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Date : 20051109

Dossier : IMM-9483-04

Référence : 2005 CF 1524

Ottawa (Ontario), le 9 novembre 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD

 

ENTRE :

ALIREZA ROOZBAHANI

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

1.         Introduction

[1]               Le demandeur, Alireza Roozbahani, demande le contrôle judiciaire de la décision rendue le 25 octobre 2004 par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), dans laquelle elle a conclu qu’il n’était pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger.

 

[2]               M. Roozbahani demande à la Cour d’ordonner l’annulation de la décision de la Commission et le renvoi de l’affaire à un tribunal différemment constitué pour réexamen.

 

2.         Le contexte factuel

[3]               Le demandeur est citoyen de l’Iran et il est né le 5 décembre 1980. Dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP), il allègue que, le 9 juillet 1999, lui et ses amis Amin et Babak, qui étaient étudiants à l’Université d’Azad à Téhéran, ont participé à une manifestation d’étudiants. Le demandeur a été arrêté par les gardes révolutionnaires iraniens, connus aussi sous le nom de Sepah Pasdaran (Sepah), détenu pendant deux semaines en isolement où il a été privé d’eau, battu et interrogé au sujet de ses convictions politiques, de ses antécédents familiaux et de ses liens politiques. Le demandeur déclare qu’on lui a fait signer une déclaration concernant ce qu’il avait dit. Le jour suivant, on lui a dit de dire la vérité, faute de quoi, il ne reverrait plus jamais sa mère. On lui a aussi dit que ses parents avaient été arrêtés et qu’ils étaient sur le point d’être exécutés.

 

[4]               Le demandeur allègue que, le 23 juillet 1999, on lui a fait signer un engagement et on lui a dit de se présenter aux autorités s’il était convoqué. On lui a dit que s’il était arrêté à nouveau pour raisons politiques, il serait exécuté. Après avoir été mis en liberté, le demandeur a appris que son père avait été détenu pendant deux jours. En novembre 1999, le demandeur a été arrêté par des basijies de la localité parce qu’il n’avait pas assisté à l’office religieux à la mosquée, il a été détenu pendant deux jours et battu si sauvagement qu’il n’a pas pu marcher pendant plusieurs jours.

 

[5]               Le demandeur déclare que, au début novembre 2002, sa mère a été arrêtée après une descente dans son salon de coiffure. On a informé sa famille de sa mort le 11 novembre 2002. Le demandeur est convaincu que sa mère a été tuée en raison de ses opinions politiques; cependant, il ne sait pas si elle était une activiste politique.

 

[6]               Le demandeur déclare que, après ces incidents, il est devenu plus actif dans les mouvements d’opposition au régime iranien. En février 2003, ses amis Amin et Babak ont préparé un tract critiquant le gouvernement. Le demandeur en a fait des copies à la papeterie où il travaillait, il en a distribué à des amis de confiance à cinq reprises au moins et il en a caché un certain nombre chez lui. L’un des tracts que le demandeur a photocopiés et distribués contenait un discours du Dr Aghajari, qui avait été interdit par le régime.

 

[7]               En juin 2003, alors que le demandeur était au Karaj et visitait sa tante, sa sœur l’a informé que la Sepah avait fait une descente à leur domicile, arrêté leur père, perquisitionné la maison et trouvé les tracts du demandeur, qui s’est alors caché. Il a appris que ses amis avaient aussi été arrêtés et qu’ils auraient avoué sa participation aux activités de distribution de tracts anti-régime et anti-clergé.

 

[8]               Le demandeur a fui l’Iran, il est passé par la Turquie et l’Italie et il est arrivé au Canada en octobre 2003.

 

[9]               L’audience devant la Commission a eu lieu le 16 juin 2004, et la décision de rejet de la demande d’asile a été rendue le 25 octobre 2004. L’autorisation d’introduire une instance en contrôle judiciaire a été accordée le 7 juin 2005.

 

3.         La décision visée par la demande de contrôle judiciaire

[10]           Outre le témoignage du demandeur, la preuve documentaire suivante a été produite devant la Commission : son FRP, son certificat de naissance, sa carte de dispense des obligations militaires, son diplôme d’études secondaires et le bulletin d’études secondaires; le certificat de naissance de sa mère et le faire-part de décès de sa mère; des documents sur la situation en Iran.

 

[11]           La Commission a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves crédibles ou fiables étayant les allégations du demandeur. Vu ses antécédents, la Commission n’a pas été convaincue que le demandeur présenterait un intérêt quelconque pour les autorités ou qu’il courrait un risque s’il devait rentrer en Iran. La Commission a rejeté la demande d’asile du demandeur, essentiellement parce qu’elle a estimé qu’il n’était pas crédible.

 

[12]           Par conséquent, la Commission a conclu que le demandeur n’était pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger.

 

4.         La question en litige

[13]           L’issue de la présente demande dépend de la réponse donnée à la question suivante : les conclusions défavorables tirées par la Commission au sujet de la crédibilité étaient-elles manifestement déraisonnables ?

 

5.         La norme de contrôle

[14]           Le droit est bien fixé : les conclusions relatives à la crédibilité sont au cœur de la compétence de la Commission et la norme de contrôle est la décision manifestement déraisonnable : Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 732 (QL); R.K.L. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] A.C.F. no 162 (QL). La Cour ne revient sur des conclusions de fait que si la Commission les a tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait : paragraphe 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7.

 

6.         Analyse

[15]           La Commission a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves crédibles ou fiables étayant l’allégation du demandeur selon laquelle les autorités s’intéressaient à lui. Cette conclusion était fondée sur les facteurs suivants :

 

1.     La Commission n’a pas cru que le demandeur aurait participé à la distribution de tracts critiquant le régime vu la manière dont les autorités l’avaient traité antérieurement suite à sa participation à une manifestation étudiante;

 

2.         La Commission n’a pas cru que la mère du demandeur était une activiste politique parce que sa maison n’avait pas été attaquée par les basijies. En outre, la Commission a signalé qu’aucun élément de preuve ne corroborait la mort de sa mère;

 

3.         La Commission a conclu que le demandeur n’avait produit aucune preuve documentaire corroborant sa présence en Iran à l’époque où les incidents en cause se seraient produits;

 

4.         La Commission a aussi conclu, en se fondant sur le rapport d’information de la Direction de la recherche de la Commission du 11 mars 1998, qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves montrant que les frères et sœurs du demandeur avaient été interrogés et que son père avait été détenu, interrogé, remis en liberté et contraint de se présenter aux autorités chaque semaine.

 

[16]           Je vais me pencher sur chacun de ces facteurs dans l’ordre.

 

[17]           La Commission a conclu que, vu le traitement que prétend avoir subi le demandeur aux mains des autorités et les menaces dont il prétend avoir fait l’objet, il était peu probable qu’il aurait participé à la distribution de tracts hostiles au régime et à des discussions politiques avec ses amis. La Commission a aussi conclu que le comportement du demandeur ne correspondait pas à celui d’une personne craignant pour sa vie. La Commission n’a pas cru non plus que le demandeur avait distribué des tracts à des jeunes afin qu’ils comprennent les atteintes aux droits humains perpétrés par le régime et la nécessité de lui faire perdre le pouvoir. La Commission a conclu qu’il avait concocté ces allégations puisqu’il avait déclaré au cours de sa déposition qu’il n’était pas membre d’une organisation politique particulière et qu’il ne connaissait pas l’origine des tracts.

 

[18]           Affirmer qu’il était improbable que le demandeur se livrerait à des activités de lutte contre un régime oppressif au motif qu’il avait été maltraité par ce régime et qu’il s’exposerait à des ennuis est manifestement déraisonnable. Pour citer le juge MacGuigan dans la décision Giron c. Canada, [1992] A.C.F. no 481 (QL) : « La Commission peut difficilement tenir pour une réflexion objective, un conseil gratuit de lâcheté de cette nature considéré comme la seule norme de comportement possible. » Je suis d’avis que ces observations sont applicables aux conclusions de la Commission relatives à la crédibilité mentionnées plus haut. En outre, lorsqu’un demandeur d’asile fait des allégations sous serment, celles-ci sont présumées être vraies, à moins qu'il n'existe des raisons d'en douter : Maldonado c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1980] 2 F.C. 302 (C.A.F.). Lorsque la Commission conclut à un manque de crédibilité en se fondant sur des inférences, notamment sur des inférences au sujet de la vraisemblance de la preuve, il faut que la preuve permette d'étayer ces inférences : Miral c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. no 254 (QL). La Commission a conclu que, en raison des menaces de mort dont il avait fait l’objet, le demandeur aurait eu trop peur pour se livrer à des discussions contre le régime avec Amin et Babak ou pour photocopier des tracts hostiles au régime dans le magasin où il travaillait. La Commission s’est livrée à des conjectures au sujet des activités du demandeur dans les circonstances. Il n’y a aucun élément de preuve au dossier étayant cette conclusion ou l’inférence tirée ou permettant de douter de la véracité du témoignage du demandeur. En fin de compte, je ne peux que conclure que la conclusion de la Commission relative à la vraisemblance du récit du demandeur est erronée.

 

[19]           Je suis aussi d’avis que c’est à tort que la Commission a refusé de croire au récit du demandeur concernant ses activités de distribution de tracts parce qu’il n’était pas membre d’un parti politique et qu’il ne pouvait pas se souvenir d’où ils provenaient. Le demandeur a donné les raisons pour lesquelles il n’était pas membre d’un parti politique et il continuait à se livrer à des activités politiques, même si elles étaient dangereuses. Lorsqu’on l’a pressé d’expliquer pourquoi il n’appartenait à aucune organisation politique, le demandeur a déposé comme suit  :

 

[TRADUCTION]

 

L’avocat :               Pourquoi n’avez-vous pas adhéré à une organisation, une organisation politique?

 

Le demandeur :       Croyez-vous que les choses se passent comme au Canada? Si je veux être membre du Parti libéral, je les appelle et je prends rendez-vous et je leur dis que je veux devenir membre de votre organisation? Si ma demande d’adhésion est rejetée, alors je deviens membre du parti conservateur? C’est dangereux. C’est impossible. Ils s’en sont pris à moi uniquement parce que j’avais distribué quelques tracts, et si vous savez le (inaudible) condamnés à mort (inaudible) uniquement pour avoir fait quelques critiques contre l’État et la religion (inaudible) il y avait tellement de danger, et vous parlez d’adhérer à des organisations. C’est dangereux, il est impossible de le faire ouvertement.

 

L’avocat :               Donc, lorsque [Babak] et Amin vous ont apporté ce tract qui parlait de mouvement étudiant, avez-vous demandé [à Babak] et à Amin si vous pouviez vous joindre à ce mouvement ?

 

Le demandeur :       Je pense que je contribuais déjà au mouvement. Il n’est pas forcément nécessaire d’en être membre, il suffit de faire cela, on contribue, on l’aide. Cela est équivalent à la qualité de membre actif de l’organisation, et il n’y a pas de carte de membre.

 

[20]           Dans ses motifs, la Commission ne s’est pas penchée sur l’explication du demandeur. Aucun élément de preuve au dossier n’indique que l’appartenance à un parti politique constitue une condition préalable à l’engagement politique. En outre, en l’espèce, l’explication du demandeur correspond entièrement à la logique et au bon sens. Lorsque la Commission a conclu que le récit du demandeur n’était pas plausible, elle a agi de façon abusive et, par conséquent, elle a commis une erreur en mettant en doute la crédibilité du demandeur.

 

[21]           La Commission a aussi conclu que, puisque les basijies n’avaient pas fait de descente dans la boutique de la mère, elle n’avait pas été une activiste politique. Il est possible que l’activisme politique d’un commerçant et les descentes dans sa boutique aillent de pair; cependant, aucun élément de preuve ne permet d’affirmer que ces descentes constituent une condition préalable à l’activisme politique d’un boutiquier. Il est plausible que la mère ait été une activiste, comme l’a allégué le demandeur, même si sa boutique n’a fait l’objet d’aucune descente. Dans les circonstances, la Commission a tiré une conclusion injustifiée parce qu’elle n’était pas étayée par la preuve, et elle n’est que pure conjecture. La Commission a commis une erreur en mettant en doute la crédibilité du demandeur en se fondant sur cette conclusion erronée.

 

[22]           La Commission a aussi contesté la crédibilité du demandeur parce qu’il n’avait pas produit le certificat de décès de sa mère, même s’il a prétendu qu’il avait assisté à ses funérailles. La Commission a déclaré que, puisque le demandeur n’avait pas produit le certificat de naissance de sa mère, qui aurait pu montrer le jour et la cause de son décès, elle a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves crédibles ou fiables montrant que le demandeur était en Iran « à l’époque où il prétend s’y être trouvé ». Il semble que la Commission ait fondé deux de ses conclusions de fait sur le défaut de production du certificat de décès de sa mère; premièrement, il n’avait fait valoir aucun élément de preuve corroborant le décès de sa mère; deuxièmement, il n’était pas en Iran à l’époque où il a dit y avoir été. En ce qui concerne cette dernière conclusion, la Commission pouvait à bon droit estimer que le défaut de production du certificat de décès de la mort constituait un élément pertinent pour conclure que le demandeur n’avait pas établi qu’il était en Iran aux moments critiques comme il l’avait soutenu. En ce qui concerne la première conclusion, le dossier révèle qu’il y a d’autres éléments de preuve qui avaient été produits au sujet du décès de la mère

 

[23]           Le dossier montre que le demandeur a bel et bien produit le certificat de naissance de sa mère qui porte la photographie de l’intéressée, expose tous les renseignements personnels la concernant, et qui est revêtu de la mention « décédée ». Outre ce document, le demandeur a produit la copie du faire-part relatif au décès de sa mère. Même si l’on admet que les documents produits ne précisent pas le moment et la cause du décès, le fait demeure qu’ils corroborent le témoignage du demandeur concernant le décès de sa mère. En outre, la Commission a reconnu, dès l’ouverture de l’audience, avoir reçu ces documents, mais elle n’a pas dit pourquoi elle les a rejetés. Le dossier établit clairement que le demandeur a bel et bien produit des preuves corroborant le décès de sa mère, contrairement à ce qu’a conclu la Commission. Je suis d’avis que la conclusion de fait de la Commission est abusive parce qu’elle l’a tirée sans tenir compte de la documentation dont elle était saisie.

 

[24]           La Commission s’est appuyée sur le rapport de renseignements du 11 mars 1998 sur le traitement réservé par les autorités iraniennes aux membres des familles des partisans des Mojahedins qui ont quitté l’Iran pour faire une demande d’asile à l’étranger. L’auteur a dit être d’avis qu’il était peu probable que des personnes se fassent arrêter ou harceler par les autorités iraniennes parce qu’elles ont des liens familiaux avec des partisans des Mohajedins qui ont fait une demande d’asile en dehors de l’Iran. La Commission s’est appuyée sur ce rapport dépassé pour conclure que le demandeur et sa famille ne seraient pas arrêtés ou harcelés par les autorités iraniennes. Cette preuve documentaire sur laquelle s’est appuyée la Commission remonte à plus de 6 ans et a trait aux Mojahedins, une organisation qui n’a rien à voir avec le demandeur ou sa famille et qui n’est mentionnée nulle part dans sa demande d’asile. Je suis d’avis que cette preuve documentaire douteuse n’est pas pertinente quant à la situation du demandeur et ne contredit pas son témoignage. En fin de compte, la preuve documentaire ne va pas dans le sens de la conclusion de la Commission; elle n’aurait donc pas dû s’appuyer sur elle pour mettre en doute la crédibilité du demandeur.

 

[25]           Le demandeur n’a pas produit son faux passeport ou son billet d’avion. Il n’a pas non plus produit sa dernière fiche de paye de son employeur. Le demandeur a expliqué qu’il n’était pas en possession de ces documents. Il a dit que le passeur avait pris son passeport et son billet d’avion et qu’il n’avait pas de fiche de paye parce qu’il avait été rémunéré en liquide. La Commission a eu raison de demander des preuves corroborant la présence du demandeur en Iran à l’époque où se seraient produits les incidents en cause. Cependant, dans ses motifs, la Commission ne s’est pas précisément exprimée sur l’explication du demandeur quant au fait qu’il n’avait pas produit son faux passeport, son billet d’avion et sa fiche de paye. La Commission a simplement signalé que le demandeur n’avait pas le certificat de décès et elle a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves crédibles montrant que le demandeur se trouvait en Iran à l’époque où se seraient produits les incidents en cause. Je suis d’avis que la conclusion de la Commission n’est pas justifiée en raison des nombreuses conclusions erronées relatives à la vraisemblance du récit du demandeur et à la crédibilité de celui-ci, analysées plus haut. Dans les circonstances, le fait que le demandeur n’avait pas produit les preuves documentaires demandées aux fins de corroboration n’était pas suffisant pour justifier le rejet de sa demande d’asile.

 

[26]           La Cour a statué dans la décision Vodics c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 783, au paragraphe 11 :

Il n'est pas difficile de comprendre que, en toute justice pour la personne qui jure de dire toute la vérité, des motifs concrets s'appuyant sur une preuve forte doivent exister pour qu'on refuse de croire cette personne. Soyons clairs. Dire qu'une personne n'est pas crédible, c'est dire qu'elle ment. Donc, pour être juste, le décideur doit pouvoir exprimer les raisons qui le font douter du témoignage sous serment, à défaut de quoi le doute ne peut servir à tirer des conclusions. La personne qui rend témoignage doit bénéficier de tout doute non étayé.

 

 

[27]           Comme je l’ai montré plus haut, la Commission n’a pas justifié ses conclusions relatives à la vraisemblance du récit du demandeur et à la crédibilité de celui-ci en invoquant clairement des éléments de preuve précis. Un examen attentif du dossier révèle que ces conclusions sont fondées sur une interprétation erronée de la preuve ou qu’elles ne sont pas étayées par la preuve; elles sont donc erronées. Voir Armson c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] A.C.F. n800 (QL) et Miral c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. n254 (QL).

 

[28]           En l’espèce, le demandeur a droit au bénéfice du doute, surtout lorsqu’il n’est pas étayé. Comme je l’ai expliqué plus haut, la Commission a fait erreur en fondant sa décision sur un certain nombre de conclusions défavorables incorrectes concernant la vraisemblance du récit du demandeur et à la crédibilité de celui-ci. L’effet cumulatif de ces conclusions incorrectes justifie l’intervention de la Cour. Par conséquent, je conclus que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en s’appuyant sur ces conclusions manifestement déraisonnables pour conclure que le demandeur n’avait, de manière générale, pas de crédibilité et rejeter sa demande d’asile.

 

6.         Conclusion

[29]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie et l'affaire renvoyée à un tribunal différemment constitué pour réexamen.

 

[30]           Les parties ont eu la possibilité de proposer que soit certifiée une question grave de portée générale en vertu de l’alinéa 74d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, et elles ne l’ont pas fait. Je conclus que la présente affaire ne soulève aucune question grave de portée générale. Il n’y a pas lieu de certifier une question.

 

 


ORDONNANCE

 

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.                                 La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

 

2.                                 L'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour réexamen.

 

3.                                 Aucune question n’est certifiée.

 

 

« Edmond P. Blanchard »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

François Brunet, LL.B., B.C.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-9483-04

 

INTITULÉ :                                       ALIZRA ROOZBAHANI

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               LE 31 AOÛT 2005

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 ET ORDONNANCE :                      LE JUGE BLANCHARD

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 9 NOVEMBRE 2005

 

 

COMPARUTIONS :

 

Randal Montgomery                                                                 POUR LE DEMANDEUR

 

Kevin Lunney                                                                           POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Randal Montgomery                                                                 POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

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