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                                                                                                         IMM-2659-96

 

 

Ottawa (Ontario), le vendredi 6 juin 1997

 

 

En présence de M. le juge Gibson

 

 

Entre :

 

                                        MANHAL ABED ORAHA,

                               DHAFIR NOONA, WAAD NOONA et

                                                NADIR YOUSEF,

 

                                                                                                               requérants,

 

                                                             - et -

 

    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                       LE SECRÉTAIRE D'ÉTAT,

 

                                                                                                                    intimés.

 

                                                  ORDONNANCE

 

 

 

La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

Les questions suivantes sont certifiées :

 

1.  Lorsqu'une personne demande à une ambassade canadienne de déterminer si elle est un réfugié au sens de la Convention, d'après la définition de la Loi sur l'immigration, qui cherche à se réétablir au Canada, la Loi sur l'immigration, et plus précisément les articles 44, 46.02 et 67 de la Loi confèrent-ils à la section du statut de réfugié au sens de la Convention de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié compétence exclusive  pour connaître et décider de la revendication de cette personne?

 

2.  Si la réponse à la question numéro 1 est négative, le requérant en l'espèce a-t-il bénéficié du degré exigé de justice naturelle et d'équité procédurale dans le règlement de sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention?

 

 

                                                                                    FREDERICK E. GIBSON

                                                                       

 

                                                                                       Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme                       

                                                                        Laurier Parenteau


 

 

 

 

 

                                                                                                         IMM-2659-96

 

 

Entre :

 

 

                                        MANHAL ABED ORAHA,

                               DHAFIR NOONA, WAAD NOONA et

                                                NADIR YOUSEF,

 

                                                                                                             requérants,

 

 

                                                             - et -

 

 

    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                       LE SECRÉTAIRE D'ÉTAT,

 

                                                                                                                    intimés.

 

 

 

                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

 

 

 

LE JUGE GIBSON

 

            Les présents motifs se rapportent à une demande de contrôle judiciaire d'une décision d'un agent des visas à Rome (Italie) rejetant la demande d'immigration au Canada, dans la catégorie des réfugiés au sens de la Convention cherchant à se réétablir, de Manhal Abed Oraha (le «requérant principal»).  La décision est datée du 25 mars 1996.

 

            Le requérant principal est citoyen iraquien.  Les trois co-requérants ont parrainé sa demande d'immigration au Canada.

 

            L'agent des visas, dans la lettre lui faisant part de la décision à l'étude, écrit ceci :

 

[TRADUCTION]

Après avoir examiné avec soin et sympathie tous les facteurs ayant trait à votre demande, j'ai conclu que vous ne répondez pas à cette définition [la définition de «réfugié au sens de la Convention» donnée à l'article 2 de la Loi sur l'immigration[1]].  Un agent d'immigration principal a souscrit à cette décision.

 

 

            En fait, l'agent des visas, ayant déterminé que le requérant principal n'était pas un réfugié au sens de la Convention, a inévitablement conclu qu'il ne pouvait faire partie de la catégorie désignée des «réfugiés au sens de la Convention cherchant à se réétablir».

 

            Dans l'affidavit déposé pour les fins de la présente demande, l'agent des visas atteste en partie de ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

4.             Comme je le fais habituellement au cours de toutes les entrevues relatives à des réfugiés, j'ai examiné les renseignements que M. Oraha avait fournis dans sa demande [...] et dans son questionnaire relatif aux réfugiés [...]

 

5.             M. Oraha m'a dit qu'il était chrétien.  Ses problèmes ont commencé en 1987 quand les membres du parti Baath ont essayé de l'obliger à se joindre au parti.  Devant son refus, ils l'ont accusé de s'être joint à un mouvement chrétien opposé au gouvernement.

 

6.             M. Oraha prétend avoir été arrêté, détenu et maltraité à plusieurs reprises par la suite parce qu'on le soupçonnait d'être opposé au régime iraquien.  Il a chaque fois été libéré.  M. Oraha m'a dit que l'incident qui a précipité sa décision de quitter l'Irak en août 1993 était son arrestation et sa détention pendant cinq mois par les agents de sécurité en mars 1993.  Ils l'ont accusé d'avoir aider un groupe terroriste kurde à voler une voiture et à la vendre à quelqu'un qui était engagé dans le groupe.  La voiture a ultérieurement été utilisée pour passer en contrebande de la nourriture et des fournitures médicales aux Kurdes.  M. Oraha prétend qu'il a été maltraité pendant sa période de détention.  Il a été libéré en août 1993 sous cautionnement et on lui a dit qu'il subirait son procès à une date ultérieure.

 

7.             Je ne trouve pas le récit de M. Oraha plausible.  Étant donné la nature du régime iraquien, le traitement auquel une personne que l'on soupçonne d'être opposée au régime peut s'attendre est un emprisonnement de longue durée ou la mort; pourtant, M. Oraha prétend avoir été libéré à plusieurs reprises après des périodes de détention relativement brèves.  En outre, pour ce qui a trait à sa dernière période de détention, quand on l'a accusé d'appuyer les terroristes kurdes, il prétend avoir été libéré sous «cautionnement» en attendant son procès.  À mon avis, cet élément de son récit est beaucoup trop improbable pour être cru, si M. Oraha a réellement été accusé de soutenir les terroristes kurdes.

 

8.             En outre, M. Oraha est demeuré en Irak pendant cinq ans après le début de ses présumées difficultés avec les autorités.  À mon avis, demeurer dans un pays où l'on prétend être persécuté pendant cinq ans avant de décider de le quitter est un comportement tout à fait incompatible avec une crainte fondée d'être persécuté.

 

9.             Compte tenu de ce qui précède, j'ai conclu que les déclarations de M. Oraha en général, et en particulier sa déclaration concernant sa crainte subjective d'être persécuté, manquaient de crédibilité.  Je crois qu'il a tout au plus souffert de cette forme générale de discrimination dont tous les Iraquiens (chrétiens ou musulmans) qui ne sont pas membres du parti Baath peuvent être victimes.  Toutefois, à mon avis, cela ne suffit pas en soi pour constituer de la persécution.  Il est également bien connu qu'en Irak les Chrétiens, malgré qu'ils soient une minorité, sont libres de pratiquer leur religion, peuvent détenir des postes de très haut niveau dans la vie politique (par exemple, Tariq Aziz, le ministre des Affaires étrangères) et peuvent obtenir la protection de l'État.  Par conséquent, même si M. Oraha m'avait convaincu qu'il avait une crainte subjective d'être persécuté, je n'aurais pu conclure que cette crainte était objectivement fondée.

 

10.          Compte tenu de ce qui précède, j'ai informé M. Oraha que j'allais vraisemblablement refuser sa demande étant donné que je ne pouvais conclure, d'après le dossier dont j'étais saisi, qu'il avait raison de craindre d'être persécuté en Irak pour l'un ou plusieurs des motifs pertinents aux revendications du statut de réfugié au sens de la Convention.  Toutefois, à la demande de M. Oraha, j'ai accepté d'attendre une déclaration écrite plus détaillée de sa part, énonçant tous les incidents sur lesquels il a fondé sa revendication, avant de prendre ma décision définitive.  M. Oraha m'a effectivement fait parvenir cette déclaration écrite, en date du 11 mars 1996, après l'entrevue [...].  Après avoir soigneusement examiné cette déclaration, j'étais toujours d'avis qu'elle ne contenait pas de nouveaux renseignements justifiant la modification de ma décision ou de mon évaluation négative concernant sa crédibilité.  Par conséquent, j'ai refusé la demande de M. Oraha dans une lettre datée du 25 mars 1996 [...]

 

11.          Pour ce qui a trait au paragraphe 5 de l'affidavit de Waad Noona, en date du 18 juillet 1996, je nie que l'entrevue de M. Oraha n'a duré que dix minutes.  Je ne me souviens pas d'avoir jamais tenu une entrevue sur une revendication du statut de réfugié qui ait duré dix minutes.  Habituellement, ces entrevues prennent de trente minutes à une heure.  Au mieux de mes souvenirs, l'entrevue de M. Oraha a duré trente minutes.

 

 

L'agent des visas n'a pas été contre-interrogé sur son affidavit.

 

            Les observations écrites du requérant principal dont il est question au paragraphe 10 de l'affidavit de l'agent des visas figurent dans le dossier du tribunal dont j'étais saisi et comprennent quatre pages et demie de renseignements soigneusement manuscrits.  Elles décrivent en détail quatre périodes de détention et des abus physiques et psychologiques entre novembre 1987 et août 1993.  Peu après la dernière période de détention, le requérant principal a quitté l'Irak pour la Grèce, en passant par la Turquie.

 

            L'avocat des requérants soulève trois questions : premièrement, la procédure en vertu de laquelle les revendications du statut de réfugié sont déterminées à l'étranger contrevient-elle à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés[2] et à la décision de la Cour suprême du Canada dans Singh c. Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration[3]; deuxièmement, la procédure suivie est-elle ultra vires du régime législatif énoncé dans la Loi sur l'immigration; et troisièmement, d'après les faits dont il disposait, l'agent a-t-il fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées et tiré des inférences non fondées sur la preuve et ignorant totalement la preuve.  Aucun avis de question constitutionnelle n'a été signifié au procureur général du Canada et à ceux des provinces conformément à l'article 57 de la Loi sur la Cour fédérale[4].

 

            Dans la décision Jallow c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration[5], le juge Rouleau était saisi d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision semblable d'un agent canadien des visas à Rome (Italie).  Les questions posées dans cette affaire au nom du requérant, également citoyen irakien, étaient essentiellement les mêmes que les questions en l'espèce.  Je suis convaincu que le règlement en l'espèce devrait être le même que celui de l'affaire Jallow, c'est-à-dire que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée.

 

            Étant donné qu'il n'y a pas eu d'avis aux termes de l'article 57 de la Loi sur la Cour fédérale, l'argument alléguant qu'il y a eu contravention à l'article 7 de la Charte a été converti devant la Cour en un argument alléguant que la procédure suivie dans cette affaire constitue un manquement aux principes de justice naturelle et à l'obligation d'agir équitablement.  Dans les motifs qu'il a énoncés dans Jallow, le juge Rouleau indique ceci :

 

Un immigrant éventuel doit répondre en toute franchise à un agent des visas.  La décision de cet agent est purement administrative; il dispose d'une latitude considérable dans l'exercice de son pouvoir et il jouit d'une large discrétion.  Son pouvoir n'est pas sans limite, puisque l'agent est tenu de se conformer à la Loi sur l'immigration et a l'obligation d'agir équitablement.  Il doit fournir au requérant la possibilité d'être entendu, si possible, et de déposer des documents à l'appui de sa demande.

 

 

Sans nécessairement adopter la description donnée par le juge Rouleau de la décision à l'étude, j'accepte qu'un agent des visas, dans des affaires comme celle qui nous occupe, est tenu de se conformer à la Loi sur l'immigration et a l'obligation d'agir équitablement.  Cette obligation d'agir équitablement est, je pense, quelque peu limitée comparativement à celle qui est due aux revendicateurs du statut de réfugié qui présentent leur demande à l'intérieur du Canada du fait que des personnes comme le requérant principal ne se trouvent pas au Canada et ne courent donc pas le risque d'être expulsées par les autorités canadiennes vers le pays où elles craignent d'être persécutées, si leurs revendications sont refusées.  En l'espèce, comme dans Jallow, le requérant principal a eu une audience.  D'après la preuve dont je suis saisi, je ne trouve aucun fondement me permettant de conclure que l'audience n'a pas été complète et équitable.  L'agent des visas a informé le requérant principal de sa conclusion préliminaire.  En réponse à une demande du requérant principal, l'agent des visas a différé sa décision définitive jusqu'à ce que le requérant principal ait eu la possibilité de lui fournir des observations supplémentaires écrites très détaillées.  J'accepte la déclaration de l'agent des visas indiquant qu'il a tenu compte de ces observations.  Le fait que l'agent des visas ait demandé l'approbation d'un agent d'immigration principal avant de communiquer sa décision au requérant, comme en fait il était tenu de le faire, ne porte aucunement atteinte à l'équité de la procédure.  L'agent d'immigration principal, qui n'était pas partie à l'audience accordée au requérant principal, n'a pas pris la décision ou, selon les documents dont je suis saisi, ne l'a en aucune façon influencée.  Il a simplement souscrit à la décision de l'agent des visas qui, après avoir entendu le requérant principal, a examiné les observations fournies et a tiré ses propres conclusions.

 

            Quant à la question de l'incidence de la décision Singh, je ne peux faire mieux que de citer les motifs du juge Rouleau dans Jallow :

 

En examinant l'arrêt Singh [...] il me semble évident que la procédure qui a été mise en place au Canada ne s'applique pas aux personnes qui présentent leurs demandes à l'étranger.  Le juge Wilson insiste à plusieurs reprises dans ses motifs sur l'obligation d'équité qui incombe aux décideurs, mais il m'apparaît très clairement que les autres conséquences qui découlent de la décision ne s'appliquent qu'aux revendicateurs du statut de réfugié qui se trouvent au Canada.  Dans le premier paragraphe à la page 184, elle écrit ceci :

 

La question soulevée dans ces pourvois est de savoir si la procédure énoncée dans la Loi sur l'immigration de 1976, 1976-77 (Can.), chap. 52 et ses modifications, pour statuer sur les revendications du statut de réfugié au Canada empêche les personnes qui revendiquent ce statut de faire valoir les droits qui leur sont reconnus par l'art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.

 

                                                                                (non souligné dans l'original)

 

Et elle ajoute ceci :

 

Celle-ci [la Cour] devrait d'abord décider si les personnes qui revendiquent le statut de réfugié et se trouvent au Canada ont droit à la protection de l'art. 7 de la Charte.

 

[...] La Loi prévoit la présentation d'une revendication du statut de réfugié visée par l'art. 45 dans le cadre d'une enquête, ce qui présuppose que la personne qui revendique le statut de réfugié se trouve au Canada et relève des autorités canadiennes.  La Loi et le Règlement envisagent l'établissement au Canada des réfugiés qui sont à l'étranger mais les observations qui suivent ne concernent pas ces personnes.

 

[...] je suis disposée à accepter que ce mot englobe tout être humain qui se trouve au Canada et qui, de ce fait, est assujetti à la loi canadienne.

 

                                                                                (non souligné dans l'original)

 

 

Les modifications qui ont par la suite été apportées à la loi canadienne sur l'immigration n'ont pas eu d'incidence sur la procédure de détermination des revendications du statut de réfugié au sens de la Convention pour des personnes qui se trouvent à l'extérieur du Canada et la décision Singh ne contient absolument aucune observation défavorable sur cette procédure.

 

            L'avocat prétend que, lorsqu'un revendicateur du statut de réfugié se présente à une ambassade canadienne à l'étranger en vue d'une entrevue concernant sa revendication, il devient effectivement une personne qui réclame le statut de réfugié au Canada et que, par conséquent, les principes énoncés dans Singh s'appliquent.  Je ne peux retenir cet argument.  Des personnes comme le requérant principal déposent leurs demandes à l'extérieur du Canada ou, au moment du dépôt, sont à l'extérieur du Canada.  Le fait qu'elles puissent brièvement se trouver dans une ambassade canadienne pour les fins d'une entrevue ou pour toute autre fin connexe, ne peut en aucun cas en faire des personnes qui réclament le statut de réfugié à l'intérieur du Canada.  En l'espèce, la décision de l'agent des visas a été adressée au requérant principal en Grèce.

 

            Finalement, je ne trouve aucun fondement qui me permette de conclure que la décision de l'agent des visas qui est à l'étude, d'après les pièces dont il était saisi et l'entrevue qu'il a menée, est abusive ou arbitraire ou qu'elle a été prise sans tenir compte des éléments dont il était saisi et du contenu de l'entrevue.  L'agent des visas a conclu que le récit du requérant principal n'était pas plausible.  Dans l'extrait de son affidavit cité ci-dessus, il explique les fondements de ses conclusions relatives à ce manque de plausibilité.  On ne peut dire que ces fondements sont incompatibles avec les éléments dont il était saisi.  Dans Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration)[6], le juge Décary écrit ceci :

 

Il ne fait pas de doute que le tribunal spécialisé qu'est la section du statut de réfugié a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d'un témoignage.  Qui, en effet, mieux que lui, est en mesure de jauger la crédibilité d'un récit et de tirer les inférences qui s'imposent?  Dans la mesure où les inférences que le tribunal tire ne sont pas déraisonnables au point d'attirer notre intervention, ses conclusions sont à l'abri du contrôle judiciaire.

 

 

Je suis convaincu qu'on peut dire la même chose du rôle des agents des visas qui décident des revendications du statut de réfugié au sens de la Convention à l'extérieur du Canada.   Je ne peux conclure que la décision de l'agent des visas concernant le manque de plausibilité dans cette affaire est déraisonnable au point d'attirer l'intervention de la Cour.

 

            Par conséquent, cette demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

            À la fin de l'audience ayant trait à cette affaire, il a été convenu que je distribuerais des motifs préliminaires et donnerais aux avocats la possibilité de présenter des observations écrites concernant la certification d'une ou de plusieurs questions.  Les motifs préliminaires ont été remis aux avocats.  L'avocat des requérants prétend que deux questions devraient être certifiées dans les termes suivants :

 

1.             La Loi sur l'immigration s'applique-t-elle aux décisions prises par des agents des visas aux ambassades canadiennes, concernant des ressortissants étrangers, qui demandent à être reconnus comme réfugiés au sens de la Convention; plus précisément, les fonctions des agents des visas (agents d'immigration) s'appliquent-elles et la CISR conserve-t-elle la compétence «exclusive» pour se prononcer sur le statut de réfugié au sens de la Convention dans les ambassades canadiennes?

 

2.             Si la réponse à la question 1 est négative, la procédure employée par les agents des visas dans les ambassades canadiennes :

 

a)  est-elle assujettie à la décision Singh de la CSC; et

 

b)  si la réponse au paragraphe b) [sic] est positive, la procédure suivie est-elle conforme à l'arrêt Singh?

 

 

L'avocat des requérants fait instamment valoir que ces deux questions devraient être certifiées parce qu'elles énoncent des questions graves de portée générale.

 

            Dans l'arrêt Liyanagamage c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[7], le juge Décary écrit ceci :

 

Lorsqu'il certifie une question sous le régime du paragraphe 83(1), le juge des requêtes doit être d'avis que cette question transcende les intérêts des parties au litige, qu'elle aborde des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale [...] et qu'elle est aussi déterminante quant à l'issue de l'appel.

 

 

            L'avocat de l'intimé fait valoir qu'aucune grave question de droit n'a été soulevée à l'audience devant moi contestant [TRADUCTION] «la procédure de décision à l'étranger concernant les personnes faisant partie de la catégorie désignée des "réfugiés au sens de la Convention cherchant à se réétablir" et qu'aucune ne peut être formulée en vue d'un appel».  Quant à la deuxième question, l'avocat de l'intimé est d'avis que, à l'audition de la présente demande, le requérant a laissé tomber l'argument selon lequel la procédure en question ne respectait pas l'article 7 de la Charte ou l'arrêt Singh et, comme il est indiqué dans ces motifs, a fondé ses arguments [TRADUCTION] «[...] sur l'obligation de respecter l'équité procédurale dans le contexte du processus de décision en question».

 

            Bien que j'accepte généralement la position de l'avocat de l'intimé sur les deux questions, je suis d'avis que cette affaire soulève effectivement des questions appropriées aux fins de la certification au regard du critère énoncé dans Liyanagamage, bien que dans des termes différents de ceux proposés par l'avocat du requérant.  Les questions suivantes seront donc certifiées :

 

1.  Lorsqu'une personne demande à une ambassade canadienne de déterminer si elle est un réfugié au sens de la Convention, d'après la définition de la Loi sur l'immigration, qui cherche à se réétablir au Canada, la Loi sur l'immigration, et plus précisément les articles 44, 46.02 et 67 de la Loi confèrent-ils à la section du statut de réfugié au sens de la Convention de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié compétence exclusive  pour connaître et décider de la revendication de cette personne?

 

2.  Si la réponse à la question numéro 1 est négative, le requérant en l'espèce a-t-il bénéficié du degré exigé de justice naturelle et d'équité procédurale dans le règlement de sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention?

 

 

 

 

                                                                                    FREDERICK E. GIBSON

                                                                       

 

                                                                                       Juge

Ottawa (Ontario)

le 6 juin 1997

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme                       

 

                                                                        Laurier Parenteau


 

 

 

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

 

AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

N° DU GREFFE :IMM-2659-96

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :MANHAL ABED ORAHA et al. c.

M.C.I., S.E.C.

 

LIEU DE L'AUDIENCE :Toronto (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               le 13 mai 1997

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : le juge Gibson

 

DATE :                                               le 6 juin 1997

 

 

 

ONT COMPARU :

 

 

Rocco Galati                                                   POUR LE REQUÉRANT

 

Stephen H. Gold                                             POUR L'INTIMÉ

 

 

 

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Rocco Galati                                                   POUR LE REQUÉRANT

Toronto (Ontario)

 

 

George Thomson                                             POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada



     [1]L.R.C. (1985), ch. I-2

     [2]Loi constitutionnelle de 1982, L.R.C. (1985), appendice II, no 44 (qui est l'annexe B de la Loi du Canada de 1982 (R.-U.), ch. 11.

     [3][1985] 1 R.C.S. 177

     [4]L.R.C. (1985), ch. F-7

     [5]No du greffe IMM-2679-95, le 6 novembre 1996 (non publiée) (C.F. 1re inst.)

     [6](1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)

     [7](1994), 176 N.R. 4 (C.A.F.)

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