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Date : 20040326

Dossier : T-805-03

Référence : 2004 CF 470

Ottawa (Ontario), le 26 mars 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE MACTAVISH

ENTRE :

                                                      MARTIN CRUICKSHANK

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                        LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Six mois après avoir décidé qu'un concours lancé par Industrie Canada ne respectait pas le principe du mérite, l'enquêteuse chargée par la Commission de la fonction publique d'examiner le processus de sélection est revenue sur sa décision. Après avoir obtenu des éclaircissements du ministère sur la vérification des références, elle a produit un deuxième rapport d'enquête dans laquelle elle a conclu que le principe du mérite avait été respecté et qu'aucune mesure de redressement n'était donc nécessaire.

[2]                Martin Cruickshank est le candidat non retenu dont la plainte a déclenché l'enquête. Il demande maintenant que le deuxième rapport de l'enquêteuse soit annulé au motif que celle-ci était, après avoir produit son premier rapport, dessaisie de la question de savoir si le principe du mérite avait été respecté. Il prétend en outre que, même si l'enquêteuse avait le pouvoir de revoir son premier rapport, ses conclusions initiales sont toujours valables et ne devraient pas être touchées par sa nouvelle appréciation de la preuve.

Contexte

[3]                Au début de 2001, Industrie Canada a lancé un concours pour doter un poste d'agent régional du droit de la concurrence à Toronto. M. Cruickshank est l'une des 129 personnes qui ont posé leur candidature. Comme il satisfaisait aux exigences indiquées dans l'énoncé de qualités, il a franchi l'étape de la présélection et a été évalué pour ce qui est du volet « connaissances » du concours. Un examen écrit a ensuite été utilisé pour évaluer certaines des « capacités » exigées. Les 11 personnes qui ont obtenu la note de passage, dont M. Cruickshank, ont ensuite subi une entrevue visant à évaluer les autres « capacités » ainsi que leurs « qualités personnelles » .

[4]                Il manquait trois points à M. Cruickshank pour réussir le volet « capacités » . L'examen de sa candidature s'est donc arrêté là. Ses références n'ont pas été vérifiées quant à la capacité C5, soit la capacité de travailler en équipe.


[5]                Après avoir appris les résultats du concours, M. Cruickshank a déposé une plainte auprès de la Commission de la fonction publique. Cette plainte contenait 15 allégations portant notamment sur la partialité du jury de sélection, l'attribution incorrecte des notes et la modification inacceptable des notes attribuées. Une enquêteuse a été chargée de déterminer si le concours avait été mené conformément au principe du mérite, en conformité avec l'article 7 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

[6]                Après avoir effectué son enquête, l'enquêteuse a produit un rapport le 16 octobre 2002 (le premier rapport), dans lequel elle rejetait la plupart des allégations de M. Cruickshank, mais faisait droit à celle selon laquelle le jury de sélection avait commis une erreur dans son évaluation de la capacité C5.

[7]                La partie essentielle du premier rapport de l'enquêteuse indique :

[traduction] ... J'estime que le jury de sélection a commis une erreur fatale dans son évaluation des candidats au regard de la capacité C5, soit la capacité de travailler efficacement en équipe.

Le ministère a indiqué, pendant la réunion sur la détermination des faits et dans ses prétentions écrites, [...] que la capacité C5 avait été évaluée à l'aide des réponses données à la question par les candidats au cours de l'entrevue et que les références avaient été demandées uniquement à des fins de validation. On fait valoir que, « si les répondants étaient contactés, l'effet sur les notes serait nul ou négatif » et que, « si un répondant donnait des renseignements contraires à ceux fournis par le candidat, la note de celui-ci baisserait. Par contre, la note resterait la même si les renseignements fournis par le répondant confirmaient ceux donnés par le candidat. » Par conséquent, la note attribuée au plaignant serait restée inchangée même si les renseignements donnés par les répondants (s'ils avaient été contactés) contredisaient sa piètre performance à l'entrevue.


J'estime que cela était contraire au mérite. Les références devaient servir d'outil d'évaluation de la capacité C5 selon la grille d'évaluation fournie par le ministère. Il incombait donc au jury de sélection de communiquer à ce sujet avec les répondants désignés par tous les candidats afin que l'évaluation de ces derniers soit équitable et uniforme. Le jury de sélection ne l'ayant pas fait, l'évaluation était incomplète. En outre, il était injuste et déraisonnable que le jury de sélection tienne compte uniquement des aspects négatifs des renseignements donnés par les répondants. En agissant ainsi, il n'a pas pris en compte toutes les données pertinentes qu'il avait à sa disposition.

Il faut se rappeler qu'il manquait trois points au plaignant pour ce qui est des capacités. Si ses répondants avaient été contactés et que leurs commentaires avaient été correctement pris en compte, une note plus élevée aurait vraisemblablement pu lui être attribuée pour la capacité C5. Il aurait ainsi pu obtenir la note de passage pour les capacités. En conséquence, ses qualités personnelles auraient été évaluées et l'ordre du mérite aurait pu être différent. Pour ces motifs, je conclus que le jury de sélection n'a pas agi conformément au mérite.

[8]                L'enquêteuse n'a alors recommandé aucune mesure de redressement. Des négociations sur les mesures de redressement appropriées ont eu lieu entre elle et les parties au cours des mois qui ont suivi.

[9]                Au cours de ces discussions, l'enquêteuse a appris que le jury de sélection n'avait communiqué avec aucun des répondants désignés par les candidats relativement à la question C5. En mars 2003, elle a fait savoir aux parties qu'elle venait tout juste de se rendre compte de l'effet de cette situation sur les conclusions contenues dans son premier rapport. Ce rapport, dit-elle, reposait sur l'hypothèse que M. Cruickshank avait été traité différemment des autres candidats pour ce qui est de la consultation de ses répondants.


[10]            Après avoir reçu les observations des parties, l'enquêteuse a produit un rapport révisé le 16 avril 2003 (le deuxième rapport), dans lequel elle indiquait que sa conclusion initiale était fondée sur l'hypothèse inexacte que les références fournies par certains candidats avaient été vérifiées alors que d'autres, celles de M. Cruickshank notamment, ne l'avaient pas été. Comme il s'avérait maintenant que tous les candidats avaient été traités équitablement, l'enquêteuse a conclu que le principe du mérite avait été respecté et que, en conséquence, aucune mesure de redressement n'était nécessaire.

Questions en litige

[11]            La présente demande soulève deux questions :

1.          L'enquêteuse était-elle dessaisie de l'affaire après avoir produit son premier rapport et était-elle donc dépourvue de compétence pour revoir son rapport à la lumière de renseignements additionnels?

2.          Le deuxième rapport de l'enquêteuse était-il conforme au principe du mérite?

L'enquêteuse était-elle dessaisie de l'affaire après avoir produit son premier rapport et était-elle donc dépourvue de compétence pour revoir son rapport à la lumière de renseignements additionnels?

[12]            Les parties conviennent que la question de savoir si le principe du dessaisissement empêchait l'enquêteuse de rouvrir son enquête est une question de droit et devrait, en conséquence, être assujettie à la norme de la décision correcte. Je suis aussi de cet avis. (Voir Abercrombie c. Canada (Procureur général), 185 F.T.R. 300.)


[13]            M. Cruickshank prétend que, bien que de nombreuses lois confèrent expressément à un décideur le pouvoir de revoir, de réviser ou de reconsidérer une décision, un tel pouvoir n'est pas conféré à un enquêteur nommé en application de l'article 7 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Il soutient que, même si l'enquêteuse n'avait pas encore statué sur la question des mesures de redressement, elle avait terminé son examen concernant le respect du principe du mérite et avait épuisé sa compétence à cet égard. Compte tenu de toutes les circonstances, notamment du caractère définitif que les décisions doivent avoir et du préjudice qu'il subirait si les conclusions du premier rapport étaient revues, M. Cruickshank soutient que le principe du dessaisissement devait s'appliquer de manière à empêcher l'enquêteuse de réexaminer la question de savoir si le principe du mérite avait été respecté.

[14]            Le défendeur soutient pour sa part que le principe du dessaisissement ne s'applique pas en l'espèce puisque la décision de l'enquêteuse n'était pas définitive, la question des mesures de redressement étant encore en suspens. De plus, même si le principe s'applique, ce doit être avec souplesse. Selon le défendeur, l'intérêt de la justice exige que l'enquêteuse ait le pouvoir de revoir sa conclusion initiale. Étant donné que cette conclusion était fondée sur une mauvaise compréhension de la preuve, il ne serait pas dans l'intérêt de la justice de forcer le défendeur à mettre en oeuvre des mesures de redressement s'il n'y a rien à corriger.

[15]            Le principe du dessaisissement veut qu'une fois qu'un arbitre a fait tout ce qui est nécessaire pour parfaire sa décision il ne peut plus revenir sur celle-ci, sauf pour corriger des erreurs matérielles ou d'autres fautes mineures. Ce principe se justifie par le caractère définitif que les procédures doivent avoir : Chandler c. Alberta Association of Architects, [1989] 2 R.C.S. 848, aux pages 861 et 862.

[16]            Comme la Cour suprême l'a mentionné dans l'arrêt Chandler, ce principe n'est pas limité aux décisions judiciaires, mais il peut s'appliquer aussi aux décisions des tribunaux administratifs, quoique, dans ces cas, il puisse être nécessaire de l'appliquer de manière plus souple et moins formaliste.

[17]            Alors que le pouvoir de réexaminer une décision découlant d'un processus juridictionnel peut devoir être expressément prévu par la loi, il en est autrement dans le cas des décisions découlant d'une procédure plus informelle. (Nouranidoust c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] 1 C.F. 123, au paragraphe 24). En fait, il y a même des doutes sur l'application du principe du dessaisissement dans le contexte des enquêtes. (Voir, par exemple, Mossman c. Association of Professional Engineers, [1994] A.J. no 61 (C.A.).)

[18]            Pour que le principe s'applique, il faut que la décision en cause soit définitive. Une décision judiciaire peut être considérée comme définitive [traduction] « lorsqu'il ne subsiste rien qui puisse être tranché ou déterminé par la suite par un tribunal, de façon à lui donner effet et à la rendre susceptible d'exécution. Une décision est définitive lorsqu'elle est absolue, complète et certaine... » . (G. Spencer Bower et A. K. Turner, The Doctrine of Res Judicata, 2e éd., Londres, Butterworths, 1969, à la page 132, cité dans D. J. M. Brown et J. M. Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada, édition sur feuilles mobiles, Toronto, Canvasback Publishing, 1998.)

[19]            Lorsque le processus décisionnel comporte plusieurs éléments, le principe du dessaisissement s'appliquera seulement après que toutes les questions auront été réglées. (Vatanabadi c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] 2 C.F. 492 (C.A.).)

[20]            Une analyse pragmatique et fonctionnelle doit être effectuée pour définir la portée du principe. Il faut mettre en balance l'absence d'équité qui découlera de la réouverture de la décision avec le préjudice qui pourrait être causé si la décision n'est pas rouverte. Il faut également tenir compte de la nature du mandat confié par la loi au décideur et de l'étendue du pouvoir discrétionnaire conféré, ainsi que des autres recours offerts, par exemple un droit d'appel. (Voir Brown et Evans, aux pages 12 à 90.)

[21]            Les principes pertinents étant bien établis, je dois maintenant les appliquer aux faits de la présente affaire. En l'espèce, l'enquêteuse nommée par la Commission de la fonction publique n'exerçait pas une fonction juridictionnelle : elle effectuait une enquête, tirait des conclusions de fait et recommandait, au besoin, les mesures de redressement nécessaires.


[22]            Une enquête n'entraînerait pas une décision exécutoire. L'autorité suprême dans ce genre d'affaires appartient non pas à l'enquêteur, mais à la Commission de la fonction publique elle-même. En effet, s'il n'est pas satisfait des mesures prises par un ministère à la suite des conclusions de son enquête, l'enquêteur en rend compte à la Commission (article 34.5 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique). La Commission n'est pas tenue d'adopter une ligne de conduite particulière lorsqu'elle reçoit le rapport d'un enquêteur. En fait, l'article 7.5 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique crée une faculté et non une obligation en prévoyant que la Commission peut ordonner à l'administrateur général du ministère concerné de prendre les mesures de redressement qui peuvent être nécessaires.

[23]            Je ne suis pas convaincue que le principe du dessaisissement s'applique à un exercice informel de détermination des faits comme celui en cause en l'espèce. En conséquence, l'enquêteuse pouvait réexaminer les conclusions contenues dans son premier rapport.

[24]            Dans l'éventualité où cette conclusion serait erronée et où le principe s'appliquerait, je considère que l'enquêteuse n'avait pas terminé son travail et n'avait pas encore rendu de décision définitive. En outre, le processus d'enquête en cause ici exige que le principe soit appliqué avec une grande souplesse. Il ne fait aucun doute que le ministère subirait un préjudice en termes de retard et de gaspillage des ressources s'il devait mettre en oeuvre des mesures visant à rectifier une situation qui n'a peut-être pas besoin de l'être. M. Cruickshank affirme qu'il subirait un préjudice si l'enquêteuse était autorisée à revoir sa conclusion initiale, mais il n'a pas précisé quelle forme prendrait ce préjudice, au-delà du fait que le rapport révisé ne lui était pas favorable. De plus, en raison de la nature du mandat confié à l'enquêteuse par la loi et de l'absence d'un droit d'appel complet, le principe doit être appliqué avec une grande souplesse et l'enquêteuse doit être autorisée à revoir ses conclusions initiales.

[25]            Par conséquent, j'estime que l'enquêteuse pouvait réexaminer les conclusions de son premier rapport après s'être rendu compte que celui-ci reposait sur une mauvaise compréhension des faits.

Le deuxième rapport de l'enquêteuse était-il conforme au principe du mérite?

[26]            Après avoir produit son premier rapport, l'enquêteuse s'est rendu compte que M. Cruickshank n'avait pas été traité différemment des autres candidats et que les références n'avaient pas été vérifiées aux fins de l'évaluation de la capacité des candidats de travailler en équipe. M. Cruickshank dit que cette nouvelle donnée n'aurait pas dû avoir d'incidence sur la conclusion de l'enquêteuse selon laquelle le principe du mérite n'avait pas été respecté dans le cadre de la sélection.


[27]            Selon M. Cruickshank, le premier rapport n'était pas fondé uniquement sur l'hypothèse que la vérification des références n'avait pas été uniforme, comme le deuxième rapport le laisse croire. Dans son premier rapport, l'enquêteuse a indiqué que la vérification des références devait faire partie du processus d'évaluation et qu'elle aurait fourni des renseignements additionnels aux fins de l'évaluation de tous les candidats. L'enquêteuse a fait remarquer que [traduction] « l'évaluation était incomplète » parce que le jury de sélection n'avait pas communiqué avec les répondants. Selon M. Cruickshank, cette conclusion reste valable, peu importe que le jury n'ait pas communiqué avec les répondants de tous les candidats ou de certains d'entre eux. Ayant conclu que le jury de sélection aurait dû communiquer avec les répondants de tous les candidats, le jury ne pouvait plus changer d'avis.

[28]            Le défendeur soutient que le premier rapport de l'enquêteuse était clairement fondé sur l'idée que certaines références seulement avaient été vérifiées dans le cadre de l'évaluation de la capacité des candidats de travailler en équipe et que tous les candidats n'avaient pas été traités de la même façon.

[29]            Se fondant sur l'arrêt Ratelle c. Canada (Commission de la Fonction publique, Direction des appels) (1975), 12 N.R. (C.A.), le défendeur soutient qu'il appartient au jury de sélection de choisir les outils dont il se servira pour évaluer les participants à un concours. Reconnaissant que le jury de sélection aurait commis une erreur en vérifiant les références de certains candidats seulement, il affirme que celui-ci était pleinement habilité à décider qu'il n'était pas nécessaire de vérifier les références dans le cadre du processus d'évaluation, à condition que cette décision soit appliquée uniformément.

[30]            Avant de trancher cette question, il faut déterminer la norme de contrôle qui s'applique. Selon M. Cruickshank, la question de savoir si le deuxième rapport de l'enquêteuse était conforme au principe du mérite est une question de droit; c'est donc la norme de la décision correcte qui devrait s'appliquer. De son côté, le défendeur soutient qu'il s'agit d'une question de droit et de fait et que la norme appropriée est celle de la décision raisonnable simpliciter.


[31]            Dans la décision Hains c. Canada (Procureur général), [2001] A.C.F. no 1238, la Cour, qui devait déterminer la norme de contrôle applicable à une décision du Comité d'appel de la Commission de la fonction publique, a statué que les conclusions de fait du CACFP et son application du principe du mérite devaient être examinées en fonction de la norme de la décision raisonnable simpliciter.

[32]            En l'espèce, il est question du rapport d'une enquêteuse ad hoc nommée en application de l'article 7 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Compte tenu des quatre facteurs pertinents à l'analyse pragmatique et fonctionnelle recommandée dans des arrêts comme Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, 2003 CSC 19, j'estime que la même norme de contrôle s'applique ici. J'appliquerai donc la norme de la décision raisonnable simpliciter dans mon analyse.

[33]            Le point de départ de cette analyse est le paragraphe 10(2) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, qui prévoit que la sélection au mérite peut être fondée sur des normes de compétence fixées par la Commission de la fonction publique plutôt que sur un examen comparatif des candidats.

[34]            Il appartient au jury de sélection, en vertu du pouvoir qui lui est délégué, de choisir les outils qui lui permettent de trouver les candidats les plus méritoires.


[35]            Après avoir décidé au début que les références seraient vérifiées aux fins de l'évaluation de la capacité C5, le jury de sélection avait certainement le pouvoir de revenir sur sa décision si, comme en l'espèce, il l'a fait avant de communiquer avec l'un ou l'autre des répondants désignés par les candidats. À cet égard, on peut faire une distinction entre la présente affaire et l'arrêt Mackintosh c. Canada (Comité d'appel de la Commission de la fonction publique), [1990] A.C.F. no 834, où la Cour d'appel fédérale a statué que le jury de sélection avait commis une erreur en éliminant une question au cours du processus de sélection après que tous les candidats y eurent répondu.

[36]            Pour ce qui est de la question de savoir si le fait qui a été mal compris a eu une incidence importante sur la conclusion initiale de l'enquêteuse selon laquelle le principe du mérite n'avait pas été respecté, il est utile de citer le passage suivant tiré du premier rapport :

[traduction] Les références devaient servir d'outil d'évaluation de la capacité C5 selon la grille d'évaluation fournie par le ministère. Il incombait donc au jury de sélection de communiquer à ce sujet avec les répondants désignés par tous les candidats afin que l'évaluation de ces derniers soit équitable et uniforme. Le jury de sélection ne l'ayant pas fait, l'évaluation était incomplète. En outre, il était injuste et déraisonnable que le jury de sélection tienne compte uniquement des aspects négatifs des renseignements donnés par les répondants. En agissant ainsi, il n'a pas pris en compte toutes les données pertinentes qu'il avait à sa disposition. [Non souligné dans l'original]

[37]            Il ressort clairement de ce passage que l'enquêteuse était préoccupée en réalité par le fait que l'évaluation des candidats n'avait pas été uniforme. Le premier rapport mentionne d'ailleurs qu'il était nécessaire, pour bien évaluer les candidats, de communiquer avec les répondants désignés par tous les candidats.

[38]            Le fait de s'être rendu compte que tous les candidats avaient été évalués de manière uniforme a apaisé les préoccupations de l'enquêteuse au sujet du processus de sélection. Par conséquent, j'estime qu'il était raisonnable qu'elle conclue, dans son deuxième rapport, que le principe du mérite avait été respecté.

Conclusion

[39]            Pour ces motifs, je suis d'avis de rejeter la demande de M. Cruickshank. Il ne fait cependant aucun doute que le fait que l'enquêteuse n'a pas bien compris ce qui s'est passé dans le cadre du processus de sélection a causé de nombreux ennuis à M. Cruickshank et l'a forcé à engager des dépenses importantes. Bien qu'il n'ait pas réussi à me convaincre que le deuxième rapport de l'enquêteuse devait être annulé, je ne rends aucune ordonnance concernant les dépens dans les circonstances.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande soit rejetée, sans dépens.

            « Anne L. Mactavish »            

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                            T-805-03

INTITULÉ :                                                           MARTIN CRUICKSHANK

c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                                     OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 24 MARS 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                           LA JUGE MACTAVISH

DATE DES MOTIFS :                                          LE 26 MARS 2004

COMPARUTIONS :

James Cameron                                                         POUR LE DEMANDEUR

Anne M. Turley                                                         POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Raven, Allen, Cameron & Ballantyne                 POUR LE DEMANDEUR

Ottawa (Ontario)

Ministère de la Justice                                        POUR LE DÉFENDEUR

Ottawa (Ontario)

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