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     Date : 19971104

     Dossier : T-1979-97

OTTAWA (ONTARIO), le lundi 4 novembre 1997

EN PRÉSENCE DE : Monsieur le juge Lutfy

ENTRE

     ANTHONY GREEN,

     requérant,

     et

     SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

             (ministre de la Défense nationale)

     intimée.

     ORDONNANCE

VU la requête en date du 20 octobre 1997 introduite au nom de l'intimée en vue d'obtenir :

1. une ordonnance qui radierait les parties suivantes des affidavits déposés par le requérant :

     Affidavit                  Paragraphe              Phrase

(i)      Anthony Green                  5                      3 e

     Établi le 11 juillet

     1997                          7                      3 e

                         40      4e, 5e, 6e, 7e & 8e

(ii)      Alain Gordon Bleau      Tous les paragraphes et

     Établi le 13 juin      la pièce

     1997

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(ii)      James Allan          Tous les paragraphes et

     Établi le 13 juin      la pièce

     1997

     (ci-après, la preuve par affidavit contestée)
2.      et toute autre réparation que l'avocat peut estimer indiquée et que la Cour peut accorder;

     VU que l'intimée ne sollicite plus la réparation figurant à l'alinéa 1(i) de la requête;

     IL EST ORDONNÉ

     Que l'affidavit en date du 13 juin 1997 d'Alain Gordon Bleau et celui en date du 13 juin 1997 de James Allan, ainsi que la pièce jointe à chacun de ces affidavits, soient radiés du dossier.

                             "Allan Lutfy"

                                     Juge

Traduction certifiée conforme

                         Tan Trinh-viet


     Date : 19971104

     Dossier : T-1979-97

ENTRE

     ANTHONY GREEN,

     requérant,

     et

     SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

             (ministre de la Défense nationale)

     intimée.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LUTFY

[1]          L'avocat du requérant a demandé à celui de l'intimée de consentir au transfert des éléments de preuve du dossier de la demande d'autorisation au présent dossier de contrôle judiciaire [TRADUCTION] "...afin d'éviter un chevauchement inutile de ce qui a été déposé." L'avocat de l'intimée y a consenti par le message d'une boîte vocale sans aucune remarque ni réserve apparentes.

[2]          Il n'existe aucune preuve ni aucune jurisprudence pour étayer la prétention du requérant selon laquelle ce consentement constitue un obstacle à la présente requête introduite par

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l'intimée pour faire radier deux des affidavits ainsi transférés. Le consentement de l'intimée était une courtoisie prévue entre collègues. En l'absence du consentement, les affidavits auraient pu être déposés avec le dossier de demande du requérant. L'intimée aurait alors pu demander la radiation de l'affidavit. L'intimée n'a pas empiré sa position en consentant à l'introduction ordonnée de ces éléments de preuve dans le dossier du contrôle judiciaire. La décision sur cette requête ne modifiera nullement l'ordonnance convenue qui a enjoint le transfert des documents d'un dossier de la Cour à l'autre.

[3]          Les souscripteurs des deux affidavits contestés sont des enquêteurs privés. Les deux affidavits introduisent le même rapport d'enquête du 31 mai 1994. Le rapport résume une entrevue téléphonique avec M. David Dubois et une réunion avec le major David Mezzabotta pour obtenir des renseignements sur le traitement réservé au requérant par le Lt.-Col. K. Bartels. Les deux individus ont fourni substantiellement des renseignements subjectifs qui, selon le requérant, étayaient sa position. Selon le rapport, M. Dubois a refusé de rencontrer les enquêteurs, et le major Mezzabotta [TRADUCTION] "...a consenti à l'entrevue à la condition qu'aucune déclaration formelle ne soit prise et que la rigueur de la confidentialité soit mentionnée. S'il est interrogé, il nierait qu'une réunion ait eu lieu, mais pourrait coopérer dans une certaine mesure, s'il est assigné à une audition civile." Le

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rapport du 31 mai 1994 n'a été déposé dans aucune des procédures de grief qui ont conduit à la décision du ministre de la Défense nationale du 25 mars 1997, qui fait maintenant l'objet du contrôle judiciaire.

[4]          Les affidavits et le rapport d'enquête constituent une preuve par ouï-dire et peuvent être exclus en application de la règle 332(1). Toutefois, le requérant soutient que la preuve des enquêteurs remplit les critères de la "nécessité" et de la "fiabilité" pour permettre la preuve par ouï-dire. Dans l'arrêt R. c. Khan , [1990] 2 R.C.S. 531, le juge McLaughlin a dit à la page 546 : "La nécessité...doit être interprétée dans le sens de [TRADUCTION] "raisonnablement nécessaire"". Selon les propos tenus par le juge en chef Lamer dans l'arrêt R. c. Smith , [1992] 2 R.C.S. 951, le principe de la nécessité englobera diverses situations (à la page 934) : "Ces situations auront comme point commun que, pour différentes raisons, la preuve directe pertinente n'est pas disponible."

[5]          On ne sait pas du tout si l'hésitation d'un témoin par ailleurs disponible à fournir un affidavit constitue de la nécessité, particulièrement lorsque la preuve est un rassemblement de déclarations qui sont subjectives, spéculatives et préjudiciables. Les déclarations que les enquêteurs attribuent à M. Dubois et au major Mezzabotta, même si elles se rapportaient à la présente demande de contrôle judiciaire, semblent avoir été

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considérablement incorporées dans un langage plus modéré, selon le propre affidavit du requérant. Le requérant peut contre-interroger un ou plusieurs des déposants de l'intimée qui se penchent sur les mêmes questions auxquelles ont fait allusion MM. Dubois et Mezzabotta. Le rapport des enquêteurs n'a pas été introduit au cours du processus de grief. Les personnes qu'ils ont interrogées ont toutes deux quitté l'armée en 1994, et il n'existe aucune preuve que les déclarations qu'elles ont faites devant les enquêteurs relevaient de leur pouvoir officiel et étaient des aveux contraires à leurs propres intérêts. J'estime que, par tous ces motifs, la preuve des enquêteurs ne satisfait pas du tout au critère de la nécessité et doit être exclue dans l'application de la règle par ouï-dire sur laquelle repose la règle 332(1).

[6]          Les affidavits des deux enquêteurs seront radiés du dossier.

                         "Allan Lutfy"

                                 Juge

Ottawa (Ontario)

Le 4 novembre 1997

Traduction certifiée conforme

                         Tan Trinh-viet


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                      T-1979-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :              Anthony Green c. Sa Majesté la Reine du chef du Canada (ministre de la Défense nationale)
LIEU DE L'AUDIENCE :              Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :              Le 27 octobre 1997

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE LUTFY

EN DATE DU                      4 novembre 1997

ONT COMPARU :

    Philip S. Tinkler                   pour le requérant
    Gregory Graham                      pour l'intimée

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

    Tinkler Morris                      pour le requérant
    Toronto (Ontario)
    George Thomson
    Sous-procureur général
    du Canada                      pour l'intimée
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