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Date : 19990304


T-85-97

E n t r e :

     SIERRA CLUB DU CANADA, organisme national voué à la protection

     et à la restauration de l'environnement et organisme à but

     non lucratif dûment constitué par lettres patentes le

     27 avril 1992 sous le régime de la Loi sur la corporation

     commerciale canadienne et dont le siège social est situé au
     1, rue Nicholas, bureau 412, à Ottawa (Ontario) K1N 7B7,

     demanderesse,

     - et -

     MINISTRE DES FINANCES DU CANADA,

         dont le bureau principal est situé à la Chambre des communes,

     pièce 515-S, édifice du Centre, Ottawa (Ontario) K1A 0A6,

         - et -
     MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DU CANADA,
         dont le bureau principal est situé à la Chambre des communes,
     pièce 418-N, édifice du Centre, Ottawa (Ontario) K1A 0A6,
              - et -
     MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL DU CANADA,
         dont le bureau principal est situé à la Chambre des communes,
     pièce 365, édifice de l'Ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0A6,
         - et -
         PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,
     ayant son bureau principal au 239 de la rue Wellington,
     à Ottawa (Ontario) K1A 0H8 et un bureau à Montréal, au
     Complexe Guy-Favreau, 200, boul. René-Levesque Ouest,
     Tour Est, 9e étage, Montréal (Québec) H2Z 1X4,

     défendeurs,

                         - et -

ÉNERGIE ATOMIQUE DU CANADA LIMITÉE,

     intervenante.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE

[1]      Les présents motifs font suite à deux requêtes connexes. La requête de la demanderesse vise à obtenir la production, dans un délai raisonnable avant le contre-interrogatoire des déposants, de documents qui sont mentionnés dans les deux affidavits qui ont été déposés par l'intervenante, Énergie Atomique du Canada Limitée (EACL), mais qui n'y sont pas annexés. Pour sa part, EACL sollicite notamment, dans sa requête, une ordonnance la dispensant de produire tout document se trouvant en la possession, sous la garde ou sous le contrôle des déposants avant la tenue de leur contre-interrogatoire respectif. Dans la plupart des cas, répondre à une requête par une requête n'est pas une façon de procédé acceptable.

[2]      Le juge Hugessen a récemment formulé des commentaires, dans l'arrêt The Greens at Tam O'Shanter Inc. c. La Reine, motifs non publiés rendus le 24 février 1999 dans l'action T-2946-92, au sujet du caractère répréhensible des requêtes déposées en réponse à une requête :

                 [8]      En second lieu, et comme le veut une procédure moderne judicieuse, je crois qu'il faut dissuader les parties de présenter des requêtes se rapportant à d'autres requêtes. Une requête devrait être contestée au fond et ne devrait pas donner lieu à d'autres requêtes procédurales. Nous risquons de faire face à une multitude interminable de requêtes si nous n'appliquons pas cette règle.                 
                      (À la page 3.)                 

Dans le cas qui nous occupe, il y a déjà des retards considérables. Il ne serait d'aucune utilité de refuser d'entendre la requête que EACL a présentée pour contester la requête de la partie adverse. Si elle n'avait pas fait cette entorse à la procédure, j'aurais toutefois peut-être accordé les dépens à EACL, étant donné qu'elle a contesté avec succès la requête en examen anticipé des documents.

GENÈSE DE L'INSTANCE

[3]      Il est utile de rappeler que la présente instance en contrôle judiciaire porte sur le fait qu'aucune évaluation environnementale n'a eu lieu en conformité avec la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale avant que le gouvernement fédéral ne finance la construction de réacteurs CANDU à Qinshan, en Chine,. EACL, qui a été autorisée à intervenir à l'instance avec tous les droits d'une partie, a notamment produit les affidavits souscrits par MM. Lin Feng et Simon Pang.

[4]      Bien qu'ils aient annexé certains documents à leur affidavit, MM. Feng et Pang se sont contentés de mentionner, de commenter et de résumer les conséquences d'un très grand nombre de documents techniques et juridiques, notamment des rapports d'incidences environnementales, d'études de faisabilité, ainsi que des dispositions législatives et réglementaires chinoises précisées ou non au sujet d'une foule de questions environnementales et civiles. EACL soutient que les documents cités par les témoins en question (dont certains n'ont pas, à son avis, à être produits " mais c'est là une question qui devra être examinée un autre jour ") sont extrêmement volumineux et représenteraient plus d'un millier de documents, selon son estimation.

[5]      La demanderesse craint d'être submergée juste avant le contre-interrogatoire par une masse de documents qu'elle ne connaît pas très bien, dont certains sont rédigés en chinois, et de ne pas avoir le temps de bien en prendre connaissance ou de contre-interroger comme il se doit les témoins à leur sujet. D'où la demande qu'elle a formulée et la requête qu'elle présente maintenant en vue d'obtenir que les documents soient produits dans un délai raisonnable avant la tenue des contre-interrogatoires prévus.

[6]      EACL soutient que les Règles n'exigent pas que les documents soient produits avant la tenue du contre-interrogatoire. Ainsi, si l'on aborde la question au niveau le plus élémentaire, la Cour n'a pas compétence pour rendre l'ordonnance sollicitée par la demanderesse. EACL affirme que la demanderesse devrait plutôt passer à l'étape du contre-interrogatoire et saisir ensuite la Cour d'une demande si elle n'est pas satisfaite du résultat.

ANALYSE

[7]      La façon de procéder utilisée par EACL, en l'occurrence celle d'incorporer par renvoi sans les annexer des documents obscurs que, pour des raisons d'ordre pratique, on ne peut peut-être pas obtenir en Occident, ne doit pas être encouragée. Dans un cas comme celui-ci, une telle façon de procéder pourrait, du moins dans un premier temps, permettre à un déposant de se soustraire à un contre-interrogatoire efficace. La demande qu'a présentée la demanderesse dans le but d'éviter un piège n'est pas déraisonnable. D'ailleurs, pour citer un extrait de l'arrêt rendu par le juge Hugessen dans l'affaire Tam O'Shanter (précitée), [TRADUCTION] " Le procès dans lequel on tend un piège ne fait pas partie d'une procédure moderne judicieuse ". Ainsi, malgré le fait que, compte tenu de l'état actuel du droit et des Règles, j'ai conclu que EACL a raison sur son moyen d'incompétence, il se peut fort bien que la demanderesse obtienne en fin de compte une autre réparation efficace. Je passe maintenant à un examen plus approfondi de cette question.

[8]      La clé qui permet de trancher la présente requête est la compétence de la Cour pour autoriser la demanderesse à examiner de façon anticipée les documents avant la tenue du contre-interrogatoire. Les avocats n'ont pas réussi à me citer de décisions portant sur la production de documents ordonnée en vertu d'une assignation, notamment d'une assignation à comparaître, avant la tenue d'un contre-interrogatoire portant sur un affidavit. L'avocat de la demanderesse fait valoir, dans ses plaidoiries écrites, que je devrais analyser la question en fonction de l'objectif consistant à empêcher la demanderesse d'être prise au dépourvu à la suite de la production d'un millier de documents et en tenant compte d'une variante de la règle de la meilleur preuve, que l'avocat formule de la façon suivante : " lorsqu'une partie cherche à invoquer le contenu d'un document pour appuyer sa cause, elle doit produire le document lui-même ".

Règle de la meilleure preuve

[9]      Cette conception de la règle de la meilleure preuve est une conception inclusive, qui était manifestement préconisée à l'origine par les tribunaux, à commencer par l'arrêt Ford v. Hopkins, [1700] 1 Salk 283, 91 E.R. 250. Dans cet arrêt, le juge en chef Holt a déclaré : [TRADUCTION] " On exige uniquement la meilleure preuve que la nature de l'objet en cause permet d'obtenir [...] ". Ce concept a été repris dans l'arrêt Robinson Brothers (Brewers) Ltd. v. Houton and Chester-Lee-Street Assessment Committee , [1937] 2 K.B. 445, à la page 469, dans lequel le lord juge Scott, qui était l'un des trois juges ayant rédigé des motifs dans cet arrêt, a déclaré que la seule preuve admissible était la meilleure et que la preuve indirecte était exclue parce qu'elle ne constituait pas la meilleure preuve. Lord Denning a toutefois tempéré ce principe en déclarant, dans l'arrêt Garton v. Hunter, [1969] 2 Q.B. 37, à la page 44 :

                 Il est évident que le lord juge Scott songeait à l'ancienne règle qui exige qu'une partie produise la meilleure preuve que la nature de l'objet en cause permet d'obtenir et qui fait en sorte que l'on doit exclure toute preuve moins bonne. Cette vieille règle est depuis longtemps désuète. Le seul cas dans lequel elle s'applique toujours est celui dans lequel une partie a l'original d'un document en mains, auquel cas elle doit produire cet original. Elle ne peut produire une preuve secondaire en soumettant une copie. De nos jours, on ne se confine plus à la meilleure preuve. On admet tous les éléments de preuve pertinents. Pour décider si un élément de preuve déterminé est bon ou mauvais, on tient uniquement compte de sa valeur, et non de son admissibilité. Je crains donc que le lord juge Scott n'ait tort.                 

De nos jours, la règle de la meilleure preuve concerne principalement la valeur à accorder à la preuve et non l'exclusion ou la production d'un document déterminé à un moment précis. D'ailleurs, pour résumer l'état actuel de la règle de la meilleure preuve, Sopenka et Lederman font remarquer, dans leur ouvrage The Law of Evidence in Canada, éd. 1992, à la page 940 :

                 [TRADUCTION]                 
                 Les règles de droit moderne, les dispositions législatives, les règles de pratique et la technologie moderne ont rendu la règle désuète dans la plupart des cas et la question en est un de valeur et non d'admissibilité.                 

Je ne crois pas que la règle de la meilleure preuve soit directement utile à la demanderesse.

[10]      Il se peut que EACL rencontre des difficultés si elle tend effectivement un piège à l'avocat de la demanderesse en l'ensevelissant sous une masse de documents à la dernière minute avant la tenue du contre-interrogatoire. Ou encore, si les documents ne sont pas produits du tout comme on l'a laissé entrevoir lors du débat sur la présente requête, EACL pourrait avoir du mal à obtenir du juge qui entendra l'affaire qu'il accorde quelque valeur que ce soit à de simples assertions contenues dans des affidavits qui ne seraient appuyés d'aucun document et dont la véracité n'aurait pas été vérifiée au moyen d'un contre-interrogatoire. Il ne s'agit cependant pas de la question à laquelle il faut répondre en l'espèce. La question qui se pose est celle du délai de production des documents et cette question relève de toute évidence des Règles de la Cour fédérale.

Production de documents lors du contre-interrogatoire

[11]      En l'espèce, la demanderesse réclame la production de documents, de textes de lois et de règlements qui sont mentionnés et commentés de façon plutôt énigmatique dans les deux affidavits. La demanderesse a, comme elle devait le faire, observé l'alinéa 91(2)c) des Règles, assortissant l'assignation à comparaître pour le contre-interrogatoire d'une demande de production de documents pour examen. Voici un extrait de l'article 91 :

                 91. (1) Assignation à comparaître " La partie qui entend tenir un interrogatoire oral signifie une assignation à comparaître selon la formule 91 à la personne à interroger et une copie de cette assignation aux autres parties.                 
                 (2) Production de documents pour examen " L'assignation à comparaître peut préciser que la personne assignée est tenue d'apporter avec elle les documents ou éléments matériels qui :                 
                      [...]                 
                      c) sont en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde et qui sont pertinents à la requête ou à la demande, dans le cas où elle est assignée pour subir son contre-interrogatoire concernant un affidavit ;                 
                      [Non souligné dans l'original.]                 

Le paragraphe 94(1) est également pertinent :

                 94.(1) Production de documents " Sous réserve du paragraphe (2), la personne soumise à un interrogatoire oral ou la partie pour le compte de laquelle la personne est interrogée produisent pour examen à l'interrogatoire les documents et éléments matériels demandés dans l'assignation à comparaître qui sont eu leur possession, sous leur autorité ou sous leur garde, sauf ceux pour lesquels un privilège de non-divulgation a été revendiqué ou pour lesquels une dispense de production a été accordée parla Cour en vertu de la règle 230.                 
                      [Non souligné dans l'original.                 

Ces règles prévoient que, sur demande, la personne qui est contre-interrogée au sujet de son affidavit doit produire à cet interrogatoire tous les documents et éléments matériels qui sont en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde. Le paragraphe 9(2) prévoit les cas de dispense de production ; cette question ne se pose toutefois pas dans le cas qui nous occupe.

Application de la règle des lacunes

[12]      La demanderesse soutient que je devrais interpréter les Règles de façon à permettre d'apporter au litige une solution qui soit juste et expéditive, comme l'exige l'article 3 des Règles, puis appliquer l'article 4, la règle des cas non prévus " aussi appelée règle des lacunes " , qui permet à la Cour de combler les lacunes d'ordre procédural qui existent dans les Règles. Si cette façon de procéder était possible, on pourrait importer les règles régissant la communication préalable des documents dans une action et permettre ainsi leur examen anticipé. Pourtant, pour que l'article 4, la règle des lacunes, s'applique, il doit effectivement y avoir une lacune dans les Règles :

                 La Règle 5 s'applique uniquement lorsqu'il existe une " lacune " dans les Règles de la Cour fédérale . Le simple fait que ces Règles ne contiennent pas une disposition énoncée dans les règles de procédure provinciales ne signifie pas nécessairement qu'il existe une lacune. Si l'absence d'une telle disposition peut s'expliquer facilement par l'organisation générale des Règles de la Cour fédérale, cette absence doit être considérée comme intentionnelle et toute application par analogie des règles de procédure provinciales ou d'autres dispositions des Règles de la Cour fédérale, inapplicables de prime abord, équivaudrait à une modification des Règles de la Cour fédérale.                 
                      (David Bull Laboratories c. Pharmacia Inc.,                 
                      [1995] 1 C.F. 588, à la page 595 (C.A.F.))                 

Pour appliquer ce concept, je dois d'abord me demander si l'absence de production anticipée de documents pertinents au contre-interrogatoire sur l'affidavit peut s'expliquer par l'économie générale des Règles de la Cour fédérale et, dans l'affirmative, je dois éviter d'établir une procédure qui équivaudrait à une modification des Règles.

[13]      Je dois également me rappeler que le principe posé à l'article 3 des Règles suivant lequel les Règles doivent être interprétées et appliquées de manière à faciliter et non à retarder le déroulement des instances ne donne pas compétence sur le fond, mais vise à faciliter l'interprétation (voir l'arrêt Brandlake Products Limited c. Adidas (Canada) Limited, [1983] 1 C.F. 197, aux pages 199 et 200 (C.A.F.).

Analyse de la compétence

[14]      D'entrée de jeu, il n'est pas inutile de rappeler, même si ce principe peut sembler élémentaire, qu'une instance introduite sous forme de demande, comme celle dont la Cour est saisie en l'espèce, est très différente d'une instance introduite sous forme d'action. La première doit être instruite " [...] à bref délai et selon une procédure sommaire " (paragraphe 18.4(1) de la Loi sur la Cour fédérale ) et être menée à terme aussi rapidement que possible, sans actes de procédure et avec le moins d'incidents procéduraux possible, en évitant notamment tout retard procédural inutile. La seconde, en revanche, implique un échange de conclusions entre les parties, la communication préalable des documents et la tenue d'interrogatoires préalables, qui sont d'habitude beaucoup plus longs qu'un simple contre-interrogatoire mené au sujet d'un affidavit à l'appui d'une demande de contrôle judiciaire.

[15]      Il est facile de comprendre pourquoi il n'y a pas de communication préalable complète de documents dans le cas d'une simple demande lorsqu'on songe à la nature sommaire de ce type de demande. Eu égard à ce fait, je ne crois pas que les Règles de la Cour fédérale comportent une lacune en ce qui concerne l'examen des documents nécessaires à un contre-interrogatoire lorsque l'auteur d'un affidavit reçoit un avis le sommant de produire certains documents. Le paragraphe 91(2) des Règles prévoit une faculté, celle pour la partie qui entend tenir un contre-interrogatoire, de préciser dans son assignation à comparaître que la personne assignée est tenue d'apporter avec elle pour examen certains documents déterminés. La faculté prévue au paragraphe 91(2) ne signifie pas automatiquement que d'autres recours sont ouverts à la partie qui demande les documents.

[16]      Les articles 91 et 94 des Règles renferment un code complet, qui ne comporte aucune lacune, en ce qui concerne la production des documents pour examen lors d'un contre-interrogatoire. Exiger en plus que cette production ait lieu dans un délai raisonnable avant la tenue de l'interrogatoire serait malheureusement contraire au libellé non ambigu de l'alinéa 91(2)c) et du paragraphe 94(1) des Règles en ce qui concerne la production des documents lors de l'interrogatoire. La règle des lacunes, la règle 4, ne s'applique pas, parce qu'il n'y a pas de lacune. Il s'ensuit que la Cour n'a pas compétence pour ordonner la production anticipée des documents demandés.

[17]      Il ne m'est pas non plus loisible de faire abstraction des Règles, ou de rendre, sur le fondement de l'article 3 des Règles, une ordonnance contraire au libellé manifeste d'une disposition des Règles, car, ainsi que la Cour l'a souligné dans l'arrêt Brandlake Products (précité), l'article 3 me permet seulement d'interpréter les Règles de façon à apporter au litige une solution expéditive et économique.

[18]      Le paragraphe 53(1) ne me permet pas d'exiger la production anticipée de documents, car ce paragraphe m'autorise uniquement à assortir une ordonnance de certaines conditions ; il ne me confère pas le pouvoir de rendre une ordonnance contraire à une ou plusieurs dispositions déterminées des Règles. Il ne m'est pas loisible non plus de recourir à l'article 55 des Règles pour ignorer l'alinéa 91(2)c) et le paragraphe 94(1) ou ne pas en tenir compte pour ensuite y superposer une règle nouvelle et différente adaptée aux besoins du moment.

[19]      J'ai également examiné la question de la compétence inhérente que possède la Cour d'assurer l'application de sa procédure. Il s'agit simplement d'une compétence procédurale implicite, et d'une d'une compétence sur le fond (voir, par exemple, l'arrêt Margem Chartering Co. c. Le " Bocsa ", [1997] 2 C.F. 1001, aux pages 1014 et 1015). Comme cette compétence vise uniquement la procédure, elle ne permet pas de modifier les Règles. Elle constitue simplement un moyen de s'assurer que les Règles s'appliquent comme elles le doivent. Il se peut que ceux qui ont rédigé les nouvelles dispositions des Règles concernant l'examen de documents à produire dans le cadre d'un contre-interrogatoire " un domaine qui ne faisait l'objet d'aucune disposition précise dans les anciennes Règles " ont estimé que les parties agiraient de façon raisonnable et qu'elles s'abstiendraient de recourir à des tactiques dilatoires en produisant une avalanche de documents " jusqu'à un millier de documents dans le cas qui nous occupe " sans en permettre l'examen préalable dans le cadre d'un contre-interrogatoire. Mais, en l'espèce, EACL respecte le libellé non ambigu des Règles en attendant le contre-interrogatoire pour produire les documents demandés.

DISPOSITIF

[20]      Pour le moment, la demanderesse n'a pas le droit d'examiner les documents demandés avant le contre-interrogatoire. Cette mesure risque fort de causer d'autres retards et de provoquer d'autres requêtes en raison de l'ajournement du contre-interrogatoire et d'autres requêtes en contre-interrogatoire lorsque l'avocat de la demanderesse sera en mesure de bien se préparer. Ces retards, ainsi que les coûts monétaires qu'ils représenteront pour EACL, sont des facteurs dont EACL devra tenir compte avant de décider du parti à prendre, car il n'est pas permis à un intervenant, même à celui qui possède tous les droits d'une partie, de détourner une instance, dans le cas qui nous occupe en mettant d'abord en litige la procédure, la législation et la réglementation environnementales chinoises puis en refusant ensuite non seulement d'annexer les pièces pertinentes à ses affidavits, mais en refusant de les produire dans un délai acceptable.

[21]      La requête de la demanderesse est rejetée. Les passages superflus de la requête d'EACL ne peuvent être qualifiés autrement. Les parties ont logiquement choisi de faire instruire la cause comme une instance à gestion spéciale et se sont entendues sur un calendrier pour la tenue des contre-interrogatoires, lequel calendrier est entériné et incorporé dans l'ordonnance de la Cour.

[22]      Hormis la procédure qui a été suivie et les thèses qui ont été défendues, les pièces versées au dossier et les avocats qui ont débattu cette requête étaient complets et excellents.

[23]      Les dépens suivront le sort de la cause.

                     (Signature) " John A. Hargrave "
         Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.

Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 4 mars 1999

     COUR FÉDÉRALE

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

DATE : 2 mars 1999

No DU GREFFE : T-85-97

INTITULÉ DE LA CAUSE : Sierra Club DU Canada

c.

Ministre des Finances du Canada et autres

LIEU DE L'AUDIENCE : Vancouver

MOTIFS DE L'ORDONNANCE du protonotaire JOHN A. HARGRAVE en date du 4 mars 1999

ONT COMPARU :

Me Timothy Howard              pour la demanderesse

Me Brian Saunders              pour le défendeur

Me Ahab Abdel-Azziz              pour l'intervenante

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Timothy Howard              pour le demandeur

Fonds de défense juridique du Sierra Club

Vancouver

Me Morris A. Rosenberg              pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada

Me Ahab Abdel-Azziz              pour l'intervenant

Osler Hoskin & Harcourt

Toronto

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