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Date 19971118


Dossier : T-2003-96

ENTRE :


AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ,

L.R.C. (1985), ch. C-29


ET UN APPEL FORMÉ CONTRE

LA DÉCISION D"UN JUGE DE LA CITOYENNETÉ


ET


ERNEST KA HO WONG,


appelant.


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Wetston

[1] La demande de citoyenneté de M. Wong n"a pas été approuvée parce qu"il ne répondait pas aux conditions de résidence énoncées à l"alinéa 5(1) c) de la Loi sur la citoyenneté , L.R.C. (1985), ch. C-29. Cependant, le règlement de la présente affaire ne va pas de soi. Une note interne (en date du 17 septembre 1997) adressée par le directeur du Centre d"enregistrement de la citoyenneté au directeur du règlement des cas, à Ottawa (Ontario), à propos de cette affaire fait état des événements suivants :



                 [TRADUCTION]            
                 "      12 juin 1996 - le client comparaît devant le juge et rencontre un agent pour vérifier les documents et voir le permis de retour pour résident permanent            
                 "      Quelque part entre le 12 juin et le 5 juillet, le juge approuve la demande.            
                 "      5 juillet - l"agent ou le directeur n"accepte pas la décision du juge et prépare une note interne au greffier            
                 "      8 juillet - le directeur notifie au juge le renvoi à Ottawa, et le juge demande à revoir le dossier            
                 "      Quelque part entre le 8 juillet et le 12 juillet - le juge n"approuve pas la demande.            
                 ...            
                 _      J"ai depuis informé le juge ... que les dossiers douteux seront soumis directement au ministre sans qu"il les réexamine.            

[2] Par lettre en date du 16 juillet 1996, M. Wong a donc reçu avis de la décision du juge de la citoyenneté par laquelle la citoyenneté lui était refusée pour le motif qu"il ne répondait pas aux conditions de résidence.

[3] La note de service interne traite de la question de la résidence et mentionne expressément que le directeur était en désaccord sur ce point avec la décision du juge, et elle énonçait aussi, à propos de la question de la résidence, certains des principes de droit tirés de précédents de la Cour fédérale. Le directeur du Centre d"enregistrement de la citoyenneté croyait en effet que la date initiale à laquelle M. Wong a fait du Canada son lieu de résidence était le 26 juillet 1994, ce qui rendait prématurée d"environ 20 mois sa demande de citoyenneté. Il semble que la pratique normale est la suivante : lorsqu"un dossier doit être envoyé à Ottawa pour un appel interjeté contre la décision du juge, le juge est informé de ce fait. Ce qui semble s"être produit en l"espèce, c"est que la note de service interne a été versée dans le dossier et que, lorsque le juge a demandé le dossier, il a, à l"évidence, changé d"avis. Je dis cela parce que la note de service interne mentionne que, quelque part entre le 12 juin et le 5 juillet, le juge a approuvé la demande. On ne sait pas très bien ce qui a conduit le juge à changer d"avis, mais, ce qui est sûr, c"est qu"il semble avoir pris une décision, et la nouvelle décision faisait suite à un examen du dossier effectué avant la lettre de refus du 16 juillet 1996. Le directeur du Centre d"enregistrement de la citoyenneté a aussi noté que, à l"avenir, les dossiers douteux seraient soumis directement au ministre, sans que le juge les réexamine. Dans le présent appel, l"avocat du requérant a qualifié l"erreur d"entrave illicite à l"indépendance d"un juge de la citoyenneté. Selon lui, après avoir rendu sa décision initiale, le juge était dépouillé de sa fonction.

[4] J"ai examiné la Loi sur la citoyenneté et le Règlement sur la citoyenneté, y compris leurs modifications, pour déterminer ce que sont les pouvoirs et obligations d"un juge de la citoyenneté. Le paragraphe 14 (2) de la Loi sur la citoyenneté est rédigé ainsi :

            (2) ...            
            le juge de la citoyenneté approuve ou rejette la demande selon qu"il conclut ou non à la conformité de celle-ci ...            
                                     (c"est moi qui souligne)            

[5] Une demande de citoyenneté faite aux termes du paragraphe 5 (1) doit être étudiée par un juge de la citoyenneté (alinéa 14 (1) a)), lequel doit se demander si le candidat répond aux conditions indiquées dans la Loi et le Règlement. Essentiellement, les attributions d"un juge de la citoyenneté sont décrites dans les textes législatifs, et il s"agit d"attributions surtout judiciaires, en ce sens que les décisions qu"il rend sont rendues conformément à la loi. Le juge de la citoyenneté doit approuver ou rejeter la demande en conformité avec certains principes de droit. Qu"il puisse ou non tenir compte également de la politique administrative, c"est-à-dire des grandes questions d"intérêt public se rapportant à la citoyenneté, il n"est guère discutable que le juge approuve ou rejette la demande uniquement "selon qu"il conclut ou non à la conformité de celle-ci".

[6] Comme il est indiqué précédemment, l"avocat de l"appelant affirme que, après avoir rendu une décision favorable, le juge était dépouillé de sa fonction. Je suis d"avis que, une fois sa décision prise, le juge de la citoyenneté était dépouillé de sa fonction. Il aurait fallu, après cela, procéder par voie d"appel ministériel. Qu"il ait ou non été dépouillé de sa fonction ou qu"il ait ou non réexaminé inopportunément la décision, le juge de la citoyenneté a commis une erreur de droit. Le directeur du Centre d"enregistrement de la citoyenneté avait parfaitement raison d"indiquer, dans la note de service, que les dossiers discutables seraient transmis directement au ministre sans que le juge les réexamine. Je partage cette position. En d"autres termes, si le ministre est en désaccord avec la décision d"un juge de la citoyenneté, son seul recours est de faire appel de cette décision.

[7] Je sais que le présent appel est un appel par procès de novo, mais, puisque le juge de la citoyenneté était dépouillé de sa fonction, l"appel aurait dû être interjeté par le ministre et non par le requérant.


[8] Par conséquent, c"est contre la décision initiale du juge qu"appel aurait dû être interjeté. L"appel est accueilli.

                         H. Wetston

                     -----------------------------------------

                         juge

Toronto (Ontario)

le 18 novembre 1997

Traduction certifiée conforme

François Blais, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Avocats et procureurs inscrits au dossier

DOSSIER :

T-2003-96

INTITULÉ :

AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29

ET un appel formé contre la décision d"un juge de la citoyenneté

ET ERNEST KA HO WONG

DATE DE L"AUDIENCE :

LE 7 OCTOBRE 1997

LIEU DE L"AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE WETSTON

EN DATE DU:

18 NOVEMBRE 1997

ONT COMPARU :

M. Stephen W. Green,

                     pour l"appelant

M. Peter K. Large,

                     Amicus Curiae

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Green et Spiegel

2200-121, rue King ouest

Toronto (Ontario)

M5H 3T9

                     pour l"appelant

Peter K. Large

Avocat

610-372, rue Bay

Toronto (Ontario)

M5H 2W9

                     Amicus Curiae

                               COUR FÉDÉRALE DU CANADA
                               Date : 19971118
                               Dossier : T-2003-96
                               ENTRE :
                               AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,
                               L.R.C. (1985), ch. C-29
                               ET un appel formé contre la
                               décision d"un juge de la citoyenneté
                               ET ERNEST KA HO WONG,
                               appelant
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                               MOTIFS DU JUGEMENT
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