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Date : 20051101

Dossier : IMM-987-05

Référence : 2005 CF 1481

Toronto (Ontario), le 1er novembre 2005

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE MACTAVISH

ENTRE :

MARIA ZULIDMA CASTANEDA VANEGAS

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Maria Zulidma Castaneda Vanegas, une citoyenne de Colombie, prétend avoir été menacée de mort par des membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie (les FARC). Sa demande d'asile a été rejetée par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), celle-ci ayant conclu son témoignage n'était pas crédible et que son récit avait été fabriqué.

[2]                La demande d'asile de la demanderesse a été entendue avec celles de sa fille et de son gendre, même si le fondement de leurs demandes était différent. Son gendre prétendait également avoir reçu des menaces des FARC, mais il ignorait si celles-ci avaient été proférées contre lui parce qu'il travaillait dans une société d'État ou parce qu'il appuyait le parti conservateur. Il a été jugé crédible et sa demande, de même que celle de son épouse, a été accueillie.

[3]                Bien qu'elle ne conteste pas les conclusions défavorables tirées par la Commission relativement à la crédibilité, la demanderesse affirme que celle-ci a commis une erreur en ne tenant pas compte du risque qu'elle courrait, en tant que membre de la famille de son gendre, si elle devait retourner en Colombie. Je ne suis cependant pas convaincue que la Commission a commis une telle erreur. En conséquence, la demande sera rejetée.

Le contexte

[4]                La demanderesse habitait en Colombie avec sa fille et son gendre jusqu'à son départ en janvier 1999. Après avoir vécu aux États-Unis pendant plusieurs années, elle est arrivée au Canada en août 2002 et a demandé immédiatement l'asile.

[5]                Le gendre de la demanderesse a commencé à avoir des ennuis avec les FARC en août 1999, soit environ sept mois après que la demanderesse eut quitté la Colombie. La Commission a reconnu que le gendre avait effectivement reçu des menaces des FARC et qu'il craignait avec raison d'être persécuté en Colombie. Elle a aussi reconnu que les FARC avaient l'habitude de prendre pour cibles les membres de la famille immédiate de leurs victimes, de sorte que la fille de la demanderesse était aussi en danger. Les demandes d'asile de la fille et du gendre de la demanderesse ont donc été accueillies.

La demande d'asile présentée par la demanderesse à la Commission

[6]                La demande d'asile de la demanderesse était fondée sur ses opinions politiques et sur son appartenance à un groupe social. La demanderesse a d'abord décrit les raisons de sa crainte dans son formulaire de renseignements personnels (FRP), où elle a parlé du meurtre de son mari survenu en 1987. C'est après cet événement qu'elle a commencé à recevoir des appels de menaces lui ordonnant de quitter la ville. Le meurtre n'aurait pas été résolu et la demanderesse ne sait pas quelles personnes ou quel groupe ont pu tuer son mari. Elle dit que les appels de menaces ont cessé lorsqu'elle a déménagé.

[7]                La demanderesse a aussi décrit les menaces qu'elle aurait reçues des FARC en 1998. Elle dit qu'elle travaillait à l'époque dans une société de fabrication de boissons alcoolisées appartenant à l'État - elle a parlé de « société politique » - et que des membres des FARC avaient menacé de la tuer. Ces derniers auraient voulu détruire les registres financiers de son employeur, lesquels montraient prétendument que des politiciens détournaient les fonds de la société.

[8]                La demanderesse dit qu'elle s'est enfuie de Colombie parce qu'elle craignait pour sa vie.

[9]                La demanderesse a répété son histoire devant la Commission. Vu que le fondement de sa demande d'asile était différent de celui invoqué par sa fille et son gendre au soutien de leurs propres demandes, la présidente de l'audience s'est efforcée de s'assurer qu'elle comprenait bien la nature et la portée de la demande de la demanderesse. À cette fin, elle a demandé à la demanderesse :

[traduction]

La commissaire : Donc, est-ce exact de dire que vous êtes ici aujourd'hui uniquement à cause des demandes qui vous ont été faites lorsque vous travailliez pour cette société?

La revendicatrice : Oui.

           

[10]            Ainsi, il ne fait aucun doute que la demanderesse a eu la possibilité de faire état de toute crainte qu'elle pouvait avoir à cause de ses liens avec son gendre et qu'elle ne l'a pas fait.

[11]            La demanderesse dit que, comme la Commission a reconnu que son gendre avait reçu des menaces des FARC et a conclu que celles-ci avaient l'habitude de prendre pour cibles les membres de la famille immédiate de leurs victimes, la Commission était tenue de prendre en considération le risque qu'elle courait à cause de son appartenance à la famille de son gendre. Selon la demanderesse, ce risque était tellement évident qu'il aurait dû être pris en considération, même si elle n'en avait pas elle-même parlé.

Analyse

[12]            Dans la mesure où la demande de la demanderesse est fondée sur l'article 96 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (la LIPR), son argumentation doit être rejetée. Pour que la qualité de réfugié au sens de la Convention lui soit reconnue, la demanderesse doit démontrer que sa crainte de persécution a un fondement tant objectif que subjectif.

[13]            La Commission a examiné la demande avec soin et a estimé qu'elle ne disposait d'aucun élément de preuve crédible étayant le récit de la demanderesse. Comme il a été mentionné précédemment, la demanderesse ne conteste pas les conclusions concernant la crédibilité auxquelles la Commission est arrivée.

[14]            La demanderesse n'ayant jamais fait mention d'une crainte subjective découlant de ses liens avec son gendre, la Commission n'avait tout simplement rien à prendre en considération à cet égard.

[15]            S'appuyant sur des décisions comme Ustaoglu c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2003] A.C.F. no 1285, 2003 CF 1009, et Shah c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2003] A.C.F. no 1418, 2003 CF 1121, la demanderesse prétend qu'une crainte subjective n'est pas un élément essentiel d'une demande fondée sur l'article 97 de la LIPR. Elle ajoute que, comme le risque qu'elle courait en raison de ses liens avec son gendre était évident, la Commission a commis une erreur en n'en tenant pas compte.

[16]            Je ne suis pas de cet avis. La Commission a conclu que les FARC prenaient pour cibles les membres de la famille immédiate de leurs victimes. La demanderesse étant la belle-mère de la principale cible des menaces, elle n'était pas clairement un membre de la famille immédiate de celle-ci. En outre, elle ne vivait pas avec sa fille et son gendre lorsque les menaces ont été proférées. En fait, la demanderesse ne se trouvait même pas en Colombie à l'époque puisqu'elle avait quitté ce pays pour les États-Unis plusieurs mois auparavant. De plus, comme sa fille et son gendre sont maintenant des réfugiés au Canada, elle ne vivrait pas avec eux si elle devait retourner en Colombie.

[17]            Aussi, même je reconnaissais que la Commission est tenue de prendre en considération un risque qui n'est même pas mentionné par un demandeur, je ne suis pas convaincue qu'une telle obligation existe dans les circonstances de l'espèce.

Conclusion

[18]            Pour ces motifs, la demande est rejetée.

La certification

[19]            Aucune partie n'a proposé une question à des fins de certification, et aucune question de ce genre n'est soulevée en l'espèce.

ORDONNANCE

            LA COUR ORDONNE :

                       

            1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée.


            2.          Aucune question grave de portée générale n'est certifiée.

                                                                                                            « A. Mactavish »

                      Juge

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 IMM-987-05

INTITULÉ :                                                                MARIA ZULIDMA CASTANEDA VANEGAS

                                                                                    c.

                                                                                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                                    ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                          TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                        LE 31 OCTOBRE 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                                LA JUGE MACTAVISH

DATE DES MOTIFS

ET DE L'ORDONNANCE :                                      LE 1ER NOVEMBRE 2005

COMPARUTIONS :

John Grice                                                                     POUR LA DEMANDERESSE

Anshumala Joyal                                                            POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

                                                                             

Davis & Grice                                                               POUR LA DEMANDERESSE

Avocats

Toronto (Ontario)

                                                                             

                                                                              John H. Sims, c.r.    POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

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