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Date : 20011106

Dossier : T-588-00

Référence neutre : 2001 CFPI 1212

ENTRE :

                                            EARLY RECOVERED RESOURCES INC.

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                              - et -

                              GULF LOG SALVAGE CO-OPERATIVE ASSOCIATION,

                         SA MAJESTÉ DU CHEF DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

ET JIM DOYLE, MINISTRE DES FORÊTS

                                                                                   

                                                                                                                                                     défendeurs

                                                TAXATION DES DÉPENS - MOTIFS

CHARLES E. STINSON

Officier taxateur


[1]                 La demanderesse s'est désistée à l'égard de la défenderesse Gulf Log Co-operative Association (Gulf Log). Gulf Log présente son mémoire de dépens en vertu de l'article 402 des règles, y compris le double des dépens sur le fondement de l'alinéa 420 (2)b) des règles. Gulf Log a retiré sa demande au titre de l'article 4, du fait que l'ordonnance correspondante était muette au sujet des dépens. La demanderesse n'a pas pris de position sur les articles 5, 6 et 11 et sur la seconde demande au titre de l'article 10, sinon pour s'opposer au double des dépens demandé en vertu de l'article 420 des règles à compter du 23 janvier 2001 (date de l'offre écrite de règlement de Gulf Log). La demanderesse a concédé tous les débours, à l'exception des télécopies (148,00 $), des frais de recherche juridique informatisée (110,29 $), des photocopies (557,00 $) et des frais de sténographie (2 318,25 $). J'ai suggéré, et les parties en sont convenues, qu'elles laissent l'article 26 à ma discrétion.

[2]                 Dans les motifs datés du 24 mai 2001, la Cour fournit des éléments utiles de contexte :

[3]            La Gulf Log Salvage Co-Operative Association est formée de personnes représentant des sociétés forestières, des sociétés d'assurance, des courtiers d'assurance, des compagnies de transport et des courtiers en bois. Elle est titulaire d'un permis qui l'autorise à exploiter une station où elle reçoit les grumes perdues que lui apportent des récupérateurs de grumes autorisés par un permis à ramasser ou à récupérer des grumes, le tout conformément à la partie 9 de la Forest Act of British Columbia R.S.B.C. 1996 ch. 157, sur la récupération maritime des grumes, et au Log Salvage Regulations, B.C. Regulations 220/81, un règlement pris en application de la Forest Act.

[4]            La constitutionnalité de la partie 9 de la Forest Act est en litige. La demanderesse prétend que les dispositions sur la récupération des grumes prévues par la Forest Act sont ultra vires de la province de la Colombie-Britannique en raison de la compétence exclusive dont jouit le gouvernement fédéral en matière de navigation et de transport maritime aux termes du paragraphe 91(10) de la Loi constitutionnelle de 1867 et en raison de l'article 52 de la Loi constitutionnelle de 1867; à titre subsidiaire, la demanderesse soutient que la législation provinciale est inopérante dans la mesure où elle est incompatible avec la Loi sur la marine marchande du Canada et la Convention internationale de 1989 sur l'assistance.

[5]            Ce débat n'est pas particulièrement simple. L'avocat de la défenderesse, un avocat d'expérience, estime que le procès durera cinq jours. En supposant, comme il est raisonnable de le faire, qu'aucun règlement ne sera conclu, il évalue que les dépens taxables de la défenderesse Gulf Log Salvage Co-Operative Association se monteront à 28 219,65 $. Je reconnais qu'il s'agit là d'un montant raisonnable pour les dépens et les débours.


La position de la demanderesse

[3]                 La demanderesse a noté que cette action, portant sur la rémunération pour la récupération de 17 grumes sur le fleuve Fraser, a été introduite comme action simplifiée, a été convertie en action ordinaire par ordonnance, se poursuit contre les autres défendeurs provinciaux et doit être jugée par voie de jugement sommaire sur la question constitutionnelle. La demanderesse a plaidé de façon générale que, selon l'article 409 et l'alinéa 400 (3)i) des règles, les dépens devraient être réduits, parce que la conduite de Gulf Log a allongé inutilement ce litige. Par exemple, la demanderesse a constamment fait pression en vue d'obtenir une procédure accélérée ou sommaire, mais n'a pu l'obtenir qu'après s'être désistée à l'égard de Gulf Log. La demanderesse a communiqué la preuve qu'elle comptait présenter à toutes les parties, mais Gulf Log a pourtant insisté pour obtenir une enquête préalable complète, notamment un interrogatoire oral détaillé de Shirley Weishun, copropriétaire de la demanderesse. La demanderesse a fait valoir que, en particulier, des mesures comme la communication de documents et l'interrogatoire préalable, ne sont pas nécessaires dans une procédure accélérée et que, donc, une réduction des dépens est justifiée. La demanderesse a concédé qu'un officier taxateur ne peut accorder de dispense de dépens en l'absence de directives spécifiques de la Cour, mais en l'espèce les dépens devraient être réduits selon l'alinéa 400 (3)h) des règles, parce qu'il était dans l'intérêt public que soient décidées la constitutionnalité et les autres questions soulevées dans cette affaire, en ce qui concerne la viabilité économique du régime législatif de récupération des grumes, les préoccupations environnementales et les dangers pour la navigation.



[4]                 S'agissant de l'article 2, la demanderesse a fait valoir que, si la déclaration soulevait des questions nouvelles d'interprétation de lois, ces questions n'étaient pas complexes au point de justifier le maximum de 7 unités demandé pour la défense. Plutôt, de 5 à 6 unités suffiraient. La demanderesse a noté que Gulf Log demande séparément, au titre de l'article 7, des dépens pour la préparation de son affidavit de documents, pour l'examen de l'affidavit de documents de la demanderesse et pour l'examen de l'affidavit de documents de la Couronne provinciale , pour un total de 13 unités, excédant ainsi à tort le maximum de 5 unités que comporte la fourchette, en l'absence d'une autorisation de la Cour. Selon l'ouvrage Registry Procedure & Assessment of Costs, chapitre 11, pages 11.1.17 et 11.1.18, Continuing Legal Education Society of British Columbia, publication d'octobre 1999, la formulation du tarif B indique clairement qu'on ne peut demander de dépens au titre de l'article 7 qu'une seule fois dans une action. Comme les documents produits n'ont pas été abondants, de 3 à 4 unités suffiraient. Sur la première demande au titre de l'article 10, la demanderesse a plaidé qu'il n'existe pas d'article spécifique du tarif pour les discussions de conciliation prévues à l'article 257 des règles et que, selon la décision Veselinovic c. Canada (Ministre du Revenu national - M.R.N.) [2000] A.C.F. n ° 104, un officier taxateur ne peut certifier d'articles en l'absence de directives de la Cour. La demanderesse soutient que ces discussions de conciliation font partie de la préparation en vue de la conférence préparatoire prévue à l'article 258 des règles (la seconde demande au titre de l'article 10), qu'elles ont duré moins de cinq minutes comme il était clair qu'il n'y avait pas de possibilité de règlement à moins d'un rejet complet de l'action et que donc rien ne devrait être alloué. À titre subsidiaire, si la première demande au titre de l'article 10 est allouée, la demanderesse a soutenu que même le minimum de trois unités est excessif pour une conversation de cinq minutes. La demanderesse a fait valoir que le bas de la fourchette est suffisant pour la seconde demande au titre de l'article 10.

[5]                 La demanderesse a plaidé que le délai entre le premier jour (le 24 janvier 2001) et le deuxième jour (le 6 mars 2001) de l'interrogatoire préalable de Shirley Weishun ne justifiait pas deux demandes au maximum au titre de l'article 8. Elle a relevé que le mémoire de dépens n'indique pas le nombre d'heures, sous l'article 9, pour la présence à son interrogatoire, lequel était largement inutile vu que son affidavit exposait la preuve que comptait présenter la demanderesse et compte tenu de l'essence de cette affaire qui relevait de l'interprétation des lois et n'était pas complexe quant aux faits. La demanderesse a soutenu que 3 unités seulement, au lieu du maximum de 5 qui a été demandé, devraient être allouées au titre de l'article 8 pour la préparation de l'interrogatoire de Douglas Cooper de Gulf Log, vu que l'interrogatoire a été bref et non complexe. Elle a soutenu qu'une unité suffisait au titre de l'article 9 pour la présence à l'interrogatoire préalable de M. Cooper. La demanderesse a plaidé que 2 unités et 1 unité devraient être allouées au titre des articles 8 et 9 respectivement, relativement au contre-interrogatoire sur l'affidavit de Shirley Weishun, vu que l'affidavit ne faisait que donner une liste d'actifs, que la durée de présence s'est limitée à 15 minutes et que la transcription ne faisait que 8 pages.

[6]                 La demanderesse a également plaidé, en s'appuyant sur les décisions Pratt c. Meredith [1999] A.C.F. n ° 15 au paragraphe [10] et Ager c. International Brotherhood of Locomotive Engineers [1999] A.C.F. n ° 909, qu'il n'y a généralement aucune preuve du caractère raisonnable et nécessaire des débours, sinon la simple affirmation dans l'affidavit à l'appui que [TRADUCTION] « les dépens engagés étaient raisonnables et nécessaires » . Elle a fait valoir que l'objet, mais non le caractère raisonnable et nécessaire, de frais comme les frais afférents aux transcriptions d'interrogatoires est évident à la lecture des factures, mais qu'on ne voit pas de façon évidente ce qui a été envoyé ou copié sous les frais de télécopie et de photocopie, quoique certaines étaient vraisemblablement nécessaires, et que donc leur pertinence n'est pas évidente. La demanderesse a suggéré une réduction arbitraire à 100 $ et 400 $ pour les télécopies et les photocopies respectivement, vu la preuve insuffisante pour la somme demandée. Le taux de 0,25 $ la page pour les photocopies est acceptable. La demanderesse a plaidé, en invoquant la décision Pardee Equipment Ltd. c. Canada [1998] A.C.F. n ° 751 au paragraphe 17, que les frais pour la recherche informatisée sont une partie des honoraires de l'avocat intégrée dans les frais généraux du cabinet d'avocat et ne peuvent donc être recouvrés comme débours. Elle a soutenu que la somme demandée pour les transcriptions devrait être réduite parce qu'une bonne partie de l'enquête préalable n'était pas raisonnablement nécessaire. Elle a fait valoir que la somme nette de 31 990,32 $ présentée pour les frais sur la base procureur-client n'est pas justifiée par la preuve et qu'il ne faut donc lui accorder aucun poids.


[7]                 La demanderesse a soutenu que Gulf Log n'a pas droit au double des dépens en vertu du paragraphe 420 (2) des règles parce que la Section de première instance, dans la décision CSC Continuum Inc. c. Sterling Software Inc. [1998] A.C.F. n ° 1554 a conclu, au paragraphe [10], qu'il n'est pas clair que l'article 420 des règles s'applique au désistement. Selon la décision Williams c. Canada (Ministre du Revenu national - M.R.N.) [2001] A.C.F. n ° 249 au par. [23], l'officier taxateur a le pouvoir de déterminer s'il a été satisfait au critère de l'article 420 des règles. La demanderesse soutient que la conclusion devrait être négative en l'espèce, parce que l'attribution de dépens ne découle pas directement des règles, du tarif ou d'une ordonnance. Elle plaide que ce qui déclenche l'application du paragraphe 420 (2) des règles, c'est non pas le caractère apparemment favorable pour Gulf Log, mais plutôt le point de savoir si le jugement obtenu a été moins favorable que les conditions de l'offre de règlement. Étant donné qu'il n'y a pas encore de jugement, on ne peut déterminer ce point pour déclencher l'application du paragraphe 420 (2) des règles. La demanderesse a plaidé que l'offre de règlement de 302,35 $, ne se rapportant qu'à une petite partie du litige, faisait abstraction de la législation sur la récupération des grumes, principale question soulevée dans ce litige. La demanderesse a fait valoir que l'acceptation de cette petite somme aurait sapé sa position juridique sur les questions beaucoup plus importantes, parce qu'elle aurait ainsi concédé en fait la validité du régime législatif actuel. Elle a noté que Gulf Log et la Couronne provinciale devaient toutes les deux être nommées comme défenderesses afin de permettre d'établir qui était propriétaire des grumes. Une fois que ce point a été confirmé, ce qui permettait de déterminer qui avait l'obligation de rémunérer la demanderesse pour les grumes, la demanderesse pouvait se désister à l'égard de Gulf Log, ce qui, en l'absence de jugement, ne résolvait qu'une question mineure et ne déclenchait pas l'application de l'article 420 des règles. Selon la demanderesse, il ne s'agissait pas d'un cas où la Cour aurait donné tort à la demanderesse, mais plutôt d'un cas où la demanderesse a choisi de se désister à l'égard de Gulf Log et de poursuivre l'instance contre la Couronne provinciale. La demanderesse soutient que la position de Gulf Log sur le doublement des dépens équivaut à des positions intenables. Si la demanderesse avait accepté l'offre de règlement, elle économiserait quelque 10 000 $ de dépens, mais elle saperait sa position juridique sur la question principale. Ou, si elle rejette l'offre de règlement, Gulf Log reçoit quelque 10 000 $ de plus en dépens.

La position de Gulf Log


[8]                 Gulf Log a soutenu qu'en l'espèce, le facteur de l'intérêt public devrait tendre à augmenter les dépens parce que non seulement Gulf Log cessera d'exister si la demanderesse a gain de cause, mais encore beaucoup d'autres récupérateurs de grumes estiment, contrairement à la demanderesse, que le système actuel est viable. Gulf Log a fait valoir qu'une action simplifiée n'était pas appropriée, puisque, comme l'établit clairement l'arrêt Northern Telecom Ltd. c. Syndicat des travailleurs en communication du Canada et al. 98 D.L.R. (3d) 1 aux pages 14 et 15 (C.S.C.), les affaires constitutionnelles doivent être décidées en tenant compte de l'ensemble du contexte factuel. Les motifs précités, datés du 24 mai 2001, mentionnent au paragraphe [29] la prétention de la demanderesse que cette affaire soulève des questions constitutionnelles importantes avec d'immenses implications. Gulf Log a plaidé que, si la demanderesse a gain de cause, le système de récupération des grumes qui est en place depuis plusieurs décennies en Colombie-Britannique sera bouleversé. Donc, l'effort de Gulf Log en vue d'assurer un dossier factuel complet et sans parti pris, ce qui n'est pas possible dans une action simplifiée, était nécessaire en vue d'assurer une analyse constitutionnelle correcte et ne constituait aucunement une tactique dilatoire. Gulf Log a fait valoir que les motifs précités, datés du 24 mai 2001, indiquent, aux paragraphes [5] et [31] respectivement, que la somme de 28 219,65 $ constitue une estimation raisonnable des dépens et qu'il y a un doute quant au bien-fondé de la cause.


[9]                 Gulf Log a plaidé que, si la défense déposée était simple, l'analyse des questions constitutionnelles complexes au cours de sa préparation ne l'était pas. Gulf Log a concédé que les actes de procédure dans des affaires autochtones complexes pouvaient être plus difficiles et a soutenu que, au titre de l'article 2, 5 ou 6 unités seraient appropriées, 6 unités étant à préférer. Gulf Log a exprimé son désaccord avec la position prise dans l'ouvrage Registry Procedure & Assessment of Costs, précité, qui ne permet qu'une demande par action au titre de l'article 7 et a soutenu que la formulation du tarif n'exclut pas une interprétation au pluriel et que c'est l'interprétation au pluriel qui correspond à l'intention des rédacteurs du tarif. Gulf Log a plaidé que chaque demande au titre de l'article 7 est justifiée séparément parce que la liste et la récupération des documents supposaient un travail important et compliqué pour toutes les parties. (Note : Gulf Log a demandé que j'indique, si je ne lui donne pas raison sur ce point, ce que je pourrais avoir alloué pour trois demandes au titre de l'article 7). Gulf Log a concédé que la conférence de règlement ne faisait pas partie d'une audience formelle devant la Cour, mais a soutenu que la première demande au titre de l'article 10 est appropriée étant donné que des discussions de conciliation ont eu lieu à plusieurs reprises.


[10]            S'agissant de l'article 8, pour la préparation en vue de l'interrogatoire de Shirley Weishun (copropriétaire de la demanderesse), comme certains récupérateurs de grumes étaient satisfaits du régime législatif et que la demanderesse avait sélectionné avec soin 17 grumes pour créer une cause type, il était essentiel d'obtenir l'historique complet de toutes les grumes même si le quantum, question encore pertinente, n'était pas la question principale. Gulf Log a fait deux demandes au titre de l'article 8 parce qu'il a fallu réexaminer les éléments découlant de l'interrogatoire du 24 janvier dans le cadre de la préparation en vue de la deuxième session, le 6 mars. S'agissant de l'article 9, Gulf Log a noté que la transcription du 24 janvier indique une durée de 4 heures et 48 minutes. Comme la transcription du 6 mars n'indique pas la durée, Gulf Log l'a estimée à 4 heures compte tenu que la session s'est poursuivie dans l'après-midi. Au titre des articles 8 et 9 par rapport à l'interrogatoire de Douglas Cooper (directeur général de Gulf Log), Gulf Log a noté que son interrogatoire préalable n'était pas simple et a donné 60 pages de transcription, comprenant 383 questions. Gulf Log a fait valoir que 1 unité pour l'article 9, équivalant à 110,00 $ l'heure, constitue un montant trop faible dans le cas d'une cause type de droit constitutionnel dans laquelle Gulf Log cesserait d'exister si la demanderesse avait gain de cause. Donc, 2 unités par heure conviendraient, parce que les rédacteurs du tarif visaient une indemnisation de 50 %. S'agissant des articles 8 et 9 par rapport au contre-interrogatoire de Shirley Weishun sur son affidavit, Gulf Log a affirmé qu'elle n'a fourni, délibérément, que des renseignements partiels. Gulf Log a rappelé que les motifs précités, datés du 24 mai 2001, confirment, au paragraphe [17], qu'un bref contre-interrogatoire était approprié. Gulf Log a fait valoir que l'avocat d'expérience, conscient qu'un trop grand nombre de questions risque de tourner au profit de son adversaire, peut estimer, comme en l'espèce, qu'un contre-interrogatoire long n'est pas le meilleur moyen de défendre la position juridique de son client. Donc, il serait approprié d'accorder 2 unités par heure au titre de l'article 9.

[11]            Gulf Log a soutenu que son affidavit à l'appui énumère chaque photocopie et que le coût réel a été ramené à 0,25 $ la page pour le mémoire de dépens. Gulf Log a rappelé que ce litige avait exigé la signification des actes de procédure à deux parties différentes, souvent à court délai, et que même l'affidavit en réponse de la demanderesse en vue de la présente taxation a été signifié à court délai. Gulf Log a plaidé qu'il ne serait donc pas équitable de réduire arbitrairement la somme de 557,00 $ demandée pour les photocopies, alors qu'elle s'appuie sur un affidavit au sujet duquel la demanderesse a choisi de ne pas contre-interroger. Gulf Log a fait valoir que des décisions plus récentes que la décision Pardee Equipment, précitée, ont approuvé les frais de recherche juridique informatisée comme débours. La somme demandée, 110,29 $, est minime pour une affaire que la demanderesse présente comme une cause type importante en droit constitutionnel.



[12]            Gulf Log a affirmé que la demanderesse n'aurait jamais pu avoir gain de cause contre elle puisque Gulf Log n'existe qu'en vertu du Log Salvage Regulation, B.C. Reg. 220/81 et a plaidé que l'acceptation de l'offre pécuniaire de Gulf Log n'aurait pas nui à la demanderesse puisque celle-ci aurait pu poursuivre l'instance sur la question constitutionnelle avec la Couronne provinciale. Gulf Log a fait valoir que la décision CSC Continuum Inc., précitée, n'est pas pertinente, parce qu'elle ne traitait pas d'une action, comme en l'espèce, mais plutôt d'un appel interjeté contre une décision d'un tribunal administratif selon les anciennes règles, qui n'accordaient pas de dépens pour les appels interjetés en vertu d'une loi et les demandes de contrôle judiciaire. Dans cette décision, au paragraphe [8], la Cour ne dit pas que l'article 420 des règles n'est pas approprié et aux paragraphes [9] et [10], elle a accordé certains dépens à l'intimé, malgré le fait que l'appelant a eu gain de cause, en raison du refus par l'appelant d'une offre de règlement. Gulf Log a plaidé que le litige en cause est comparable à l'affaire Feherguard Products Ltd. c. Rocky's of B.C. Leisure Ltd. [1994] A.C.F. n ° 2012 (O.T.), où il a été jugé que l'article 344.1 des règles (l'article qui régissait alors les dépens à la suite d'une offre de règlement) permettait le doublement des dépens en l'absence de directives ou d'une ordonnance de la Cour. Cette décision conclut, au paragraphe [10] : « la meilleure manière de déterminer le montant des dépens consiste à adopter dans l'application des dispositions un point de vue positif et non étroit et négatif » . Gulf Log a noté que la position formulée par la demanderesse, que le doublement des dépens est prématuré en l'absence du jugement prévu à l'alinéa 420 (2)a) des règles, n'est pas pertinente, puisque c'est plutôt l'alinéa 420 (2)b) qui s'applique en l'espèce, c'est-à-dire que la demanderesse n'a pas obtenu de jugement. Gulf Log a plaidé que le dépôt d'un désistement, empêchant toute possibilité pour la demanderesse d'avoir gain de cause, n'a pas protégé la demanderesse des conséquences découlant, selon l'article 420 des règles, de l'acceptation ou du refus d'offres de règlement. Gulf Log a soutenu que le tarif visait à procurer un recouvrement d'environ 50 % des frais avant que l'article 420 des règles n'entre en jeu et que les rédacteurs du tarif n'avaient pas l'intention que les plaideurs puissent se soustraire aux conséquences du non-règlement d'une affaire qui tourne mal en déposant un désistement visant à empêcher le doublement des dépens qui résulterait d'un jugement.

La taxation


[13]            J'ai conclu dans la décision Bruce Starlight et al. c. Sa Majesté la Reine du 7 septembre 2001, dans le dossier T-66-86B (2001 CFPI 999) qu'il n'est pas obligatoire d'utiliser le même point dans les fourchettes pour chaque article, parce que les services des avocats doivent être appréciés en fonction des circonstances. L'intérêt public comme facteur qui influe sur les dépens est peut-être plus difficile à appliquer, parce qu'on peut considérer qu'il s'étend à l'ensemble du litige, alors que d'autres facteurs, par exemple la conduite visant à allonger la procédure, peuvent se manifester d'un bout à l'autre, mais pourraient facilement être attribués à des portions seulement du litige. Les deux parties conviennent que l'intérêt public constitue un facteur à prendre en compte, mais dans un sens opposé : la demanderesse fait valoir que les dépens devraient généralement être réduits à cause de l'initiative qu'elle a prise de créer cette cause type en droit constitutionnel et Gulf Log fait valoir que les dépens devraient généralement être augmentés parce que les récupérateurs autres que la demanderesse sont satisfaits du système actuel. L'intérêt de Gulf Log tient notamment à sa crainte que, en tant que créature de la réglementation provinciale, elle cesserait d'exister si la demanderesse avait gain de cause. Cet intérêt a l'effet plus vaste de protéger les personnes dont la position concernant la viabilité économique du régime provincial est opposée à celle de la demanderesse. Je conclus que le facteur de l'intérêt public devrait jouer en faveur de Gulf Log. Cependant, après avoir noté que les motifs précités, datés du 24 mai 2001, mentionnent, au paragraphe [29], que le gouvernement du Canada n'est pas intervenu et peut estimer que les questions constitutionnelles soulevées ne sont guère fondées, j'ai tempéré cette conclusion, parce que l'intérêt public est de nature régionale. Finalement, le dossier me convainc que la position de Gulf Log sur l'opportunité d'une procédure simplifiée était raisonnable.


[14]            J'alloue 6 unités au titre de l'article 2 parce que la défense était importante pour définir la position constitutionnelle de Gulf Log. L'avocat de Gulf Log a signalé avec raison que la formulation de l'article 7 permet des dépens distincts pour la communication de documents de la partie intéressée et pour celle de son adversaire. Dans l'ouvrage Registry Procedure & Assessment of Costs, précité, j'ai supposé une indemnité unique au titre de services fusionnés ou combinés regroupant toutes les communications de documents dans une procédure. Le caractère insatisfaisant de cette interprétation étroite est évident dans les circonstances de ce litige dans lequel la position de Gulf Log par rapport à la demanderesse a été compliquée par la nécessité de se tenir au fait de la position de défendeurs indépendants avec lesquels il fallait une communication de documents distincte. Je modifie donc la position que j'avais prise antérieurement, mais avec certaines réserves. Je pense que, au moment où survient chaque communication de documents, on peut raisonnablement s'attendre ou non à ce que des renseignements utiles pour les communications de documents ultérieures vont faire surface, ce qui justifie l'attributions de dépens moindres pour la deuxième demande et les demandes ultérieures au titre de l'article 7. En l'espèce, je ferai droit, au titre de l'article 7, à une demande pour chacune des communications de documents relatives à Gulf Log, à la demanderesse et à la Couronne provinciale; ces demandes ont été présentées à 3, 5 et 5 unités respectivement, et j'alloue 3, 5 et 3 unités respectivement. Sur ce point, je note que l'affidavit à l'appui de la requête de Gulf Log en vue d'obtenir un cautionnement pour frais, qui estimait les dépens taxables estimatifs qui seraient nécessaires pour contester l'action, ne comportait qu'une demande au titre de l'article 7. La première demande au titre de l'article 10 n'est pas appropriée dans le cas de négociations en vue d'un règlement. Toutefois, le régime des règles vise à encourager le règlement et tous les efforts en ce sens doivent être traités de façon positive. Plus d'une demande au titre de l'article 27 peut être allouée pour les services non couverts aux articles 1 à 26. J'alloue 2 unités au titre de l'article 27. J'alloue, pour la seconde demande au titre de l'article 10, les 5 unités demandées.


[15]            Dans la décision Association Olympique Canadienne c. USA Hockey Inc. et al., A-472-97 (2001 C.A.F. 32) du 22 février 2001, j'ai indiqué, au paragraphe [14], qu'il est possible de faire droit à une deuxième demande au titre de l'article 8 au cours de l'intervalle avant la reprise d'un interrogatoire. En l'espèce, je n'alloue qu'une seule demande au titre de l'article 8, au maximum de 5 unités dans les circonstances, pour la préparation de l'interrogatoire de Shirley Weishun. Au titre de l'article 9, j'accepte l'estimation du nombre d'heures et j'alloue les 10 unités et 8 unités demandées pour les deux jours, respectivement. Pour la préparation de l'interrogatoire de Douglas Cooper, j'alloue 4 unités dans les circonstances, au lieu du maximum de 5 unités qui avait été demandé. La demande de 5 unités par rapport à lui au titre de l'article 9 donne à penser qu'on a probablement calculé en fonction d'une fraction d'heure comme durée. J'alloue les 5 unités demandées. Pour la préparation du contre-interrogatoire sur l'affidavit de Shirley Weishun au titre de l'article 8 et la présence à ce contre-interrogatoire au titre de l'article 9, les demandes de 3 unités et 2 unités sont justifiées dans les circonstances.


[16]            Essentiellement, à part l'affirmation, faite sur la foi de renseignements tenus pour véridiques dans l'affidavit à l'appui, que tous les débours engagés pour ce litige étaient raisonnables et nécessaires, la preuve des télécopies et des photocopies consiste en des imprimés d'ordinateur indiquant la date, le montant, le client et le service, mais non l'objet. Mon approche dans les cas où on n'a pas une preuve absolue des photocopies et des télécopies a été exposée dans la décision Carlile c. La Reine, 97 D.T.C. 5284 et Local 4004, Division du transport aérien du Syndicat de la fonction publique c. Air Canada du 25 mars 1999 dans le dossier T-323-98. Certains des frais de Gulf Log peuvent se rapporter à la Couronne provinciale, mais si c'est le cas, cela n'est pas pertinent parce qu'ils n'ont pas d'autre cause que l'introduction de ce litige par la demanderesse. J'alloue la somme de 148,00 $ demandée pour les télécopies. J'alloue le montant réduit de 450,00 $ pour les photocopies. Conformément à la décision Pharmacia Inc. et al. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et al. 1999 Carswell Nat 2244 (T-2291-93, O.T.) aux par. [48] à [55], j'alloue la recherche informatisée au montant demandé de 110,29 $. En ce qui concerne les transcriptions, j'alloue la somme de 2 318,25 $ qui a été demandée, parce que j'accepte la prémisse que la jurisprudence obligeait Gulf Log à envisager les implications d'ensemble pour l'industrie de la récupération de grumes. Les extraits des transcriptions reflètent une tentative raisonnable de créer un dossier factuel complet par rapport à la position de Gulf Log que de nombreux récupérateurs estiment que le régime législatif actuel fournit une rémunération adéquate pour la récupération des grumes.


[17]            L'article 402 des règles prévoit les dépens après un désistement, en l'absence d'ordonnance ou d'entente, et la seule mention d'un jugement dans cet article se situe dans le contexte de l'exécution forcée pour obtenir le paiement des dépens, « comme s'ils avaient été adjugés par jugement rendu en faveur ... » , mais non dans le contexte de la taxation de ces dépens. Donc, je ne pense pas que l'alinéa 420 (2)a) des règles, qui présume qu'un jugement existe, s'applique ici. La formulation de l'alinéa 420 (2)b) des règles, qui envisage le cas où le demandeur « n'obtient pas gain de cause » n'est pas restrictive, c'est-à-dire que, selon son sens ordinaire, elle n'empêche pas le désistement de déclencher le doublement des dépens (les honoraires, mais non les débours). Il se peut qu'une offre de règlement ne soit pas crédible dans les circonstances d'une procédure donnée. En l'espèce, je conclus que l'offre de Gulf Log correspondait raisonnablement à la position prise dans sa défense. J'alloue le double des dépens ainsi qu'il a été demandé. La présente taxation n'a pas été particulièrement difficile. J'alloue les 4 unités demandées au titre de l'article 26. Le mémoire de dépens de Gulf Log, qui s'élevait à 22 931,24 $, est taxé et un montant de 20 559,55 $ est alloué.

   « Charles E. Stinson »    

      Officier taxateur

Vancouver (C.-B.)

6 novembre 2001

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                         T-588-00                                                

INTITULÉ :                                                        Early Recovered Resources Inc.

c. Gulf Log Salvage Co-Operative Association et al.

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                              le 4 septembre 2001

TAXATION DES DÉPENS - MOTIFS :    Charles E. Stinson        

DATE DES MOTIFS :                                    le 6 novembre 2001

COMPARUTIONS :

Angela McCue                                                     POUR LA DEMANDERESSE

M. Venton

David F. McEwen                                                POUR LA DÉFENDERESSE

GULF LOG SALVAGE CO-OPERATIVE ASSOCIATION             

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sierra Legal Defence Fund                                   POUR LA DEMANDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)

McEwen, Schmitt & Co.                                     POUR LA DÉFENDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)

Procureur général                                                 POUR LES DÉFENDEURS

Victoria (Colombie-Britannique)                         SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF

DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE ET AL.           

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