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[TRADUCTION FRANÇAISE]

Date : 20000828

 

Dossier : T-627-00

 

ENTRE :

  ED WAHL BOAT BUILDERS

  AND REPAIRS LTD.,

  demanderesse,

  et

  PAUL HOLM et ANTOINETTE HOLM,

  LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE

  « NORSE-POL », NUMÉRO OFFICIEL 1058601,

  défendeurs,

ET ENTRE :

  PAUL HOLM et ANTOINETTE HOLM,

  demandeurs reconventionnels

  et

  ED WAHL BOAT BUILDERS AND REPAIRS LTD.,

  et SHELTER ISLAND MARINA INC.,

  défenderesses reconventionnelles.

 

  MOTIFS DE L’ORDONNANCE

JOHN A. HARGRAVE

PROTONOTAIRE

 

[1]  Les défendeurs, Paul et Antoinette Holm, propriétaires du Norse-Pol, sont également les demandeurs reconventionnels. Ils demandent diverses réparations dans le cadre de la présente requête. Ils cherchent principalement à obtenir la mainlevée de la saisie du Norse-Pol, présentement abandonné par le constructeur sur des blocs situés sur un terrain appartenant à Shelter Island Marina Inc., sans frais de caution et de sûreté. L’avis de requête a été signifié aux défendeurs dans le cadre d’une ordonnance rendue le 22 août 2000.

[2]  Les faits pertinents à la présente requête sont les suivants : le Norse-Pol, un yacht partiellement construit, a été saisi le 12 avril 2000 par le constructeur au motif que des sommes étaient dues pour sa construction. Les propriétaires du Norse-Pol affirment, au contraire, qu’ils ont versé un montant supplémentaire au prix convenu selon le contrat. De plus, les défendeurs estiment que la construction était déficiente. Ils avancent que les réparations nécessaires pour régler les défectuosités et ainsi que les travaux d’achèvement de la construction du navire s’élèveront à des centaines de milliers de dollars.

[3]  La défenderesse semble éprouver de nombreux problèmes à l’heure actuelle, incluant avec ses créanciers, son propriétaire-locateur, ses avocats, son procureur, ainsi qu’avec son directeur et unique agent, M. Ed Wahl.

[4]  En outre, la défenderesse a abandonné son chantier maritime loué situé sur la rue Graybar il y a environ deux mois, avec des loyers impayés. Les avocats de la défenderesse ont fait modifier l’adresse des bureaux de la société de leur cabinet aux bureaux de ceux du propriétaire-locateur de la défenderesse. Le propriétaire-locateur n’a aucun autre lien ou intérêt avec la défenderesse, hormis sa qualité de créancier. L’avocate de la défenderesse s’est retirée du dossier, à la fois, car elle n’était pas en mesure d’obtenir des instructions, mais également, car les factures de son cabinet demeuraient impayées. Finalement, les éléments de preuve démontrent que M. Ed Wahl, domicilié à une adresse inconnue, le directeur et seul agent de la défenderesse, a tenté de se retirer de ses rôles d’agent et de directeur de la société.

[5]  Ceci signifie que l’avocat des défendeurs se retrouve sans homologue avec qui interagir, mais également que les défendeurs ne disposent d’aucun moyen valable de rejoindre la société, ou ses agents et son directeur. Je soulignerai à ce point qu’en vue de signifier la présente requête à la défenderesse et à M. Wahl, qui ne figure pas dans le bottin téléphonique, autrement qu’aux coordonnées de la désormais manifestement défunte défenderesse, la requête a été signifiée aux anciens avocats de la société ainsi qu’à l’adresse d’un ami, chez qui il est possible que M. Wahl réside.

[6]  En résumé, les défendeurs sont inquiets du fait qu’ils n’ont personne avec qui traiter que ce soit de façon générale, dans le cadre de la présente requête, ou de manière plus pointue afin d’obtenir la mainlevée de leur navire.

[7]  Le processus de saisie d’un navire devant la Cour fédérale est une demande nécessitant l’allégation de la responsabilité. Il s’agit d’une procédure simple et peu onéreuse. Toutefois, la procédure de saisie est, sur de nombreux plans, un recours extraordinaire d’un poids considérable, quoiqu’accordé de manière fort sommaire par la Cour fédérale. En outre, elle permet presque d’accorder un droit à tout demandeur invoquant un droit opposable universellement. Ceci nous amène au concept visant à chercher l’équilibre entre les droits du créancier et ceux du propriétaire du navire.

[8]  L’équilibre des droits du propriétaire d’un navire et de ceux du créancier n’a pas reçu le même degré d’attention au Canada qu’aux États-Unis, où ce concept a soulevé de nombreux débats quant à la question délicate à savoir de préserver les droits du propriétaire ainsi que les droits raisonnables d’un créancier. Il s’agit de chercher à trouver le point d’équilibre entre les intérêts de chacun, de façon à ce que justice soit rendue de façon équitable, eu égard aux circonstances.

[9]  Bien entendu, le concept d’une saisie injustifiée, ainsi que des dommages conséquents, existe au Canada. Toutefois, il suppose la présence d’un demandeur réel à qui l’on peut s’adresser, et pénaliser en cas de saisie injustifiée. En effet, étant donné la nature sommaire et extraordinaire d’une procédure de saisie, il incombe au demandeur, ou à son procureur, d’être disponible dans un délai raisonnable, ce qui peut signifier peu de préavis, afin que le propriétaire du navire puisse intenter un recours pour protéger ses droits, incluant pour obtenir la mainlevée de la saisie du navire. En l’occurrence, la saisie a eu lieu; or, il n’y a aucun signe de vie du côté de la partie requérante de ladite saisie, que ce soit de la société, d’un agent, d’un directeur, d’un receveur ou d’un fiduciaire, attestant d’une personne à qui s’adresser. De plus, rien ne laisse présager qu’une telle personne sera disponible ultérieurement.

[10]  La Cour fédérale a compétence, en application de l’article 488 des Règles, pour ordonner la mainlevée de la saisie d’un navire. Quant à la mainlevée de la saisie d’un navire en l’absence du versement d’une sûreté, consulter par exemple la décision Atlantic Lines & Navigation Co. c. The Didymi, [1985] 1 C.F. 240, dans laquelle la juge Reed souligne, à la page 244, que la question portait à savoir si la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire pour ordonner la mainlevée de la saisie d’un navire sans sûreté.

[11]  En l’espèce, le maintien de la saisie du navire en l’absence d’une demanderesse avec qui négocier la mainlevée serait une décision abusive et contraire aux droits raisonnables des propriétaires du navire. La saisie à l’égard du Norse-Pol est levée sans qu’il soit nécessaire de verser une caution.

[12]  Quant au cautionnement pour dépens, les défendeurs doivent être en mesure, éventuellement, de clore la présente procédure, et ce, malgré l’absence d’une demanderesse en mesure de mener le recours à terme. Ceci peut se faire en exigeant de la demanderesse qu’elle fournisse un cautionnement pour dépens dans le délai prescrit.

[13]  La demanderesse devra verser la somme de 40 000 $ à titre de cautionnement pour dépens dans un délai de 60 jours. À défaut de respecter cette condition, les défendeurs pourront déposer une requête en rejet de l’action. J’ai tenu compte à la fois de la somme considérablement plus élevée que suggéraient les défendeurs, soit d’environ 90 000 $, ainsi que du fait que la majeure partie du litige est réglée bien avant la tenue de l’audience, pour parvenir à la somme de 40 000 $ à titre de cautionnement pour dépens. Cependant, advenant que l’espèce procède à l’audience, les défendeurs pourront demander une augmentation du cautionnement pour dépens après la tenue des interrogatoires préalables.

[14]  J’ai tenu compte des autres demandes énoncées dans la requête des défendeurs. Il me semble approprié de réduire légèrement le délai prévu pour permettre la production d’une défense reconventionnelle et le dépôt, par la demanderesse, d’une réponse à la défense des défendeurs. La date d’échéance est fixée au 1er septembre 2000.

[15]  Les défendeurs ont droit aux dépens et aux débours en lien avec la présente requête établis au Tarif B, soit du montant forfaitaire de 1 000 $, payable sans délai.

 

  (Signature) « John A. Hargrave »

  Protonotaire

Le 28 août 2000

Vancouver (Colombie-Britannique)

  COUR FÉDÉRALE DU CANADA

  PREMIÈRE INSTANCE

  AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



DOSSIER :  T-627-00

INTITULÉ :  ED WAHL BOAT BUILDERS AND REPAIRS LTD.

  c. 

  PAUL HOLM ET ANTOINETTE HOLM, LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « NORSE-POL », NUMÉRO OFFICIEL 1058601

LIEU DE L’AUDIENCE :  Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :  Le 28 août 2000

MOTIFS DE L’ORDONNANCE : LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

DATE : Le 28 août 2000

 

COMPARUTIONS :

Glenn Morgan  POUR LES DÉFENDEURS, PAUL ET ANTOINETTE HOLM

 

James Hall  POUR LA DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE SHELTER ISLAND MARINA INC.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Davis & Co.

Vancouver (Colombie-Britannique)   POUR LES DÉFENDEURS, PAUL ET ANTOINETTE HOLM

Owen, Bird

Vancouver (Colombie-Britannique)  POUR LA DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE SHELTER ISLAND MARINA INC.

 

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