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Date : 20180830


Dossier : T-1107-17

Référence : 2018 CF 876

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 30 août 2018

En présence de madame la protonotaire Kathleen M. Ring

ENTRE :

LIVING SKY WATER SOLUTIONS CORP.

demanderesse

et

ICF PTY LTD.,

SONEERA WATER, LLC,

SONEERA WATER CANADA LTD.

ET DARRELL BEHAN

défendeurs

ORDONNANCE ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  La demanderesse, la société Living Sky Water Solutions Corp., est une entreprise qui fournit des systèmes de traitement des eaux usées. Elle propose à ses clients, notamment à la ville de Kerrobert, en Saskatchewan, le système « Living Sky ». Les défenderesses, Soneera Water, LLC et Soneera Water Canada Ltd. (collectivement « Soneera »), sont des entreprises qui fabriquent et fournissent des systèmes de traitement de l’eau. Le défendeur, Darrell Behan, est le directeur général de Soneera. Soneera est le titulaire exclusif en Amérique du Nord d’une licence d’exploitation du brevet canadien no 2 834 902 (le brevet 902), qui porte sur un système de traitement de l’eau par électrofloculation en flux continu. Le brevet 902 est la propriété de la défenderesse, la société ICF Pty Ltd.

[2]  Dans l’action sous-jacente, la demanderesse sollicite une déclaration selon laquelle le système Living Sky ne contrefait aucune revendication du brevet 902. Elle sollicite également une déclaration selon laquelle la société Soneera et M. Behan ont fait des déclarations fausses et trompeuses tendant à discréditer son entreprise, ses produits et ses services et ont donné au public, sciemment ou sans se soucier des conséquences, des indications fausses ou trompeuses en contravention des alinéas 7a) et 7d) de la Loi sur les marques de commerce et de l’article 52 de la Loi sur la concurrence.

[3]  Les défendeurs ont introduit la présente requête visant à obtenir une ordonnance en application des alinéas 221(1)a) et c) des Règles des Cours fédérales rejetant toutes les revendications personnelles contre M. Behan en son nom propre, ainsi que toutes les revendications contre les défendeurs aux termes de l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce et de l’article 52 de la Loi sur la concurrence. Ils demandent également une ordonnance visant à radier certaines portions des paragraphes 21, 24, 25, 26 et 27 de la déclaration, ainsi que certaines portions de la réponse de la demanderesse, datée du 4 octobre 2017, à la demande de précisions des défendeurs. Subsidiairement, les défendeurs sollicitent une ordonnance visant à obtenir des précisions plus détaillées en réponse aux questions 1 à 20 de leur demande de précisions datée du 19 septembre 2017. Ils demandent également qu’une ordonnance soit rendue en application de l’article 206 des Règles des Cours fédérales,pour forcer la demanderesse à signifier une copie du contrat qui a été passé entre elle et la ville de Kerrobert et qui est décrit au paragraphe 23 de la déclaration (la déclaration).

[4]  Les questions à trancher sont les suivantes :

a)  La demanderesse a-t-elle présenté suffisamment de faits substantiels pour révéler une cause d’action valable selon les alinéas 7a) ou d) de la Loi sur les marques de commerce, ou les articles 36 et 52 de la Loi sur la concurrence?

b)  La demanderesse a-t-elle présenté suffisamment de faits substantiels pour révéler une cause d’action valable contre M. Behan à titre personnel?

c)  S’il y a radiation d’actes de procédure, la demanderesse devrait-elle obtenir l’autorisation de les modifier?

d)  Si aucun acte de procédure n’est radié, les défendeurs peuvent-ils exiger une ou plusieurs des précisions demandées pour être en mesure de répondre à la déclaration?

e)  Les défendeurs ont-ils le droit d’exiger, en application de l’article 206 des Règles des Cours fédérales, la production du contrat passé entre la demanderesse et la ville de Kerrobert?

[5]  Après avoir examiné les dossiers de requête déposés au nom des parties, et examiné les plaidoiries des avocats des parties, ainsi que pour les motifs énoncés ci-après, je conclus que les allégations formulées par la demanderesse au paragraphe 1b) de la déclaration, au titre de l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce et de l’article 52 de la Loi sur la concurrence, doivent être radiées sans autorisation de les modifier, car elles ne révèlent aucune cause d’action valable. Tous les renvois au terme « observations » dans la déclaration doivent eux aussi être radiés sans autorisation de les modifier. De plus, la demande de précisions des défendeurs est accueillie en partie, et la demanderesse doit fournir des précisions sur les allégations floues qu’elle a formulées aux paragraphes 21 et 24 de la déclaration. Enfin, la demanderesse doit signifier une copie du contrat qu’elle a conclu avec la ville de Kerrobert et qui est décrit au paragraphe 23 de la déclaration, dans les quatorze (14) jours suivant la date de la présente ordonnance.

II.  Principes applicables à une requête en radiation

[6]  La Cour peut radier un acte de procédure en application de l’alinéa 221(1)a) des Règles des Cours fédérales (les Règles) si cet acte ne révèle aucune cause d’action valable. Le critère rigoureux à remplir pour radier une demande pour ce motif consiste à établir qu’il est « clair et évident » que la demande ne révèle aucune cause d’action valable, si l’on présume que les faits invoqués peuvent être démontrés. Subsidiairement, il s’agit de démontrer que la demande n’a aucune possibilité raisonnable d’être accueillie : Hunt c Carey Canada Inc., [1990] 2 RCS 959, au paragraphe 36; R. c Imperial Tobacco Canada Ltée, 2011 CSC 42, au paragraphe 17, [2011] 3 RCS 45.

[7]  Lors de la présentation d’une requête en radiation d’un acte de procédure au motif qu’il ne révèle aucune cause d’action valable, on doit considérer comme exactes les allégations qui peuvent être prouvées : Hunt c Carey Canada Inc., [1990] 2 RCS 959. Cette règle ne s’applique toutefois pas aux allégations fondées sur des suppositions et des conjectures : Operation Dismantle c La Reine, [1985] 1 RCS 441, (1985), 18 DLR (4th) 481 (CSC), aux pages 486 et 487 et 490 et 491.

[8]  Une déclaration peut être radiée au motif qu’elle ne révèle aucune cause d’action valable lorsque les conclusions ne sont étayées par aucun fondement factuel. Ainsi, il ne peut y avoir de cause d’action si le demandeur n’invoque pas les faits substantiels requis pour donner lieu à une cause d’action : Amos c Canada, 2017 CAF 213, au paragraphe 36; Keremelevski c Église Ukrainienne Orthodoxe de Sainte-Marie, 2018 CF 406, au paragraphe 61.

[9]  De plus, une déclaration peut être radiée en application de l’alinéa 221(1)c) des Règles au motif qu’elle est fondamentalement vexatoire, si les faits révélés par le demandeur pour étayer sa cause d’action ne sont pas suffisants pour permettre au défendeur d’y répondre ou à la Cour de statuer sur l’affaire : Murray c Canada, [1978] ACF no 406, au paragraphe 10; Kisikawpimootewin c Canada, 2004 CF 1426 aux paragraphes 8 et 9; Ceminchuk, au paragraphe 10.

[10]  Selon le paragraphe 221(2) des Règles, aucune preuve n’est admissible dans le cadre d’une requête en radiation d’un acte de procédure si celui-ci ne révèle aucune cause d’action valable. La Cour doit limiter son examen aux questions exposées dans les actes de procédure. À cet égard, la Cour peut généralement tenir compte, non seulement des actes de procédure formels (p. ex. la déclaration), mais aussi des détails fournis par une partie en réponse à une demande de précisions, puisque ces précisions deviennent partie des actes de procédure dans l’action : Nation Crie Oujé-Bougoumou c Canada, 2004 CF 842, au paragraphe 7. Cependant, si les précisions exposent clairement des éléments de preuve devant servir à prouver des allégations de fait, le paragraphe 221(2) des Règles interdit à la Cour de tenir compte de cette preuve.

[11]  Par conséquent, durant mon examen de la requête présentée par les défendeurs en application de l’alinéa 221(1)a), je n’ai pas tenu compte de la lettre datée du 26 juin 2017, qui fait partie de la réponse de la demanderesse à la demande de précisions des défendeurs et qui est jointe à titre de pièce « B » à l’affidavit de Nelly Lee déposé par les défendeurs à l’appui de leur requête.

III.  Demande présentée aux termes de l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce

[12]  En présentant cette requête, les défendeurs ne sollicitent pas une ordonnance visant à radier l’ensemble de la demande présentée par la demanderesse en application de l’alinéa 7a) au motif qu’elle ne révèle aucune cause d’action valable. Fait important à souligner, les défendeurs ne sollicitent pas non plus la radiation de l’alinéa 21a) de la déclaration (où la demanderesse allègue que les défendeurs ont déclaré que la conception du système Living Sky constitue une violation du brevet 902), du paragraphe 22 (où il est allégué que les déclarations sont fausses et trompeuses et qu’elles tendent à discréditer l’entreprise, les produits et les services de la demanderesse), ni du paragraphe 23 (où il est allégué que la ville de Kerrobert a reçu lesdites déclarations).

[13]  Les défendeurs demandent plutôt la radiation de certaines allégations de fait précises de la déclaration (c.-à-d. des portions du paragraphe 21, les paragraphes 24, 25, 26 et 27 et certaines sections de la réponse de la demanderesse à la demande de précisions des défendeurs), en faisant valoir que ces allégations n’appuient pas une cause d’action raisonnable aux termes de l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, qu’elles sont vagues et indéfinies et qu’elles ne fournissent pas aux défendeurs suffisamment de faits substantiels pour leur permettre de savoir par qui, quand, où, comment et de quelle façon leur responsabilité a été engagée.

[14]  La demanderesse soutient pour sa part que les allégations de fait exposées aux alinéas 21b) à i) de la déclaration ne concernent pas uniquement la demande au titre de l’alinéa 7a) et que, pour les radier de la déclaration, la Cour doit conclure que ces allégations sont sans importance pour l’ensemble des causes d’action invoquées. Elle soutient en outre que les allégations de fait dans ces alinéas, ainsi qu’au paragraphe 22, sont pertinentes pour ce qui est de l’examen de la demande au titre de l’alinéa 7a). Même s’il s’agit d’allégations excédentaires, la demanderesse fait valoir qu’elles ne devraient pas être radiées, car les défendeurs n’ont pas démontré qu’elles sont préjudiciables.

[15]  Pour établir une cause d’action aux termes de l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, les exigences suivantes doivent être satisfaites : il faut démontrer l’existence a) d’une déclaration fausse et trompeuse; b) d’une tendance à discréditer l’entreprise, les marchandises ou les services d’un concurrent et c) d’un préjudice : S & S Industries Inc v Rowell, [1966] RCS 419, au paragraphe 10, Canadian Copyright Licensing Agency c Bureau en gros ltée, 2008 CF 737, au paragraphe 27.

[16]  Les défendeurs ne présentent aucun argument pour étayer leur requête en radiation des paragraphes 25, 26 et 27 de la déclaration, et je ne suis pas convaincue par les arguments qu’ils ont présentés pour étayer leur requête en radiation des parties contestées des paragraphes 21 ou 24. Les alinéas 21b) à i) de la déclaration, lus conjointement avec le paragraphe 22, contiennent des allégations de fait qui, pourrait-on croire, appuient les deux premiers éléments d’une demande au titre de l’alinéa 7a). Ils décrivent diverses déclarations que les défendeurs auraient prétendument faites à la ville de Kerrobert et qui, selon la demanderesse, sont fausses et trompeuses et tendent à discréditer son entreprise, ses produits et ses services. De même, le paragraphe 24 contient des allégations de fait qui seraient vraisemblablement pertinentes pour établir tout au moins le premier élément d’une demande au titre de l’alinéa 7a), car ce paragraphe décrit les déclarations que les défendeurs auraient faites à la ville de Unity et qui, selon la demanderesse, sont elles aussi fausses et trompeuses.

[17]  Bien que les défendeurs déclarent que les diverses déclarations alléguées dans ces paragraphes n’ont pas été formulées dans le but de discréditer l’entreprise, les produits ou les services de la demanderesse, ni ne satisfont d’aucune manière aux exigences pour établir une demande au titre de l’alinéa 7a), la Cour est tenue, dans le cadre d’une requête en radiation fondée sur l’alinéa 221(1)a) des Règles, d’admettre la véracité d’allégations qui peuvent être prouvées. Il appartient au juge qui présidera le procès de statuer sur le bien-fondé de la déclaration, et notamment de déterminer si les déclarations contestées ont été formulées d’une manière menaçante qui tend à discréditer l’entreprise, les produits ou les services de la demanderesse : Excalibre Oil Tools Ltd c Advantage Products Inc., 2016 CF 1279, au paragraphe 282.

[18]  Quoi qu’il en soit, même si les paragraphes contestés contiennent des allégations superflues pour l’examen de la déclaration, la Cour refusera généralement de radier ces déclarations « en trop » si elles ne sont pas préjudiciables : Apotex Inc. c Glaxo Group Ltd., 2001 CFPI 1351, au paragraphe 6. Or, les défendeurs n’ont pu établir l’existence de quelque préjudice découlant des paragraphes contestés.

[19]  De même, je refuse de radier certains termes précis utilisés dans l’introduction du paragraphe 21 de la déclaration qui, selon les défendeurs, sont vagues ou indéfinis. Il ne s’agit pas d’une affaire où il peut être affirmé que l’existence de la cause d’action dépend des faits pouvant apparaître lors de l’interrogatoire préalable. La déclaration révèle une cause d’action selon l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, sans égard à la vaste portée des actes de procédure : Reliance Comfort Limited Partnership c Commissaire de la concurrence, 2013 CAF 129, au paragraphe 7. Cela dit, je suis d’avis que la demanderesse devrait fournir certaines précisions sur les observations vagues formulées aux paragraphes 21 et 24 de la déclaration, ainsi qu’il est indiqué ultérieurement dans les présents motifs.

[20]  Par conséquent, je rejette la requête des défendeurs visant à radier les alinéas 21b) à i), les paragraphes 24, 25, 26 et 27 et certaines portions de la réponse de la demanderesse à la demande de précisions des défendeurs.

IV.  Demande au titre de l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce

[21]  Les défendeurs sollicitent une ordonnance visant à radier toutes les revendications à leur endroit formulées en application de l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce, au motif qu’elles ne révèlent aucune cause d’action valable. Ils font valoir que l’alinéa 7d) porte sur la manière dont une personne fait usage d’une marque de commerce et que la demanderesse n’a présenté aucun fait précis indiquant quelle marque de commerce est en litige ni n’a fourni aucun autre des éléments exigés pour établir une demande au titre de cette disposition. Les défendeurs font également valoir que la demanderesse n’a pas invoqué d’atteinte à la propriété intellectuelle comme l’exige l’arrêt MacDonald et al. c Vapor Canada Ltd., [1977] 2 RCS 134, au paragraphe 64 [Vapor].

[22]  En matière de compétence fédérale, je conviens avec la demanderesse qu’elle a invoqué les liens appropriés avec la propriété intellectuelle. Les prétendues fausses déclarations faites par Soneera et M. Behan portent sur les droits de brevet des parties et sur l’achalandage attaché aux noms commerciaux des parties, ou les deux.

[23]  En ce qui concerne les éléments d’une cause d’action selon l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce, la demanderesse soutient que le terme « emploi » s’applique à l’utilisation d’une « désignation » et que cette disposition ne s’applique pas uniquement à l’emploi d’une marque de commerce. La demanderesse semble prétendre que les prétendues fausses déclarations faites par les défendeurs constituent les faits substantiels nécessaires pour établir l’emploi par les défendeurs d’une « désignation » au sens de l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce.

[24]  Aucune partie n’a cité quelque jurisprudence où la Cour a directement examiné la question de savoir si l’application de l’alinéa 7d) se limite à l’emploi d’une marque de commerce. Dans College of Traditional Chinese Medicine Practitioners and Acupuncturists of British Columbia c Council of Natural Medicine College of Canada, 2009 CF 1110 – seule décision invoquée par les défendeurs à l’appui de cet argument –, aucune question n’a été soulevée quant à la portée de l’alinéa 7d), car cette affaire portait sur l’emploi allégué de marques de commerce.

[25]  L’alinéa 7d) ne précise pas explicitement qu’il s’applique uniquement à l’emploi d’une marque de commerce. Les défendeurs soutiennent que l’alinéa 7d), lorsqu’il est lu conjointement avec la définition du terme « emploi » à l’article 2 de la Loi sur les marques de commerce ainsi qu’à l’article 4, établit que l’emploi d’une marque de commerce est une condition essentielle à la présentation d’une demande au titre de l’alinéa 7d). Les défendeurs demandent à la Cour d’interpréter la loi pour trancher la requête en radiation; cette décision devrait toutefois être laissée au juge qui présidera le procès et être basée sur un dossier de preuve approprié. Par conséquent, bien que je sois d’avis que la demanderesse cherche peut-être à étendre l’application de l’alinéa 7d) au-delà de la portée prévue, il n’est ni évident ni manifeste qu’il faille à ce stade radier les allégations relatives à l’alinéa 7d) au motif que les faits invoqués ne sont pas liés à l’emploi d’une marque de commerce.

[26]  Je conviens toutefois avec les défendeurs que la demanderesse n’a pas invoqué suffisamment de faits pour démontrer tous les autres éléments requis pour établir une cause d’action selon l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce. Dans l’arrêt Vapor, la Cour suprême du Canada a interprété l’alinéa 7d) comme suit :

[22] L’alinéa d) de l’art. 7 semble prévoir la protection de l’acheteur ou consommateur de marchandises ou services, par opposition à l’al. a) qui vise la diffamation ou le dénigrement d’un concurrent ou de sa marchandise. Cela implique ce que j’appellerais de la duperie dans l’offre au public de marchandises ou services, duperie au sens de désignation fausse sous un rapport essentiel et de nature à tromper le public en ce qui regarde les caractéristiques, la qualité, la quantité ou la composition des marchandises ou services ou leur origine géographique ou leur mode de fabrication, de production et d’exécution.

[27]  Selon l’arrêt Vapor, l’alinéa 7d) vise à interdire l’emploi abusif, par une personne, d’une désignation associée aux marchandises ou aux services que cette personne offre au public. En l’espèce, même en présumant, sans pour autant en décider, que le terme « désignation » à l’alinéa 7d) pourrait être interprété dans un sens aussi large que celui que propose la demanderesse afin de comprendre les prétendues fausses déclarations formulées par Soneera et M. Behan, la demanderesse n’a pas présenté de faits substantiels démontrant que les défendeurs ont fait emploi d’une fausse désignation liée aux propriétés de leur système de traitement de l’eau, qui a sans doute induit le public en erreur. Un examen de la déclaration, et plus précisément du paragraphe 21 que la demanderesse invoque à l’appui de sa demande au titre de l’alinéa 7d), indique que les prétendues fausses déclarations des défendeurs font référence au système de traitement de l’eau de la défenderesse (c.-à-d. le système Living Sky), et non aux propriétés du système de traitement de l’eau des défendeurs.

[28]  Par conséquent, je conclus que la demanderesse n’a pas fourni de faits substantiels pour établir une demande au titre de l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce et, donc, que cette demande exposée à l’alinéa 1b) de la déclaration doit être radiée au motif qu’elle ne révèle pas une cause d’action valable. Les allégations de fait formulées dans la déclaration, et invoquées par la demanderesse à l’appui de sa demande au titre de l’alinéa 7d), ne sont toutefois pas radiées, car elles sont également pertinentes pour ce qui est de l’examen de sa demande au titre de l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, qui échappe à la requête en radiation.

V.  Demande au titre de l’article 52 de la Loi sur la concurrence

[29]  Les défendeurs font valoir que la revendication de la demanderesse relativement à la prétendue violation de l’article 52 de la Loi sur la concurrence devrait être radiée, car la demanderesse n’a pas présenté de faits pour établir qu’elle s’est fiée, d’une manière qui lui a été préjudiciable, aux prétendues observations trompeuses des défendeurs. Par conséquent, la demanderesse n’a pas établi le lien de causalité exigé entre la prétendue violation de l’article 52 de la Loi sur la concurrence (la Loi) et les dommages-intérêts réclamés selon l’article 36 de la Loi. Les défendeurs allèguent en outre que la demanderesse a omis d’invoquer un aspect lié à la propriété intellectuelle dans le cadre de sa demande au titre de l’article 52 et que, de ce fait, la Cour n’a pas compétence pour trancher cette question.

[30]  La demanderesse soutient au contraire qu’elle a présenté suffisamment de faits substantiels pour établir un lien de causalité. En matière de compétence fédérale, la demanderesse soutient qu’elle n’est pas tenue d’invoquer un aspect lié à la propriété intellectuelle dans le cadre d’une demande au titre de l’article 52, parce que le paragraphe 36(3) de la Loi sur la concurrence confère à la Cour fédérale compétence sur les recours civils compensatoires pris au titre de cette loi.

[31]  Je conviens avec la demanderesse que la Cour a compétence pour statuer sur la demande présentée au titre de l’article 52 de la Loi sur la concurrence. L’article 36 de cette loi vise à créer un droit d’intenter une action civile en dommages-intérêts découlant d’une prétendue violation de l’article 52 de la Loi. Le paragraphe 36(3) de la Loi sur la concurrence confère à la Cour fédérale compétence sur les actions engagées au titre du paragraphe 36(1) de la Loi.

[32]  En ce qui concerne le caractère suffisant des demandes présentées par la demanderesse au titre des articles 36 et 52 de la Loi sur la concurrence, les défendeurs invoquent la décision rendue par la Cour supérieure de justice de l’Ontario dans Singer v Schering-Plough Canada Inc, 2010 ONSC 42 [Singer], pour prétendre qu’un demandeur qui réclame des dommages-intérêts aux termes du paragraphe 36(1) de la Loi sur la concurrence doit établir que les actes commis par la personne visée par la réclamation constituent une violation du paragraphe 52(1) de la Loi, que le demandeur a subi des pertes ou des dommages et qu’il existe un lien de causalité entre la violation et les préjudices causés (c.-à-d. que le demandeur s’est fié, à son détriment, aux prétendues fausses déclarations).

[33]  Bien qu’aucune partie ne cite cette affaire, notre Cour dans Murphy c Compagnie Amway Canada, 2015 CF 958, au paragraphe 82, renvoie avec approbation à Singer et insiste sur le fait que, pour intenter un recours aux termes de l’article 36 de la Loi sur la concurrence, le demandeur doit démontrer qu’il a agi, à son détriment, sur la foi des fausses observations alléguées.

[34]  En l’espèce, la demanderesse a omis de fournir des faits substantiels pour établir qu’elle s’est fiée, à son détriment, aux fausses observations alléguées. Il ne suffit pas que la demanderesse se contente d’alléguer que les déclarations et observations fausses et trompeuses lui ont causé préjudice, ou que le refus de payer de la ville de Kerrobert, ou la perte de ventes à la ville de Unity, sont le résultat de ces déclarations ou observations. Aucune de ces allégations de fait ne prouve que la demanderesse s’est fiée, à son détriment, aux fausses observations alléguées.

[35]  Pour ces motifs, la demande présentée par la demanderesse en application de l’article 52 de la Loi sur la concurrence, et exposée à l’alinéa 1b) de la déclaration, doit être radiée, car elle ne révèle pas de cause d’action valable. De plus, tous les renvois au terme « observations » dans la déclaration seront eux aussi radiés, car la demanderesse a expressément indiqué qu’ils étaient invoqués à l’appui de sa demande au titre à l’article 52. Les autres allégations de fait formulées par la demanderesse à l’appui de sa demande en application de l’article 52 ne sont pas radiées, car elles sont également pertinentes pour ce qui est de l’examen de la demande qu’elle a présentée au titre de l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, et qui échappe à la requête en radiation.

VI.  Réclamation personnelle contre M. Behan

[36]  Les défendeurs sollicitent une ordonnance en application des alinéas 221(1)a) et c) des Règles qui rejette toute action engagée à titre personnel contre M. Behan. Ils soutiennent que la demanderesse n’a pas présenté de faits substantiels démontrant que M. Behan, en faisant les déclarations fausses et trompeuses alléguées, a outrepassé son rôle et ses obligations à titre de dirigeant d’une personne morale et dépassé le cadre des activités commerciales normales de Soneera.

[37]  Dans sa réponse, la demanderesse soutient que les défendeurs ont mal interprété son argument et que M. Behan a personnellement causé les actes délictueux décrits dans la déclaration. Elle allègue que les personnes doivent être tenues responsables de leur propre conduite délictueuse, qu’elles agissent ou non au nom d’une personne morale ou dans les limites de leurs attributions, et qu’elle a présenté suffisamment de faits substantiels pour étayer une cause d’action à l’encontre personnellement de M. Behan.

[38]  Dans l’arrêt Mentmore Manufacturing Co Ltd c National Merchandise Manufacturing Co Inc, [1978] ACF no 521 (1978), 89 DLR (3d) 195, 22 NR 161, au paragraphe 24, la Cour d’appel fédérale a déclaré que le simple fait qu’un défendeur individuel soit l’unique actionnaire et administrateur d’une société n’est pas en soi suffisant pour qu’il soit possible d’inférer que la société était son agent ou instrument dans l’accomplissement des actes de contrefaçon ou que le défendeur a autorisé ces actes et s’en est ainsi personnellement rendu responsable. La Cour a noté que le type de participation dans les actes d’une société qui engage une responsabilité personnelle est une question difficile à définir, qui doit être tranchée en fonction des circonstances propres à chaque affaire, mais  « [i]l semblerait que ce soit lorsque la nature et l’étendue de la participation personnelle de l’administrateur ou du dirigeant fasse de l’acte délictueux leur acte délictueux » (paragraphe 25). Pour que la responsabilité personnelle d’un administrateur ou d’un dirigeant de société soit engagée, la Cour a déclaré ce qui suit :

[28] [...] À mon avis, il existe toutefois certainement des circonstances à partir desquelles il y a lieu de conclure que ce que visait l’administrateur ou le dirigeant n’était pas la conduite ordinaire des activités de fabrication et de vente de celle-ci, mais plutôt la commission délibérée, volontaire et intentionnelle d’actes qui étaient de nature à constituer une contrefaçon ou qui reflètent une indifférence à l’égard du risque de contrefaçon.

[39]  La responsabilité personnelle n’est engagée que si les actes de l’administrateur ou du dirigeant sont tels que le comportement lui-même de l’administrateur est délictueux ou qu’il témoigne d’une identité distincte ou d’intérêts différents de ceux de la personne morale et qui fait que les actes ou les agissements reprochés peuvent être attribués à la personne en cause : Petrillo c Allmax nutrition inc., 2006 CF 1199, au paragraphe 29; Zero Spill Systems (Int’l) Inc. c 614248 Alberta Ltd, 2009 CF 70, au paragraphe 19.

[40]  À titre d’exemple, dans Krav Maga Enterprises, LLC c Edge Combat Fitness Inc., 2006 CF 112, la Cour a confirmé une ordonnance ayant ajouté un défendeur à titre personnel, au motif que la demanderesse dans cette affaire avait plaidé suffisamment de faits alléguant que cette personne avait agi à titre personnel en menant les activités de contrefaçon alléguées. La Cour a noté que le défendeur s’était personnellement livré aux activités alléguées de contrefaçon (distribution de prospectus électroniques distribués par le défendeur), et elle a établi un parallèle entre ces faits et ceux dans Fibremann Inc. c Rocky Mountain Spring (Icewater 02) Inc., 2005 CF 977. Dans Fibremann, la Cour a rejeté l’argument du défendeur qui disait avoir à première vue un moyen de défense selon lequel c’était toujours en qualité d’administrateur de la société qu’il avait accompli les actes qui lui étaient reprochés et, donc, qu’il ne saurait en être tenu personnellement responsable. Dans cette affaire, la Cour a conclu que les faits dont elle avait été saisie différaient de ceux dans Mentmore :

[32] [...] En l’espèce, M. Kwok a fait beaucoup plus que donner des instructions aux employés. Il a en effet écrit des lettres incitant des tiers à commercer avec Rocky Mountain, qui affirmaient à la clientèle que Rocky Mountain était un simple « changement de nom ». D’autres allégations dans la déclaration décrivent d’autres agissements menés directement par M. Kwok. À chaque fois, c’est M. Kwok qui a mené les activités ayant abouti à la contrefaçon présumée de la marque de commerce.

[Non souligné dans l’original.]

[41]  De même, dans West Coast Engineering Ltd c J.A. Industries (Canada) Ltd, [1997] ACF no 945, (1997), 75 CPR (3d) 337 (CF), la Cour a rejeté une requête visant à radier une réclamation présentée à l’encontre personnellement des défendeurs en application de l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, concluant que « [l]e fait qu’ils aient pu agir pour le compte de la société défenderesse ne les soustrait pas aux conséquences découlant de leurs actes personnels si ces actes sont délictueux. Dans la déclaration, il est allégué que chacun d’entre eux s’est livré à certaines activités particulières qui, si elles sont prouvées, pourraient satisfaire au critère relatif à la responsabilité personnelle [...] ».

[42]  Comme la jurisprudence tient les dirigeants de personne morale responsables de leurs actes si leur propre comportement est considéré comme délictueux, je conclus que, si les faits allégués dans la déclaration au sujet de la participation personnelle de M. Behan aux prétendues activités menées en contravention de l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce sont avérés, ces faits pourraient constituer un fondement suffisant pour raisonnablement soutenir que M. Behan a fait siens les actes délictueux contestés et a ainsi engagé sa responsabilité personnelle. La demanderesse fait valoir, au paragraphe 9 de la déclaration, que Soneera et M. Behan ont envoyé des lettres, à elle et à la ville de Kerrobert, les menaçant d’actions en contrefaçon du brevet 902 par le système Living Sky. Aux paragraphes 21 à 23, la demanderesse soutient que Soneera et M. Behan ont présenté diverses déclarations et observations à la ville de Kerrobert au sujet du système Living Sky, ainsi qu’il est décrit au paragraphe 21, mais que ces déclarations sont fausses et trompeuses et qu’elles ont été faites dans le but de discréditer son entreprise, ses produits et ses services. Puis, au paragraphe 24, elle allègue que Soneera et M. Behan ont présenté des observations et des déclarations fausses et trompeuses à la ville de Unity au sujet du système Living Sky.

[43]  À cette étape de l’instance, je ne peux conclure de manière claire et manifeste que les actes de procédure révèlent, comme l’exige l’alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, une cause d’action valable contre M. Behan à titre personnel. Cependant, la déclaration mentionne des activités menées directement par M. Behan qui, si elles sont avérées, pourraient satisfaire au critère engageant la responsabilité personnelle selon Mentmore. Par conséquent, je rejette la requête des défendeurs visant à radier les réclamations personnelles contre M. Behan.

VII.  Faudrait-il accorder à la demanderesse l’autorisation de modifier ses actes de procédure?

[44]  Lorsqu’il est décidé de radier un acte de procédure, l’article 221 des Règles des Cours fédérales prévoit qu’il faut ensuite déterminer si cette radiation se fera avec ou sans autorisation de modifier. Pour qu’une déclaration soit radiée sans autorisation d’être modifiée, elle doit comporter un vice qui ne peut être corrigé par une modification : Simon c Canada, 2011 CAF 6, aux paragraphes 8 et 14.

[45]  La demanderesse soutient que, si la Cour juge que les faits présentés sont insuffisants, elle devrait être autorisée à modifier ses actes de procédure au motif qu’elle pourrait alors peut-être avoir gain de cause. Cependant, la demanderesse n’a pas proposé de modifications susceptibles de corriger les lacunes relevées dans les actes de procédure précités, et ce, bien que les parties aient largement discuté des éléments essentiels pour présenter une cause d’action en application de l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce et de l’article 52 de la Loi sur la concurrence. Dans les circonstances, je conclus que les portions précitées de l’alinéa 1b) et du paragraphe 21 de la déclaration devraient être radiées, sans autorisation de les modifier : Sivak c Canada, 2012 CF 272, au paragraphe 94; Gagné c Canada, 2013 CF 331, au paragraphe 22.

VIII.  Demande de précisions

[46]  Subsidiairement, les défendeurs demandent des précisions plus détaillées, en réponse aux questions 1 à 20 de leur demande de précisions datée du 19 septembre 2017. Ils contestent plus précisément le caractère flou de certaines allégations formulées dans la déclaration.

[47]  Lors de la présentation d’une requête visant à obtenir des précisions, il incombe à la partie qui présente la requête d’établir que les précisions demandées sont nécessaires pour lui permettre de répondre à l’acte de procédure en litige, et pas seulement pour se préparer au procès, et que ces précisions ne lui sont pas connues. Il n’est pas acceptable qu’une partie demande des précisions dans le seul but de faire une recherche à l’aveuglette visant à déterminer s’il existe un fondement factuel permettant de présenter une éventuelle défense : Stryker Corporation c Umano Medical Inc., 2016 CF 378, au paragraphe 25.

[48]  Les défendeurs soutiennent que les allégations formulées en introduction du paragraphe 21 de la déclaration, selon lesquelles [traduction] « Soneera et M. Behan ont présenté, ou ont demandé à d’autres de présenter en leur nom, des observations et des déclarations affirmant ou laissant entendre, notamment, que […] » (souligné par les défendeurs), sont des déclarations vagues et floues. Ils soutiennent également que le paragraphe 24 contient des termes vagues et non définis, faisant ici probablement référence à l’allégation de la demanderesse que [traduction] « Soneera et M. Behan ont aussi fait des déclarations et des observations fausses et trompeuses au sujet du système Living Sky à la ville de Unity (Unity) et à d’autres. Soneera et M. Behan ont présenté des déclarations et des observations fausses et trompeuses affirmant, ou laissant entendre, notamment, que […] » (non souligné dans l’original).

[49]  Durant l’audience, l’avocat de la demanderesse a indiqué que la demanderesse était disposée à fournir des précisions sur les « autres » qui, selon les allégations mentionnées au paragraphe 21, auraient également fait des déclarations ou des observations au nom de Soneera et de M. Behan, ainsi que sur les autres villes auxquelles les défendeurs auraient fait des déclarations fausses et trompeuses selon ce qu’allègue la demanderesse au paragraphe 24.

[50]  Je suis d’avis que la demanderesse doit fournir des précisions sur toutes les allégations floues qui sont mentionnées dans les portions soulignées précitées des paragraphes 21 et 24 de la déclaration, et pas seulement sur le terme « autres » qui y est utilisé. Le caractère flou des allégations laisse croire qu’il pourrait y avoir des faits liés à d’autres observations ou aux déclarations contestées, ou à d’autres entités les ayant formulées, que la demanderesse aurait l’intention d’invoquer à l’appui de sa demande. Or, si ces renseignements existent, les défendeurs ont le droit de les obtenir pour pouvoir préparer leur réponse et être informés des arguments qu’ils auront à réfuter.

[51]  Outre les actes de procédure flous précités, le reste de la demande de précisions des défendeurs est rejeté, car les défendeurs n’ont pas réussi à établir pourquoi ils ont besoin des précisions demandées aux questions 1 à 20 de leur demande de précisions datée du 19 septembre 2017 pour répondre intelligemment à la déclaration. Les éléments de preuve produits par les défendeurs à l’appui de cette requête consistent en un affidavit d’un assistant juridique auquel sont annexées, à titre de pièces à l’appui, la demande de précisions des défendeurs et la réponse de la demanderesse. Cet affidavit ne précise pas les limites des connaissances des défendeurs relativement aux précisions demandées, ni ne contient d’explications factuelles précises démontrant que ce sont les défendeurs, et non leurs avocats, qui ont véritablement besoin de cette information pour répondre intelligemment à la déclaration de la demanderesse.

IX.  Divulgation du contrat – Article 206 des Règles

[52]  Les défendeurs sollicitent également une ordonnance en application de l’article 206 des Règles des Cours fédérales pour forcer la demanderesse à signifier une copie du contrat qu’elle a passé avec la ville de Kerrobert et qui est décrit au paragraphe 23 de la déclaration. Dans ses observations écrites, la demanderesse soutient que la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et dégager la demanderesse de son obligation de divulguer le contrat en conformité avec l’article 206 des Règles, au motif que les modalités précises du contrat ne constituent pas un élément pertinent. Durant l’audience, l’avocat de la demanderesse a déclaré que la principale préoccupation sous-jacente était de préserver la confidentialité du montant accordé aux termes du contrat.

[53]  Je refuse d’exercer le pouvoir discrétionnaire que me confère l’article 206 des Règles pour dégager la demanderesse de son obligation de signifier le contrat aux défendeurs. Après examen de la déclaration, je conclus que les modalités du contrat sont pertinentes pour ce qui est de l’examen des questions soulevées dans les actes de procédure. La demanderesse s’appuie sur son allégation formulée au paragraphe 23 selon laquelle [traduction] « Kerrobert a refusé d’effectuer un paiement exigible en application de son contrat avec Living Sky, directement après avoir été informée des déclarations », et que cela constitue un fait substantiel qui appuie sa prétention qu’elle a subi des pertes ou des dommages à la suite des prétendues déclarations fausses ou trompeuses faites par les défendeurs. La demanderesse n’a présenté aucun argument contraire convaincant. De plus, elle n’a pas cherché à présenter une copie non expurgée du contrat scellé, afin de permettre à la Cour d’en examiner les modalités et d’en évaluer la pertinence.

[54]  Si la préoccupation de la demanderesse est de s’assurer que les renseignements contenus dans le contrat sont considérés comme confidentiels, l’avocat aurait dû prendre des mesures pour restreindre la communication de tout renseignement sensible au moyen d’un accord entre avocats, ou sinon, d’une requête présentée à la Cour pour obtenir l’ordonnance appropriée.

[55]  Dans les circonstances, je conclus que la demanderesse doit signifier une copie du contrat qu’elle a passé avec la ville de Kerrobert et qui est décrit au paragraphe 23 de la déclaration, dans les quatorze (14) jours suivant la date de la présente ordonnance.

[56]  Sauf décision contraire de la Cour, les défendeurs signifieront et déposeront une défense dans les vingt (20) jours après que la demanderesse se sera conformée aux modalités de la présente ordonnance.

[57]  Puisque chaque partie a partiellement gain de cause, je conclus que chacune devrait prendre en charge ses propres frais afférents à la requête.


ORDONNANCE dans le dossier T-1107-17

LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

  1. Les allégations d’infraction à l’alinéa 7d) de la Loi sur les marques de commerce et à l’article 52 de la Loi sur la concurrence, formulées à l’alinéa 1b) de la déclaration, sont radiées sans autorisation de les modifier. Tous les renvois au terme « observations » dans la déclaration sont eux aussi radiés, sans autorisation de les modifier. Le reste de la requête en radiation des défendeurs est rejetée.

  2. Dans les quatorze (14) jours suivant la date de la présente ordonnance, la demanderesse fournira des précisions sur les allégations de la déclaration qui sont soulignées ci-après :

    • a)  Paragraphe 21 : [traduction] « Soneera et M. Behan ont présenté, ou ont demandé à d’autres de présenter en leur nom, des observations et des déclarations affirmant ou laissant entendre, notamment, que […] »;

    • b) Paragraphe 24 : [traduction] « Soneera et M. Behan ont aussi présenté des déclarations et des observations fausses et trompeuses au sujet du système Living Sky à la ville de Unity (Unity) et à d’autres. Soneera et M. Behan ont présenté des déclarations et des observations fausses et trompeuses affirmant, ou laissant entendre, notamment, que […] ».

  3. Le reste de la demande de précisions est rejeté.

  4. Dans les quatorze (14) jours suivant la date de la présente ordonnance, la demanderesse signifiera une copie du contrat qu’elle a passé avec la ville de Kerrobert et qui est décrit au paragraphe 23 de la déclaration.

  5. Sauf décision contraire de la Cour, les défendeurs signifieront et déposeront une défense dans les vingt (20) jours après que la demanderesse se sera conformée aux modalités de la présente ordonnance.

  6. Il n’y aura pas d’adjudication des dépens.

« Kathleen M. Ring »

Protonotaire


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1107-17

 

INTITULÉ :

LIVING SKY WATER SOLUTIONS CORP. c ICF PTY LTD., SONEERA WATER, LLC, SONEERA WATER CANADA LTD. ET DARRELL BEHAN

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 13 février 2018

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

MADAME LA PROTONOTAIRE KATHLEEN M. RING

 

DATE DES MOTIFS :

Le 30 août 2018

 

COMPARUTIONS :

William Regan

 

Pour la demanderesse

 

Aiyaz A. Alibhai

Pour les défendeurs

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Piasetzki Nenniger Kvas LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour la demanderesse

 

Miller Thomson LLP

Lawyers | Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour les défendeurs

 

 

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