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     Date : 19971212

     Dossier : T-1-96

OTTAWA, le 12 décembre 1997

EN PRÉSENCE DE : Monsieur le juge MacKay

ENTRE :

     JAMES KILBURN,

     requérant,

     - et -

     CONSEIL DU TRÉSOR

     (Transports Canada),

     intimé.

     VU le dépôt par le requérant d'une demande de contrôle judiciaire et d'ordonnance portant annulation de la décision en date du 24 novembre 1995 rendue sous le régime de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, par laquelle l'arbitre a rejeté le grief que le requérant a présenté contre l'intimé, son employeur;

     APRÈS avoir entendu les avocats des parties à Ottawa le 25 avril 1997, après avoir mis l'affaire en délibéré et après avoir examiné les observations qui ont alors été faites, y compris les observations du requérant selon lesquelles il devrait, pour des raisons spéciales, avoir droit aux frais de l'interrogatoire auquel l'intimé l'a soumis à Toronto relativement à son affidavit;


     ORDONNANCE

     LA COUR ORDONNE :

     1.      La demande est accueillie.
     2.      La décision de l'arbitre est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre arbitre en vue d'un nouvel examen.
     3.      Comme il n'y a pas de raisons spéciales de rendre une ordonnance adjugeant les dépens en vertu de la règle 1618, chaque partie supportera ses propres dépens.

                                 W. Andrew MacKay

                                         Juge

Traduction certifiée conforme

Marie Descombes, LL.L.

     Date : 19971212

     Dossier : T-1-96

ENTRE :

     JAMES KILBURN,

     requérant,

     - et -

     CONSEIL DU TRÉSOR

     (Transports Canada),

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE MacKAY

[1]          Le requérant demande que soit rendue une ordonnance annulant la décision en date du 24 novembre 1995 par laquelle un arbitre de grief nommé en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35, modifiée, (la LRTFP), a rejeté le grief présenté par le requérant contre son employeur, Transports Canada. L'arbitre a conclu que l'employeur n'a pas agi de manière inéquitable ou déraisonnable en refusant d'accorder une prolongation du maintien du traitement à l'expiration de la période normale d'un an, malgré le fait que cette période et son éventuelle prolongation à la suite de consultations et d'une entente étaient prévues dans la convention collective applicable à l'emploi du requérant.

Les faits

[2]          Avant sa maladie puis son départ à la retraite involontaire, le requérant était contrôleur de la circulation aérienne opérationnel affecté à la tour de Toronto. Le 5 septembre 1991, il a pris un congé de maladie et a finalement demandé de prendre une retraite involontaire au motif qu'il était inapte pour des raisons de santé à remplir ses fonctions de contrôleur.

[3]          Tous les contrôleurs aériens étaient tenus d'avoir un certificat de validation de licence comme condition rattachée à la licence requise pour exercer leur emploi. Ce certificat exigeait le respect de certaines normes médicales et l'obtention d'une attestation d'aptitude physique et mentale. Cette attestation était délivrée à la suite d'une évaluation faite par un médecin régional, aviation, en partie sur la foi du rapport d'un médecin-examinateur de l'aviation civile autorisé à faire les examens médicaux prescrits. C'est au contrôleur qu'il incombait d'obtenir l'attestation en question. Après avoir été examiné par un médecin-examinateur de l'aviation civile, le contrôleur avait normalement quatre-vingt-dix jours pour demander au médecin régional de délivrer une attestation d'aptitude physique et mentale. Outre le rapport périodique habituel du médecin-examinateur de l'aviation civile, le médecin régional pouvait demander d'autres renseignements ou rapports médicaux pour établir l'aptitude du contrôleur.

[4]          En cas de maladie, les directives ministérielles obligeaient un contrôleur qui s'absentait pour des raisons de santé à présenter un certificat médical. Selon la convention collective applicable au syndicat des contrôleurs, un contrôleur devait satisfaire aux exigences médicales de la manière prévue par l'employeur. Cette convention comprenait une lettre d'entente (la Lettre d'entente 3-91) qui prévoyait le maintien du traitement d'un contrôleur qui, entre autres choses, avait utilisé tous les crédits de congé de maladie auxquels il avait droit et avait été déclaré inapte au travail pour des raisons de santé et avait perdu son certificat de validation de licence. La Lettre d'entente disait notamment ce qui suit :

     La période totale de maintien du traitement prévue dans la présente lettre est d'un an pour la totalité de la période d'emploi dans la fonction publique sauf si, à la suite de consultations au sujet de cas particuliers, les parties s'entendent sur une prolongation de cette période.         

[5]          Les exigences relatives à une retraite involontaire étaient régies par l'article 52 du Règlement sur la pension de la fonction publique, C.R.C., ch. 1358, modifié, et étaient précisées dans le Bulletin du personnel 84-20 daté du 23 octobre 1984. Aux termes de l'alinéa 52a) du Règlement, une retraite involontaire était possible lorsque " [...] l'employé est incapable de satisfaire aux exigences médicales inhérentes à la validation de son permis de contrôleur de la circulation aérienne [...] par le ministère des Transports ". Le Bulletin précisait en outre que la preuve requise pour obtenir une retraite involontaire comprenait une lettre des autorités compétentes de Transports Canada annulant la licence du contrôleur pour des raisons de santé et une lettre de la direction retirant l'employé du service parce qu'il n'était plus titulaire d'une licence valide.

[6]          Le requérant, M. Kilburn, a quitté son emploi pour des raisons de santé en septembre 1991, mais a attendu jusqu'en mars 1992, malgré plusieurs rappels, pour envoyer les formulaires habituels exigés des personnes qui sont en congé de maladie. Le certificat de validation de licence du requérant a expiré le 1er avril 1992. Au mois de février, on lui avait rappelé de le renouveler, mais il ne l'a pas fait. Après le mois de juin 1992, il a de nouveau négligé d'envoyer des certificats médicaux expliquant pourquoi il était incapable de travailler, bien que la direction ait continué de les lui demander. En novembre et en décembre 1992, son gestionnaire lui a écrit pour l'avertir qu'il serait placé en congé sans solde s'il n'envoyait pas les rapports médicaux et il a pris des mesures pour obtenir le renouvellement de son certificat de validation de licence.

[7]          En décembre 1992, le requérant a été examiné par un médecin-examinateur de l'aviation civile qui l'a déclaré inapte au travail pour des raisons de santé à cause de problèmes psychiatriques, dont l'angoisse et la dépression, et d'un problème d'alcoolisme. Sur réception de ce rapport, le surintendant des Services de la circulation aérienne et des ressources humaines (le surintendant) a écrit à M. Kilburn pour l'informer qu'il bénéficierait d'un maintien du traitement du 24 janvier 1993 au 23 janvier 1994. Le surintendant a posé des questions au requérant sur son aptitude au travail, et celui-ci a répondu qu'il était incapable d'exercer ses fonctions et qu'aucune date de retour au travail n'avait été fixée. Le 27 janvier, soit après le commencement de la période de maintien du traitement, le médecin régional a écrit au requérant pour lui demander un complément d'information sur son état de santé. Le requérant n'aurait pas reçu cette lettre. Le médecin-examinateur de l'aviation civile qui a déclaré que le requérant était inapte au travail en décembre 1992, auquel une copie de cette lettre a été envoyée, ne l'a pas reçue non plus. En fin de compte, cette demande est restée sans réponse.

[8]          On a ordonné au gestionnaire de continuer de demander au requérant d'envoyer des rapports médicaux tous les mois pendant la période de maintien du traitement. À ce stade-là, aucune mesure ne pouvant être prise par le médecin régional relativement à l'état de santé du requérant à la suite de l'examen médical fait en décembre 1992, le certificat de validation de licence, bien qu'expiré depuis plusieurs mois, n'était apparemment pas censé être suspendu définitivement tant que le médecin régional n'aurait pas évalué l'aptitude physique et mentale du requérant et pris une décision à cet égard.

[9]          Le 13 juillet 1993, le gestionnaire a écrit au requérant pour lui demander d'envoyer les formulaires médicaux de façon périodique et, dans une autre lettre, il lui a demandé de donner son consentement à une évaluation de son aptitude physique et mentale par un médecin de Santé et Bien-être social Canada et de prendre un engagement à cet égard. Cette façon de procéder n'est pas expressément prévue par les règlements, la convention collective ou la pratique courante. Dans les circonstances, les supérieurs du requérant tenaient beaucoup à avoir une évaluation indépendante de son état de santé.

[10]          Le requérant a été absent pendant presque tout l'été 1993 et, en novembre, comme il n'avait pas encore fourni les formulaires demandés au mois de juillet précédent, son gestionnaire lui a écrit à plusieurs reprises pour l'aviser que si un médecin de Santé et Bien-être social Canada ne procédait pas à une évaluation, il serait impossible de demander une retraite involontaire à la fin de la période de maintien du traitement. Le requérant a rempli les formulaires de consentement en question au début de novembre. Lorsque le médecin de Santé et Bien-être social Canada les a reçus, il a écrit au médecin désigné par le requérant comme son médecin de famille, et ce dernier a répondu au début de décembre 1993 qu'il n'était plus le médecin personnel de M. Kilburn et n'était pas en mesure de fournir des renseignements à jour. Le médecin de Santé et Bien-être social Canada a écrit à Transports Canada au début de décembre pour transmettre ces renseignements et indiquer que le requérant serait tenu de fournir de nouveaux formulaires de consentement précisant les noms de ses médecins. Il semble qu'on ait eu tort de prendre la décision de demander ces nouveaux formulaires de consentement, du moins dans la mesure où cette décision incluait le consentement à l'examen du requérant par des employés de Santé et Bien-être social Canada. Cet examen avait initialement été autorisé jusqu'à la mi-janvier 1994. C'est à la mi-janvier 1994 seulement que le requérant a reçu l'avis que des formulaires de consentement supplémentaires étaient requis, et à peu près au même moment son gestionnaire a ordonné de mettre le requérant en congé sans solde à compter du 24 janvier, soit le lendemain du jour où la période de maintien du traitement expirait.

[11]          Entre-temps, par lettre datée de la mi-décembre 1993, que son gestionnaire n'a reçue qu'un mois plus tard, le requérant avait demandé à prendre une retraite involontaire. Toutefois, ainsi qu'il vient d'être mentionné, lorsque sa période de maintien du traitement a expiré le 23 janvier, M. Kilburn a été mis en congé sans solde. Le surintendant a alors envoyé au requérant une lettre circonstanciée dans laquelle il l'informait que sa demande de retraite involontaire était refusée parce que le médecin régional ne l'avait pas encore jugé " inapte ". Il informait en outre le requérant que le traitement d'une retraite, volontaire ou involontaire, prendrait trois mois, et il lui demandait de fournir des rapports médicaux pour la période de son absence et de remplir de nouveaux formulaires de consentement en vue d'un examen par des médecins de Santé et Bien-être social Canada. L'employeur a reçu ces formulaires de consentement remplis le 31 janvier 1994.

[12]          Pendant toute la période qui a pris fin en janvier 1994, il semble que le syndicat a été consulté et tenu au courant par le gestionnaire et le surintendant, et a parfois été invité à intervenir. Toutefois, cela n'a pas amené le requérant à remplir les formalités de retraite involontaire en temps opportun.

[13]          Le 2 mars 1994, le requérant a demandé que la période de maintien du traitement soit prolongée avec effet rétroactif à compter du 24 janvier 1994 au motif que [traduction] " [c]e n'est pas de ma faute si le [médecin régional] n'a pas encore annulé mon [certificat], de sorte que j'ai été incapable de me prévaloir d'une retraite anticipée ". Le surintendant a résumé la situation pour l'administration centrale en qualifiant d'" inexactes " les affirmations du requérant voulant qu'il n'y soit pour rien.

[14]          L'affaire a été étudiée par un haut fonctionnaire de l'administration centrale de la circulation aérienne à Ottawa le 10 mars 1994. Après avoir examiné la demande du requérant et les observations du surintendant, il a recommandé de ne pas prolonger le maintien du traitement au motif qu'il n'y avait pas de raison impérieuse de le faire et que la prolongation, si elle était accordée, serait rétroactive et pour une période indéterminée. Il était mentionné dans ce rapport que le requérant avait apparemment été autorisé à prendre un congé de maladie pendant plus d'un an sans que la direction ne s'y oppose, avait laissé passer la date de son examen médical annuel par un médecin-examinateur de l'aviation civile sans demander une évaluation, n'avait pas fourni les renseignements demandés par le médecin régional, n'avait pas renvoyé les formulaires remplis qu'on lui avait à plusieurs reprises demandé de soumettre, était depuis longtemps reconnu pour son manque de coopération et n'avait pas demandé la prolongation du maintien du traitement pendant la période initiale de maintien du traitement. Pour faire ces commentaires, le fonctionnaire de l'administration centrale n'a pas consulté le syndicat ni reçu d'observations de ce dernier. Son rapport et ses recommandations ont été acceptés le 11 mars 1994 par le directeur des Services de la circulation aérienne, qui a refusé la demande du requérant sans donner de motifs. Une lettre avisant M. Kilburn de ce refus lui a été envoyée le 22 mars 1994.

[15]          Entre-temps, des dispositions avaient été prises le 7 mars relativement à l'évaluation proposée par des médecins de Santé et Bien-être social Canada, et des rendez-vous médicaux avec des spécialistes avaient été pris pour le requérant. À la mi-avril 1994, le responsable de Santé et Bien-être social Canada a écrit à Transports Canada pour l'aviser que le requérant était inapte au travail et que si le médecin du requérant préparait les documents nécessaires, la retraite anticipée du requérant pour des raisons de santé pourrait être prise en considération.

[16]          En avril 1994, le surintendant est devenu le nouveau gestionnaire de la tour Pearson à Toronto. Lorsque le requérant a communiqué avec lui en mai 1994 pour lui dire qu'il avait été déclaré inapte au travail pour des raisons de santé, le gestionnaire a indiqué qu'avec ce rapport le médecin régional serait en mesure de terminer son évaluation. Par la suite, toutefois, le médecin régional a indiqué qu'il ne pouvait pas s'appuyer sur le rapport de Santé et Bien-être social Canada. En effet, vu que le dernier rapport médical du requérant datait de décembre 1992, soit plus d'un an auparavant, son dossier était inactif. En ce qui concerne le médecin régional, il fallait que le requérant soit examiné à nouveau par un médecin-examinateur de l'aviation civile.

[17]          À la mi-juin, le gestionnaire a pris des dispositions pour aider le requérant à se faire examiner par le médecin-examinateur de l'aviation civile. Le gestionnaire a emmené le requérant dans divers bureaux pour accélérer le processus de mise à la retraite. M. Kilburn a ensuite été évalué par le médecin régional qui l'a déclaré " inapte " pour des raisons de santé. Lorsque cette évaluation a été transmise au directeur régional responsable de la délivrance des licences, le certificat et la licence du requérant ont été suspendus. Le requérant a ensuite signé une lettre de démission, puis a été démis de ses fonctions. Sa demande de retraite involontaire a été acceptée et est entrée en vigueur le 20 juin 1994.

[18]          Le 22 juin 1994, le gestionnaire, au nom du requérant mais à l'insu de ce dernier, a présenté une demande de prolongation avec effet rétroactif du maintien du traitement du requérant, soit du 24 janvier au 20 juin 1994, au motif que le requérant avait subi un préjudice sur le plan pécuniaire pendant qu'il était en congé sans solde, et que le retard dans le traitement de la retraite involontaire était en partie attribuable, selon le gestionnaire, à Transports Canada. Cette demande n'a pas été discutée avec le requérant à ce moment-là et n'a pas été portée officiellement à la connaissance du syndicat.

[19]          Cette recommandation du gestionnaire a été examinée une fois de plus à l'administration centrale par le même fonctionnaire qui avait antérieurement recommandé le refus de la demande de prolongation du maintien du traitement. Celui-ci a de nouveau recommandé, le 30 juin, que cette deuxième demande soit refusée. Il a invoqué la difficulté qu'entraîne la création d'un précédent pour la prolongation avec effet rétroactif d'un maintien du traitement et a indiqué que le retard dans le traitement de la demande de retraite involontaire du requérant était attribuable au manque de coopération de ce dernier. Une fois de plus, le syndicat n'a pas été consulté, et comme il n'a pas été mis au courant de cette demande, il n'a pas soumis d'observations. Le 30 juin 1994, le directeur a refusé la deuxième demande sans fournir de motifs. Par lettre en date du 4 juillet, le requérant a été informé par son gestionnaire que la deuxième demande avait été faite mais avait été refusée.

[20]          Par la suite, le requérant a présenté un grief relativement à la décision prise le 30 juin. Ce grief a été rejeté à différents paliers et a été soumis à un arbitre nommé en vertu de la LRTFP, qui a entendu l'affaire en octobre 1995. L'arbitre a rejeté le grief dans une décision en date du 24 novembre 1995.

La décision de l'arbitre

[21]          La question soumise à l'arbitre était de savoir si, pour déterminer s'il convenait de prolonger le maintien du traitement, l'employeur était tenu par la Lettre d'entente 3-91 de consulter le syndicat et si l'employeur avait l'obligation implicite d'appliquer la convention collective de manière équitable et raisonnable. En particulier, le requérant a soutenu devant l'arbitre que l'employeur avait l'obligation de prendre l'initiative du processus de consultation avec le syndicat et n'a pas tenu compte de l'état de santé du requérant et de son incidence sur la capacité de ce dernier de prendre de bonnes décisions. De plus, l'arbitre a entendu le témoignage du requérant, y compris son opinion que les examens médicaux qu'on lui avait demandé de subir étaient inutiles et s'apparentaient à du harcèlement de la part de la direction.

[22]          L'arbitre a statué que la Lettre d'entente 3-91 ne contenait aucune disposition de consultation semblable à celle qu'on trouve normalement dans les conventions collectives. De l'avis de l'arbitre, le libellé de la Lettre d'entente 3-91 prévoit la possibilité d'une prolongation de la période de maintien du traitement d'un an si, à la suite de consultations au sujet d'un cas particulier où une telle prolongation est demandée, les parties s'entendent sur ce point. L'arbitre a statué que la partie qui prend l'initiative de ces consultations serait normalement celle qui demande la prolongation et, en l'espèce, il n'incombait pas à l'employeur de prendre l'initiative du processus de consultation. Le passage pertinent de la décision de l'arbitre est le suivant :

         Le troisième paragraphe [de la Lettre d'entente 3-91] n'est pas une disposition de "consultation" comme on en retrouve normalement dans les conventions collectives. En fait, la convention collective entre les parties contient une disposition très élaborée sur les consultations [...] laquelle décrit les procédures très spécifiques à suivre pour entamer des consultations aux échelons national, régional et local. Le troisième paragraphe, lui, ne fait qu'énoncer que l'employé admissible a droit au MDT pour une période totale d'un an durant la totalité de la période d'emploi dans la fonction publique. Il prévoit en outre cependant la possibilité d'une prolongation de cette période si les parties parviennent à s'entendre à l'issue de consultations. Il semble apparent alors qu'une des parties doit entamer des consultations relativement à un cas particulier si elle a l'intention de demander une prolongation de la période d'un an. Selon moi, la partie qui demanderait ces consultations serait normalement celle qui désire obtenir une prolongation, soit, en l'occurrence, le fonctionnaire s'estimant lésé ou ses représentants. Selon moi, rien n'oblige l'employeur à prendre l'initiative du processus de consultation.         

[23]          En ce qui concerne la question de savoir si la direction a agi de manière équitable et raisonnable, l'arbitre a refusé de se prononcer sur la question de savoir si l'employeur avait une telle obligation, mais a statué que de toute façon la direction n'avait pas agi de manière déraisonnable en demandant au requérant d'envoyer divers certificats médicaux et de se soumettre à des examens médicaux dans le but de déterminer s'il était " apte " au travail. Bien que la maladie du requérant explique peut-être son manque de coopération, l'employeur ne pouvait être tenu responsable de ce manque de coopération ou du retard qui en est résulté. Il découle implicitement de ces conclusions que l'employeur n'a pas agi de manière déraisonnable en refusant de prolonger le maintien du traitement du requérant.

Les questions en litige

[24]          Le requérant soutient que les questions litigieuses soumises à la Cour en l'espèce sont au nombre de trois. Premièrement, il s'agit de savoir si l'arbitre a commis une erreur de droit en concluant que la Lettre d'entente 3-91 n'obligeait pas l'employeur à prendre l'initiative du processus de consultation ou à obtenir le consentement du syndicat avant de prendre une décision sur les demandes de prolongation du maintien du traitement. Deuxièmement, il s'agit de savoir si l'arbitre a commis une erreur de droit en refusant de se prononcer expressément sur l'obligation générale de l'employeur d'exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère la Lettre d'entente 3-91 de manière équitable et raisonnable. Troisièmement, il s'agit de savoir si la décision de l'arbitre selon laquelle l'employeur n'a pas agi de manière déraisonnable en refusant de prolonger la période de maintien du traitement constitue une erreur de droit.

Analyse

[25]          Les parties ont fondamentalement convenu qu'il faut faire preuve de retenue dans le cadre de la révision de la décision rendue par un arbitre nommé en vertu de la LRTFP. Les avocats des deux parties se sont référés à de récentes décisions de la Cour, postérieures à la modification de la LRTFP, entrée en vigueur en 19931, qui a supprimé la clause privative qui figurait antérieurement dans la Loi. Les parties s'entendent sur la norme, mais pas sur son application dans les circonstances de l'espèce.

[26]          Dans l'affaire Canada (Procureur général) c. Wiseman2, mon collègue le juge Cullen a fait les remarques suivantes sur la norme appropriée :

     [...] J'ai examiné les critères susmentionnés et les arrêts de la Cour suprême du Canada concernant la norme de contrôle et je conclus qu'il faut faire preuve d'une grande retenue à l'égard de la décision que l'arbitre a rendue en l'espèce, en particulier parce qu'elle se rapporte à une question qui relève directement du champ de compétence et d'expertise spéciale de l'arbitre. Je n'ai pu arriver à une formule toute faite - comme celle du "caractère manifestement déraisonnable" - pour décrire le genre de décision qui exige l'intervention judiciaire, mais il suffit de dire que seules les décisions qui ne peuvent pas être étayées par la preuve peuvent faire l'objet d'une intervention.         

Cette norme doit s'appliquer dans la mesure où l'objet des questions litigieuses dans une affaire relève de la compétence de l'arbitre3.

[27]          Dans l'affaire Canada (Procureur général) c. Séguin4, le juge Pinard a été appelé à examiner la jurisprudence relative à la norme à appliquer dans le cadre d'un contrôle judiciaire ayant trait à la LRTFP. Il a expliqué son refus de modifier la décision de l'arbitre en ces termes :

     [...] j'entends faire preuve de grande retenue judiciaire et m'abstenir d'intervenir en regard d'une décision arbitrale qui, dans les limites de la compétence attribuée par la loi, a, de façon suffisamment rationnelle, interprété une convention collective en s'appuyant sur des faits mis en preuve, et ce, sans porter atteinte aux principes de justice naturelle ou à l'équité procédurale.         

[28]          J'en viens maintenant à l'espèce. Si je comprends bien le premier moyen invoqué par le requérant, l'interprétation des exigences de la Lettre d'entente 3-91 portant sur les consultations et l'entente entre les parties est une question de droit. Le requérant soutient qu'en concluant que l'employeur n'était pas tenu de prendre l'initiative du processus de consultation au sujet d'une prolongation de la période de maintien du traitement, ni même d'en informer le syndicat, l'arbitre a rendu le passage pertinent de la Lettre d'entente vide de sens, ce qui, du moins implicitement, est déraisonnable et constitue une erreur de droit. Le passage pertinent, ainsi qu'il vient d'être mentionné, dispose que " [l]a période totale de maintien du traitement prévue dans la présente lettre est d'un an pour la totalité de la période d'emploi dans la fonction publique sauf si, à la suite de consultations au sujet de cas particuliers, les parties s'entendent sur une prolongation de cette période ". Selon l'avocat du requérant, ce passage obligeait l'employeur à consulter le syndicat les deux fois qu'une demande de prolongation a été présentée, ce que l'employeur n'a pas fait.

[29]          Il ne fait aucun doute que l'arbitre, en interprétant la Lettre d'entente 3-91, s'est prononcé sur une question qui relevait manifestement de sa compétence particulière, à savoir l'interprétation d'une convention collective. Cela étant, vu la jurisprudence relative à la norme de contrôle judiciaire, je ne puis modifier la décision que si elle a été rendue d'une manière qui n'est pas assez rationnelle par rapport aux faits présentés en preuve ou que si elle porte atteinte aux règles de justice naturelle ou d'équité procédurale.

[30]          Malgré les exhortations de l'avocat du requérant, je refuse de modifier la conclusion de l'arbitre que la mention, dans la Lettre d'entente 3-91, de la tenue de consultations et d'une entente entre les parties n'obligeait pas, normalement, l'employeur à prendre l'initiative du processus de consultation. Comme l'a dit l'arbitre, " la partie qui demanderait ces consultations serait normalement celle qui désire obtenir une prolongation, soit, en l'occurrence, le fonctionnaire s'estimant lésé ou ses représentants ". Selon moi, cette décision n'est pas déraisonnable au point de justifier l'intervention de la Cour. La question de savoir si la Cour souscrit à l'interprétation et à l'application de la Lettre d'entente 3-91 par l'arbitre dans le cas de la première demande, une demande normale présentée par le requérant, " [la partie] qui désire obtenir une prolongation ", est sans importance. Je ne suis pas convaincu que cette interprétation, et son application à cette demande, est déraisonnable au point de constituer une erreur de droit justifiant l'intervention de la Cour.

[31]          J'ai plus de difficulté à accepter la conclusion de l'arbitre, qui applique implicitement la même interprétation aux mesures prises par l'employeur, quant à la deuxième demande de prolongation de la période de maintien du traitement. Selon mon interprétation de cette décision, l'arbitre n'établit aucune distinction entre les faits sur lesquels reposent chacune de ces demandes. Pour statuer qu'il n'incombait pas à la direction de prendre l'initiative du processus de consultation, l'arbitre se réfère expressément aux circonstances normales dans lesquelles la partie qui désire obtenir une prolongation serait censée prendre l'initiative du processus de consultation. À mon avis, les circonstances factuelles se rapportant aux deux demandes en l'espèce exigeaient que chaque demande soit examinée séparément. La deuxième demande a été présentée par le gestionnaire, non par le requérant. Bien que le dossier n'indique pas clairement si le nouveau gestionnaire a mentionné, en passant, l'existence de la deuxième demande à un représentant du syndicat local, rien ne permet de croire que le syndicat a été officiellement avisé de l'existence de cette demande avant qu'une décision ne soit rendue. Il est évident que le requérant a été informé de la deuxième demande seulement après que la décision défavorable a été prise.

[32]          La deuxième demande ne correspondait pas à la propre conception que se faisait l'arbitre des circonstances normales dans lesquelles la partie qui désire obtenir une prolongation de la période de maintien du traitement en ferait la demande. Lorsque ni un requérant ni son syndicat ne sont au courant d'une demande de prolongation présentée dans son intérêt, il est déraisonnable de présumer que l'un d'eux devrait prendre des mesures en vue de la tenue de consultations. Il me semble certainement que la Lettre d'entente 3-91 prévoyait, dans les circonstances de la deuxième demande, que le syndicat ou le requérant soit mis au courant de la demande.

[33]          L'avocat de l'intimé a fait valoir que la deuxième demande était simplement un geste posé à titre gratuit par un autre employé, en l'occurrence le gestionnaire du requérant, pour venir en aide à ce dernier. Apparemment, cet employé se sentait personnellement responsable d'une partie du retard dans l'obtention de l'évaluation médicale indispensable de l'état du requérant. Comme il n'a pas posé ce geste à titre de représentant du requérant, ce dernier ne devrait acquérir aucun droit en vertu de la convention collective. C'est peut-être une conclusion appropriée, mais ce n'est pas celle qu'a formulée l'arbitre et ce n'est pas une conclusion qu'il appartient à la Cour de tirer.

[34]          À mon sens, l'arbitre a commis une erreur de droit en ne tenant aucun compte de l'application de la convention collective, comme le prévoyait la Lettre d'entente 3-91, dans les circonstances relatives à la deuxième demande, à savoir l'omission de l'employeur d'aviser le requérant ou son syndicat de la demande. Selon moi, la convention collective, telle que l'a interprétée l'arbitre, n'a pas été appliquée en tenant compte des faits présentés en preuve concernant la deuxième demande de prolongation. En conséquence, je suis d'avis de faire droit à la présente demande de contrôle judiciaire et de renvoyer l'affaire à un autre arbitre en vue d'un nouvel examen.

[35]          Je traite brièvement les autres questions soulevées par le requérant. En ce qui concerne l'argument selon lequel l'arbitre était obligé de déterminer, en principe, si l'employeur avait l'obligation générale d'appliquer la convention collective de manière équitable et raisonnable, je n'admets pas que le défaut de statuer définitivement sur cette question de principe, comme le requérant l'a demandé à l'audition devant l'arbitre, est une erreur justifiant un contrôle. Qui plus est, l'arbitre a bien précisé que même si l'employeur avait l'obligation d'agir de manière équitable et raisonnable, cette norme avait été respectée. L'arbitre a conclu que " la direction n'a pas agi de manière déraisonnable " en insistant pour obtenir une preuve de l'état de santé du requérant. De plus, la conclusion de l'arbitre que la direction n'était pas obligée de prendre l'initiative du processus de consultation appuie le corollaire de sa décision prise globalement, c'est-à-dire que l'employeur n'a pas agi de manière déraisonnable en refusant les demandes de prolongation.

[36]          L'avocat du requérant a fait valoir que l'employeur est tenu, par une condition qui est implicite dans la convention collective et qui découle de la nature de la négociation collective, d'exercer son pouvoir discrétionnaire de manière équitable et raisonnable, en l'espèce relativement à la prolongation de la période de maintien du traitement selon les modalités de la Lettre d'entente 3-91. On a porté à ma connaissance, de même qu'à celle de l'arbitre, des décisions5 qui appuient le principe défendu en l'espèce. Dans sa décision, l'arbitre s'est référé à ces décisions et a fait remarquer que " la question de savoir si l'employeur doit agir équitablement et raisonnablement en exerçant son pouvoir discrétionnaire est une question au sujet de laquelle il existe une grande divergence de vues chez les arbitres ". Il s'est référé à l'analyse de la question par des auteurs et à une décision dans laquelle la Cour d'appel de l'Ontario a affirmé que la condition implicite invoquée en l'espèce n'avait pas été incorporée dans les dispositions d'une convention collective en ce qui concerne le pouvoir discrétionnaire de la direction6.

[37]          À mon avis, l'arbitre n'a pas commis d'erreur de droit en refusant d'énoncer un principe juridique général comme le requérant l'avait invité à le faire. On a fait valoir que la Cour devrait énoncer ce principe, afin de donner des directives à un arbitre si la demande de contrôle judiciaire est accueillie et que l'affaire est renvoyée à un arbitre en vue d'un nouvel examen. Ce n'est pas une raison pour que la Cour exprime un point de vue par principe, sans se référer à des faits particuliers. Un énoncé de principe semblable serait une simple opinion incidente.

[38]          J'en viens maintenant à la troisième question, qui consiste à savoir si l'arbitre a commis une erreur de droit en concluant que l'employeur n'a pas agi de manière déraisonnable en refusant de prolonger la période de maintien des prestations salariales en vertu de la Lettre d'entente 3-91. Selon l'avocat du requérant, l'arbitre a commis une erreur parce qu'il n'a pas tenu compte de la manière inéquitable dont l'employeur intimé a procédé et n'a pas fait un examen raisonnable des circonstances dans lesquelles s'inscrivaient les demandes de prolongation. Selon lui, la façon dont les deux demandes ont été examinées était inéquitable à cause du peu de temps qui s'est écoulé après la présentation de chaque demande et avant le prononcé de la décision défavorable; ce délai était si court qu'il a effectivement empêché la tenue de consultations. De plus, les renseignements inclus dans la révision de la première demande du requérant et dans la révision de la demande présentée par son gestionnaire la deuxième fois auraient fait abstraction de faits importants, comme la nature et la gravité de la maladie du requérant, et auraient déformé d'autres faits ayant trait aux demandes du requérant. Les renseignements fournis au décideur relativement aux demandes auraient été inexacts, incomplets et trompeurs, et auraient été présentés d'une manière qui était préjudiciable au requérant.

[39]          Pourtant, le requérant a eu la possibilité à l'audition du grief de faire valoir son point de vue et de mettre en évidence le caractère insuffisant de la preuve sur laquelle l'employeur s'est fondé pour se prononcer sur les demandes de prolongation. Nul ne prétend en l'espèce que l'arbitrage en tant que tel a été inéquitable sur le plan de la procédure. L'arbitre a été saisi d'éléments de preuve, y compris ceux qu'a présentés le requérant. Il les a appréciés pour rendre sa décision et n'a pas conclu, pour ce faire, que l'employeur n'avait pas respecté les normes fondamentales d'équité et de caractère raisonnable. Selon moi, l'arbitre pouvait tirer pareille conclusion.

[40]          La question soumise à la Cour dans le cadre du contrôle judiciaire n'est pas de savoir si les décisions de l'employeur étaient justes ou raisonnables. Il n'appartient pas à la Cour de reconsidérer la conclusion de l'arbitre à cet égard. Le rôle de la Cour consiste à déterminer si l'arbitre a rendu sa décision d'une manière rationnelle compte tenu des faits présentés en preuve, et à s'assurer que sa démarche ne portait pas atteinte aux règles de justice naturelle ou d'équité procédurale applicables. Je ne suis pas convaincu que le processus de prise de décision de l'arbitre ait été affligé de ces défauts. La preuve versée au dossier révèle que le retard dans le traitement de la demande de prolongation du maintien du traitement est attribuable, au moins en partie, au défaut du requérant de renvoyer les formulaires et de fournir les renseignements demandés en temps opportun. Je n'arriverai peut-être jamais à comprendre pourquoi une évaluation par des médecins de Santé et Bien-être social Canada, qui s'est révélée inutile, a été un facteur important qui a contribué à retarder l'évaluation de l'aptitude physique et mentale du requérant, et pourquoi la demande relative à cette évaluation est venue de la direction et non du médecin régional. De plus, il semblerait qu'il était inutile d'envoyer une deuxième série de formulaires de consentement à un examen par des médecins de Santé et Bien-être social Canada, et pourtant le retard causé par cette exigence de la direction n'a pas été pris en ligne de compte par l'employeur. Néanmoins, ce sont des questions découlant de la preuve qui a été soumise à l'arbitre, comme l'a également été la preuve du défaut du requérant de renvoyer les formulaires en temps opportun.

[41]          À mon avis, mis à part le défaut de l'arbitre de tenir compte des circonstances relatives à la deuxième demande, on ne saurait affirmer que celui-ci a pris sa décision d'une manière irrationnelle sans se fonder sur les faits présentés en preuve. Même si la Cour devait parvenir à une décision différente au vu du dossier, il n'y a pas lieu d'intervenir. En conséquence, je ne suis pas d'avis que la décision rendue par l'arbitre était à ce point abusive ou déraisonnable en ce qui a trait à l'appréciation de la preuve de la décision de l'employeur, particulièrement dans le contexte de la première demande du requérant, que la Cour devrait intervenir dans le cadre du présent contrôle judiciaire.

[42]          Deux autres questions ont été abordées au cours des débats devant moi. Premièrement, les parties n'étaient pas du même avis sur le poids à accorder à l'affidavit du requérant. L'avocat de l'intimé a soutenu que cet affidavit ne reflétait pas véritablement la connaissance personnelle du requérant. L'avocat du requérant a prétendu que les moyens invoqués par l'intimé sur ce point reprenaient simplement une question déjà tranchée dans une requête en radiation de la totalité ou d'une partie de l'affidavit que ma collègue Madame le juge McGillis a rejetée dans le cadre d'une instance interlocutoire. Comme ma décision ne s'appuie pas d'une manière importante sur des faits dont le requérant n'aurait pas eu personnellement connaissance, il est inutile que je me prononce sur cette question.

[43]          En dernier lieu, l'avocat du requérant a soutenu qu'il y avait, en l'espèce, des circonstances spéciales justifiant la mise à la charge de l'intimé, sur la base procureur-client, d'une partie des frais de la présente demande, soit les frais rattachés au contre-interrogatoire auquel le requérant a été soumis sur son affidavit à Toronto. L'avocat du requérant a soutenu que ce contre-interrogatoire représentait une dépense inutile car l'intimé n'en a tiré aucun avantage véritable. Le requérant avait accepté de dissiper d'une manière moins onéreuse les doutes que l'intimé pourrait avoir eus au sujet de l'affidavit. Le contre-interrogatoire a amené l'intimé à présenter une demande interlocutoire qui, après audition, a été rejetée.

[44]          Je ne suis pas convaincu que la décision de l'intimé de faire subir un contre-interrogatoire à l'intimé pourrait constituer des raisons spéciales justifiant l'attribution de dépens. Selon moi, les Règles autorisaient l'intimé à contre-interroger le requérant sur son affidavit. Le simple fait que les contradictions que l'intimé a semblé voir dans l'affidavit du requérant ne se sont pas révélées importantes n'est pas un motif suffisant de condamner la conduite de l'intimé en mettant les dépens à sa charge. Rien n'indique que l'intimé n'était pas de bonne foi. En l'espèce, le requérant a simplement prétendu qu'on pouvait remédier aux contradictions qui semblaient exister dans l'affidavit par un autre moyen qu'un contre-interrogatoire. Selon moi, cette affirmation ne suffit pas à rendre déraisonnable l'insistance de l'intimé à contre-interroger le requérant, ce que les Règles autorisaient l'intimé à faire.

Conclusion

[45]          Je conclus que l'arbitre a commis une erreur de droit dans la décision qu'il a rendue le 24 novembre 1995 en ne tenant aucun compte de l'application de la convention collective de la manière prévue dans la Lettre d'entente 3-91 aux circonstances relatives à la deuxième demande de prolongation de la période de maintien du traitement présentée au nom du requérant. Je fais droit à la présente demande et je renvoie l'affaire à un autre arbitre nommé en vertu de la LRTFP en vue d'un nouvel examen. Je ne donne pas d'instructions pour cette audition parce que l'interprétation et l'application des conditions de la Lettre d'entente 3-91 dans les circonstances relatives aux deux demandes de prolongation de la période de maintien du traitement sont des questions qui relèvent de la compétence d'un arbitre et qui n'intéressent pas directement la Cour.

[46]          L'ordonnance que je rends précise qu'il n'existe pas de circonstances spéciales semblables à celles que prévoit la règle 1618 qui justifient l'attribution de dépens.

                                 W. Andrew MacKay

                                         Juge

OTTAWA (Ontario)

Le 12 décembre 1997

Traduction certifiée conforme

Marie Descombes, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU DOSSIER :                  T-1-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :              James Kilburn c. Conseil du Trésor (Transports Canada)
LIEU DE L'AUDIENCE :              Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :              Le 25 avril 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE MACKAY

EN DATE DU :                      12 décembre 1997

ONT COMPARU :

M. Peter Barnacle                          POUR LE REQUÉRANT

Mme Maureen Crocker                          POUR L'INTIMÉ

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Peter Barnacle                          POUR LE REQUÉRANT

Association canadienne du contrôle

du trafic aérien

Nepean (Ontario)

Mme Maureen Crocker                          POUR L'INTIMÉ

Conseil du Trésor

Ottawa (Ontario)

__________________

     1      Voir la Loi sur la réforme de la fonction publique, L.C. 1992, ch. 54, art. 73, entrée en vigueur le 1er juin 1993.

     2      (1995), 95 F.T.R. 200. Voir aussi Reibin c. Canada (Conseil du Trésor) (1996), 114 F.T.R. 174; Barry c. Canada (Conseil du Trésor) (1996), 115 F.T.R. 281; Romanik c. Canada (Conseil du Trésor) (1996), 111 F.T.R. 134; Ouimet c. Canada (Conseil du Trésor) (1995), 106 F.T.R. 161.

     3      Green c. Canada (Conseil du Trésor), (8 juillet 1997), numéro du greffe T-171-96 (C.F. 1re inst.).

     4      (1995), 101 F.T.R. 64, à la p. 80.

     5      Council of Printing Industries of Canada and Toronto Printing Pressmen and Assistants' Union No 10. et al., (1983), 42 O.R. (2d) 404 (C.A.); Meadow Park Nursing Home and Service Employees International Union, Local 220 (1983), 9 L.A.C. (3d) 137; Canadian Union of Public Employees, Metropolitan Toronto Civic Employees' Union, Local 43 v. Metropolitan Toronto (Municipality) (1990), 74 O.R. (2d) 239 (C.A.); Re Brampton Hydro Electric Commission and C.A.W. - Canada et al. (1993), 108 D.L.R. (4th) 168 (C. div. Ont.).

     6      L'arbitre s'est référé aux auteurs Brown et Beatty, Canadian Labour Arbitration (3e éd.), aux p. 4-40 et 4-41; et à l'arrêt Metropolitan Toronto Board of Commissioners of Police and Metropolitan Toronto Police Association et al. (1981), 124 D.L.R. (3d) 684 (C.A. Ont.), le juge Houlden, à la p. 687.

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