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     Date: 20010126

     Dossier: T-1922-99


Entre :

     ALIMENTS DORCHESTER INC., maintenant connue

     sous le nom de EXCELDOR COOPÉRATIVE AVICOLE

     Demanderesse

     - et -


     MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET

     DU COMMERCE EXTÉRIEUR

     Défenderesse




     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE PINARD :

[1]      La présente demande de contrôle judiciaire vise deux décisions du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (le « Ministère » ). La première décision, rendue le 29 juillet 1999, a pour effet de refuser d'attribuer à Exceldor Coopérative Avicole ( « Exceldor » ) une part du contingent tarifaire (le « CT » ) du poulet pour 1999 qui est alloué aux transformateurs de poulets dont les produits ne sont pas inscrits sur la « Liste des marchandises d'importation contrôlée » (la « LMIC » ), selon l'Avis aux importateurs no 577 du 9 novembre 1998. La seconde décision, rendue le 26 janvier 2000, est à l'effet de refuser à Exceldor une part du CT du poulet pour 2000 qui est alloué aux transformateurs de poulets dont les produits ne sont pas inscrits sur la LMIC, selon l'Avis aux importateurs no 593 du 29 octobre 1999.

[2]      La demanderesse soutient avoir droit à ces quotas d'importation requis par Exceldor, vu les termes de l'alinéa 2(1)b) de l'Arrêté sur la méthode d'allocation de quotas (volaille et produits de volaille), DORS/96-388 (15 juillet 1996) ( « l'Arrêté » ). Cet arrêté est autorisé par l'alinéa 6.2(2)a) de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation, L.R.C. (1985), ch. E-19.

[3]      Il est utile de reproduire ici les dispositions pertinentes suivantes de cette loi et de cet arrêté :

Loi sur les licences d'exportation et d'importation, L.R.C. (1985), ch. E-19 :

6.2 (1) Where any goods have been included on the Import Control List for the purpose of implementing an intergovernmental arrangement or commitment, the Minister may determine import access quantities, or the basis for calculating them, for the purposes of subsection (2) and section 8.3 of this Act and for the purposes of the Customs Tariff.


(2) Where the Minister has determined a quantity of goods under subsection (1), the Minister may

     (a) by order, establish a method for allocating the quantity to residents of Canada who apply for an allocation; and
     (b) issue an allocation to any resident of Canada who applies for the allocation, subject to the regulations and any terms and conditions the Minister may specify in the allocation.

(3) The Minister may consent to the transfer of an import allocation from one resident of Canada to another.

6.2 (1) En cas d'inscription de marchandises sur la liste des marchandises d'importation contrôlée aux fins de la mise en oeuvre d'un accord ou d'un engagement intergouvernemental, le ministre peut, pour l'application du paragraphe (2), de l'article 8.3 et du Tarif des douanes, déterminer la quantité de marchandises visée par le régime d'accès en cause, ou établir des critères à cet effet.

(2) Lorsqu'il a déterminé la quantité des marchandises en application du paragraphe (1), le ministre peut :

     a) établir, par arrêté, une méthode pour allouer des quotas aux résidents du Canada qui en font la demande;
     b) délivrer une autorisation d'importation à tout résident du Canada qui en fait la demande, sous réserve des conditions qui y sont énoncées et des règlements.

(3) Le ministre peut autoriser le transfert à un autre résident de l'autorisation d'importation.

Arrêté sur la méthode d'allocation de quotas (volaille et produits de volaille), DORS/96-388 :

1. The following definitions apply in this Order.

[. . .]

"process" means to slaughter chicken, to cut up eviscerated chicken or to further process. It includes to manufacture products such as patties, nuggets, fingers, rolls or roasts produced from chicken meat. (transformer)

"processor" means a processor who has processed at least 220,000 kg of chicken and chicken products at its own or rented facilities during the reference period. (transformateur)

1. Les définitions qui suivent s'appliquent au présent arrêté.

[. . .]

« période de référence » Période de douze mois commençant le 1er septembre et se terminant le 31 août qui précède l'année civile à laquelle s'applique l'autorisation d'importation. (reference period)

[. . .]

« transformateur » Transformateur qui a transformé au moins 220 000 kg de volaille et de produits de volaillereference period" in respect of an import allocation, means the 12-month period beginning on the September 1 and ending on the August 31 before the calendar year to which the import allocation applies. (période de référence)

[. . .]



2. (1) Subject to subsections (2) and (3), the method for allocating the import access quantity for chicken and chicken products that may be imported into Canada in a calendar year is as follows:

     [. . .]
     (b) an applicant who is a processor of chicken-based products not on the Import Control List shall receive a share of the import access quantity that is equal, on an eviscerated chicken equivalent basis, to the amount of chicken and chicken products the processor used in producing those chicken-based products during the reference period;
     [. . .]
     (f) an applicant who is a processor shall receive a share of 70% of the remaining portion of the import access quantity on a market-share basis after distribution to the applicants referred to in paragraphs (a) to (d), which shall not be less than 60,686 kg; and

dans ses propres installations ou des installations louées, durant la période de référence. (processor)

« transformer » Abattre la volaille, découper la volaille éviscérée ou la transformer en produits de second cycle, y compris la fabrication de produits tels que les petits pâtés, les croquettes, les doigts, les roulés ou les rôtis fabriqués avec de la chair de volaille. (process)

[. . .]

2. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), la méthode d'allocation des quotas quant à la quantité de volaille et de produits de volaille visée par le régime d'accès en cause qui peut être importée au Canada au cours d'une année civile est la suivante :

     [. . .]
     b) le requérant qui est un transformateur de second cycle de produits de volaille non inscrits sur la Liste des marchandises d'importation contrôlée reçoit un quota égal, en équivalent de volaille éviscérée, à la quantité de volaille et de produits de volaille qui a été nécessaire à la production de ces marchandises durant la période de référence;
     [. . .]
     f) le requérant qui est un transformateur reçoit, sur les 70% du solde de la quantité visée par le régime d'accès, après distribution aux requérants visés aux alinéas a) à d), une part non inférieure à 60,686 kg et proportionnelle à sa part de marché;


[4]      Dans sa première demande de quota à l'importation du 15 décembre 1998 (pour l'année 1999), Exceldor a informé le Ministère que la compagnie Aliments Dorchester Inc. allait cesser ses activités le 31 janvier 1999. En donnant cette information, Exceldor se conformait aux « Instructions pour la présentation d'une demande de quote-part » contenues à l'Annexe 1 de l'Avis aux importateurs no 577 publié en marge du processus législatif de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation. En effet, l'article 2 de cet annexe 1 comporte l'instruction suivante :

         Les sociétés doivent préciser si la fabrication du produit se poursuit au moment de la demande.


[5]      Dans cette même demande du 15 décembre 1998, Exceldor précisait en outre :

         . . . Exceldor, Coopérative Avicole est issu de la fusion des coopératives : La Coopérative de Dorchester et la Société Coopérative Avicole Régionale. Ces coopératives détenaient et détiennent encore aujourd'hui 100% des actions de la compagnie Aliments Dorchester Inc..


[6]      Effectivement, la compagnie Aliments Dorchester Inc. a, tel qu'annoncé, cessé ses activités le 31 janvier 1999. Les parties, par ailleurs, admettent qu'Exceldor, en tout temps pertinent, bien qu'ayant été un transformateur de volaille et de produits de volaille, n'a jamais été « un transformateur de second cycle de produits de volaille non inscrits sur la liste des marchandises d'importation contrôlée » au sens de l'alinéa 2(1)b) de l'Arrêté.

[7]      C'est dans ce contexte factuel fondamental qu'il importe de considérer les prétentions des parties en cause.

[8]      D'une part, la demanderesse soutient que pour obliger le Ministère à attribuer à Exceldor les quotas d'importation demandés, il était suffisant d'établir, comme cela a été fait, qu'Aliments Dorchester Inc. était un transformateur qui, au cours de chacune des deux périodes de référence applicables, soit celles du 1er septembre 1997 au 31 août 1998 et du 1er septembre 1998 au 31 août 1999, avait utilisé au moins 220,000 kilogrammes de volaille et de produits de volaille à titre d'intrant dans la production de produits non inscrits sur la liste des marchandises d'importation contrôlée.

[9]      D'autre part, la défenderesse plaide que les définitions de « période de référence » , de « transformateur » et de « transformer » contenues à l'article 1 de l'Arrêté ne sont pas, comme le prétend la demanderesse, utiles à l'interprétation de la disposition sur laquelle s'appuie cette dernière, soit l'alinéa 2(1)b) du même arrêté. La défenderesse soutient notamment qu'il ne peut être fait abstraction de la présence du mot « est » dans cette dernière disposition, mot qui ajoute une condition qui n'est pas contenue à la définition de « transformateur » , soit la nécessité d'une production continue au moment de la demande. La défenderesse ajoute que si la personne requérant les quotas à l'importation a cessé de produire avant l'attribution des quotas demandés, elle ne saurait avoir droit à ceux-ci.

[10]      Je pense que pour disposer du litige, il est utile et nécessaire de tenir compte du contexte législatif pertinent. L'alinéa 2(1)b) sur lequel s'appuie la demanderesse fait partie d'une méthode d'allocation des quotas contenue dans un arrêté qui a été adopté en vertu de l'alinéa 6.2(2)a) de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation. Or, ce même article 6.2, à son paragraphe (3), accorde au ministre le pouvoir discrétionnaire d'autoriser le transfert à un autre résident de l'autorisation d'importation. C'est donc dire que le refus par le ministre d'autoriser semblable transfert est inattaquable si le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, sa décision ne devant pas être fondée sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi lui conférant ce pouvoir discrétionnaire (voir Maple Lodge Farms c. Gouvernement du Canada, [1982] 2 R.C.S. 2, aux pages 7 et 8).

[11]      L'Arrêté, à son alinéa 2(1)f) prévoit aussi une méthode d'allocation des quotas différente pour un simple transformateur qui n'est pas décrit comme étant un transformateur de second cycle. Cela implique qu'un simple transformateur qui n'est pas un transformateur de second cycle ne saurait avoir droit aux quotas d'importation prévus à l'alinéa 2(1)b) de l'Arrêté.

[12]      Comme il ressort des faits de la présente cause que le requérant des quotas à l'importation pour les années 1999 et 2000 est Exceldor, un transformateur qui n'était pas et n'est pas, directement ou indirectement, un transformateur de second cycle au sens de l'alinéa 2(1)b) de l'Arrêté, je suis d'avis qu'il s'agit là d'un motif à lui seul suffisant pour entraîner le rejet de la demande de contrôle judiciaire.

[13]      Considérant en outre qu'Aliments Dorchester Inc. constitue une personne morale distincte et que celle-ci a cessé toute production le 31 janvier 1999, les quotas d'importation requis pour le reste de l'année 1999 et pour l'année 2000 ne pouvaient être utilisés sans d'abord être transférés, avec le consentement du « ministre » , par ou pour Aliments Dorchester Inc. à un autre « résident » qualifié, tel que prévu au paragraphe 6.2(3) de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation. Comme semblable transfert n'a jamais été sollicité et qu'il n'a de toute façon jamais fait l'objet d'un consentement du ministre responsable, les quotas d'importation demandés par Exceldor ne pouvaient être attribués. D'ailleurs, permettre semblable transfert, alors qu'Exceldor n'a été et n'est d'aucune façon un transformateur de second cycle, aurait été à l'encontre de l'Arrêté qui, à son alinéa 2(1)f), prévoit une méthode d'allocation de quotas différente pour les autres « transformateurs » .

[14]      Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée, avec dépens.

                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 26 janvier 2001

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