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Date : 20180406


Dossier : IMM-3584-17

Référence : 2018 CF 368

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 6 avril 2018

En présence de madame la juge Strickland

ENTRE :

HAOCHEN WANG

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision d’un agent d’immigration du consulat général du Canada à Hong Kong par laquelle sa demande de résidence permanente a été rejetée en raison de fausses déclarations, conformément au paragraphe 40(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR).

[2]  Par les motifs qui suivent, j’ai déterminé que la présente demande doit être rejetée puisque l’agent est arrivé à la conclusion raisonnable que le demandeur a fait de fausses déclarations au sujet de ses antécédents de voyage.

Résumé des faits

[3]  Le demandeur est un citoyen de la République populaire de Chine (la Chine). Le 22 octobre 2015, il a présenté une demande de visa de résident permanent au Canada au titre de la catégorie des candidats des provinces pour l’Île-du-Prince-Édouard. Dans le cadre de cette demande, il a rempli le formulaire 5562, Renseignements supplémentaires – Liste des voyages. Il devait énumérer tous les voyages qu’il avait faits à l’extérieur de son pays d’origine ou de résidence au cours des 10 dernières années. Le document donne pour instruction d’« inclure les voyages à but touristique, les voyages d’affaires, les stages de formation, etc. ». Le demandeur y a inscrit quatre voyages, un à Singapour, un à Tokyo et deux au Canada. Dans l’Annexe A – Contexte/Déclaration, il indique qu’il avait aussi résidé aux Émirats arabes unis, en Arabie saoudite et au Royaume-Uni. Compte tenu de cette déclaration, la Section de l’immigration du consulat a, dans une lettre datée du 14 juillet 2016, demandé au demandeur de produire un certificat de police pour chaque pays où il avait résidé pendant six mois ou plus ainsi qu’un certificat de police original des Émirats arabes unis. Le demandeur a répondu, dans une lettre datée du 25 juillet 2016, qu’il avait seulement voyagé aux Émirats arabes unis pour le travail et qu’il n’y avait pas vécu plus de six mois. Par conséquent, il ne satisfaisait pas aux exigences lui permettant d’obtenir un certificat de police des Émirats arabes unis. Puisque le demandeur n’a produit aucun document appuyant ses explications, un agent de la Section de l’immigration du consulat a, dans une lettre datée du 20 octobre 2016, avisé le demandeur qu’il devait produire des certificats de police du Bangladesh et de l’Arabie saoudite ainsi que des copies originales notariées de toutes les pages de son passeport de la Chine comportant son visa des Émirats arabes unis, les timbres d’entrée et de sortie des Émirats arabes unis et le dernier timbre de sortie de l’Arabie saoudite.

[4]  Dans une lettre reçue par le consulat le 20 décembre 2016, le demandeur a produit une copie notariée de son passeport des Affaires publiques de la Chine. Cela a suffi à convaincre l’agent que le demandeur n’avait pas résidé aux Émirats arabes unis et que, par conséquent, il n’avait pas besoin de produire d’attestation de ce pays. Cependant, le passeport faisait état de plusieurs voyages qui n’avaient pas été déclarés dans ses antécédents de voyages au formulaire 5562.

[5]  Le 3 janvier 2017, le consulat a envoyé une lettre d’équité procédurale au demandeur (la lettre d’équité). Cette lettre indiquait que, au vu des timbres d’entrée et de sortie du passeport des Affaires publiques de la Chine, il avait été déterminé que le demandeur n’avait pas divulgué tous les renseignements concernant ses voyages touristiques, voyages d’affaires, stages de formation, etc. des 10 dernières années, comme l’exigeait le formulaire 5562 qu’il a rempli. Les omissions comprennent des voyages au Bahreïn, au Niger, au Tchad, en France, en Algérie, au Cameroun et en Iraq. La lettre d’équité l’avisait ainsi :

[traduction] Veuillez noter que, s’il est établi que vous avez fait une fausse déclaration dans votre demande, vous pourriez être déclaré interdit de territoire en application de l’alinéa 40(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Le cas échéant, vous serez interdit de territoire au Canada pour une période de cinq ans conformément à l’alinéa 40(2)a) et, en application du paragraphe 40(3), vous ne pourrez présenter de nouvelle demande de résidence permanente durant la période d’interdiction de territoire.

[6]  La lettre abordait également la demande de certificat de police bangladais, donnant au demandeur la possibilité de répondre aux préoccupations soulevées.

[7]  Le demandeur a répondu à la lettre d’équité procédurale le 18 janvier 2017. Il déclare notamment dans sa réponse que [traduction] « en raison d’un malentendu, je croyais à tort que “les voyages à but touristique, les voyages d’affaires, les stages de formation”, comme indiqué dans le formulaire IMM5562, concernaient uniquement mes entrées et sorties personnelles inscrites dans mon passeport personnel et non à la fois mon passeport personnel et mon passeport des Affaires publiques. Après tout, le processus d’immigration est personnel et n’a rien à voir avec mon employeur… » Le demandeur a présenté un formulaire 5562 mis à jour faisant état de ses antécédents de voyage inscrits dans ses deux passeports.

Décision faisant l’objet du contrôle

[8]  Dans une lettre datée du 17 juin 2017, un agent a avisé le demandeur que sa demande de résidence permanente au Canada avait été évaluée et qu’il avait été conclu que le demandeur n’était pas en droit de recevoir un visa de résident permanent du Canada. L’agent renvoie aux alinéas 40(1)a) et 40(2)a) et au paragraphe 40(3) de la LIPR et déclare que le demandeur a fait une présentation erronée de faits importants, ou a dissimulé des faits importants sur son passé et sur ses antécédents de voyage. L’agent y explique que les antécédents de voyage que le demandeur avait déclarés dans ses formulaires de demande n’étaient pas complets et véridiques. De plus, bien que le demandeur ait déclaré en réponse à la lettre d’équité qu’il avait omis certains de ses voyages puisqu’ils n’étaient pas des voyages privés, mais plutôt des voyages effectués dans le cadre de son travail et inscrits dans son passeport des Affaires publiques, il ne s’agit pas là d’une explication raisonnable puisque le formulaire 5562 demande clairement d’y « Inclure les voyages à but touristique, les voyages d’affaires, les stages de formation, etc. ». La réponse du demandeur n’était pas raisonnable et n’a pas suffi à réfuter les préoccupations de l’agent. L’agent a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur avait directement ou indirectement fait une présentation erronée de faits importants, ou une réticence sur ces faits, quant à ses antécédents personnels pertinents dans le traitement de sa demande d’immigration. La présentation erronée de ces faits importants ou la réticence sur ces faits a entraîné ou a risqué d’entraîner des erreurs dans l’application de la LIPR puisqu’un visa d’immigrant aurait pu être délivré au demandeur sans qu’il ait remis des renseignements véridiques et complets permettant au consulat d’évaluer correctement son admissibilité. Par conséquent, le demandeur a été déclaré interdit de territoire au Canada pour une période de cinq ans et sa demande a été rejetée.

[9]  Il est bien établi que les notes du Système mondial de gestion des cas (le SMGC) font partie des motifs d’un agent (Gebrewldi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 621, au paragraphe 29; Pushparasa c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 828, au paragraphe 15 ; Khowaja c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 823, au paragraphe 3). Dans le cas qui nous occupe, les notes du SMGC exposent les renseignements généraux susmentionnés. Les notes révèlent également que l’agent avait conclu que l’explication que le demandeur avait envoyée en réponse à la lettre d’équité procédurale n’était pas satisfaisante et que le demandeur n’avait pas été en mesure d’expliquer de façon raisonnable pourquoi il avait mal interprété les instructions claires du formulaire 5562 étant donné que les voyages qu’il a faits avec son passeport chinois des Affaires publiques étaient probablement tous des voyages d’affaires. L’agent ne pouvait en outre conclure que le demandeur n’avait pas intentionnellement omis une partie de ses antécédents de voyage. De plus, si le consulat n’avait pas demandé au demandeur de produire des éléments de preuve fiables faisant état de ses anciens lieux de résidence, le demandeur n’aurait jamais présenté de copies des pages de son passeport chinois des Affaires publiques et le consulat n’aurait jamais été mis au courant des voyages qu’il avait faits avec celui-ci. L’agent est arrivé à la conclusion que les fausses déclarations étaient importantes et auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR puisque le consulat n’aurait pas réalisé que le demandeur était interdit de territoire en vertu du paragraphe 15(1) pour avoir présenté des renseignements non véridiques à l’appui de sa demande d’immigration et que le consulat aurait été amené à croire qu’il avait mené une évaluation approfondie des antécédents du demandeur et à lui délivrer un visa sur la foi de renseignements non véridiques.

[10]  La conclusion de l’agent a été confirmée par un réexamen du dossier d’un deuxième agent (l’agent de réexamen). Il a été déterminé par ce réexamen qu’il incombait au demandeur de s’assurer que sa demande était complète et que son contenu était véridique, et qu’il avait retenu les services d’un représentant autorisé depuis qu’il avait présenté sa demande. L’agent de réexamen a conclu que le demandeur avait bénéficié d’un processus procédural équitable et avait eu la possibilité de présenter des observations. Il a par conséquent conclu que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur avait fait une présentation erronée de faits importants sur ses antécédents de voyage dans son formulaire de demande. Ces renseignements sont importants puisqu’ils étaient pertinents quant à l’évaluation de l’admissibilité du demandeur et qu’ils auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR et la délivrance d’un visa sans que tous les renseignements nécessaires à l’évaluation d’admissibilité aient été présentés. L’agent de réexamen a rejeté la demande conformément à l’article 40, qui prévoit une interdiction de territoire de cinq ans (l’agent responsable de l’évaluation et l’agent de réexamen seront ci-après désignés collectivement par le terme « agent »).

Questions en litige et norme de contrôle

[11]  À mon avis, la seule question à trancher est celle de savoir si la décision de l’agent était raisonnable.

[12]  La décision d’un agent au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable puisqu’elle s’appuie sur des conclusions mixtes de fait et de droit (Ge c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 594, au paragraphe 14; Jiang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 942, au paragraphe 19 [Jiang]; Zhamila c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 88, au paragraphe 13; Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 401, au paragraphe 14 [Patel], citant Rahman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 793, au paragraphe 6). Lorsqu’elle procède à l’examen du caractère raisonnable d’une décision, la Cour se préoccupe surtout de l’existence d’une justification, de la transparence et de l’intelligibilité du processus décisionnel, mais aussi de la question de savoir si la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).

Discussion

[13]  Le paragraphe 40(1) de la LIPR prévoit ce qui suit : Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants : a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi.

[14]  Pour qu’un demandeur soit déclaré interdit de territoire en vertu de l’alinéa 40(1)a), un agent doit être convaincu que i) le demandeur a, directement ou indirectement, fait une fausse déclaration; ii) la fausse déclaration se rapporte à un fait important quant à un objet pertinent; et iii) la fausse déclaration entraîne ou aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR (Kazzi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 153, au paragraphe 32 [Kazzi]; Geng c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CF 1155, au paragraphe 22).

[15]  J’ai déjà résumé les principes généraux portant sur les fausses représentations dans l’affaire Goburdhun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 971, au paragraphe 28. Aux fins de la présente demande, ces principes supposent une interprétation très large de l’article 40 afin d’en promouvoir l’objectif sous-jacent (Khan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 512, au paragraphe 25 [Khan]), l’objectif étant de prévenir les fausses déclarations et préserver l’intégrité du processus d’immigration. Pour réaliser cet objectif, il incombe au demandeur de s’assurer que sa demande est complète et exacte (Oloumi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 428, au paragraphe 23 [Oloumi]; Jiang, au paragraphe 35; Wang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1059, aux paragraphes 55 et 56 [Wang]).

[16]  En ce sens, le demandeur a une obligation de franchise et de fournir des renseignements complets, fidèles et véridiques en tout point quand il présente une demande d’entrée au Canada (Bodine c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 848, aux paragraphes 41 et 42 [Bodine]; Baro c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1299, au paragraphe 15 [Baro]; Haque c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 315, au paragraphe 11 [Haque]). L’article 40 est intentionnellement formulé en termes généraux et appliqué de façon élargie, et englobe même les présentations erronées faites par une tierce partie, dont celles d’un consultant en immigration, sans que le demandeur soit mis au courant (Jiang, au paragraphe 35 ; Wang, aux paragraphes 55 et 56).

[17]  L’exception à l’article 40 est restreinte et s’applique uniquement dans des circonstances véritablement extraordinaires où le demandeur croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne faisait pas de présentation erronée sur un fait important et qu’il était impossible pour le demandeur d’avoir connaissance de la déclaration inexacte (Masoud c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 422, aux paragraphes 33 à 37 [Masoud]; Goudarzi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 425, au paragraphe 40 [Goudarzi]). C’est-à-dire que le demandeur ignorait subjectivement qu’il dissimulait des renseignements (Medel c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 2 CF 345 (CAF) [Medel]; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Singh Sidhu, 2018 CF 306, au paragraphe 55 [Singh Sidhu]).

[18]  Pour décider si une fausse déclaration est importante, il est nécessaire de tenir compte du libellé de la disposition ainsi que de l’objet qui la sous‑entend (Oloumi, précité, au paragraphe 22). Il est nécessaire d’examiner les circonstances entourant chaque cas avant de décider si les renseignements dissimulés constituent une présentation erronée des faits (Baro, au paragraphe 17; Bodine, aux paragraphes 41 et 42; Singh Sidhu, aux paragraphes 59 à 61). De plus, une fausse déclaration n’a pas à être décisive ou déterminante; il suffit qu’elle ait une incidence sur le processus amorcé (Oloumi, précité, au paragraphe 25);

[19]  un demandeur ne peut non plus tirer parti du fait que la fausse déclaration a été mise au jour par les autorités d’immigration avant l’examen final de la demande. L’analyse de la notion de fait important ne se limite pas à un moment particulier dans le traitement de la demande (Haque, aux paragraphes 12 et 17; Khan, aux paragraphes 25, 27 et 29; Shahin, c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 423, au paragraphe 29 [Shahin]).

[20]  Dans l’affaire qui nous occupe, le demandeur soutient qu’il y a une exception à la règle concernant les cas de fausses déclarations qui s’applique quand le demandeur peut prouver qu’il croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne dissimulait aucun renseignement important (Baro, au paragraphe 15) et que les agents sont tenus, conformément au guide opérationnel OP 1 – Procédures d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, de reconnaître que des erreurs et des malentendus de bonne foi peuvent parfois se produire. L’agent a cependant omis de mentionner l’abondante jurisprudence et les lignes directrices concernant l’exception liées aux erreurs commises de bonne foi. Le demandeur prétend que le fait qu’il n’y a pas eu d’analyse sérieuse de l’exception touchant les erreurs commises de bonne foi constitue une erreur rendant la décision déraisonnable (Berlin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1117, aux paragraphes 19 à 22 [Berlin]).

[21]  J’aimerais d’abord faire remarquer que dans la décision Oloumi, la juge Tremblay-Lamer a abordé l’affaire Baro, que le demandeur invoque en l’espèce et dans laquelle le juge O’Reilly a déclaré qu’une exception à l’obligation de franchise s’applique quand les demandeurs peuvent prouver qu’ils croyaient honnêtement et raisonnablement qu’ils ne dissimulaient aucun renseignement important, renvoyant à l’affaire Medel pour appuyer sa thèse. La juge Tremblay‑Lamer a déclaré ce qui suit :

[35]  Même si elle est souvent citée, l’« exception » dont il est question dans l’extrait qui précède est peu appliquée. L’affaire dont elle tire son origine, Medel, précitée, mettait en cause un ensemble inusité de faits : la demanderesse était parrainée par son époux, mais, à son insu, l’époux avait retiré son parrainage. Les fonctionnaires canadiens avaient ensuite induit la demanderesse en erreur en lui demandant de renvoyer le visa qui, disaient-ils, contenait une erreur. Ils avaient laissé entendre qu’il lui serait renvoyé, après avoir été rectifié. La demanderesse avait demandé à des membres de sa famille qui parlaient l’anglais d’examiner le visa et, après que ceux-ci lui avaient assuré qu’il ne contenait aucune erreur, elle s’en était servie pour entrer au Canada. La Commission d’appel de l’immigration a conclu qu’elle était une personne décrite à l’alinéa 27(1)e) de l’ancienne Loi sur l’immigration, 1976 LC 1976-77, c 52 [aujourd’hui LRC 1985, c I-2], c’est-à-dire qu’elle avait « obtenu le droit d’établissement […] par des moyens frauduleux ou irréguliers ». Cette conclusion a été infirmée par la Cour d’appel fédérale parce que la demanderesse « croyait raisonnablement » qu’elle ne cachait pas de renseignements connexes à son admission.

[36]  Quand on la considère dans son contexte factuel, l’exception formulée dans l’arrêt Medel est donc assez étroite. Comme l’a fait remarquer le juge MacKay en faisant une distinction entre cette affaire et celle dont il était saisi, soit Mohammed c Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1997] 3 CF 299 :

41  On peut également établir une distinction entre les faits de la présente espèce et ceux de l’affaire Medel, au motif que le renseignement que le requérant n’a pas communiqué n’était pas un renseignement dont il n’était véritablement et subjectivement pas au courant. Dans le cas qui nous occupe, le demandeur savait bien qu’il était marié. Et il ne s’agissait pas, comme dans l’affaire Medel, d’un renseignement dont la connaissance échappait à sa volonté. Il ne s’agissait pas d’un renseignement qu’on lui avait dissimulé ou au sujet duquel il avait été induit en erreur par les fonctionnaires de l’ambassade. La présumée ignorance du requérant en ce qui concerne l’obligation de signaler un tel changement important survenu dans son état matrimonial et son incapacité de communiquer ce renseignement à son arrivée à un agent d’immigration ne constitue pas, selon moi, une « ignorance subjective » de renseignements importants au sens de l’arrêt Medel. [Non souligné dans l’original.]

Par ailleurs, je souligne qu’il y avait dans l’affaire Medel un facteur déterminant : la demanderesse croyait raisonnablement qu’elle ne cachait pas de renseignements aux autorités canadiennes. Par contraste, en l’espèce, les demandeurs n’ont pas agi de manière raisonnable – le demandeur principal n’a pas examiné sa demande pour s’assurer de son exactitude.

[En gras dans l’original]

[22]  De plus, la jurisprudence a décidé que pour se conformer à l’obligation de franchise, le demandeur doit s’assurer que les documents sont complets et exacts quand il présente sa demande. Ce n’est que dans les cas exceptionnels où le demandeur peut démontrer qu’il croyait honnêtement et raisonnablement ne pas cacher des renseignements importants « dont la connaissance échappait à sa volonté » qu’il peut se prévaloir d’une exception à l’application de l’alinéa 40(1)a) (Goudarzi, au paragraphe 40; Masoud, au paragraphe 33).

[23]  À mon avis, il ressort clairement des motifs de l’agent qu’il s’était demandé s’il y avait fausse déclaration et, le cas échéant, si elle avait été faite de bonne foi. L’agent fait référence à l’explication du demandeur voulant qu’il ait cru à tort que l’énoncé du formulaire 5562, indiquant que tous les voyages, qu’ils soient touristiques, d’affaires ou pour une formation, ne touchaient qu’aux entrées et aux sorties inscrites à son passeport personnel, et non à ses deux passeports dont son passeport des Affaires publiques. L’agent a cité la déclaration du demandeur, où ce dernier affirme [traduction] « Après tout, le processus d’immigration est personnel et n’a rien à voir avec mon employeur… ». L’agent est arrivé à la conclusion que cette explication n’était pas satisfaisante et que le demandeur n’avait pas réussi à expliquer raisonnablement comment il aurait pu mal interpréter la formulation claire du formulaire 5562, considérant que les voyages qu’il a faits avec son passeport des Affaires publiques sont prétendument tous des voyages d’affaires. Les notes du SMGC indiquent que l’agent n’était pas convaincu que le demandeur n’avait pas omis intentionnellement ses antécédents de voyage et il n’était pas convaincu non plus que le demandeur aurait présenté des copies des pages de son passeport chinois des Affaires publiques si le consulat ne lui avait pas demandé de produire des éléments de preuve fiables de ses anciens lieux de résidence; le consulat n’aurait donc jamais été informé des voyages qu’il avait faits avec ce passeport.

[24]  Bien que l’agent n’ait pas employé l’expression exacte « erreur commise de bonne foi », le dossier montre clairement que l’agent s’est penché sur la prétention du demandeur voulant qu’il ait mal interprété la question concernant ses antécédents de voyage. Exiger que l’agent cite explicitement la jurisprudence ou les guides de procédures concernant les erreurs commises de bonne foi favoriserait la forme plutôt que le fond. Dans le cas présent, l’agent n’était tout simplement pas convaincu que l’erreur alléguée à la lecture du formulaire de demande, soit que le demandeur avait retenu une portion importante de ses antécédents de voyage, ait été commise de bonne foi. L’agent n’est pas tenu de retenir chaque explication donnée en réponse à une lettre d’équité procédurale dans l’évaluation de fausses déclarations (Sinnachamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1092, au paragraphe 17). Je ne retiens pas non plus l’argument du demandeur qui soutient que le fait que l’agent n’a pas retenu son explication signifie qu’il a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité, ce qui l’aurait obligé à envoyer une seconde lettre d’équité procédurale informant le demandeur de cette conclusion. L’agent n’a pas tiré de conclusion quant à la crédibilité, il a simplement rejeté l’explication qui lui a été offerte. La doctrine de l’équité procédurale n’obligeait pas l’agent à informer le demandeur que son explication avait été rejetée et à lui accorder une autre occasion de commenter. La lettre d’équité procédurale visait à le mettre au courant de la question, y compris la possibilité que l’explication résultante ne soit pas acceptée (Alalami c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 328, au paragraphe 13).

[25]  En tout état de cause, il n’y a exception que lorsque le demandeur démontre qu’il croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne dissimulait aucun renseignement important. Dans l’affaire dont notre Cour est saisie, la question du formulaire de demande était sans ambiguïté. Le demandeur était tenu d’énumérer « tous les voyages […] des 10 dernières années [...] à l’extérieur de votre pays d’origine ou de résidence […] les voyages à but touristique, les voyages d’affaires, les stages de formation, etc. ». Le demandeur savait qu’il détenait deux passeports et il savait qu’il avait omis de déclarer de nombreux voyages dans d’autres pays. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une situation semblable à celle de l’affaire Jean-Jacques c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 104, où le demandeur n’était pas au courant de l’existence de ces renseignements; dans le cas présent, le demandeur savait qu’il avait fait les voyages en question. Il ne s’agissait pas non plus d’une situation semblable à celle prévalant dans la décision Medel, où la connaissance de fait échappait au contrôle de l’intéressé ou encore, lui avait été cachée. Comme le demandeur n’a pas démontré qu’il croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne dissimulait aucun renseignement important, l’exception restreinte a été considérée sans être appliquée (Baro, au paragraphe 18; Oloumi, aux paragraphes 36 et 39; Mohammed c Canada, [1997] 3 CF 299).

[26]  À cet égard, le demandeur prétend qu’en faisant l’évaluation d’une potentielle fausse déclaration, l’intention est un facteur dont il faut tenir compte. Le demandeur aurait cru à tort que le formulaire ne lui demandait que de produire ses antécédents de voyage personnels, alors qu’on lui demandait aussi de déclarer ses voyages d’affaires. Il s’est immédiatement montré disposé à corriger l’erreur et a par la suite fourni la liste détaillée de ses antécédents de voyage. Lorsque l’on examine ce fait parallèlement au fait que le demandeur est un homme d’affaires réputé ayant à son actif de nombreux antécédents de voyage, on peut être porté à penser qu’il n’avait pas besoin ou l’intention d’induire en erreur les agents d’immigration. Il s’agirait plutôt d’une erreur de bonne foi.

[27]  Cependant, comme je l’ai fait remarquer plus haut, l’agent n’a pas accepté l’explication du demandeur selon laquelle il n’avait pas l’intention d’omettre de renseignements. De plus, le demandeur n’était pas dans l’ignorance subjective de ses antécédents de voyage. Aussi, dans sa réponse à la lettre d’équité procédurale, le demandeur a déclaré qu’il considérait que son immigration ne concernait que lui, et qu’elle n’avait rien à voir avec son employeur, suggérant que le demandeur a décidé lui-même ce qu’il considérait comme pertinent de déclarer dans son formulaire 5562. Comme l’a énoncé le juge Mosley dans l’affaire AA c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1066 [AA], le pouvoir discrétionnaire de déterminer si une fausse déclaration ou une omission constitue ou non « un fait important quant à un objet pertinent, et de ce fait entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la LIPR » appartient à l’agent. Ce n’est pas au demandeur de décider quel fait est important ou non (AA, au paragraphe 39).

[28]  Le demandeur ajoute qu’il est déraisonnable de conclure qu’il a délibérément tenté d’induire en erreur les autorités parce qu’il a de son propre gré fourni des renseignements supplémentaires à l’agent. Quand l’agent lui a demandé les copies intégrales des visas et des timbres des Émirats arabes unis ainsi que le dernier timbre de sortie de l’Arabie saoudite, le demandeur lui aurait fourni une copie complète de son passeport des Affaires publiques, qui faisait état de voyages qui n’avaient jusqu’alors toujours pas été déclarés. Le demandeur aurait aussi divulgué volontairement dans sa demande de résidence permanente des éléments de preuve concernant son travail en Iraq, qui faisait partie des pays qu’il avait omis au départ. En l’espèce, l’agent aurait pu obtenir certains des renseignements que le demandeur avait innocemment omis quant à son travail en Iraq et il aurait pu les vérifier en examinant la demande, semblablement à la situation de l’affaire Berlin, aux paragraphes 19 et 20 (Brooks c Canada (Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration), [1974] 1 RCS 850, à la page 858).

[29]  Cependant, le demandeur n’a pas immédiatement et volontairement fourni les renseignements manquants. Le demandeur n’a remis ces renseignements qu’après que l’agent lui eut demandé les certificats de police du Bangladesh et de l’Arabie saoudite en plus des copies de toutes les pages de son passeport chinois comportant son visa et ses timbres de sortie, qui étaient en fait contenus dans le passeport des Affaires publiques qui n’avait pas été divulgué jusque-là. À ce stade, le demandeur n’avait d’autre choix que de divulguer tous ses voyages puisque l’agent était maintenant au courant de l’existence de son passeport des Affaires publiques.

[30]  À mon avis, cette situation n’est pas semblable à la situation prévalant dans l’affaire Berlin. Dans cette affaire, on fait référence à la décision Koo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 931 [Koo], qui portait sur la dissimulation de renseignements qui étaient autrement disponibles à l’agent des visas dans les dossiers ministériels. La question en litige dans cette affaire était de savoir si les deux noms du demandeur avaient été divulgués. Le dossier a démontré qu’un grand nombre de pièces justificatives avaient été déposées par le demandeur sous son ancien nom et étaient disponibles dans la documentation produite dans le cadre de la demande initiale (Koo, aux paragraphes 22 à 29). Par ailleurs, dans la décision Berlin, le demandeur avait omis de mentionner deux de ses enfants dans sa demande de visa puisqu’il ne croyait pas qu’ils étaient à sa charge, mais il avait précédemment divulgué leur existence dans sa demande d’asile, dans son formulaire de renseignements personnels et dans les documents qu’il avait produits pour la demande de son épouse présentée au titre de la catégorie des époux. La décision faisant l’objet du contrôle dans cette affaire n’avait pas touché le fait que les renseignements omis étaient disponibles dans le dossier du demandeur et apparaissaient dans certains des documents présentés dans le cadre de la demande alors à l’étude.

[31]  Ces circonstances ne sont pas semblables à celles auxquelles était confronté l’agent dans le cas qui occupe notre Cour. Bien que le demandeur soutienne que l’agent avait déjà en sa possession une partie des renseignements qui avaient été déclarés de manière inexacte, seuls les quatre voyages énumérés dans le formulaire 5562 avaient été divulgués. Il est vrai qu’il avait mentionné dans sa demande qu’il avait vécu au Royaume-Uni, aux Émirats arabes unis et en Arabie saoudite. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’agent avait demandé plus de renseignements. Le demandeur soutient que si l’agent avait examiné sa demande plus attentivement, il aurait aussi remarqué que le demandeur avait aussi divulgué qu’il avait vécu en Iraq. Après avoir examiné le dossier, le demandeur semble faire référence à son récit circonstancié qui décrit ses emplois antérieurs, dont un emploi de directeur des travaux à Saudi Kayan qui serait, selon son avocate, un champ pétrolifère bien connu en Iraq, bien que l’Iraq ne soit pas nommé dans le document.

[32]  Plus particulièrement, cependant, le formulaire 5562 révisé fait état de 78 voyages, soit 74 de plus que les 4 voyages que le demandeur avait divulgués. De surcroît, en plus des quatre voyages qu’il a déclarés à Singapour, au Japon et au Canada, le demandeur a aussi voyagé au Kazakhstan, au Cambodge, au Royaume-Uni, en Arabie saoudite, en Iraq, en Turquie, à Bahreïn, au Niger, au Tchad, au Cameroun et en France. Le demandeur reconnaît que la plupart de ces pays ne sont mentionnés nulle part ailleurs dans le dossier et que l’agent n’avait pas accès à ces renseignements. Ainsi, comme ces voyages ne figurent pas au dossier, les circonstances ne sont pas semblables à celles de l’affaire Berlin.

[33]  De plus, comme je l’ai déjà mentionné, le fait que la fausse déclaration a été mise au jour avant l’examen final de la demande n’est d’aucun secours au demandeur (Haque, aux paragraphes 12 et 17; Khan, aux paragraphes 25, 27 et 29; Shahin, au paragraphe 29). Par conséquent, le fait que le demandeur a finalement présenté son passeport des Affaires publiques ne change toutefois pas la conclusion faite au moment de la fausse déclaration, soit qu’il y a eu présentation erronée des faits (Kazzi, aux paragraphes 37 et 39).

[34]  Il ne reste donc plus que la question de savoir si cette fausse déclaration était importante.

[35]  Le demandeur soutient que le raisonnement de l’agent est circulaire et qu’il n’a pas expliqué en quoi les agissements du demandeur auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR ni en quoi la fausse déclaration aurait pu avoir une incidence sur le processus amorcé ou sur la décision finale. Les erreurs sans importance ne rencontrent aucunement le seuil fixé par l’article 40 de la LIPR et le fait de ne pas effectuer l’analyse appropriée quant à l’importance de la fausse déclaration constitue une erreur susceptible de contrôle (Koo, au paragraphe 38). Dans le cas présent, le demandeur n’a pas passé six mois ou plus dans l’un ou l’autre des pays qu’il a omis et il n’était donc pas tenu de fournir les certificats de police de ces pays. Étant donné que l’agent n’a pas tenu compte de l’importance de la fausse déclaration, il n’est pas clair quelles enquêtes supplémentaires auraient pu être menées en détenant une liste complète de ses voyages.

[36]  Comme je l’ai déjà mentionné, une fausse déclaration n’a pas besoin d’être décisive ou déterminante de la demande pour être importante; il suffit qu’elle ait une incidence sur le processus amorcé (Oloumi, au paragraphe 25; Patel, au paragraphe 64). Pour décider si une fausse déclaration est importante, il est nécessaire de tenir compte du libellé de la disposition ainsi que de l’objet qui la sous-tend (Oloumi, au paragraphe 22).

[37]  La présentation erronée de ces faits importants ou la réticence sur ces faits entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la LIPR puisqu’un visa d’immigrant aurait pu être délivré au demandeur sans qu’il ait remis des renseignements véridiques et complets permettant au consulat d’évaluer correctement son admissibilité. D’après les notes versées au SMGC, le Système mondial de gestion des cas, l’agent est arrivé à la conclusion que les fausses déclarations étaient importantes et auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR puisque le consulat n’aurait pas réalisé que le demandeur était interdit de territoire en vertu du paragraphe 15(1) pour avoir présenté des renseignements non véridiques à l’appui de sa demande d’immigration et que le consulat aurait été amené à croire qu’il avait mené une évaluation approfondie des antécédents du demandeur et à lui délivrer un visa sur la foi de renseignements non véridiques. Ce motif est répété de façon plus claire par l’agent de réexamen, qui a conclu que le demandeur avait fait une présentation erronée de faits importants sur ses antécédents de voyage dans son formulaire de demande. Ces renseignements sont importants puisqu’ils étaient pertinents quant à l’évaluation de l’admissibilité du demandeur et qu’ils auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR et la délivrance d’un visa sans que tous les renseignements nécessaires à l’évaluation d’admissibilité aient été présentés.

[38]  Puisque l’agent a énoncé explicitement que les antécédents de voyage du demandeur étaient pertinents à l’examen de son admissibilité, et puisque le fait qu’il n’a pas divulgué l’entièreté de ses antécédents aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR, je ne suis pas d’accord avec le demandeur qui soutient que l’agent n’a pas expliqué en quoi les actions du demandeur auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR ou en quoi la présentation erronée des faits aurait pu avoir une incidence sur le processus amorcé.

[39]  Le demandeur était tenu de faire une divulgation complète, et c’est à l’agent qui examine la demande de décider ce qui est pertinent, et non au demandeur (Singh c Canada, 2015 CF 377, au paragraphe 32). Dans le cas présent, le formulaire 5562 révisé fait état de 78 voyages, dont la grande majorité est inscrite à titre de voyages d’affaires, desquels seulement quatre figuraient sur le formulaire original. Le demandeur a voyagé dans plus de 10 pays qui n’étaient indiqués d’aucune façon dans les documents de demande présentés initialement par le demandeur. Je ne suis pas d’accord avec l’argument du demandeur selon lequel l’omission n’était pas importante puisqu’il n’a vécu dans aucun des pays qu’il a omis de déclarer pendant six mois ou plus et qu’il n’avait donc pas besoin de présenter de certificats de police pour les pays manquants. L’analyse de l’admissibilité menée par l’agent ne se limitait pas à l’obtention des certificats de police. De plus, il appartient à l’agent, non au demandeur, de choisir de quels renseignements supplémentaires il convient de s’enquérir. Aussi, le fait que le demandeur a voyagé dans certains des pays qui n’ont pas été divulgués pouvait avoir une incidence sur les préoccupations d’admissibilité.

[40]  À cet égard, j’aimerais faire remarquer que le manuel ENF 2/OP 18 de Citoyenneté et Immigration Canada, Évaluation de l’interdiction de territoire, énonce à l’article 10.5 qu’une conclusion erronée indiquant qu’une personne répond aux exigences relatives à l’obtention du statut de résident permanent est clairement une erreur dans l’application de la LIPR. Les agents doivent être convaincus que la personne répond aux exigences et qu’elle n’est pas interdite de territoire. Pour prendre ces décisions, l’agent décide quelles procédures sont requises, notamment investigations, entrevues et vérification. Certaines procédures sont requises par la loi, d’autres sont de nature administrative. Il est pertinent de mentionner que l’exemple donné dans le manuel de politiques sur les fausses déclarations qui risqueraient d’entraîner une erreur dans l’application de la LIPR décrit une situation dans laquelle le demandeur déclare qu’il était dans un pays alors qu’en fait, il se trouvait dans un autre. Cela aurait mené l’agent à faire la vérification des antécédents du demandeur en se fondant sur des renseignements erronés et aurait entraîné une erreur dans l’application de la LIPR.

[41]  À mon avis, il était loisible à l’agent d’arriver à la conclusion à laquelle il est arrivé, soit que le demandeur a fait une présentation erronée des faits, qu’il n’a pas divulgué la totalité des pays qu’il a visités, que cela aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR puisque le consulat aurait été amené à croire qu’il avait mené un examen approfondi des antécédents du demandeur avant de lui délivrer un visa en s’appuyant sur ce fondement. Un visa aurait été délivré sans que tous les renseignements nécessaires pour procéder à l’examen de l’admissibilité soient divulgués. Comme il est indiqué dans l’affaire Oloumi, la présentation erronée est importante si elle a une incidence sur le processus. Le fait que le demandeur n’a pas présenté la totalité de ses antécédents de voyage a eu une incidence sur le processus de détermination de son admissibilité.

[42]  Les circonstances en l’espèce ne sont pas non plus semblables à celles de l’affaire Chhetry c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 513, sur laquelle s’appuyait le demandeur, puisque les renseignements qui ont été fournis en réponse à la lettre d’équité procédurale n’ont pas été ignorés ou négligés.

[43]  Compte tenu de ce qui précède, je suis d’avis que la décision de l’agent appartenait aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit et qu’elle était donc raisonnable.

 


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-3584-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y aura pas d’adjudication des dépens.

  3. Les parties n’ont proposé aucune question de portée générale à certifier et aucune question ne se pose en l’espèce.

« Cecily Y. Strickland »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 6e jour de février 2020

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3584-17

 

INTITULÉ :

HAOCHEN WANG c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 26 mars 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE STRICKLAND

 

DATE DES MOTIFS:

LE 6 avril 2018

 

COMPARUTIONS :

Tamara Thomas

 

Pour le demandeur

 

Melissa Mathieu

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bellissimo Law Group

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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