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Date : 19991008


Dossier : T-2792-96



ENTRE :


     MERCK & CO. INC., MERCK FROSST CANADA INC.,

     ZENECA LIMITED et ZENECA PHARMA INC.,


     demanderesses

     (défenderesses reconventionnelles),



     - et -




     APOTEX INC.,

     défenderesse

     (demanderesse reconventionnelle).

    

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE LAFRENIÈRE

[1]      Les demanderesses veulent faire radier certains paragraphes de la défense et demande reconventionnelle (la " défense ") ou, subsidiairement, obtenir une ordonnance enjoignant à la défenderesse de fournir des précisions relativement aux paragraphes en question. Elles demandent également copie de certains documents mentionnés dans la défense (ce à quoi la défenderesse a déjà acquiescé), ainsi qu'une ordonnance prévoyant la gestion spéciale de l'instance.

[2]      Déposée le 22 janvier 1999, la requête n'a été entendue que le 17 mai suivant, des demandes répétées d'ajournement ayant été présentées par les parties. Dans l'intervalle, la Cour a procédé à un examen de l'état de l'instance conformément à la règle 380 des Règles de la Cour fédérale (1998). Après avoir reçu les prétentions écrites des parties, le juge Lutfy a permis que l'instance soit poursuivie et a ordonné qu'elle le soit à titre d'instance à gestion spéciale. Par conséquent, je n'examinerai pas la question de la gestion spéciale de l'action.

     Retard excessif

[3]      À titre préliminaire, la défenderesse soutient que la requête devrait être rejetée pour non-respect du délai imparti puisqu'elle a été présentée quelque 18 mois après le dépôt de la défense. Les actes de procédure sont maintenant clos, et les demanderesses sont réputées avoir nié chacune des allégations de la défense. La défenderesse fait valoir qu'une partie ne peut soulever un éventuel vice de forme ou de fond à l'égard d'un acte de procédure qu'elle a contesté ou qu'elle est réputée avoir contesté sans qu'il n'y ait eu d'objection. Afin de mieux apprécier l'argument de la défenderesse et de le situer dans son contexte, je me suis penché sur les étapes suivies par les parties depuis que l'instance a été engagée en décembre 1996.

[4]      La déclaration allègue la contrefaçon actuelle et éventuelle du brevet canadien nE 1 275 350 (le " brevet 350 ") par la défenderesse. Le brevet 350 renferme des revendications visant le composé appelé lisinopril, une multitude d'autres composés définis par la formule dans la revendication 1 et des revendications visant des compositions pharmaceutiques constituées de quantités efficaces des composés mentionnés dans la revendication 1, de pair avec un excipient pharmaceutiquement acceptable.

[5]      Les demanderesses ont déposé la déclaration après que la Cour d'appel fédérale eu rejeté leur demande présentée sur le fondement du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité)) (le " Règlement ") afin d'interdire au ministre de la Santé nationale et du Bien-être social de délivrer un avis de conformité à la défenderesse pour sa marque de lisinopril (Zeneca Pharma Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) ).

[6]      En mars 1997, la défenderesse a demandé par requête la radiation de certains paragraphes de la déclaration se rapportant à la contrefaçon " éventuelle " du brevet ou, subsidiairement, une ordonnance enjoignant aux demanderesses d'alléguer les faits substantiels nécessaires et de fournir des précisions suffisantes concernant l'allégation. La radiation des paragraphes en cause a été ordonnée le 21 mars 1997. Les demanderesses ont par la suite modifié la déclaration. Cependant, après la présentation d'une autre requête par la défenderesse, il leur a été ordonné, le 21 avril 1997, de modifier un paragraphe de la déclaration et d'en supprimer un autre en totalité. Les demanderesses ont interjeté appel de cette dernière ordonnance le 2 mai 1997.

[7]      Le 31 juillet 1997, la défenderesse a signifié et déposé sa défense et demande reconventionnelle. De leur propre aveu, les demanderesses sont ensuite demeurées inactives dans le cadre de l'instance sauf en ce qui concerne l'appel interjeté relativement à l'ordonnance du 21 avril 1997 et dont la Cour d'appel fédérale est toujours saisie. Aucune réponse n'ayant été produite par les demanderesses, la défenderesse prétend que les plaidoiries sont closes depuis l'expiration d'un délai de 15 jours après la signification de la défense, conformément à l'ancienne règle 431.

[8]      L'avocat de la défenderesse soutient que les demanderesses ne devraient pas obtenir la radiation de certains paragraphes de la défense pour l'un ou l'autre des motifs énumérés à la règle 221(1)b) à f), car le délai entre le dernier acte de procédure et la requête en radiation est excessif. De même, il fait valoir que la Cour ne devrait pas entendre une requête pour précisions lorsqu'une longue période de temps s'est écoulée depuis le dépôt de l'acte de procédure que l'on prétend insuffisant.

[9]      Comme pour toute autre irrégularité, la partie qui demande des précisions devrait agir dans les meilleurs délais pour faire valoir son droit à une ordonnance corrigeant l'irrégularité. Les demanderesses reconnaissent n'avoir pris aucune mesure pour contester la défense au cours des 18 mois qui ont suivi son dépôt. Le principe général veut qu'une requête en radiation soit présentée sans délai et avant que la partie ne réponde aux paragraphes en cause. Or, les demanderesses sont réputées avoir répondu à l'expiration du délai imparti pour le faire. La règle 221(1) confère toutefois à la Cour le pouvoir discrétionnaire d'ordonner " [à] tout moment " la radiation de tout ou partie d'un acte de procédure. J'ai tenu compte du fait que l'appel des demanderesses est toujours pendant, que les parties n'ont pas encore procédé à la communication préalable et que tout préjudice infligé à la défenderesse par le délai peut être réparé par l'adjudication de dépens. De plus, la radiation des allégations viciées ou la formulation des précisions nécessaires aideront certainement les parties à circonscrire les questions qui les opposent et à mettre l'accent sur le règlement de l'instance. Je rejette donc la demande de la défenderesse que la requête des demanderesses soit rejetée vu son caractère tardif.

     Radiation d'actes de procédure

[10]      La règle 221(1)a) dispose qu'un acte de procédure peut, en tout ou en partie, être radié pour le motif qu'il ne révèle aucune cause d'action ou de défense valable. Pour autoriser la radiation de certains paragraphes d'un acte de procédure, la Cour doit être convaincue qu'il est " évident et manifeste " que les paragraphes en cause ne révèlent aucune cause d'action ou de défense valable (Hunt c. Carey Canada Inc. , [1990] 2 R.C.S. 959).

[11]      Les principes qui s'appliquent à la requête en radiation sont les suivants. La Cour doit tenir les faits allégués pour établis, puis se demander si l'allégation que renferme ou appuie le paragraphe en cause est si manifestement futile que l'intimé n'a aucune chance d'avoir gain de cause à l'issue de l'instruction. L'interprétation doit être généreuse compte tenu d'erreurs possibles de rédaction. La Cour doit s'abstenir de statuer sur des questions de droit. Enfin, elle ne doit autoriser la radiation que lorsque les circonstances sont claires et qu'on ne saurait prétendre au maintien des allégations dont la radiation est demandée (Comstock Canada c. Electec Ltd. (1989), 28 C.P.R. (3d) 495, à la p. 500 (C.F. 1re inst.), Hirsh Co. c. Minshall (1988), 22 C.P.R. (3d) 268 (C.A.F.) et Ceminchuk c. IBM Canada Ltd. (1995), 62 C.P.R. (3d) 546, à la p. 549 (C.F. 1re inst.)).

     Paragraphes visés

     a)      les paragraphes 2 et 5 de la défense

[12]      Dans leurs prétentions écrites, les demanderesses soutiennent que le paragraphe 2 de la défense est incompatible avec le paragraphe 5, de sorte que les allégations contradictoires devraient être radiées. Lors de l'audition de la requête, les demanderesses ont retiré leur objection à la lumière des prétentions écrites de la défenderesse. En conséquence, la paragraphe 2 n'est pas radié. Cependant, les demanderesses demandent la radiation du paragraphe 5 pour un autre motif, ce dont il est question ci-après.

     b)      les paragraphes 4, 5, 6 et 7 de la défense

[13]      Les demanderesses cherchent à faire radier les paragraphes 4, 5, 6 et 7 de la défense pour le motif que la défenderesse s'appuie sur l'article 56 de la Loi sur les brevets sans alléguer les faits nécessaires à l'application de la disposition. L'avocat des demanderesses soutient que la défenderesse n'allègue pas avoir acquis le lisinopril avant la délivrance du brevet, mais dit simplement que le lisinopril a été fabriqué avant la délivrance du brevet. Les demanderesses ajoutent que la défenderesse ne précise pas le moment où elle a acquis le médicament, ne révèle pas sa provenance et n'énumère pas toutes les transactions intervenues entre la fabrication du médicament et son acquisition par elle. Les demanderesses prétendent en outre que le paragraphe 7 devrait être radié étant donné que leur connaissance des actes de la défenderesse n'est pas pertinente pour déterminer si les exigences de l'article 56 ont été remplies.

[14]      L'avocat de la défenderesse prétend que la défense, fondée sur l'article 56 de la Loi sur les brevets, est clairement formulée. En outre, on ne saurait prétendre, selon lui, qu'il est " évident et manifeste " que la défense ne peut être accueillie. Comme tout fait supplémentaire sera de nature à établir le bien-fondé de la défense, des éléments de preuve pourront être présentés à cette fin lors de l'instruction. Aucun élément des paragraphes dont la radiation est demandée n'est incompatible avec la défense formulée. Par ailleurs, la défenderesse soutient que la connaissance, par les demanderesses, des faits établissant le bien-fondé de la défense est à tout le moins susceptible d'être pertinente en ce qui a trait à l'argument d'Apotex favorable à des dépens plus élevés en ce qui touche la défense et la demande reconventionnelle. De plus, la " pertinence " d'une allégation contenue dans un acte de plaidoirie contesté 18 mois après son dépôt ne devrait pas faire l'objet d'une décision maintenant.

[15]      Les paragraphes 4, 5 et 6 de la défense n'énoncent pas, selon moi, les faits substantiels nécessaires pour appuyer une défense fondée sur l'article 56. En soi, le paragraphe 4 n'est rien de plus que l'exposé d'un fait et est inextricablement lié aux paragraphes subséquents. Il n'y a pas de lien rationnel entre les faits énoncés aux paragraphes 4, 5 et 6 et un moyen de défense fondé sur l'article 56. En outre, j'estime qu'une ordonnance de donner des précisions ne saurait remédier aux lacunes des paragraphes en question. En conséquence, les paragraphes 4, 5 et 6 sont radiés. Toutefois, la défenderesse est autorisée à modifier sa défense de façon à alléguer les faits nécessaires à l'application de l'article 56. En ce qui concerne le paragraphe 7, les demanderesses n'ont pas établi que l'allégation est sans importance ou non pertinente. Il est à tout le moins discutable qu'il puisse avoir une incidence sur la question des dépens lors de l'instruction. Partant, le paragraphe 7 n'est pas radié.

     c)      l'alinéa 8b) de la défense

[16]      L'avocat des demanderesses soutient que l'alinéa 8b) de la défense ne révèle aucun moyen de défense raisonnable. Il fait valoir que la défenderesse confond l'exigence de la nouveauté prévue à l'article 27 avec la brevetabilité d'un médicament suivant le paragraphe 39(1) (anciennement le par. 41(1)). Comme la défenderesse n'a pas précisé la date du dépôt de la demande nE 607 198 (sur le fondement de laquelle le brevet 350 a été délivré), il doit être tenu pour acquis qu'il s'agit du 6 décembre 1979, soit la date du dépôt selon le dossier. En conséquence, toute exigence de nouveauté fondée sur l'alinéa 27(1)b ) serait inapplicable après cette date.

[17]      Pour sa part, la défenderesse estime que l'alinéa 8b) est lié à l'alinéa a), lequel n'a pas été contesté. Suivant cet alinéa, le brevet 350 résulte d'une demande complémentaire inappropriée. En supposant que tel soit le cas, l'alinéa b) fait donc état des conséquences qui peuvent découler d'une demande complémentaire inappropriée dans le contexte du paragraphe 41(1) de la Loi sur les brevets. La défenderesse prétend qu'on ne peut conclure qu'il est " évident et manifeste " qu'il ne pourrait être fait droit à l'allégation contenue à l'alinéa b ) considérée de pair avec celle énoncée à l'alinéa a).

[18]      Les demanderesses ont reconnu devant moi que l'alinéa 8b) reprend simplement l'allégation de l'alinéa 8a) qui, comme je l'indique précédemment, n'est pas contestée. Il ne m'apparaît pas évident et manifeste que les deux alinéas, interprétés l'un en fonction de l'autre, ne constituent pas un moyen de défense valable. L'alinéa ne sera donc pas radié.

     d)      les alinéas 8c) et d) de la défense

[19]      Les demanderesses contestent les alinéas 8c) et d) en s'appuyant sur l'arrêt Merck & Co. c. Apotex Inc. (1995), 60 C.P.R. (3d) 356, de la Cour d'appel fédérale. Dans les deux alinéas, la défenderesse allègue qu'il ne peut y avoir simultanément une revendication visant une composition et une revendication du composé lui-même. Les demanderesses soutiennent que les deux alinéas ne révèlent aucune cause d'action valable, car la Cour a statué péremptoirement en sens contraire.

[20]      Selon la défenderesse, l'arrêt de la Cour d'appel fédérale concernant l'opportunité de formuler des revendications distinctes pour des compositions qui ne sont pas le fruit d'une activité inventive n'est pas décisif à cet égard. Son avocat fait valoir que des décisions antérieures de la Cour suprême du Canada soulèvent d'importants doutes quant à la justesse des conclusions tirées dans cette affaire (voir Sandoz Patents Ltd. c. Gilcross Ltd. et al., (1972), 8 C.P.R. (2d) 210, aux pp. 211 et 212). En conséquence, on ne peut dire qu'il est " évident et manifeste " que la défense n'a aucune chance d'être accueillie.

[21]      En réponse, l'avocat des demanderesses invoque la règle 3, qui énonce les principes de base des Règles de la Cour fédérale (1998), soit favoriser le règlement rapide, efficace et juste des litiges. Il fait valoir qu'un acte de plaidoirie ne devrait pas faire l'objet de contestations futiles. J'en conviens. La Cour ne pourrait faire droit aux allégations de la défenderesse aux alinéas 8c) et d) étant donné l'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans Merck & Co. c. Apotex Inc., précité, l'autorisation de pourvoi devant la Cour suprême du Canada ayant été refusée. À l'issue d'un examen approfondi de la jurisprudence, le juge MacGuigan conclut ce qui suit à la p. 756 de la décision :

Du moins, depuis l'arrêt Shell Oil, il doit être clair que les décisions antérieures ne signifient pas qu'une revendication pour la composition ne peut pas subsister avec une revendication pour le composé pour le motif qu'elle n'est pas le fruit d'une activité inventive. Tant et aussi longtemps que les compositions ne comportent pas d'inventions distinctes, il n'existe aucune règle suivant laquelle les revendications relatives aux composés et les revendications relatives aux compositions comprenant ceux-ci ne peuvent être combinées dans un seul brevet.

[22]      Il ressort de cet énoncé que le moyen de défense allégué aux alinéas 8c) et d) est voué à l'échec. Il serait inutile de permettre que soit débattue à nouveau une question de droit que la Cour d'appel fédérale a déjà tranchée de manière décisive. Partant, les deux alinéas sont radiés.

     e)      l'alinéa 8e) de la défense

[23]      Les demanderesses prétendent que l'alinéa 8e), selon lequel la revendication a une portée excessive, ne révèle une cause de défense valable, car il n'est pas nécessaire que l'inventeur fabrique ou mette à l'essai chacun des composés lorsque les composés revendiqués sont raisonnablement prévisibles. L'avocat des demanderesses cite la décision de la Cour dans Eli Lilly Canada Inc. c. Apotex Inc., (1998), 80 C.P.R. (3d) 80, où une plaidoirie semblable a été radiée pour le motif suivant :

Le fait que l'inventeur n'a pas mis à l'essai et prouvé toutes les applications revendiquées de son brevet ne constitue pas un motif d'invalidité.

[24]      La défenderesse rétorque que le moyen de défense fondé sur la " portée excessive " est bien établi dans la jurisprudence. Selon elle, la partie de l'allégation se rapportant à la fabrication et à la mise à l'essai des composés fournit simplement la base factuelle du moyen de défense invoqué.

[25]      La défenderesse a soulevé un certain nombre d'éléments pour contester la validité de la revendication des demanderesses. La portée excessive est un moyen de défense reconnu et il n'est pas évident et manifeste, à ce stade, que le moyen de défense est voué à l'échec. Par conséquent, l'alinéa 8e) n'est pas radié.

     f)      l'alinéa 8h) de la défense

[26]      Les demanderesses contestent l'alinéa 8h) pour le motif qu'il n'est pas obligatoire de prouver l'utilité dans le brevet, non plus que de fournir des renseignements à l'appui d'une assertion d'utilité. La défenderesse rétorque que l'alinéa en cause énonce des faits qui appuient les allégations des alinéas e), f) et g). Selon elle, le fait que le breveté n'a révélé aucune méthode de mise à l'essai ni confirmé que les composés revendiqués ont l'utilité alléguée est pertinent aux fins de toute allégation de portée excessive ou d'absence de prévisibilité.

[27]      Je conviens à l'instar de la défenderesse que l'alinéa ne peut être considéré isolément et peut être interprété comme appuyant les allégations antérieures concernant l'inutilité des composés visés par la revendication 1 et l'allégation qu'une telle utilité n'était pas raisonnablement prévisible à la date du brevet. L'alinéa n'est donc pas radié.

     f)      l'alinéa 8i) de la défense

[28]      Les demanderesses soutiennent que l'alinéa 8i), qui allègue la délivrance tardive du brevet, ne révèle aucune cause de défense valable. Elles font en outre valoir que, dans aucun arrêt de jurisprudence, l'assertion factuelle d'un retard volontaire à poursuivre une demande de brevet canadien n'est tenue pour pertinente aux fins d'une contestation de validité.

[29]      La défenderesse rétorque que le caractère nouveau d'un moyen n'empêche pas qu'il puisse être invoqué en défense. Son avocat fait valoir qu'une demande de brevet ne peut comporter d'erreur substantielle dans l'exposé des faits et que le breveté a l'obligation d'agir de bonne foi dans la poursuite d'une demande de brevet. La preuve selon laquelle le comportement délibéré visant à différer l'examen de la demande afin de profiter des avantages de modifications ultérieures de la Loi sur les brevets et d'obtenir ainsi une plus grande protection que celle qui aurait pu être obtenue si la demande avait suivi son cours normal peut être considérée comme établissant l'éviction du public de ce domaine supplémentaire sur lequel le breveté prétend maintenant détenir un droit exclusif. La contrepartie théorique dont bénéficie le public en échange de l'octroi d'un brevet aurait été beaucoup plus importante si les demanderesses n'avaient pas délibérément différé la poursuite de la demande. Dans les circonstances, les principes plus généraux qui sous-tendent le droit des brevets ne sont pas respectés, de sorte qu'une ordonnance pourrait annuler le brevet 350.

[30]      Pour l'heure, la possibilité qu'il en soit ainsi est suffisante pour que l'allégation demeure. Les demanderesses n'ont pas établi que ce nouveau moyen de défense est voué à l'échec.

     f)      Demande de précisions

[31]      Les demanderesses demandent les précisions suivantes :

     a) la description des composés [TRADUCTION] " que les inventeurs présumés n'ont pas fabriqués ou mis à l'essai, ou n'ont pu le faire " selon l'alinéa 8a ),
     b) la description des composés visés à l'alinéa 8g) et aux sous-alinéas 8g)(ii) et (iii),

     c) l'identité des présumés inventeurs véritables, à l'alinéa 8i) et

     d) la description des composés qui ne sont pas efficaces en tant qu'inhibiteurs de l'enzyme de conversion et pour lesquels aucun motif valable ne permettait de prévoir qu'ils auraient une telle efficacité, comme l'allègue l'alinéa 8k).

[32]      De telles précisions sont nécessaires, selon les demanderesses, pour établir une réponse à la défense et une défense à la demande reconventionnelle. La défenderesse estime que la Cour ne devrait pas faire droit à une demande de précisions présentée longtemps après le dépôt de l'acte de procédure en cause.

[33]      Les demanderesses n'ont pas établi que les précisions demandées sont nécessaires aux fins d'un acte de procédure. Les précisions exigées pour un acte de procédure sont moindres que pour l'instruction. De plus, comme les demanderesses ont tardé à les demander, je conclus que les précisions ne sont pas nécessaires pour circonscrire les questions en litige qui opposent les parties. En outre, aucun affidavit n'explique pourquoi les demanderesses, qui sont manifestement des entreprises averties, ont besoin de précisions supplémentaires pour répondre aux actes de procédure produits.

     Conclusion

[34]      La requête des demanderesses est accueillie dans la mesure exposée précédemment. La défenderesse signifiera et déposera une défense et demande reconventionnelle modifiée au plus tard 30 jours après la présente ordonnance. Une ordonnance distincte sera rendue conformément aux motifs qui précèdent.

[35]      Vu le retard des demanderesses à agir et comme aucune des parties n'a clairement gain de cause, les dépens afférents à la requête sont adjugés à la défenderesse suivant l'issue de la cause.

                                            

                                 Roger R. Lafrenière

     Protonotaire

TORONTO (ONTARIO)

8 octobre 1999



Traduction certifiée conforme



Claire Vallée, LL.B.














COUR FÉDÉRALE DU CANADA                         

     Avocats et procureurs inscrits au dossier

NE DU GREFFE :                      T-2792-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :              MERCK & CO. INC., MERCK FROSST CANADA INC., ZENECA LIMITED et ZENECA PHARMA INC.

                        

                             c.
                             APOTEX INC.

                            

EXAMEN À TORONTO (ONTARIO) SUIVANT LA RÈGLE 369.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE LAFRENIÈRE en date du vendredi 8 octobre 1999.

PRÉTENTIONS ÉCRITES :              Me Nelson Landry et

                             M e Judith Robinson

                            

                                 Pour les demanderesses, Merck & Co., Inc. et Merck Frosst Canada Inc.

                             M e Gunars A. Gaikis et

                             M e Shonagh L. McVean

                                 Pour les demanderesses, Zeneca Limited et Zeneca Pharma Inc.

            

                            

                             M e H. B. Radomski et

                             M e D. M. Scrimger

                                 Pour la défenderesse





PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :      Ogilvy Renault

                             Avocats

                             1981, av. McGill College

                             Bureau 1100

                             Montréal (Québec)

                             H3C 3C1

                                 Pour les demanderesses Merck & Co., Inc. et Merck Frosst Canada Inc.

                            

                             Smart & Biggar

                             Avocats

                             438, av. University

                             Bureau 1500

                             Toronto (Ontario)

                             M5G 2K8                 

                                 Pour les demanderesses Zeneca Limited et Zeneca Pharma Inc.

                                    

                              Goodman Phillips & Vineberg

                             Avocats

                             250, rue Yonge

                             Bureau 2400, C.P. 25

                             Toronto (Ontario)

                             M5B 2M6

                                 Pour la défenderesse

                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA


                                 Date : 19991008

                        

         Dossier : T-2792-96


                             Entre :

                             MERCK & CO. INC., MERCK FROSST CANADA INC., ZENECA LIMITED et ZENECA PHARMA INC.,

     demanderesses

(défenderesses reconventionnelles),

                             - et -


                             APOTEX INC.,

    

     défenderesse

(demanderesse reconventionnelle).



                    

                            

        

                             MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                             ET ORDONNANCE

                            

    




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