Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision


Date : 19980506


Dossier : IMM-3865-97

Entre :

     VICKI NKONGOLO-BEYEA

     Requérant

     - et -

     LE MINISTÈRE DE L'IMMIGRATION ET DE LA CITOYENNETÉ

     Intimé

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE RICHARD :


[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Commission de l'Immigration et du Statut de Réfugié (le tribunal) rendue le 15 août 1997. Par cette décision, le tribunal ne reconnaît pas au requérant le statut de réfugié au sens de la Convention, tel qu'il est défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration.

Les faits

[2]      Les faits en l'espèce sont succincts et non contestés.

[3]      Le requérant est membre de l'ethnie Luba et citoyen de la République démocratique du Congo (ex-Zaire). En juillet 1991, il adhère à l'Union pour la démocratie et le progrès social (U.D.P.S.), section des jeunes, dans la zone de Lemba à Kinshasa.

[4]      Le 16 février 1992, il participe à une marche pour la démocratie qui sera interrompue lors d'une intervention militaire. Le requérant prend la fuite. Le soir même, deux agents de la Garde civile arrêtent le requérant à son domicile et il est incarcéré au camp de Tshatshi durant 48 heures.

[5]      Au début de 1995, le requérant travaille à sensibiliser les jeunes aux élections prévues pour le mois de juillet suivant. En avril, un ami du requérant, collaborateur à la Ligue zaïroise des électeurs, disparaît sans explications.

[6]      Le 18 août 1995, le requérant invite les jeunes à respecter la "ville morte", décrétée par l'U.D.P.S.

[7]      Le 28 février 1996, des agents de la Garde civile se présentent au domicile du requérant pour l'arrêter. Ce dernier étant absent, les agents battent ses parents et saccagent leur demeure. Le lendemain, le requérant déménage dans une zone adjacente chez un membre de l'U.D.P.S.

[8]      Le 25 mai 1996, le requérant, craignant pour sa vie puisqu'il est membre de l'U.D.P.S. et d'origine kasaïenne, quitte la R.D.C. pour chercher refuge au Canada.

La décision de la Section du statut de réfugié

[9]      Le tribunal tient pour avérer les principaux événements rapportés par le requérant et ne met pas en doute sa crédibilité.

[10]      L'audition s'est déroulée à Ottawa, le 22 avril 1997, et la décision prise en délibéré. En mai 1997, suite à la prise de pouvoir par l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaire (A.F.D.L.) et au départ du gouvernement Mobutu et de ses supporters, le tribunal avise l'avocat du requérant qu'il doit désormais fournir des arguments supplémentaires quant au "changement de circonstances" survenu en R.D.C.

[11]      Le 15 août 1997, le tribunal conclut que le changement de circonstances en R.D.C. ne lui permet pas de croire que le requérant a une crainte objective d'être persécuté s'il retourne dans ce pays.

Question en litige

[12]      Le tribunal a-t-il erré par son interprétation de ce qui constitue un "changement de circonstances"?

Le changement de circonstances

[13]      Le fait que la situation politique existant dans le pays d'origine d'un revendicateur ait évoluée, au point de faire disparaître les motifs qui ont amené ce dernier à craindre la persécution, est un fait pertinent à la détermination de son statut de réfugié au sens de la Convention1.

[14]      La question du changement de circonstances est une question de fait, tel que l'a souligné la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Yusuf2. Il n'y a pas de critère légal prédéfini afin de déterminer s'il y a un changement de circonstances dans un pays donné. Il incombe au tribunal de déterminer, eu égard aux documents dont il dispose, s'il y a vraiment changement de circonstances et si la crainte objective du requérant est toujours fondée.

[15]      En l'espèce, le tribunal s'est longuement attardé à l'analyse de la nouvelle situation politique en R.D.C. Malgré qu'il reconnaît que la situation politique en R.D.C. n'est pas encore idéale, le tribunal conclut qu'aucune preuve ne justifie la crainte de persécution du requérant à l'égard du nouveau gouvernement de Laurent Kabila.

[16]      Le requérant ne s'est pas déchargé de son fardeau de démontrer que les inférences, tirées par le tribunal spécialisé qu'est la Section du statut, ne pouvaient pas raisonnablement l'être.


[17]      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Je ne vois pas ici matière à certification.

     __________________________

     Juge

Ottawa (Ontario)

Le 6 mai 1998

__________________

1      Mileva c. Canada, le 23 janvier 1993, A-726-90, C.A.F.

2      Yusuf c. Canada (1995), 179 N.R. 11 (C.A.F.).

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.