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Date : 19990429


Dossier : T-2161-97



AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ

L.R.C. (1985), ch. C-29,


ET un appel de la décision

d"un juge de la citoyenneté,


ET

ENTRE :



LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L"IMMIGRATION,


appelant,



-et-



FARHEEN UR RAHMAN,


intimée.



MOTIFS DU JUGEMENT



LE JUGE SIMPSON

[1]      Il s"agit d"un appel interjeté par voie de procès de novo conformément au paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29 (la Loi) et à l"article 21 de la Loi sur la Cour fédérale , L.R.C. (1985), ch. F-7, présenté au nom du ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration (le ministre) relativement à la décision d"un juge de la citoyenneté datée du 7 août 1997, dans laquelle le juge a approuvé la demande d"attribution de la citoyenneté canadienne de l"intimée, Mlle Farheen Rahman.

[2]      Le juge de la citoyenneté a conclu que l"intimée satisfaisait à l"exigence de résidence de l"alinéa 5(1)c ) de la Loi, malgré le fait qu'elle avait été absente du Canada pendant 930 des 1095 jours de résidence requis par l"alinéa 5(1)c ) de la Loi.

[3]      L"intimée était représentée par avocat et a témoigné à l"instance.

LES FAITS

[4]      L"intimée est née le 4 février 1976 et est citoyenne du Pakistan. Elle a acquis le statut d"immigrante ayant obtenu le droit d"établissement le 1er septembre 1993, le jour où elle est venue au Canada pour la première fois, en compagnie de son père, de sa mère et de ses deux soeurs. Le 30 septembre 1996, environ trois ans après sa première venue au Canada, l"intimée a rempli une demande d"attribution de la citoyenneté canadienne en tant qu'adulte. Cela veut dire que la période pertinente en ce qui a trait à sa résidence a débuté le 30 septembre 1992, un an avant son arrivée au Canada.

[5]      Le 9 septembre 1993, seulement neuf jours après sa première venue au Canada, l"intimée a quitté le pays avec son père et sa mère et elle a vécu avec eux au Koweit pendant qu'"elle poursuivait ses études " de niveau A ". Elle n"est pas revenue au Canada avant le 18 juillet 1994, quelque 312 jours plus tard. Après des vacances à l"étranger et de brefs séjours au Canada, elle est retournée au Koweit et elle a à nouveau vécu avec ses parents jusqu'à ce qu'"elle ait terminé ses études de niveau A au printemps 1995.

[6]      Peu de temps après, à l"automne 1995, l"intimée s"est rendue à l"Université du Michigan pour étudier l"illustration médicale. On lui avait dit que le cours d"illustration médicale n"était pas ouvert au niveau du premier cycle à l"Université de Toronto. Sur sa demande d"admission à l"Université du Michigan, l"intimée a inscrit l"adresse de ses parents au Koweit comme étant sa résidence.

[7]      Entre son arrivée le 1er septembre 1993 et sa demande de citoyenneté le 30 septembre 1996, l"intimée n"a été au Canada que 165 jours en tout. Elle a été absente du Canada à sept occasions pour un total de 960 jours. La liste détaillée de ses absences est la suivante :

- du 9 septembre 1993 au 18 juillet 1994, pendant 312 jours (poursuite des études de niveau A au Koweit);

- du 8 août 1994 au 21 août 1994, pendant 13 jours (vacances au Koweit/R.-U.);

- du 6 septembre 1994 au 13 juin 1995, pendant 280 jours (elle a terminé ses études de niveau A au Koweit);

- du 21 juin 1995 au 18 juillet 1995, pendant 27 jours (vacances au R.-U.);

- du 10 août 1995 au 14 août 1995, pendant 4 jours (vacances aux É.-U.);

- du 5 septembre 1995 au 21 juin 1996, pendant 290 jours (études aux É.-U.);

- du 2 septembre 1996 au 26 septembre 1996, pendant 24 jours (études aux É.-U.).


[8]      Le juge de la citoyenneté s"est basé sur l"affaire Papadogiorgakis , [1978] 2 C.F. 208 (C.F. 1re inst.). Cependant, à mon avis, cet arrêt devrait être limité à ses faits particuliers. Dans cette affaire, un étudiant n"ayant pratiquement pas de présence physique au Canada pendant la période pertinente d"évaluation de quatre ans, avait vécu ici pendant quatre ans et centralisé son mode de vie avant d"aller étudier à l"étranger. De plus, pendant son absence, il avait maintenu une résidence au Canada, il était revenu souvent et il avait passé la majorité de ses vacances au Canada.

[9]      La décision Papadogiorgakis montre que la Cour peut considérer un étudiant comme un résident, malgré des périodes d"absence physique considérables, si cet étudiant a établi sa résidence au Canada et l"y a maintenue en centralisant son mode de vie au Canada, alors qu'"il était à l"étranger seulement temporairement en raison de ses études et qu'"il revenait souvent au Canada.

[10]      Mais, l"arrêt Papadogiorgakis ne fait pas autorité quant à la proposition qu'"un étudiant puisse venir au Canada pendant une courte période de temps, ne pas établir de résidence, pour ensuite passer de longues périodes d"études et de vacances à l"étranger et, sur cette base, s"attendre à satisfaire à l"exigence de résidence relative à l"octroi de la citoyenneté canadienne.

[11]      Je me dois de faire remarquer qu'"établir une résidence n"est pas seulement une question de rassembler les documents habituels associés à un résident (carte santé, carte d"assurance sociale, carte de banque, déclaration de revenus, carte de bibliothèque, permis de conduire, etc.). Selon moi, un certain effort pour s"intégrer à la société canadienne est aussi nécessaire. Cela peut se faire dans le milieu de travail, au sein d"un groupe de bénévoles ou d"un groupe social ou religieux, pour ne mentionner que quelques possibilités.

[12]      À cet égard, je note que l"intimée a quitté le Canada après neuf jours. Elle ne s"est pas établie en tant que résidente avant son départ et elle n"a jamais été assez longtemps au Canada pendant la période pertinente pour ne serait-ce que commencer à centraliser son mode de vie ici.

[13]      Ce n"est pas une critique. L"intimée a terminé d"importantes études et elle a l"intention de s"installer au Canada. Depuis sa demande de citoyenneté elle est effectivement devenue résidente et travaille au Royal Ontario Museum dans son champ d"études. Le seul problème concernant sa présente demande est qu'"elle est prématurée. Par conséquent, l"appel du ministre est accueilli.

                             (Signature) " Sandra J. Simpson "

                                     Juge

Vancouver (C.-B.)

Le 29 avril 1999



Traduction certifiée conforme


Martin Desmeules

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ

L.R.C. (1985), ch. C-29,


ET un appel de la décision

d"un juge de la citoyenneté,


ET

ENTRE :


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L"IMMIGRATION,


appelant,

-et-


FARHEEN UR RAHMAN,


intimée.


No DU GREFFE :              T-2161-97

LIEU DE L"AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L"AUDIENCE :          le 24 mars 1999

MOTIFS DU JUGEMENT :          Le juge SIMPSON

EN DATE DU :                  29 avril 1999


ONT COMPARU :

Mme A. Leena Jaakkimainen                              pour l"appelant

M. Mendel M. Green, c.r.                              pour l"intimée

M. Peter K. Large                                  amicus curiae

AVOCATS AU DOSSIER

M. Morris Rosenberg                                  pour l"appelant

Sous-procureur général du Canada

Green and Spiegel                                  pour l"intimée

Toronto (Ontario)

M. Peter K. Large                                  amicus curiae

Toronto (Ontario)

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