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Date : 20190123


Dossier : IMM-1343-18

Référence : 2019 CF 99

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 23 janvier 2019

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

JILA AGHAZADEH

ARYA KHADEMI (REPRÉSENTÉ PAR SA TUTRICE À L’INSTANCE

JILA AGHAZADEH)

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Les demandeurs, Jila Aghazadeh et son fils Arya Khademi, sont citoyens de l’Iran. L’opposition politique de Mme Aghazadeh à l’égard du gouvernement iranien a amené les demandeurs à quitter l’Iran avec le mari de Mme Aghazadeh, le père d’Arya. Ils ont fui vers la Hongrie, où ils ont obtenu une « protection subsidiaire ». Ils ont ensuite décidé de venir au Canada et d’y présenter une demande d’asile.

[2]  Leur demande a d’abord été jugée recevable et pouvant être déférée à la Section de la protection des réfugiés (la SPR). Toutefois, un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence) a par la suite conclu que la demande était irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR), et qu’elle ne pouvait donc pas être déférée à la SPR, au motif que leur statut à titre de personnes bénéficiant d’une « protection subsidiaire » équivalait à celui de réfugié au sens de la Convention. Après réexamen, l’agent a maintenu l’irrecevabilité de la demande, précisant que les demandeurs étaient des [traduction] « personnes ayant obtenu une protection ». Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire de cette décision de réexamen en application du paragraphe 72(1) de la LIPR.

[3]  Les demandeurs soutiennent que l’agent a commis une erreur en concluant que leur statut à titre de personnes bénéficiant d’une « protection subsidiaire » rendait leur demande irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d). Le défendeur est d’avis que l’agent n’a pas commis d’erreur.

[4]  Pour les motifs qui suivent, la demande est accueillie.

II.  Le contexte

[5]  Les demandeurs indiquent qu’ils ont quitté l’Iran en septembre 2014 pour se rendre d’abord en Turquie, puis en Hongrie, où ils ont demandé l’asile. Le gouvernement hongrois a rejeté leur demande d’asile à titre de réfugiés au sens de la Convention. Ils ont toutefois été reconnus comme des personnes bénéficiant d’une « protection subsidiaire » en Hongrie.

[6]  Les demandeurs affirment qu’en raison des difficultés rencontrées en Hongrie liées à la discrimination et aux discours hostiles à l’immigration, ils sont venus au Canada en septembre 2017. À leur arrivée au pays, ils ont présenté une demande d’asile dans laquelle ils ont fait part de leur crainte de retourner en Iran et en Hongrie. Lorsque les demandeurs ont été reçus en entrevue, ils ont révélé qu’ils avaient demandé et obtenu l’asile en Hongrie. Leur demande a d’abord été jugée recevable et pouvait être déférée à la SPR en application du paragraphe 100(1) de la LIPR.

[7]  Toutefois, après que les demandeurs ont déposé des documents sur le fondement de la demande d’asile et avant qu’une audience devant la SPR ait lieu, un agent de l’Agence a jugé que les demandes étaient irrecevables et qu’elles ne pouvaient pas être déférées à la SPR. L’agent a conclu qu’elles étaient irrecevables au titre de l’alinéa 101(1)d), étant donné que les demandeurs avaient obtenu le statut réfugié au sens de la Convention en Hongrie. Les demandeurs ont sollicité un réexamen de cette décision, et ont joint d’autres documents à l’appui de leur demande.

III.  Les dispositions législatives

[8]  L’article 96 de la LIPR définit le statut de réfugié au sens de la Convention, et l’article 97 définit les personnes qui ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention, mais qui sont néanmoins des personnes à protéger. Lorsqu’un agent de l’Agence reçoit une demande d’asile, il détermine si la demande est recevable et peut être déférée à la SPR, une section de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) (art. 100 de la LIPR). La SPR détermine si un demandeur d’asile est un réfugié au sens de la Convention (art. 95 de la LIPR).

[9]  L’article 101 de la LIPR énumère les cas où une demande est irrecevable et ne peut être déférée à la SPR.

[10]  Voici le libellé du paragraphe 101(1) de la LIPR :

Irrecevabilité

101 (1) La demande est irrecevable dans les cas suivants :

a) l’asile a été conféré au demandeur au titre de la présente loi;

b) rejet antérieur de la demande d’asile par la Commission;

c) décision prononçant l’irrecevabilité, le désistement ou le retrait d’une demande antérieure;

d) reconnaissance de la qualité de réfugié par un pays vers lequel il peut être renvoyé;

e) arrivée, directement ou indirectement, d’un pays désigné par règlement autre que celui dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle;

f) prononcé d’interdiction de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux — exception faite des personnes interdites de territoire au seul titre de l’alinéa 35(1)c) —, grande criminalité ou criminalité organisée.

[Non souligné dans l’original.]

Ineligibility

101 (1) A claim is ineligible to be referred to the Refugee Protection Division if

(a) refugee protection has been conferred on the claimant under this Act;

(b) a claim for refugee protection by the claimant has been rejected by the Board;

(c) a prior claim by the claimant was determined to be ineligible to be referred to the Refugee Protection Division, or to have been withdrawn or abandoned;

(d) the claimant has been recognized as a Convention refugee by a country other than Canada and can be sent or returned to that country;

(e) the claimant came directly or indirectly to Canada from a country designated by the regulations, other than a country of their nationality or their former habitual residence; or

(f) the claimant has been determined to be inadmissible on grounds of security, violating human or international rights, serious criminality or organized criminality, except for persons who are inadmissible solely on the grounds of paragraph 35(1)(c).

[Emphasis added]

IV.  La décision faisant l’objet du présent contrôle

[11]  La demande de réexamen de la décision de l’agent a été présentée à la fin de septembre 2017. Aux fins du réexamen, les demandeurs ont fourni à l’agent la décision du gouvernement hongrois leur accordant une protection subsidiaire et rejetant leur demande de statut de réfugié. Les demandeurs ont également fourni une copie de leurs documents de voyage hongrois indiquant qu’ils étaient des personnes bénéficiant d’une « protection subsidiaire », ainsi qu’un extrait du site Web du Bureau de l’Immigration et de la Nationalité de la Hongrie. Le site Web définit le statut de « réfugié » et la « protection subsidiaire » en ces termes :

[traduction]

RÉFUGIÉ : Le statut de réfugié peut être accordé à une personne dont la vie et la liberté sont menacées dans son pays d’origine en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques, ou dont la crainte de persécution est bien fondée.

PERSONNES BÉNÉFICIANT D’UNE PROTECTION SUBSIDIAIRE : La protection subsidiaire peut être accordée à une personne qui n’est pas admissible à titre de réfugié, mais à l’égard de laquelle il y a lieu de croire que, si elle était renvoyée dans son pays d’origine, elle courrait un risque réel de subir un préjudice grave, et qu’elle ne peut ou ne veut en raison de ce risque se prévaloir de la protection du pays concerné.

[12]  Après avoir initialement refusé de rendre une deuxième décision, l’agent a rendu une décision sur la demande de réexamen datée du 6 mars 2018. L’agent a informé les demandeurs que leurs nouveaux éléments de preuve avaient été pris en considération et que leur demande était irrecevable et qu’elle ne pouvait pas être déférée à la SPR au titre du paragraphe 104(1) et de l’alinéa 101(1)d) de la LIPR.

[13]  Après réexamen, l’agent a conclu à l’irrecevabilité de la demande, précisant que les demandeurs étaient des [traduction] « personnes ayant obtenu une protection ». Cela contraste avec la décision initiale de l’agent selon laquelle la demande était irrecevable au motif que les demandeurs avaient obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention en Hongrie.

V.  La question en litige

[14]  La présente demande soulève la question suivante :

A.  L’agent a-t-il commis une erreur en concluant que la protection subsidiaire octroyée aux demandeurs en Hongrie rendait leur demande d’asile irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d) de la LIPR?

VI.  La norme de contrôle applicable

[15]  Les demandeurs font remarquer que la décision de réexamen de l’agent est brève. Ils font valoir que la décision à elle seule ne permet pas d’établir si l’agent a fait une interprétation erronée de l’alinéa 101(1)d) en englobant les types de protection au-delà du statut de réfugié au sens de la Convention ou s’il a simplement commis une erreur de fait en concluant que les demandeurs avaient obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention en Hongrie.

[16]  Les demandeurs soutiennent que l’agent a remédié à l’erreur de fait initiale, la conclusion selon laquelle les demandeurs avaient obtenu le statut de « réfugiés au sens de la Convention », en concluant au moment du réexamen qu’ils étaient des [traduction] « personnes ayant obtenu une protection ». Ils soutiennent que la question soulevée est donc une question d’interprétation de l’alinéa 101(1)d) qui devrait être examinée selon la norme de la décision correcte.

[17]  En demandant à la Cour de ne faire preuve d’aucune retenue à l’égard de l’interprétation de la LIPR par l’agent, les demandeurs s’appuient sur la décision Wangden c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1230, conf. par 2009 CAF 344 (Wangden), dans laquelle le juge Richard Mosley a conclu que l’interprétation de l’alinéa 101(1)d) de la LIPR devrait être examinée selon la norme de la décision correcte (Wangden, au par. 18). Les demandeurs s’appuient également sur l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Tobar Toledo, 2013 CAF 226 (Tobar Toledo). Dans le cadre de son examen de l’alinéa 101(1)b) de la LIPR, soit l’irrecevabilité dans le cas d’un rejet antérieur de la demande d’asile par la Commission, la Cour d’appel fédérale a conclu que « les conclusions de droit tirées par l’agent des services frontaliers dans le cadre de l’alinéa 101(1)b) sont contrôlables selon la norme de la décision correcte » (Tobar Toledo, au par. 48).

[18]  Le défendeur soutient que l’agent a interprété la LIPR comme une « loi constitutive » de l’Agence. Par conséquent, la présomption veut que la norme de la décision raisonnable s’applique, et cette présomption n’a pas été réfutée en l’espèce (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, aux par. 34 et 39 (Alberta Teachers); Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Huruglica, 2016 CAF 93, au par. 30 (Huruglica)). Le défendeur fait remarquer que la décision Wangden précède l’arrêt Alberta Teachers, et cite l’arrêt Majebi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 274 (Majebi) dans lequel la Cour d’appel fédérale affirme que la jurisprudence antérieure à l’arrêt Alberta Teachers « doit être abordée avec prudence » (Majebi, au par. 5).

[19]  Le défendeur soutient également que l’arrêt Tobar Toledo se distingue et fait remarquer que la Cour n’a fait aucune référence à l’arrêt Alberta Teachers et n’a pas abordé la présomption voulant que la norme de la décision raisonnable s’applique. Il soutient également que la question soulevée dans l’arrêt Tobar Toledo portait sur l’interprétation de l’alinéa 101(1)b) de la LIPR, et qu’elle ne faisait pas appel à l’expertise spéciale du décideur. En l’espèce, le défendeur soutient que l’interprétation de l’alinéa 101(1)d) commande l’examen de la Convention relative au statut des réfugiés, 28 juillet 1951, 189 UNTS 150 (entrée en vigueur le 22 avril 1954) (la Convention) et que la Cour d’appel fédérale a décidé que l’interprétation de la Convention n’entre pas dans la catégorie des questions qui peuvent faire l’objet d’un contrôle judiciaire selon la norme de la décision correcte (Majebi, au par. 5).

[20]  La forte présomption voulant que la norme de contrôle judiciaire de la décision raisonnable s’applique lorsqu’un décideur interprète une « loi constitutive » n’est pas immuable, comme l’a expliqué la Cour suprême du Canada dans l’arrêt McLean c. Colombie‑Britannique (Securities Commission), 2013 CSC 67 (McLean), au paragraphe 22 :

Or, la présomption adoptée dans Alberta Teachers n’est pas immuable. D’abord, notre Cour reconnaît depuis longtemps que certaines catégories de questions, même lorsqu’elles emportent l’interprétation d’une loi constitutive, sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte (Dunsmuir, par. 58‑61). Ensuite, elle affirme également qu’une analyse contextuelle peut « écarter la présomption d’assujettissement à la norme de la raisonnabilité de la décision qui résulte d’une interprétation de la loi constitutive » (Rogers Communications Inc. c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 35, [2012] 2 R.C.S. 283, par. 16). [Non souligné dans l’original.]

[21]  L’arrêt McLean reconnaît que la présomption relative à la norme de la décision raisonnable peut être écartée lorsqu’une analyse contextuelle démontre qu’il n’y a pas lieu de faire preuve de déférence à l’égard de l’interprétation de la loi constitutive par le décideur. Il semble que ce soit le cas dans l’arrêt Tobar Toledo, dans lequel la Cour a souligné que le décideur administratif qui interprète l’alinéa 101(1)b) de la LIPR était un agent des services frontaliers qui [traduction] « ne décide pas ces questions au nom d’un tribunal quelconque. Au plus, il décide ces questions de droit en tant que délégué du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile » (Tobar Toledo au par. 42). La Cour a également affirmé ce qui suit au paragraphe 43 :

[L]a jurisprudence qui traite de la déférence due à un tribunal administratif qui tranche des questions de droit au cours d’un débat contradictoire ne s’applique pas à un décideur administratif « qui ne statut [sic] pas à l’égard d’un litige et qui ne dispose donc pas d’un pouvoir implicite de décider des questions de droit ». [Souligné dans l’original.]

[22]  Comme dans Tobar Toledo, le décideur dans cette affaire ne tranchait pas la question au nom d’un tribunal. Récemment toutefois, la Cour d’appel fédérale a réaffirmé la forte présomption relative à l’application de la norme de la décision raisonnable lorsque l’interprétation d’une loi constitutive fait l’objet d’un examen (Huruglica, au par. 30). Je souscris à la conclusion du juge Richard Southcott dans la décision Farah c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 292 (Farah), dans laquelle il estime que l’orientation de la jurisprudence récente favorise l’application de la norme de la décision raisonnable dans ces circonstances (Farah, au par. 12). Toutefois, je n’ai pas à trancher la question, car, à la lumière des faits dont je dispose, je suis d’avis que l’interprétation de l’alinéa 101(1)d) par l’agent était à la fois déraisonnable et erronée.

VII.  Analyse

[23]  Pour faire valoir leurs positions respectives, les deux parties s’appuient sur la décision rendue par le juge Richard Mosley dans Wangden. Un aperçu de la décision Wangden sera donc utile.

A.  Aperçu de la décision Wangden

[24]  Dans Wangden, la demande d’asile du demandeur a été jugée irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d), étant donné qu’il avait obtenu le « retrait du statut de personne à renvoyer » aux États-Unis, lequel, selon le décideur, équivalait à accorder le statut de réfugié au sens de la Convention. Une demande de contrôle judiciaire a été présentée. Une preuve d’expert quant à l’effet juridique du « retrait du statut de personne à renvoyer » en droit américain a été présentée au juge Mosley.

[25]  S’appuyant sur la preuve d’expert, le juge Mosley a conclu que l’« asile » aux États-Unis est offert aux demandeurs qui peuvent démontrer qu’ils craignent avec raison d’être persécutés pour l’un des motifs prévus dans la Convention, et que cette définition équivalait à celle de l’article 96 de la LIPR (Wangden, au par. 61). En revanche, il a fait remarquer que le « retrait du statut de personne à renvoyer » protège les demandeurs admissibles contre le renvoi ou l’expulsion vers un pays dans lequel ils sont à risque, mais n’empêche pas l’exclusion ou l’expulsion vers un autre pays sûr et accueillant disposé à accepter ou à prendre les demandeurs (Wangden, au par. 63). Le juge Mosley a également conclu qu’un droit au « retrait du statut de personne à renvoyer » existait pour les réfugiés qui peuvent démontrer que, selon toute vraisemblance, ils seraient menacés à leur retour dans leur pays d’origine (Wangden, au par. 63). Sur ce fondement, il a conclu que les personnes qui obtiennent le « retrait de leur statut de personne à renvoyer » sont nécessairement des réfugiées au sens de la Convention, puisqu’elles ont établi qu’elles craignaient avec raison d’être persécutées dans leur pays de nationalité pour l’un des motifs prévus à la Convention (Wangden, au par. 65).

[26]  Le juge Mosley a souligné que l’aspect fondamental de la demande dont il était saisi est l’interprétation de la signification de « réfugié au sens de la Convention » à l’article premier de la Convention et à l’alinéa 101(1)d) de la LIPR. Il a reconnu que la signification ordinaire des mots de l’alinéa 101(1)d) semble restreindre l’admissibilité « pour tous les demandeurs qui ont obtenu l’asile ou le statut de réfugié au sens de la Convention dans un autre pays et qui peuvent y être renvoyés », mais que l’interprétation législative ne peut s’appuyer uniquement sur les termes de la loi; il faut leur donner leur sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur (Wangden, aux par. 68 et 69). Ce faisant, il a tenu compte de la relation entre le Canada et les États‑Unis dans le contexte du droit des réfugiés et de l’accord de réciprocité qui existe entre les deux pays. Il a conclu que le demandeur pouvait être renvoyé aux États‑Unis où il ne courra pas le risque d’être persécuté, un facteur compatible avec le principal objet de la LIPR (Wangden, aux par. 69 à 71). Il a également conclu que, en appliquant l’alinéa 101(1)d), la question était de savoir si le demandeur était protégé contre le risque et si le fait d’exiger que les agents d’immigration de première ligne effectuent « un examen plus approfondi du statut des demandeurs dans un autre pays » était incompatible avec le processus expéditif et relativement simple envisagé au paragraphe 101(1) (Wangden, aux par. 72 et 76).

[27]  Le juge Mosley conclut que les conclusions de fait tirées étaient raisonnables et que la décision était également correcte en droit à la lumière de la conclusion qu’il a tirée plus tôt selon laquelle « les personnes dont le statut de personne à renvoyer a été retiré aux États‑Unis sont des réfugiées au sens de la Convention selon l’alinéa 101(1)d) de la LIPR » (Wangden, au par. 77).

B.  Point de vue des parties

(1)  Les demandeurs

[28]   Les demandeurs vont valoir que le fait qu’ils ne soient pas reconnus comme réfugiés au sens de la Convention en Hongrie n’est pas contesté. Ils font valoir que la substitution de la conclusion initiale selon laquelle les demandeurs étaient des réfugiés au sens de la Convention en Hongrie par une conclusion plus générale selon laquelle une « protection leur a été accordée en Hongrie » fait en sorte que les conclusions tirées dans la décision initiale étaient erronées en fait, mais correctes en droit, tandis que les conclusions tirées dans la décision subséquente étaient correctes en fait, mais erronées en droit.

[29]  Ils soutiennent que, à sa simple lecture, l’alinéa 101(1)d) ne s’applique pas aux « personnes ayant obtenu une protection ». L’alinéa 101(1)d) ne s’applique qu’aux réfugiés au sens de la Convention, et comme la définition de ce terme est bien établie en droit, manifestement, le législateur n’avait pas l’intention d’étendre la portée de l’alinéa 101(1)d) au‑delà de sa simple définition. Si le législateur avait voulu faire autrement, il l’aurait exprimé explicitement, comme il l’a fait dans d’autres dispositions de la LIPR.

[30]  Selon les demandeurs, la décision Wangden se distingue en raison du fait que le statut de réfugié au sens de la Convention n’a jamais été expressément refusé à M. Wangden, qu’il n’a pas fourni au décideur les documents à l’appui pour clarifier son statut, et que les autorités américaines avaient confirmé au décideur que M. Wangden avait obtenu « l’asile » aux États‑Unis. Les demandeurs soutiennent également que, contrairement à la preuve d’expert présentée dans la décision Wangden quant à l’équivalence des deux statuts en cause dans cette affaire, la preuve en l’espèce démontre clairement que la protection subsidiaire est destinée aux personnes qui ne satisfont pas aux critères exigés pour l’obtention du statut de réfugié au sens de la Convention et que les demandeurs n’avaient pas le statut de réfugié au sens de la Convention. Enfin, ils font valoir que la preuve dans la décision Wangden a démontré que « la norme de preuve à satisfaire pour accorder le retrait du statut de personne à renvoyer est plus stricte que la norme concernant l’asile » (Wangden, au par. 64), alors qu’en l’espèce, il semble que la norme juridique applicable à l’octroi d’une protection subsidiaire soit moins élevée.

[31]  Les demandeurs soutiennent qu’ils n’ont pas obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention et que la preuve montre que la protection subsidiaire est distincte, et non équivalente, en ce qui concerne le statut de réfugié au sens de la Convention. Ils soutiennent que la décision est incompatible avec le sens ordinaire des mots employés dans l’alinéa 101(1)d), avec les principes applicables à l’interprétation des lois et avec la décision Wangden.

[32]  Bien que les demandeurs conviennent qu’il serait inapproprié pour les agents de première ligne de procéder à un examen approfondi du statut d’un demandeur d’asile dans un autre pays, ils soutiennent qu’un tel examen approfondi n’était pas nécessaire en l’espèce. La preuve était claire et facile à appliquer.

(2)  Le défendeur

[33]  Le défendeur s’appuie sur la décision Wangden pour faire valoir que l’alinéa 101(1)d) doit être interprété dans le contexte de l’ensemble de la LIPR, y compris de ses objectifs, dont l’un consiste à sauver des vies et à offrir la protection aux personnes déplacées et persécutées. Le défendeur soutient que la conclusion de l’agent selon laquelle une demande d’asile est irrecevable et ne peut pas être déférée à la SPR est juste lorsque le demandeur possède un statut dans un autre pays équivalent au statut de réfugié au sens de la Convention, même s’il n’est pas reconnu comme tel.

[34]  Le défendeur soutient que la preuve montre que l’asile en Hongrie (1) comprend à la fois le statut de réfugié et la protection subsidiaire; et (2) permet à un ressortissant étranger de résider en Hongrie et prévient le refoulement, l’expulsion et l’extradition. Les deux statuts accordent au demandeur le droit de vivre en Hongrie. La preuve montre également que les demandeurs bénéficient de la protection subsidiaire en Hongrie. Le défendeur fait valoir que les demandeurs présument, sans preuve solide, qu’il existe dans les statuts une différence importante qui a une incidence sur leur admissibilité simplement parce que l’un leur a été refusé et que l’autre leur a été accordé. Comme dans Wangden, les distinctions mineures entre les droits ne changent pas le fait que les demandeurs sont protégés contre le refoulement en Hongrie.

[35]  Le défendeur soutient qu’il n’est pas possible de faire une distinction avec la décision Wangden en fonction de la norme de preuve, faisant valoir que cette question ne modifie pas l’étendue de la protection que les demandeurs ont obtenue en Hongrie. Le défendeur affirme que, même si cette question s’avérait importante, aucun élément de preuve n’a été présenté à la Cour concernant la norme de preuve applicable à la protection subsidiaire par rapport au statut de réfugié au sens de la Convention.

[36]  Le défendeur soutient que le fait que les demandeurs se soient fondés sur d’autres articles de la LIPR faisant référence à des personnes « en situation semblable » ne justifie pas une interprétation plus étroite de l’alinéa 101(1)d). L’expression « personne en situation semblable » est définie et ne s’applique pas à l’alinéa 101(1)d). La Cour ne devrait pas interpréter l’alinéa 101(1)d) de façon plus étroite que ce qui a été établi dans les précédents jurisprudentiels.

C.  L’agent a-t-il commis une erreur en concluant que la protection subsidiaire octroyée aux demandeurs en Hongrie rendait leur demande d’asile irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d) de la LIPR?

[37]  Comme je l’ai mentionné précédemment, les parties ne contestent pas le fait que le processus d’immigration et du droit d’asile hongrois établit une distinction entre le statut de « réfugié » et les « personnes bénéficiant d’une protection subsidiaire ». Il n’est pas non plus contesté que les autorités hongroises ont refusé la demande des demandeurs visant à obtenir le statut de réfugié au sens de la Convention, mais leur ont accordé la protection subsidiaire. Ce statut accordait aux demandeurs le droit de résider en Hongrie et de ne pas être refoulés vers l’Iran. Le défendeur est d’avis que la protection subsidiaire équivaut à être reconnu comme réfugié au sens de la Convention et que la Cour ne devrait pas intervenir. Je ne suis pas de cet avis.

[38]  Le défendeur soutient que les étiquettes adoptées et utilisées en droit interne étranger pour décrire la protection ne peuvent pas être déterminantes dans le cadre d’un examen au titre de l’alinéa 101(1)d). Je souscris à sa prétention. Ce qui est déterminant pour l’application de l’alinéa 101(1)d) est la question de savoir si les protections accordées par un pays autre que le Canada découlent du fait que l’État en question a accordé à la personne le statut de réfugié au sens de la Convention. Cette reconnaissance du statut de réfugié, peu importe la terminologie utilisée, entraîne le respect des obligations juridiques internationales d’un État en tant que partie à la Convention sur les réfugiés. À mon avis, il s’agit là de la circonstance que l’alinéa 101(1)d) vise à englober, à savoir si le respect des obligations internationales d’un pays a été déclenché.

[39]  Comme dans Wangden, la question en litige en l’espèce porte sur l’interprétation de l’expression « réfugié au sens de la Convention » telle qu’elle est utilisée à l’alinéa 101(1)d). Il faut lire les mots dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur : Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 RCS 27, au paragraphe 21.

[40]  L’objet principal de la LIPR concernant les réfugiés est établi au paragraphe 3(2) de la LIPR : 1) de reconnaître que le programme pour les réfugiés vise avant tout à sauver des vies et à protéger les personnes de la persécution et 2) de remplir les obligations en droit international du Canada relatives aux réfugiés et aux personnes déplacées et d’affirmer la volonté du Canada de participer aux efforts de la communauté internationale pour venir en aide aux personnes qui doivent se réinstaller (al. 3(2)a) et b) de la LIPR).

[41]  Ces principes ne concordent pas avec une interprétation de l’alinéa 101(1)d) et ne sont pas mis de l’avant par une interprétation qui a pour effet de rendre irrecevables des demandes d’asile présentées par des personnes qui se sont vu refuser le statut de réfugié au sens de la Convention dans un autre pays, mais qui se sont vu accorder une autre forme de protection. Le fait de rendre une demande irrecevable au motif qu’une autre forme de protection a été accordée, protection que l’État qui l’accorde n’a pas l’obligation juridique internationale d’accorder ou de maintenir, même lorsque ces protections pourraient être semblables à celles qu’un État est tenu d’offrir lorsqu’une personne obtient le statut de réfugié au sens de la Convention, est incompatible avec les objectifs énoncés dans la LIPR.

[42]  L’interprétation que le défendeur demande à la Cour d’adopter est également incompatible avec le sens ordinaire des mots employés dans l’alinéa 101(1)d). Si le législateur avait voulu que la disposition soit interprétée de la façon plus large qu’adopte le défendeur, il aurait pu indiquer cette intention en utilisant un langage clair, explicite et sans ambiguïté. Ce n’est pas le cas.

[43]  Il convient de souligner que le législateur a adopté un langage qui englobe une catégorie plus large de personnes que celle des « réfugiés au sens de la Convention » dans d’autres dispositions de la LIPR. Par exemple, le paragraphe 95(1) prévoit que l’asile est la protection conférée à toute personne « sur constat qu’elle est [...] un réfugié au sens de la Convention ou une personne en situation semblable ». Le défendeur soutient que l’expression « personne en situation semblable » est définie à l’article 146 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, et qu’elle ne pourrait pas s’appliquer à l’alinéa 101(1)d). L’argument du défendeur passe à côté de la question. Il est évident que le législateur a jugé bon d’élargir la portée de l’expression « réfugié au sens de la Convention » en utilisant un langage clair, explicite et sans ambiguïté dans d’autres articles de la LIPR. Il ne l’a pas fait à l’alinéa 101(1)d), une disposition qui, à mon avis, a une incidence directe sur l’objet du Canada de remplir ses obligations juridiques internationales.

[44]  Je tiens également à souligner que l’examen des demandes au titre de l’article 101 de la LIPR se veut un processus administratif expéditif et relativement simple effectué par les agents d’immigration de première ligne (Wangden, au par. 76). S’attendre à ce qu’un agent de contrôle examine en détail le statut d’une personne dans un pays autre que le Canada irait à l’encontre de ce rôle administratif relativement simple. Cela ouvrirait également la porte aux agents de première ligne d’effectuer l’analyse que la LIPR demande à la SPR de faire, avec son expertise spécialisée.

[45]  Après avoir examiné le sens grammatical et ordinaire de l’expression « réfugié au sens de la Convention » qui s’harmonise avec l’esprit de la Loi, l’objet de la Loi et l’intention du législateur, je ne peux pas conclure que l’expression peut être interprétée comme incluant les personnes qui se sont vu refuser le statut de réfugié au sens de la Convention, mais qui se sont vu accorder une autre forme de protection par un pays autre que le Canada.

[46]  Le défendeur soutient que cette conclusion est contraire aux précédents jurisprudentiels portant sur l’interprétation de l’alinéa 101(1)d). Encore une fois, je ne souscris pas à cette intrprétation.

[47]  Dans Wangden, le juge Mosley a conclu que le système américain offrait deux mécanismes en vertu desquels un [traduction] « étranger [autrement] passible d’expulsion » (deportable alien), selon l’expression américaine, qui craint d’être persécuté peut solliciter une mesure de protection (Wangden, au par. 60). Il conclut que les personnes qui obtiennent le retrait de leur statut de personne à renvoyer sont « nécessairement des réfugiées au sens de la Convention, puisqu’elles ont établi qu’elles craignaient avec raison d’être persécutées dans leur pays de nationalité pour l’un des motifs prévus à la Convention » (Wangden, au par. 65). Autrement dit, le juge Mosley a conclu que le statut de réfugié au sens de la Convention de M. Wangden avait été reconnu aux États-Unis. Dans Wangden, la Cour a conclu que, malgré l’étiquette adoptée en droit interne, les protections accordées par les États-Unis découlent du fait que l’État a accordé à M. Wangden le statut de réfugié au sens de la Convention. Cette conclusion ne peut pas être tirée en l’espèce.

[48]  Les demandeurs ont demandé l’asile en Hongrie et se sont fait dire que la Hongrie [TRADUCTION] « refusait leur demande de statut de réfugié [sic] ». Selon la définition de « réfugié » reproduite au paragraphe 11 des présents motifs, il est clair que le statut de « réfugié » en Hongrie correspond au statut de réfugié au sens de la Convention. Par conséquent, contrairement à la situation dans Wangden, il ne fait aucun doute que les demandeurs n’ont pas obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention dans un autre pays. Les protections accordées aux demandeurs par l’octroi d’une protection subsidiaire ne découlent pas du fait que les demandeurs ont obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention.

[49]  J’estime donc que la conclusion de l’agent selon laquelle les demandeurs sont des réfugiés au sens de la Convention, conformément à l’expression utilisée à l’alinéa 101(1)d), était à la fois déraisonnable et erronée.

VIII.  Question certifiée

[50]  Le défendeur propose que la question suivante soit certifiée :

Une demande d’asile est-elle irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés si la personne qui la présente n’a pas « obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention » dans un autre pays, mais qui a obtenu un statut dans un autre pays qui la protège contre le refoulement et lui accorde un droit de retour?

[51]  Le défendeur soutient que la réponse à cette question sera déterminante quant à l’issue de l’appel de la décision en l’espèce, déterminera la portée appropriée de l’alinéa 101(1)d) et fournira des directives aux décideurs qui évaluent la recevabilité des demandes.

[52]  Les demandeurs s’opposent à ce que la question soit certifiée, faisant valoir qu’elle est formulée de façon trop large, qu’elle ne permettrait pas de trancher la demande et qu’elle ne découle pas des faits de la présente demande. Si une question devait être certifiée, les demandeurs proposent qu’elle soit ainsi formulée :

Une demande d’asile peut-elle être jugée irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés si la personne qui la présente s’est expressément vue refuser le « statut de réfugié au sens de la Convention » dans un autre pays?

[53]  Pour être certifiée, une question « doit être déterminante quant à l’issue de l’appel, transcender les intérêts des parties au litige et porter sur des questions ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale. En corollaire, la question doit avoir été discutée par la Cour fédérale et elle doit découler de l’affaire elle-même, et non des motifs du juge (ou de la manière dont la Cour fédérale peut avoir tranché l’affaire) » (Lewis c. Canada (Sécurité publique et Protection civile)), 2017 CAF 130, au par. 36 (Lewis)).

[54]  La question du défendeur ne répond pas à ces critères. La question dont la Cour était saisie portait sur la seule question de savoir si la demande d’une personne qui s’est vu refuser la protection accordée à un réfugié au sens de la Convention dans un autre pays, mais qui a obtenu une autre forme de protection est irrecevable au titre de l’alinéa 101(1)d) de la LIPR. Une réponse à la question a été fournie à la lumière de ces faits uniques en appliquant la jurisprudence établie, confirmée par la Cour d’appel fédérale, en interprétant l’alinéa 101(1)d).

[55]  La question telle qu’elle a été formulée par les demandeurs décrit plus fidèlement les faits présentés à la Cour, mais souffre en fin de compte du même défaut que la question formulée par le défendeur.

[56]  Dans les circonstances, je ne peux pas conclure que la question proposée soulève une question de portée générale. Je refuse de certifier la question.

IX.  Conclusion

[57]  La demande est accueillie. Aucune question n’est certifiée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-1343-18

LA COUR statue que :

  1. la demande est accueillie;

  2. l’affaire est renvoyée pour nouvel examen par un autre décideur;

  3. aucune question n’est certifiée.

« Patrick Gleeson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 13e jour de mars 2019.

Claude Leclerc, traducteur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1343-18

 

INTITULÉ :

JILA AGHAZADEH et ARYA KHADEMI (REPRÉSENTÉ PAR SA TUTRICE À L’INSTANCE JILA AGHAZADEH) c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 30 octobre 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge Gleeson

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

Le 23 janvier 2019

 

COMPARUTIONS :

Benjamin Liston

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Sharon Stewart Guthrie

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Benjamin Liston

Avocat

Bureau du droit des réfugiés

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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