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Date : 20040105

Dossier : T-1715-03

Référence : 2004 CF 4

ENTRE :

                                                    JOSEPHAKIS CHARALAMBOUS

                                                                                                                                                        défendeur

                                                                                   et

                                                              SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                                   défenderesse

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

[1]                 Dans l'action en dommages-intérêts qui sous-tend la présente requête en suspension des procédures déposée en vertu de l'article 50.1 de la Loi sur les Cours fédérales, le demandeur réclame la réparation du préjudice qu'il a subi et qu'il continue de subir en raison du défaut de la défenderesse de lui donner en temps utile l'assistance médicale dont il avait besoin lors de sa crise cardiaque. La défenderesse demande la suspension de cette action pour le motif que la Couronne entend mettre en cause devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique son entrepreneur indépendant et fournisseur de services médicaux, le Dr Alan Moore.

[2]                 Malgré la formulation impérative de l'article 50.1 de la Loi sur les Cours fédérales, qui énonce que la suspension des procédures devant la Cour fédérale est ordonnée lorsque la Couronne entend présenter une demande reconventionnelle ou procéder à une mise en cause pour lesquelles la Cour n'a pas compétence, une telle suspension ne doit pas être accordée automatiquement. C'est ce qu'a affirmé le juge Rouleau dans la décision Bande de Fairford c. Canada (1995), 96 F.T.R. 172.

[3]                 Pour pouvoir invoquer l'article 50.1, la Couronne doit démontrer clairement qu'elle « entend [...] procéder à une mise en cause pour [laquelle] la Cour n'a pas compétence » . Il ressort des documents que la Couronne voudrait réclamer des dommages-intérêts pour inexécution de contrat. Selon l'arrêt McNamara Construction (Western) Ltd. c. La Reine, [1977] 2 R.C.S. 654, une telle réclamation est fondée sur une loi provinciale et ne relève donc pas de la compétence de la Cour fédérale. Il reste à la Couronne à démontrer qu'elle entend réellement procéder à une mise en cause.

[4]                 En l'espèce, la preuve présentée par la Couronne démontre seulement que l'avocat de la Couronne a envoyé à l'avocat du demandeur une lettre dans laquelle il lui faisait part de son « intention » de procéder à une mise en cause du Dr Alan Moore devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique. La Couronne n'a fourni aucune preuve prima facie à l'appui d'une action récursoire pour négligence ou inexécution de contrat de la part du Dr Moore.

[5]                 Au contraire, et je dois souligner ici que le demandeur réclame des dommages-intérêts découlant du retard à agir et de la réaction institutionnelle inadéquate de la défenderesse, les éléments de preuve présentés relativement à la présente requête démontrent clairement qu'il n'y a pas eu de retard injustifié à agir de la part du Dr Moore, qui a prescrit les médicaments et recommandé les mesures qui s'imposaient peu de temps après avoir été contacté par téléavertisseur. Le retard avec lequel l'assistance médicale a été donnée au demandeur aurait plutôt été causé par les préposés de la Couronne. Cette affirmation est certainement étayée par le compte rendu détaillé établi par la Couronne des événements précédant le moment où le Dr Moore a finalement été contacté par téléavertisseur et le moment où la Couronne a fini par transporter le demandeur à l'hôpital. Le compte rendu détaillé en question révèle que le Dr Moore a réagi rapidement et a donné les instructions appropriées après avoir été contacté par téléavertisseur, mais qu'il y a eu un retard dans l'exécution de ces instructions par la défenderesse. Comme je l'ai déjà mentionné, la demande de réparation présentée par le demandeur repose entièrement sur l'allégation voulant qu'il ait subi et continue de subir un préjudice en raison du fait que la Couronne ait tardé à lui donner l'assistance médicale requise et à le transporter à l'hôpital conformément aux instructions du Dr Moore.


[6]                 Ordonner la suspension des procédures sous prétexte que le Dr Moore a commis une faute serait injuste étant donné que la preuve vague et imprécise selon laquelle la Couronne entend mettre en cause le Dr Moore ne me convainc pas. Le juge Rouleau est arrivé à une conclusion semblable aux pages 175 et 176 de la décision Bande de Fairford c. Canada, précitée, où il a dit que le caractère vague des documents et l'absence de renseignements détaillés l'ont amené à mettre en doute l'intention du défendeur d'intenter la procédure de mise en cause. Le juge Rouleau a ensuite fait remarquer, à la page 176, que :

[...] la requête qu'il introduit devant la Cour est extrêmement vague; elle ne renferme aucun détail sur la mise en cause envisagée. De fait, il paraît conclure que la Cour doit lui accorder de plein droit le redressement demandé. Il ne serait cependant pas juste de priver les demandeurs de leur droit au jugement de leur action et à une réparation éventuelle, alors que la Cour n'est saisie d'aucune preuve indiquant que le procureur général va effectivement intenter une procédure de mise en cause contre le Manitoba.

[7]                 La requête en suspension des procédures, déposée en vertu de l'article 50.1 de la Loi sur les Cours fédérales, est rejetée. Toutefois, la Couronne pourra déposer et signifier sa défense avant la fermeture des bureaux du greffe le 23 janvier 2004. Les dépens sont adjugés au demandeur.

        « John A. Hargrave »        

    Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Aleksandra Koziorowska, LL.B.


                                       COUR FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                               T-1715-03

INTITULÉ :                              JOSEPHAKIS CHARALAMBOUS

c.

SA MAJESTÉ LA REINE

                                                         

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE

DATE DES MOTIFS :                        LE 5 JANVIER 2004

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Rebecca L. Darnell

POUR LE DEMANDEUR

Ken Manning

POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Darnell & Company Law Office

Langley (Colombie-Britannique)

POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

POUR LA DÉFENDERESSE

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