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Date : 20050901

Dossier : IMM-6375-04

Référence : 2005 CF 1198

ENTRE :

ANGELICA REYES MARTINEZ

STEPHANIE HUERTA REYES

YOSELIN REYES MARTINEZ

demanderesses

et

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LA JUGE SIMPSON

[1]                La présente demande vise à obtenir le contrôle judiciaire d'une décision d'un agent d'évaluation des risques avant renvoi (l'agent), datée du 8 juin 2004, qui a conclu que la demanderesse adulte (la demanderesse) et ses deux filles mineures ne seraient pas en danger si elles étaient renvoyées au Mexique (la décision).

LES FAITS

[2]                La demanderesse a présenté une demande d'asile au motif qu'elle craint son père, un commandant dans la police judiciaire. La demande a été rejetée le 14 avril 2003 par la


Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la CISR) et la demande ultérieure, laquelle visait à obtenir l'autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire, a été rejetée.

[3]                La soeur de la demanderesse a obtenu l'asile en août 2003. Toutefois, aucun élément de preuve n'a été présenté à l'agent au sujet des circonstances de sa demande.

[4]                La demande d'évaluation des risques avant renvoi était fondée sur les motifs suivants :

(i)                   La demanderesse craint son père qui réside au Mexique. Il a été violent avec elle dans le passé, sur les plans sexuel, physique et mental. Il lui a dit qu'il la trouverait, peu importe où elle irait au Mexique. Elle le croit à cause du poste d'influence qu'il occupe. La demanderesse craint également que ses filles deviennent victimes de son père. La CISR a été saisie de ces points-là.

(ii)         La demanderesse a également soulevé un nouveau point. Elle craint de retourner au Mexique en raison du fait que la police mexicaine a menacé et attaqué l'un de ses frères en décembre 2003. Elle allègue que la police a menacé de tuer ce frère, de même que le reste de la famille, si lui et sa mère ne cessaient pas d'enquêter sur le décès de son frère aîné, Juan, survenue en avril 2002 (les menaces).

LA DÉCISION

[5]                En ce qui concerne la pertinence des observations formulées dans la présente demande, l'agent a tiré les conclusions suivantes :

a)                   L'agent a conclu qu'il était moins probable que le contraire que les demanderesses soient en danger en raison des menaces. Il a décrit le risque comme [traduction] « moins que probable » .

b)                   En ce qui a trait au décès de Juan et aux menaces, l'agent a fait remarquer que le frère et la mère de la demanderesse n'avaient pas approché le père pour obtenir de l'aide. Il a conclu que cela était déraisonnable puisqu'il n'y avait aucune preuve qu'ils avaient des problèmes avec le père.

c)                   L'agent a également fait remarquer que les menaces avaient été proférées en décembre 2003 et qu'il n'y avait aucune preuve que le frère et la mère continuaient leur enquête sur le décès de Juan. Ils sont tous les deux demeurés au Mexique sans qu'aucun incident ne soit survenu depuis ce temps-là.

d)                   Enfin, l'agent a traité de la demande d'asile de la soeur de la demanderesse (la soeur), laquelle a été accueillie en août 2003. L'agent a conclu que, puisque la demanderesse n'avait pas fourni les motifs écrits de la SPR concernant la demande de sa soeur, ce point n'était pas pertinent à l'égard de l'évaluation des risques.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[6]                Les questions en litige concernent :

·           la norme de preuve;

·           la conclusion selon laquelle il n'y avait aucune preuve d'une enquête en cours sur le décès de Juan;

·           la décision sur la demande d'asile de la soeur;

·           la conclusion selon laquelle il était raisonnable de s'attendre à ce qu'on demande au père d'aider à l'enquête sur le décès de Juan.

ANALYSE ET CONCLUSIONS

La norme de preuve

[7]                Bien que la norme de preuve appliquée par l'agent soit énoncée par la négative, c.-à-d. [traduction] « moins probable que le contraire » , il ressort clairement des commentaires qu'il est « moins que probable » que les demanderesses seraient en danger et que la norme appliquée n'est pas plus onéreuse que celle du « plus probable que le contraire » récemment approuvée dans l'arrêt Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2005] A.C.F. no 1 (C.A.F.) (QL). Par conséquent, la demanderesse n'a pas gain de cause sur cette question.

L'ENQUÊTE EN COURS

[8]                La demanderesse affirme qu'il est manifestement déraisonnable de la part de l'agent d'avoir conclu que la demande ERAR ne comprenait aucune preuve au sujet de la question de savoir si la mère et le frère avaient décidé de continuer l'enquête qui a conduit aux menaces. Elle affirme que, puisque la demande ERAR n'a été présentée que trois mois après les menaces, l'agent aurait dû présumer que l'enquête continuait, à moins d'indication contraire.

[9]                Selon moi, rien ne permet de tirer une inférence nécessaire en l'absence de preuve sur cette question. On aurait pu ne pas tenir compte des menaces et continuer l'enquête ou la mère et le frère de la demanderesse auraient pu en être terrifiés au point de ne rien faire. La demanderesse avait le fardeau de présenter à l'agent des éléments de preuve au sujet des répercussions des menaces sur l'enquête.

LA DEMANDE DE LA SoeUR

[10]            Je suis également d'avis que, si la demanderesse avait voulu s'appuyer sur la demande d'asile de sa soeur, laquelle avait été accueillie, la décision de la SPR aurait dû être incluse dans sa demande d'évaluation des risques avant renvoi.

L'IMPLICATION POTENTIELLE DU PÈRE

[11]            La demanderesse a affirmé que, du fait qu'elle avait été victime de violence de la part de son père, il était manifestement déraisonnable que l'agent laisse entendre que sa mère et son frère pouvaient obtenir son aide dans leur enquête sur le décès de Juan. À mon avis, en ce qui concerne les faits inhabituels de la présente affaire, notamment le fait que le père soit commandant dans la police judiciaire ainsi que le fait que le frère et la mère n'aient pas de problème avec lui, la proposition de l'agent n'était pas déraisonnable.

CONCLUSION

[12]            Pour l'ensemble de ces motifs, la demande sera rejetée.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 1er septembre 2005

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 IMM-6375-04

INTITULÉ :                                                                ANGELICA REYES MARTINEZ

                                                                                    STEPHANIE HUERTA REYES

                                                                                    YOSELIN REYES MARTINEZ

                                                                                    c.

                                                                                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ                                                                                ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                          TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                        LE 20 JUIN 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                           LA JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :                                               1er SEPTEMBRE 2005

COMPARUTIONS :

Michael Crane                                                               POUR LES DEMANDERESSES

Marina Stefanovic                                                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Michael Crane                                                               POUR LES DEMANDERESSES

Avocat

Toronto (Ontario)

Ministère de la Justice                                                    POUR LE DÉFENDEUR

Bureau régional de Toronto

Toronto (Ontario)


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