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Date: 19980826


Dossier: T-1324-92

Entre :

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     demanderesse,

     et

     LOMEX, INC.,

     défenderesse.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE JOYAL


[1]      Il s'agit d'un appel à l'encontre d'une décision rendue par la Cour canadienne de l'impôt le 5 février 1992. Par cette décision, la Cour accueillait les appels de Lomex Inc. (ci-après "Lomex") à l'encontre de nouvelles cotisations imposées à cette dernière pour les années d'imposition 1982, 1983, 1984 et 1985. Le Ministère du revenu national (ci après "le MRN") en appelle maintenant de cette décision.


Les faits

[2]      La défenderesse, Lomex, lors de la production de ses déclarations d'impôts pour les années d'imposition 1982, 1983, 1984 et 1985, réclamait une déduction d'impôt pour bénéfices de fabrication et de transformation. Cette déduction est prévue à l'article 125.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu (ci-après "la Loi") et a pour but de stimuler l'activité et la productivité des opérations de fabrication et de transformation au Canada.


[3]      Le 22 janvier 1988, le MRN fixait l'impôt à payer par Lomex pour les années en litige. Il corrigeait alors les déductions réclamées par cette dernière au motif que la cueillette et le transport de matières premières, ainsi que toutes opérations afférentes, ne constituait pas des activités de fabrication ou de transformation en vertu de la Loi. Le MRN considérait que les actifs utilisés à des fins de transport des matières premières et d'entretien de la flotte de camions n'étaient pas utilisés dans les activités admissibles, et que les salaires versés aux employés impliqués dans ces opérations l'avaient été pour du temps où ceux-ci ne se livraient pas à des activités admissibles.


[4]      Le 22 janvier 1988, Lomex s'opposait aux nouvelles cotisations émises par le MRN. Le 25 août 1988, ce dernier confirmait les nouvelles cotisations. Le 15 septembre 1988, Lomex lançait un appel à l'encontre de cette décision auprès de la Cour canadienne de l'impôt, appel que cette Cour accueillait le 5 février 1992. Le MRN en appelle, à son tour, de cette décision.


L'entreprise de la défenderesse

[5]      Lomex a son siège social et son usine de traitement à Montréal, avec des dépôts dans les régions d'Ottawa et de Québec. Depuis plusieurs années, elle opère une entreprise de récupération et de traitement par déshydratation de déchets et de sous-produits d'origine animale.


[6]      La première matière de base pour la production consiste en résidus animaux, tels le gras, les os, les parures de graisse, les restes de viande, les plumes, le sang, les abats et les carcasses d'animaux. La défenderesse s'approvisionne dans environ 1500 points de récupération, tels les boucheries, les restaurants, les supermarchés, les fermes ou abattoirs, étalés dans un rayon de 250km de Montréal.


[7]      Les produits finis résultant de ce traitement par déshydratation consistent en farine protéinée de viande et d'os, de plumes et de sang ainsi que de graisse, destinée à l'alimentation animale. Le savonneries et l'industrie oléochimique fond aussi usage de ces produits. La défenderesse écoule sa production tant sur les marchés nationaux qu'internationaux. Cette activité de traitement par déshydratation constitue la seule activité de la défenderesse.


[8]      Afin d'assurer un contrôle adéquat du programme et de la qualité de sa production, ainsi que le respect de la réglementation gouvernementale visant à protéger la santé publique, la défenderesse dispose de sa propre flotte de 102 véhicules pour la cueillette de matières premières. Cette flotte est composée principalement de camions à benne, remorques, camions citernes, deux camionnettes d'entretien, deux remorques, deux camions de vidange, un camion aspirateur, un camion balayeur et camions cabines pour le transport de remorques.


[9]      La défenderesse allègue que la flotte de récupération est opérée par 56 individus, dont le directeur des opérations, 44 opérateurs, 4 mécaniciens, 5 employés de garage ainsi qu'un contremaître et un surveillant chargés de l'entretien et du lavage de l'équipement.


[10]      La défenderesse allègue que les fonctions de ses opérateurs incluent la pesée des matières premières, le classement des matières selon le contenu en gras et en os, l'inspection visuelle des matières afin de s'assurer qu'elles rencontrent les critères de qualité requis, la finalisation des billets de livraison ainsi que de la manutention et la vidange des conteneurs ou des réceptacles de ses fournisseurs.


La décision de la Cour canadienne de l'impôt

[11]      Dans sa décision, Monsieur le juge Garon indiquait qu'il était admis de part et d'autre que l'entreprise de la défenderesse se livrait à des opérations de fabrication ou de transformation tel que prescrit par l'article 125.1 de la Loi. Le litige portait sur certaines activités de l'entreprise étant, ou non, "activités admissibles" au sens de la définition apparaissant à l'article 5202 du Règlement de l'impôt sur le revenu (ci-après "le Règlement").


[12]      Le savant juge procédait à une étude détaillée de l'article 5202 du Règlement. Il concluait que si la cueillette des matières premières et leur transport vers l'usine ne sont pas visés par l'alinéa 5202(a), ils sont toutefois inclus dans l'expression "les autres activités" prévues à l'alinéa 5202(b). Le juge soulignait que la cueillette des matières premières est une opération essentielle à la poursuite des opérations de fabrication ou de transformation au Canada par l'entremise de la défenderesse, et que de plus, cette activité ne s'apparente nullement aux exceptions visées par les alinéas (d), (f), (h) et (i), concernant les produits finis et les aspects généraux de l'administration d'une entreprise.


[13]      Cette étude de l'article 5202 du Règlement et des différents alinéas portant sur les définition des "activités admissibles", menait le savant juge à conclure que les activités de la défenderesse, relatives à la cueillette des matières premières et à leur transport à l'usine, faisaient partie des activités admissibles au sens donné à cette expression à l'article 5202 du Règlement.


Question en litige

[14]      Les activités de la défenderesse, soit la cueillette et le transport des matières premières à l'usine, constituent-elles des "activités admissibles" tel que défini à l'article 5202 du Règlement?


Les dispositions pertinentes

[15]      L'article 125.1 de la Loi établit la formule de calcul des bénéfices de transformation et de fabrication:

125.1 (1) Une corporation peut déduire de l'impôt payable par ailleurs pour une année d'imposition, en vertu de la présente Partie, un montant égal au total obtenu en additionnant

(a) 9% du moins élevé des montants qui représentent

     (i) la fraction, si fraction il y a, des bénéfices de fabrication et de transformation au Canada réalisés par la corporation pour l'année qui est en sus du moins élevé des montants déterminés en vertu des alinéas 125(1) (a) à (c), à l'égard de la corporation, pour l'année, ou
     (ii) la fraction, si fraction il y a, du revenu imposable de la corporation pour l'année, qui est en sus du total obtenu en additionnant

     [...]

     (B) le moins élevé des montants déterminés en vertu des alinéas 125(1) (a) à (c), à l'égard de la corporation, pour l'année,
     (C) le double du total des sommes déduites, en vertu du paragraphe 126(2), de l'impôt pour l'année, par ailleurs payable par la corporation en vertu de la présente Partie, et
     (D) la fraction, si fraction il y a, du total du revenu de placements au Canada de la corporation pour l'année et de son revenu de placements à l'étranger pour l'année (au sens du paragraphe 129(4) ) qui est en sus de la somme, si somme il y a, déduite en vertu de l'alinéa 111(1)(b), du revenu de la corporation pour l'année; et

(b) 5% du moins élevé des montants suivants:

     (i) les bénéfices de fabrication et de transformation au Canada réalisés par la corporation pour l'année, ou
     (ii) le moins élevé des montants déterminés en vertu des alinéas 125(1) (a) à (c), à l'égard de la corporation, pour l'année,

sauf que, aux fins de l'application du présent article à une année d'imposition postérieure à l'année d'imposition 1973, le pourcentage de "9% qui figure à l'alinéa (a) doit être remplacé par le pourcentage de "8%" pour l'année d'imposition 1974, de "7%" pour l'année d'imposition 1975 et de "6%" pour les années d'imposition 1976 et suivantes.

125.5 (1) There may be deducted from the tax otherwise payable under this Part by a corporation for a taxation year an amount equal to the aggregate of

(a) 9% of the lesser of

     (i) the amount, if any, by which the corporation's Canadian manufacturing and processing profits for the year exceed the least of the amounts determined under paragraphs 125(1) (a) to (c) in respect of the corporation for the year, and
     (ii) the amount, if any, by which the corporation's taxable income for the year exceeds the aggregate of
     [...]
     (B) the least of the amounts determined under paragraphs 125(1) (a) to (c) in respect of the corporation for the year,
     (C) 2 times the aggregate of amounts deducted under subsection 126(2) from the tax for the year otherwise payable under this Part by the corporation, and
     (D) the amount, if any, by which the aggregate of the corporation's Canadian investment income for the year and its foreign investment income for the year (within the meanings assigned by subsection 129(4) ) exceeds the amount, if any, deducted under paragraph 111(1)(b) from the corporation's income for the year; and

(b) 5% of the lesser of

     (i) the corporation's Canadian manufacturing and processing profits for the year, and
     (ii) the least of the amounts determined under paragraphs 125(1) (a) to (c) in respect of the corporation for the year;

except that in applying this section for a taxation year after the 1973 taxation year, the reference in paragraph (a) to "9%" shall be read as a reference to "8%" for the 1974 taxation year, "7%" for the 1975 taxation year, and "6%" for the 1976 and subsequent taxation years.

[16]      Pour sa part, l'alinéa 125.5(1)(b) nous cite certaines exclusions:

125.1 (3)

(b) "fabrication ou transformation" ne comprend pas

     (i) l'exploitation agricole ou la pêche,

     (ii) l'exploitation forestière,

     (iii) la construction,

     (iv) l'exploitation d'un puits de pétrole ou de gaz, l'extraction de pétrole ou de gaz naturel d'un gisement naturel de pétrole ou de gaz naturel ou la transformation du pétrole lourd extrait d'un réservoir naturel situé au Canada, jusqu'à un stade qui ne dépasse pas celui du pétrole brut ou de son équivalent;
     (v) l'extraction de minéraux d'une ressource minérale;
     (vi) la transformation de minerais tirés de ressources minérales (à l'exclusion du minerai de fer et des sables asphaltiques), jusqu'à un stade qui ne dépasse pas celui du métal pur ou de son équivalent;
     (vi.1) la transformation du minerai de fer tiré de ressources minérales, jusqu'à un stade qui ne dépasse pas celui de la boulette ou de son équivalent,
     (vi.2) la transformation de sables asphaltiques, jusqu'à un stade qui ne dépasse pas celui du pétrole brut ou de son équivalent,
     (vii) la production de minéraux industriels autre que le soufre obtenu par traitement du gaz naturel,
     (viii) la production ou la transformation d'énergie électrique ou de vapeur en vue de la vente,
     (ix) le traitement du gaz, si celui-ci est traité dans le cadre de l'exploitation, par un service public, d'une entreprise de vente ou de distribution du gaz, ou
     (x) toute fabrication ou transformation de marchandises en vue de la vente ou de la location, si, pour une année d'imposition d'une corporation à l'égard de laquelle l'expression s'applique, moins de 10% de ses recettes brutes de toutes les entreprises exploitées activement au Canada provenait
     (A) de la vente ou de la location d'articles qu'elle a fabriqués ou transformés au Canada, et
     (B) de la fabrication ou de la transformation au Canada d'articles destinés à la vente ou à la location, autres que des articles qu'elle devrait vendre ou louer elle-même.

125.1 (3)

(b) "manufacturing or processing" does not include

     (i) farming or fishing,

     (ii) logging,

     (iii) construction,

     (iv) operating an oil or gas well, extracting petroleum or natural gas from a natural accumulation thereof or processing heavy crude oil recovered from a natural reservoir in Canada to a stage that is not beyond the crude oil stage or its equivalent,
     (v) extracting minerals from a mineral resource,
     (vi) processing ore (other than iron or tar sands) from a mineral resource to any stage that is not beyond the prime metal stage or its equivalent,
     (vi.1) processing iron ore from a mineral resource to any stage that is not beyond the pellet stage or its equivalent,
     (vi.2) processing tar sands to any stage that is not beyond the crude oil stage or its equivalent,
     (vii) producing industrial minerals other than sulphur produced by processing natural gas,
     (viii) producing or processing electrical energy or steam, for sale,
     (ix) processing gas, if such gas is processed as part of the business of selling or distributing gas in the course of operating a public utility, or
     (x) any manufacturing or processing of goods for sale or lease, if, for any taxation year of a corporation in respect of which the expression is being applied, less than 10% of its gross revenue from all active businesses carried on in Canada was from
     (A) the selling or leasing of goods manufactured or processed in Canada by it, and
     (B) the manufacturing or processing in Canada of goods for sale or lease, other than goods for sale or lease by it.

[17]      L'enjeu de cet appel porte tout particulièrement sur l'application des articles 5200 et 5202 du Règlement. Ces articles se lisent ainsi:

5200.      Sous réserve de l'article 5201, aux fins de l'alinéa 125.1(3)(a) de la Loi, les "bénéfices de fabrication et de transformation au Canada" qu'une corporation réalise pour une année d'imposition sont la fraction du revenu rajusté tiré d'une entreprise par la corporation pour l'année, que représente

(a)      le total, pour l'année, de son coût en immobilisations de fabrication et de transformation,

par rapport

(b)      au total, pour l'année, de son coût en immobilisations et de son coût en main-d'oeuvre.

5200.      Subject to section 5201, for the purposes of paragraph 125.1(3)(a) of the Act, "Canadian manufacturing and processing profits" of a corporation for a taxation year are hereby prescribed to be that proportion of the corporation's adjusted business income for the year that

(a)      the aggregate of its cost of manufacturing and processing capital for the year and its cost of manufacturing and processing labour for the year,

is of

(b)      the aggregate of its cost of capital for the year and its cost of labour for the year.


5202.      Dans la présente partie, sauf indication contraire à l'article 5203 ou 5204,

"activités admissibles" signifie

(a)      n'importe quelle des activités suivantes, lorsqu'elles sont exercées au Canada dans le cadre des opérations de fabrication ou de transformation au Canada (à l'exception des activités énumérées aux sous-alinéas 125.3(b)(i) à (ix) de la Loi) de marchandises en vue de leur vente ou de leur location à bail:

     (i) la conception technique des produits et des installations de production,
     (ii) la réception et l'emmagasinage des matières premières,
     (iii) la production, l'assemblage et la manutention des marchandises en voie de transformation,
     (iv) l'inspection et l'emballage des produits finis,
     (v) la surveillance axiale,
     (vi) les activités de soutien de la production y compris la sécurité, le nettoyage, le chauffage et l'entretien de l'usine,
     (vii) le contrôle de la qualité et de la production,
     (viii) la réparation des installations de production, et
     (ix) la lutte anti-pollution,

(b)      toutes les autres activités qui sont exercées au Canada directement dans le cadre des opérations de fabrication ou de transformation au Canada (à l'exception des activités énumérées aux sous-alinéas 125.1(3)(b)(i) à (ix) de la Loi) de marchandises en vue de leur vente ou de leur location à bail, et

(c)      la recherche scientifique, suivant la définition qu'en donne l'article 2900, mais ne comprend aucune des activités suivantes:

(d)      l'emmagasinage, l'expédition, la vente et la location à bail des produits finis,

(e)      l'achat de matières premières,

(f)      l'administration, y compris les activités relatives aux écritures et au personnel,

(g)      les opérations d'achat et de revente,

(h)      le traitement des données, et

(i)      la fourniture d'installations aux employés, y compris les cafétérias, les cliniques et les installations de récréation;

"coût brut" d'un bien signifie le coût en capital du bien calculé sans tenir compte du paragraphe 13(7.1) ou (10) ou de l'article 21 ou 80 de la Loi;

"coût de location" d'un bien signifie le loyer à payer pour l'utilisation de ce bien;

"coût en immobilisations" d'une corporation pour une année d'imposition signifie un montant égal au total formé

(a)      de 10 pour-cent du total de toutes les sommes dont chacune constitue le coût brut, pour la corporation, d'un bien visé à l'alinéa 1100(1)(e), (f), (g) ou (h), à l'alinéa 1102(1)(d) ou (g) ou à l'annexe II qui

     (i) appartenait à la corporation à la fin de l'année, et
     (ii) a été utilisé par la corporation à une époque quelconque de l'année, et

(b)      du total de toutes les sommes dont chacune constitue le coût de location supporté pendant l'année par la corporation pour l'utilisation de tout bien dont une fraction du coût brut serait incluse en vertu de l'alinéa (a) si le bien appartenait à la corporation à la fin de l'année,

mais aux fins de la présente définition, le coût brut d'un bien ou le coût de location pour l'utilisation de tout bien ne comprend par la fraction de ces coûts qui correspond à la mesure dans laquelle le bien a été utilisé par la corporation pendant l'année

(c)      dans une entreprise exploitée activement hors du Canada, ou

(d)      pour tirer un revenu de placements au Canada ou un revenu de placements à l'étranger suivant la définition qu'en donne le paragraphe 129(4) de la Loi;

"coût en immobilisations de fabrication et de transformation" d'une corporation pour une année d'imposition signifie 100/85 de la fraction du coût en immobilisations de la corporation pour cette année qui correspond à la mesure dans laquelle chaque bien inclus dans le calcul de ce coût a été utilisé directement dans des activités admissibles de la corporation pendant l'année, mais le montant ainsi calculé ne doit pas dépasser le coût en immobilisations de la corporation pour l'année;

"coût en main-d'oeuvre" d'une corporation pour une année d'imposition signifie un montant égal au total

(a)      des traitements et salaires payés ou payables pendant l'année à tous les employés de la corporation pour des services rendus pendant l'année, et

(b)      de toutes les autres sommes dont chacune constitue une somme payée ou payable pendant l'année pour l'exécution pendant l'année, par toute personne autre qu'un employé de la corporation, de fonctions relatives

     (i) à la gestion ou à l'administration de la corporation,
     (ii) à la recherche scientifique suivant la définition qu'en donne l'article 2900, ou
     (iii) à un service ou à une fonction que rendrait ou accomplirait normalement un employé de la corporation,

mais aux fins de la présente définition, les traitements et salaires visés à l'alinéa (a) et les autres sommes visées à l'alinéa (b) ne comprennent pas la fraction de ces sommes qui

(c)      était comprise dans le coût brut, pour la corporation, d'un bien (autre qu'un bien fabriqué par la corporation et loué à bail par elle, pendant l'année, à une autre personne) qui est entré dans le calcul du coût en immobilisations de la corporation pour l'année, ou

(d)      était reliée à une entreprise que la corporation exploitait activement hors du Canada;

"coût en main-d'oeuvre de fabrication et de transformation" d'une corporation pour une année d'imposition signifie 100/75 de la fraction du coût en main-d'oeuvre de la corporation pour cette année qui correspond à la mesure dans laquelle

(a)      les salaires et traitements inclus dans le calcul de ce coût ont été payés ou étaient payables à des personnes pour la partie de leur temps où elles se livraient directement à des activités admissibles de la corporation pendant l'année, et

(b)      les autres sommes comprises dans le calcul de ce coût en main-d'oeuvre de la corporation pour l'année;

"revenu rajusté tiré d'une entreprise" par une corporation pour une année d'imposition désigne la fraction, si fraction il y a,

(a)      du total de toutes les sommes dont chacune constitue le revenue tiré par la corporation, pour l'année, d'une entreprise exploitée activement au Canada

qui est en sus

(b)      du total de toutes les sommes dont chacune constitue une perte subie par la corporation, pour l'année, au titre d'une entreprise exploitée activement au Canada;

"traitements et salaires" signifie les traitements, salaires et commissions, mais ne comprend aucune autre forme de rémunération, aucune prestation de pension de retraite ou autre pension, aucune allocation de retraite, ni aucun montant visé à l'article 6 ou 7 de la Loi.

5202.      In this Part, except as otherwise provided in section 5203 and 5204,

"adjusted business income" of a corporation for a taxation year means the amount, if any, by which

(a)      the aggregate of all amounts each of which is the income of the corporation for the year from an active business carried on in Canada

exceeds

(b)      the aggregate of all amounts each of which is the loss of the corporation for the year from an active business carried on in Canada;

"cost of capital" of a corporation for a taxation year means an amount equal to the aggregate of

(a)      10 per cent of the aggregate of all amounts each of which is the gross cost to the corporation of a property referred to in paragraph 1100(1)(e), (f), (g) or (h), paragraph 1102(1)(d) or (g) or Schedule II that

     (i) was owned by the corporation at the end of the year, and
     (ii) was used by the corporation at any time during the year, and

(b)      the aggregate of all amounts each of which is the rental incurred by the corporation during the year for the use of any property a portion of the gross cost of which would be included by virtue of paragraph (a) if the property were owned by the corporation at the end of the year,

but for purposes of this definition, the gross cost of a property or rental cost for the use of any property does not include that portion of those costs that reflects the extent to which the property was used by the corporation during the year

(c)      in an active business carried on outside Canada, or

(d)      to earn Canadian investment income or foreign investment income as defined in subsection 129(4) of the Act;

"cost of labour" of a corporation for a taxation year means an amount equal to the aggregate of

(a)      the salaries and wages paid or payable during the year to all employees of the corporation for services performed during the year, and

(b)      all other amounts each of which is an amount paid or payable during the year for the performance during the year, by any person other than an employee of the corporation, of functions relating to

     (i) the management or administration of the corporation,
     (ii) scientific research as defined in section 2900, or
     (iii) a service or function that would normally be performed by an employee of the corporation,

but for the purposes of this definition, the salaries and wages referred to in paragraph (a) or other amounts referred to in paragraph (b) do not include that portion of those amounts that

(c)      was included in the gross cost to the corporation of a property (other than a property that was manufactured by the corporation and leased during the year by the corporation to another person) that was included in computing the cost of capital of the corporation for the year, or

(d)      was related to an active business carried on outside Canada by the corporation;

"cost of manufacturing and processing capital" of a corporation for a taxation year means 100/85 of that portion of the cost of capital of the corporation for that year that reflects the extent to which each property included in the calculation thereof was used directly in qualified activities of the corporation during the year, but the amount so calculated shall not exceed the cost of capital of the corporation for the year;

"cost of manufacturing and processing labour" of a corporation for a taxation year means 100/75 of that portion of the cost of labour of the corporation of the for that year that reflects the extent to which

(a)      the salaries and wages included in the calculation thereof were paid or payable to persons for the portion of their time that they were directly engaged in qualified activities of the corporation during the year, and

(b)      the other amounts included in the calculation thereof were paid or payable to persons for the performance of functions that would be directly related to qualified activities of the corporation during the year if those persons were employees of the corporation,

but the amount so calculated shall not exceed the cost of labour of the corporation for the year;

"gross cost" of a property means the capital cost of the property computed without reference to subsection 13(7.1) or (10) or section 21 or 80 of the Act;

"qualified activities" means

(a)      any of the following activities, when they are performed in Canada in connection with manufacturing or processing (not including the activities listed in subparagraphs 125.1(3)(b)(i) to (ix) of the Act) in Canada of goods for sale or lease:

     (i) engineering design of products and production facilities,
     (ii) receiving and storing of raw materials,
     (iii) producing, assembling and handling of goods in process,
     (iv) inspecting and packaging of finished goods,
     (v) line supervision,
     (vi) production support activities including security, cleaning, heating and factory maintenance,
     (vii) quality and production control,
     (viii) repair of production facilities, and
     (ix) pollution control,

(b)      all other activities that are performed in Canada directly in connection with manufacturing or processing (not including the activities listed in subparagraphs 125.1(3)(b)(i) to (ix) of the Act) in Canada of goods for sale or lease, and

(c)      scientific research as defined in section 2900,

but does not include any of

(d)      storing, shipping, selling and leasing of finished goods,

(e)      purchasing of raw materials,

(f)      administration, including clerical and personnel activities,

(g)      purchase and resale operations,

(h)      data processing, and

(i)      providing facilities for employees, including cafeterias, clinics and recreational facilities;

"rental cost" of a property means the rents incurred for the use of that property;

"salaries and wages" means salaries, wages and commissions, but does not include any other type of remuneration, any superannuation or pension benefits, any retiring allowances or any amount referred to in section 6 or 7 of the Act.

Les arguments de la Couronne

[18]      L'argument de base de la Couronne est à l'effet que les camionneurs et la flotte de camions, ainsi que les employés de garage et le garage, ne sont pas utilisés dans le genre d'activité visé par le Règlement 5200, et dont les activités admissibles sont étalées au Règlement 5202. Plus spécifiquement, la Couronne souligne:

(1)      qu'elle aurait déjà accordé 40% de tous les salaires refusés par les cotisations comme représentant la proportion du temps de camionneurs consacré à "la réception de matières premières", tel que visé à l'alinéa 5202(a)(ii) du Règlement. Ce pourcentage, aux dires de la Couronne, est déjà très généreux;
(2)      les autres activités ne sont pas effectuées dans le cadre des opérations de fabrication et de transformation; elles ne constituent pas de la réception ou de l'emmagasinage;
(3)      il ne faut pas oublier que le Règlement prévoit l'attribution d'un certain pourcentage des actifs et des employés à des activités admissibles, ce qui souvent oblige le fisc a faire un triage de ces activités afin d'en déterminer la vraie nature; le consentement de la Couronne en accordant 40% des salaires des camionneurs respecte cette obligation;
(4)      le Règlement 5202 déclare admissibles "les activités ... dans le cadre des opérations de fabrication et de transformation", et que "dans le cadre" signifie "faire partie"; une lecture du Règlement dans son entier confirme que le Règlement vise des activités particulières, exclusives aux fabricants, lorsqu'elles sont exercées dans le cadre des opérations de fabrication et de transformation; les activités des camionneurs ne sont pas différentes des autres activités de transport, et le privilège accordé à un contribuable sous ce Règlement serait discriminatoire;
(5)      le même argument s'applique, il va sans dire, lorsqu'on parle des activités reliées à la réception de matières premières: il s'agit là d'une activité reliée au transport;
(6)      la notion d'un processus continu entre la cueillette de la matière et sa transformation porte à conclure que tout ce qui est relié à la cueillette est admissible, conduisant à une injustice; à tout événement, la réglementation elle-même exige le fractionnement des activités;
(7)      une partie des activités de camionneurs constitue des fonctions d'achat, activité exclue selon l'alinéa 5202(g) du Règlement;
(8)      généralement, la nature des exclusions visées au Règlement 5202 démontre que les activités périphériques ou accessoires ne doivent pas être considérées admissibles.

Les arguments de la défenderesse

[19]      La défenderesse souligne avant tout que l'objet de l'article 125.1 de la Loi, ainsi que du Règlement s'y afférant, est tout simplement d'aider l'industrie manufacturière, ce qui est en fait l'unique activité de la défenderesse. Plus précisément, cependant, la défenderesse soumet, et je cite:

1.      Les activités en cause se qualifient en vertu du paragraphe 5202 a) du Règlement parce qu'elles sont exercées dans le cadre des opérations ou de transformation comme faisant partie de la réception et de l'emmagasinage des matières premières.
     (1)      La récupération des matières premières par la défenderesse constitue une partie essentielle et intégrante de son entreprise de fabrication et de transformation1.
     (2)      De toute façon, l'expression "dans le cadre des opérations de fabrication ou de transformation" étend la liste des activités admissibles au-delà de celles apportant un changement dans la forme ou les caractéristiques d'un bien2.
     (3)      Lors du calcul du crédit de fabrication et transformation, on doit tenir compte de la théorie de "l'entreprise intégrée" en vertu de laquelle une étape particulière sera considérée comme étant exercée directement dans le cadre des opérations de fabrication ou de transformation lorsqu'elle constitue une partie essentielle et intégrante du processus de fabrication et transformation, et ce même si aucun changement dans la forme ou la caractéristique du bien ne survient au cours de cette étape3.
     (4)      La défenderesse n'ayant pas d'autres opérations que celle de fabriquer des biens pour fin de revente, il y a une présomption que toutes ses activités sont donc exercées dans le cadre de cette opération4.
     (5)      Et finalement, le paragraphe 5202 a) du Règlement n'exige pas qu'il y ait un lien direct entre l'activité en cause et les opérations de fabrication ou de transformation.
2.      Alternativement, les activités en cause se qualifient en vertu du paragraphe 5202 b) du Règlement à titre d'autres activités exercées directement dans le cadre des opérations de fabrication ou de transformation de la défenderesse. La défenderesse suggère: comment peut-il en être autrement puisqu'il s'agit de sa seule activité?
3.      De plus, les activités en cause ne sont pas incluses dans les exceptions prévues aux paragraphes 5202 c) à i) du Règlement; ces exceptions confirment la règle que les dispositions précédentes doivent avoir un sens très large puisqu'autrement, le législateur aurait parlé pour ne rien dire.
4.      Même si le transport ne se qualifiait pas comme activité admissible, le fait que l'équipement et la main-d'oeuvre en question soient partiellement utilisées à cette fin ne les disqualifie pas à titre d'équipement et de main-d'oeuvre utilisés dans des activités admissibles.5
5.      Contexte réglementaire: le Règlement sur les aliments, R.R.Q., 1981, c. P-29, r.1 (Chapitre 7), impose à l'industrie des conditions tout à fait particulières dans le transport, la manutention et la détention des produits, aussi bien qu'il impose des normes de construction et d'aménagement des ateliers.

[20]      La défenderesse soutient que sa flotte est constituée de véhicules exclusivement utilisés pour recueillir les matières premières sur une base régulière, et ces véhicules possèdent un équipement standardisé permettant la préparation et le tri des matières recueillies.

[21]      La défenderesse allègue qu'en plus de leurs responsabilités normales, ses opérateurs doivent peser les matières premières afin de s'assurer qu'elles rencontrent les critères de qualité requis, finaliser les billets de livraison, et voir à la manutention et au vidage des conteneurs.

[22]      Selon la défenderesse, elle a exclu du calcul du coût en main-d'oeuvre de fabrication et de transformation les salaires de ses trois employés qui sont responsables de l'achat des matières premières et des opérations qui y sont reliées.

[23]      La défenderesse soutient qu'à cause de la nature même des matières premières recueillies, et à cause de la réglementation sévère que lui imposent les autorités de la province de Québec, sous l'égide de la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments, les matières premières restent entreposées dans ses camions jusqu'au déchargement direct dans les différents systèmes de transformation.

[24]      La défenderesse allègue que ses opérations sont continues et intégrées, de sorte que les matières recueillies par camion le matin, sont transportées à l'usine, déversées dans les équipements de déshydratation et de raffinage, et deviennent le jour même un produit fini, destiné à la vente.

[25]      Ainsi, la défenderesse soumet que la cueillette des matières premières constitue des activités de réception et d'emmagasinage des matières premières au sens du sous-paragraphe 5202 a) ii) du Règlement. Dans le contexte d'une opération intégrée, la défenderesse maintient que le tri des matières, leur examen ainsi que les opérations effectuées lors du transport constituent de la production, de l'assemblage ou de la manutention au sens du sous-paragraphe 5202 a) iii) du Règlement. Finalement, il est évident, nous dit la défenderesse, que les activités mentionnées précédemment sont des activités exercées au Canada directement dans le cadre des opérations de fabrication ou de transformation au sens du paragraphe 5202 b) du Règlement.

La jurisprudence pertinente

[26]      Je me permets de résumer, dans la mesure du possible, la jurisprudence soumise par les parties:

1.      Harvey C. Smith Drugs Limited c. La Reine, 95 DTC 5026 (C.A.F.):
     La Cour d'appel juge que le fait de mélanger divers liquides ou composés fait pour remplir une ordonnance de médicament est considérée comme une activité de fabrication et de transformation. Cependant, l'exécution d'ordonnance consistant en la mise d'une étiquette sur des produits déjà dans leur contenant, la mise en plus petits contenants de pilules, capsules ou liquides achetés en vrac, et la mise d'une étiquette sur ces contenants, n'est pas considérée comme une activité de fabrication et de transformation.
2.      Midland Transport Limited c. La Reine, 94 DTC 1759:
     Dans ce dossier, il s'agissait de déterminer si une benne à copeaux était pour fins de fabrication et de transformation. La Couronne prétendait que la benne servait à l'emmagasinage ou l'expédition de produits finis, qui sont des activités expressément exclues. Monsieur le juge Bonner, cependant, s'appuyant entre autres, sur Bunge of Canada c. La Reine, 84 DTC 6276 (C.A.F.), et Warren Bituminous Paving Co. v. Corp. of Twp. of Otonnabee (1963), O.R. 29, jugeait que la prétention que la benne sert à l'entreposage était irréaliste, étant donné que lorsque l'on tient compte du taux de production et de la capacité de la benne, aucun copeau ne pouvait séjourner dans la benne pendant plus de deux heures.
3.      Highway Sawmills Limited c. M.R.N., 66 DTC 5116:
     Dans cette affaire (à la page 5120), il est dit: "La réponse à la question de savoir quel est l'impôt dû dépend, bien sûr, des termes de la loi qui l'a créé. Lorsque le sens de ces termes est difficile à déterminer, il peut être d'un grand secours de se demander laquelle des deux interprétations soumises donne un résultat conforme à l'esprit apparent de la loi."
4.      Hopkins Construction (Lacombe) Ltd. c. M.R.N., 84 DTC 1150:
     Dans cette affaire, il s'agissait de déterminer si une benne à chargement était directement utilisée pour la fabrication et la transformation de marchandises destinées à la vente. La Cour reconnaissait qu'il s'agissait tout simplement de l'usage d'une pièce d'équipement destinée à des services de transformation, mais nullement engagée dans la fabrication ou la transformation de marchandises destinées à la vente.
5.      Range Grain Company Ltd. v. La Reine, 97 DTC 5221:
     Mon collègue, le juge Wetston, jugeait que l'acte de préserver la qualité d'un article est inhérent à tout transport de marchandise, et qu'il ne s'agit pas du genre d'activités, i.e. fabrication et transformation, prévu à l'article 125.1 de la Loi.
6.      IGTC Ltd. c. M.R.N. [1982], CTC 2570:
     Dans cette affaire, il fut décidé que l'expression "dans le cadre de" ou "in connection with" n'exigeait pas que le contribuable ait toujours la possession physique ou le contrôle des biens sujets à l'étude. Je lis aussi dans les motifs du jugement de la Cour que les expressions citées méritent une interprétation qui est le plus conforme aux autres faits et circonstances de la cause.
7.      M.R.N. v. Amoco Canada Petroleum Company Limited [1986], 1 CTC 124:
     La Cour d'appel fédérale, sous la plume de Monsieur le juge Urie, statuait sur l'application de la taxe de vente sur la machinerie directement liée à la fabrication ou à la production de marchandise. La Cour ne voyait aucune raison d'interpréter cette disposition de façon restrictive. Effectivement, la pipeline en question pouvait servir de moyen de transport en plus de participer directement à la fabrication des différents hydrocarbures qu'elle renfermait.

Analyse

[27]      On pourrait croire que les parties en litige ont pu bénéficier des résultats du premier tour devant M. le juge Garon de la Cour canadienne de l'impôt, dont le jugement favorable à la contribuable était rendu le 5 février 1992. Je constate que les parties sont substantiellement d'accord sur les faits, les arguments touchant plutôt les différentes conclusions tirées sur ces faits, et les différentes formules d'interprétation apportées au Règlement en question. Je souligne ici que les cahiers d'étude soumis par les procureurs des parties m'apparaissent très bien préparés et me sont très utiles dans l'élaboration d'un jugement dans cette affaire.

[28]      Les documents publics ainsi que les recueils de jurisprudence produits par les parties contiennent des renseignements et une foule d'arrêts où les législateurs auraient imposé différentes formules de partage des opérations ou des équipements d'usine quand ils désiraient accorder un taux d'impôt préférentiel ou une exemption quelconque à certaines entreprises. Les exemples sont nombreux sous la Loi et sous les régimes de taxes d'accise, de douanes et de vente.

[29]      À l'analyse de cette jurisprudence, il devient facile de constater jusqu'à quel point les circonstances particulières dans chaque dossier sont étudiées en profondeur, et jusqu'à quel point la preuve produite par les parties devant moi m'apparaît substantiellement la même dont était saisi en première instance le juge Garon de la Cour canadienne de l'impôt. Cela n'est pas surprenant: les opérations en cours chez la défenderesse ne sont pas universellement connues et rares sont les articles de revues traitant d'ateliers d'équarrissage et de ce qui se passe derrières leurs murs. Encore plus rares sont les instances où la Cour doit en quelque sorte définir les éléments de la fabrication et de la transformation de produits bruts acheminés vers ces ateliers.

Conclusions

[30]      Qu'importe tous ces facteurs particuliers, la Cour doit tirer les conclusions suivantes:

1.      Je m'accorde avec les conclusions du juge Garon que des éléments de fabrication ou de transformation se rencontrent à compter de la possession des matières premières. Il importe peu, dans un sens, que ces éléments soient toujours évidents et actifs tout au long du parcours entre la charge et le débit. Je ne crois pas que dans l'interprétation de l'alinéa 5202(a)(ii), on doit imposer à la Cour un examen microscopique de chacun des gestes dans la manutention, le transport et la transformation, d'une minute à l'autre, des matières premières entre le chargement et le déchargement.
2.      Je reconnais et j'apprécie à sa juste valeur le geste de la demanderesse en concédant à la défenderesse 40% des salaires des employés préposés au transport des produits bruts. Cette marge, cependant, est limitée par l'application restreinte de l'alinéa 5202(a)(ii) qui parle de "réception et emmagasinage de matières premières". À mon humble avis, on doit permettre à l'alinéa 5202(a)(iii) d'exercer son rôle.

[31]      Je crois que la Cour devrait aussi reconnaître que les différentes dispositions de l'article 5202 du Règlement ne sont pas mutuellement exclusives. C'est ainsi que l'on doit étudier le texte de l'article dans son ensemble pour voir jusqu'à quel point une disposition particulière de l'article peut nous aider à mieux interpréter la portée d'une autre disposition particulière. Je donne comme exemple l'alinéa 5202(a)(ii) qui traite de "la réception et l'emmagasinage des matières premières", et de l'alinéa 5202(a)(iii) qui parle de "la production, l'assemblage et la manutention des marchandises en voie de transformation". Selon la preuve, les activités de la défenderesse en cueillant, en examinant et en chargeant les produits bruts dans des véhicules spécialisés, et les transportant à l'usine où ils sont vidés dans quelques heures, contiennent une foule d'éléments particuliers qu'on pourrait catégoriser sous une rubrique ou sous une autre.

[32]      Cette constatation pourrait bien servir de tremplin pour adopter la thèse de la défenderesse à l'effet qu'il s'agit d'une "opération intégrée" à la fabrication et à la transformation qui connaît ses débuts lors de la prise de possession des produits bruts et qui ne se termine qu'à la fin du processus, c'est-à-dire au stage des produits finis, vendus à des tiers.

[33]      Je suis le premier à reconnaître que le choix que nous offre le dossier n'est pas facile. Dans leur ensemble, cependant, les opérations de la défenderesse revêtent des aspects tout-à-fait particuliers, ou du moins, sont d'un genre que le législateur n'avait certes pas vu lorsqu'il a rédigé le Règlement en question. Des plus, les parties elles-mêmes reconnaîtront que les textes ne sont pas des modèles de rédaction, surtout lorsqu'on doit articuler non seulement les exceptions à la règle générale, mais aussi les exceptions aux exceptions. Dans de tels cas, la Cour ne peut qu'exercer son meilleur jugement.

[34]      Je dois donc rejeter l'appel de la demanderesse, avec dépens à la défenderesse. Je laisse aux parties, cependant, la responsabilité de rédiger le jugement formel dont les termes, hormis les engagements préalables par quiconque des parties, seront conformes à ces motifs. S'il y a désaccord, je demeure naturellement saisi du dossier, et je demanderais aux procureurs de bien vouloir m'en faire part.

     L-Marcel Joyal

    

     J U G E

OTTAWA, Ontario

le 26 août 1998.

__________________

     1      Le Soleil Limité v. M.R.N. [1972], CTC 244 (C.F. 1ère inst.); The St-Catherines Standard Limited v. La Reine, [1978] CTC 258 (C.F. 1ère inst.); Irving Oil Limited et al. v. Le secrétaire provincial de la province du Nouveau-Brunswick [1980], 1 R.C.S. 78; Indiiana Department of State Revenue v. Cave Stone Inc. [1983], 457 NE (2d) 520 (Cour suprême de l'Indiana); et State of Indiana v. Farmers Tankage, Inc. [1969] NE, (2d) 409 (Appellate Court de l'Indiana).

     2      Harvey C. Smith Drugs Ltd. v. M.R.N., [1986] 1 CTC 2339 (Cour canadienne de l'impôt); IGTC Ltd. v. M.R.N. [1982], CTC 2570 (Comm. de révision de l'impôt); et Midland Transport Limited v. La Reine, 94 DTC 1759.

     3      Compagnie Minière I.O.C. Inc. v. Le Sous-ministre du Revenu du Québec [1987], RDFQ 232 (Cour provinciale); Roy Legumex Inc. v. M.R.N. [1990], 2 CTC 2389 (Cour canadienne de l'impôt); Stora Kopparbergs Bergslags Aktiebolag v. Minister of Finance (Re) [1981], 119 DLR 76 (Cour suprême de la Nouvelle-Écosse); Joe E. Richardson v. State Tax Commission, [1979] Idaho, 604 P.2d 719 (Cour suprême de l'Idaho); Floyd Charcoal Company Inc. v. Director of Revenue [1980], 599, S.W. 2d 173 (Cour suprême du Missouri); Coca-Cola Ltd. v. M.R.N. et al [1985], 6 C.E.R. 90 (C.A.F.); M.R.N. v. Amoco Canada Petroleum Company Ltd. [1986], 1 CTC 124 (C.A.F.); et Shell Canada Resources Ltd. c. M.N.R. [1985], 6 CER 249 (C.A.F.)

     4      La Reine c. Veritas Seismic (1987) Ltd., 94 DTC 6123 (C.A.F.)

     5      Petro-Canada Inc. v. M.N.R. [1986], 9 CER 121 (C.A.F.).

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