Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20060222

Dossier : IMM-9288-04

Référence : 2006 CF 238

Toronto (Ontario), le 22 février 2006

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

ENTRE :

FENG WENG

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Mme Weng, une citoyenne de 22 ans de la République populaire de Chine, a réclamé l'asile au Canada en application de l'article 96 (réfugié au sens de la Convention) et du paragraphe 97(1) (personne à protéger) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR). Le 8 octobre 2004, la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a conclu qu'elle n'était pas crédible et a rejeté sa demande. Elle souhaite obtenir le contrôle judiciaire de cette décision.

[2]                L'avocate de Mme Weng soutient que la Commission a recherché des contradictions dans la preuve et s'est livrée à des conjectures afin de conclure de façon défavorable relativement à la crédibilité. Malgré les observations convaincantes de l'avocate, je ne suis pas convaincue que la SPR ait commis cette erreur ou que mon intervention soit justifiée.

[3]                Mme Weng prétend avoir adopté la religion chrétienne en Chine le 6 mai 2001. Les offices religieux auraient eu lieu au domicile de différents membres. Mme Weng affirme y avoir assisté régulièrement et avoir reçu sa Bible d'un organisateur de son église. Elle a été baptisée le 9 décembre 2001 au cours d'une des quatre visites du pasteur.

[4]                Lors d'un office le 25 décembre 2002, des guetteurs ont averti les fidèles que des agents du Bureau de la sécurité publique (BSP) approchaient. Mme Weng se serait enfuie par la porte d'en arrière, sans emporter sa Bible, et aurait couru pendant 20 minutes dans une petite rue. Arrivée à la route principale, elle aurait hélé un taxi et se serait rendue à la maison de sa tante où elle se serait tenue cachée. Elle prétend que le BSP s'est présenté plusieurs fois au domicile de ses parents pour l'arrêter. Le BSP aurait informé ceux-ci que les autres membres de son église avaient été arrêtés. Mme Weng est entrée au Canada en janvier 2003 et a demandé l'asile à son arrivée.

[5]                La SPR a jugé que Mme Weng n'avait pas présenté suffisamment d'éléments de preuve crédibles et dignes de foi à l'appui de sa prétention voulant qu'elle soit membre d'une église clandestine. La SPR a également conclu, selon toute probabilité, que la descente n'a jamais eu lieu et que Mme Weng n'était pas recherchée par le BSP. Ses conclusions sont fondées sur un certain nombre de contradictions et d'invraisemblances dans le témoignage de Mme Weng. Les principales conclusions portaient sur :

·         la contradiction à propos de la date où Mme Weng avait commencé à pratiquer le christianisme;

·         la contradiction (à propos de son lieu de résidence) entre son Formulaire de renseignement personnel (PIF) et les notes prises au point d'entrée (PDE);

·         l'invraisemblance de son récit au sujet de la descente et de sa fuite;

·         l'invraisemblance de son récit sur la façon dont sa Bible lui avait été rendue compte tenu de son témoignage selon lequel tous les membres du groupe avaient été arrêtés et compte tenu des risques que devait courir un non-membre pour récupérer la Bible (qui aurait pu être achetée de nouveau d'une libraire en Chine) et pour la lui rendre;

·         la contradiction dans le témoignage de Mme Weng concernant la note trouvée dans sa Bible;

·         l'invraisemblance entre sa connaissance de la religion chrétienne et la connaissance à laquelle on pouvait raisonnablement s'attendre d'un fidèle de la Chinese Gospel Church (Église évangélique chinoise).

[6]                Les conclusions portant sur la crédibilité sont des conclusions de fait et, en tant que telles, doivent être contrôlées selon la norme de la décision manifestement déraisonnable. Les conclusions de la Commission, à mon avis, ne sont pas manifestement déraisonnables. En outre, si la norme de contrôle applicable était celle plus exigeante de la décision raisonnable simpliciter, j'aurais néanmoins conclu que la Commission pouvait raisonnablement conclure ainsi.

[7]                J'ai examiné avec soin la transcription de l'audience et je conviens avec Mme Weng que la première contradiction à avoir été soulignée résultait, selon toute probabilité, d'une confusion. Cependant, la Commission a pris acte et a traité expressément de cette question aux pages 3 et 4 de ses motifs. La SPR a souligné que, en d'autres circonstances, elle aurait pu accepter l'explication de la demanderesse, mais que, en raison de l'ensemble de la preuve, en l'espèce, elle ne l'avait pas fait. Il ne m'appartient pas de juger à nouveau la décision de la Commission en de telles circonstances. De toute façon, la dernière conclusion de la SPR ne reposait pas sur un facteur unique; elle reposait sur l'ensemble de la preuve.    

[8]                La SPR est tenue de considérer l'ensemble de la preuve. Les conclusions en l'espèce étaient fondées sur la preuve produite par Mme Weng. Celle-ci a été informée des doutes de la Commission et a eu suffisamment l'occasion d'y répondre. Ses réponses étaient vagues, évasives, trompeuses, invraisemblables ou contredisaient son témoignage antérieur.

[9]                L'avocate de Mme Weng a fourni un certain nombre d'hypothèses de rechange, ce qui est impressionnant, mais la plupart d'entre elles ne se fondaient sur aucune preuve. À tous les autres égards, elles ne constituent que des points de vue différents de celui de la Commission. Les éléments précis qualifiés de conjecture par l'avocate ne résultent en fait que de l'application du bon sens.     

[10]            Les questions de crédibilité relèvent de la compétence de la SPR. En l'absence d'erreur susceptible de contrôle, et il n'y en a aucune en l'espèce, les conclusions de la Commission à cet égard sont à l'abri de tout contrôle. L'essentiel de la position de Mme Weng est qu'elle se trouve en désaccord avec la décision de la Commission. C'est son droit, mais il ne s'ensuit pas que la décision doit être annulée pour ce motif. Les conclusions de la SPR dans la présente affaire ne sont pas manifestement déraisonnables, ni déraisonnables de toute autre manière.    

[11]            Les avocats n'ont proposé aucune question à certifier et aucune n'est soulevée en l'espèce.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE QUE la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

« Carolyn Layden-Stevenson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 IMM-9288-04

INTITULÉ :                                                                FENG WENG       

                                                                                    c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                               

LIEU DE L'AUDIENCE :                                          TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                        LE 21 FÉVRIER 2006

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                                LA JUGE LAYDEN-STEVENSON    

DATE DES MOTIFS :                                               LE 22 FÉVRIER 2006

COMPARUTIONS :                         

Shelly Levine                                                                 POUR LA DEMANDERESSE

                                                                                               

Alexis Singer / John Pr                                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :      

Levine Associates                                                          POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)                                 

John H. Sims, c.r.                                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada       

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.