Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20171206


Dossier : T-721-17

Référence : 2017 CF 1110

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 6 décembre 2017

En présence de monsieur le juge Bell

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

OMID MEHDI MOHIT

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l’audience à Toronto (Ontario), le 21 novembre 2017)

I.  Aperçu

[1]  Le demandeur, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le ministre), demande le contrôle judiciaire de la décision rendue par un juge de la citoyenneté (le juge) en date du 23 mars 2017, dans laquelle il a accueilli la demande d’Omid Mehdi Mohit (M. Mohit) en vue d’obtenir la citoyenneté canadienne aux termes de l’alinéa 5(1)c) de la Loi sur la Citoyenneté (la décision).

[2]  En disposant de la demande de citoyenneté de M. Mohit, le juge a choisi d’appliquer le critère énoncé par le juge en chef adjoint Thurlow, tel que son titre était alors, dans Re Papadogiorgakis, [1978] 2 CF 208, 88 DLR (3d) 243. Ce critère exigeait que le juge examine si M. Mohit avait établi sa résidence au Canada et s’il y avait maintenu cette résidence.

[3]  Le ministre reconnaît que M. Mohit a établi une résidence au Canada lorsqu’il est arrivé à titre de résident permanent en juillet 2010. Cependant, le ministre fait valoir que M. Mohit ne satisfait pas au deuxième critère, à savoir qu’il n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’il avait maintenu sa résidence. En conséquence, le ministre soutient que le juge a rendu une décision déraisonnable lorsqu’il a conclu au contraire.

[4]  Pour appuyer son argument, le ministre cite le paragraphe 23 des motifs et de la décision du juge, qui est rédigé ainsi :

[traduction] Les absences du demandeur du Canada étaient-elles « temporaires » (comme le juge en chef adjoint Thurlow le mentionne)? Chaque absence l’était. La situation actuelle – l’emploi continu du demandeur pour le compte de l’OMS au Caire après avoir obtenu son diplôme de maîtrise en santé publique – a perduré, malgré tous les efforts déployés par le demandeur (selon ses prétentions) en vue de trouver un emploi en santé publique au Canada. Néanmoins, compte tenu du témoignage crédible et des documents concernant ses attaches au Canada, il ne fait pas de doute qu’il vient ici chaque fois qu’il en a l’occasion.

[5]  Le ministre soutient que l’emploi de M. Mohit à l’Organisation mondiale de la Santé au Caire, en Égypte, parmi d’autres facteurs, démontre qu’il n’avait pas l’intention de maintenir une résidence au Canada. Par conséquent, la décision est déraisonnable.

[6]  Subsidiairement, le ministre fait valoir que seul le paragraphe 23 aborde le critère relatif au maintien de la résidence, alors que les paragraphes 17 à 22 des motifs et de la décision du juge traitent de l’établissement de la résidence. Le ministre fait valoir que des observations aussi brèves, notamment la phrase [traduction] « Chaque absence l’était », démontrent que les motifs sont inadéquats et empêchent la Cour d’apprécier le caractère raisonnable de la décision du juge.

II.  Norme de contrôle

[7]  Les parties conviennent que la norme de contrôle est la norme de la décision raisonnable, comme il est établi dans Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47 [Dunsmuir]. Elles conviennent également que l’insuffisance présumée des motifs ne constitue pas à elle seule un motif pour accueillir la demande de contrôle judiciaire, reconnaissant que les motifs doivent être examinés en corrélation avec le résultat pour décider si ce dernier fait partie des issues possibles acceptables (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 RCS 708, au paragraphe 14 [Newfoundland and Labrador Nurses]).

III.  Questions en litige

[8]  La question consiste à déterminer si la décision du juge d’accueillir la demande de citoyenneté de M. Mohit était justifiée, transparente et intelligible, et si elle faisait partie des issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir, au paragraphe 47).

IV.  Discussion

[9]  Je conviens avec le ministre que l’analyse du juge manque de rigueur. Néanmoins, je conclus que les motifs et la décision répondent à la norme de la décision raisonnable. Pour tirer cette conclusion, j’ai examiné le résumé de l’interrogatoire entre le juge et M. Mohit, les éléments de preuve et le résumé factuel présenté par le juge.

[10]  Je relaterai quelques-uns des faits dont le juge était saisi : la famille de M. Mohit, dont l’épouse et le fils, réside à Richmond Hill, en Ontario, où elle a vécu depuis son arrivée au Canada. M. Mohit a entrepris des rénovations importantes dans la résidence familiale, qu’il détient avec son épouse. M. Mohit s’est imprégné de la culture canadienne, soit en amenant son fils voir des matchs de hockey, en faisant du bénévolat à l’école de son fils ainsi qu’en voyageant au Canada afin de mieux connaître son pays d’adoption. Pour améliorer ses perspectives d’emploi, M. Mohit a accepté une réduction de salaire de 50 000 $ afin de pouvoir fréquenter l’Université de Toronto à temps plein. Il étudie afin d’améliorer ses aptitudes linguistiques en français. Il a fait des demandes d’emploi en vue de trouver du travail au Canada et a fait passablement de réseautage afin d’améliorer ses perspectives d’emploi dans ce pays. Il fait la navette entre sa résidence à Richmond Hill et son travail au Caire aussi souvent que possible ou, selon les mots du juge, [traduction] « chaque fois qu’il en a l’occasion ». M. Mohit paie de l’impôt sur le revenu au Canada, participe activement à l’éducation de son fils et a fourni de nombreuses lettres en ce qui concerne son engagement dans la collectivité. Depuis qu’il a terminé ses études supérieures à l’Université de Toronto, il a été présent au Canada pendant au moins une semaine tous les deux mois.

[11]  Ces faits permettent de conclure que M. Mohit a maintenu une résidence au Canada, malgré son emploi à l’étranger.

[12]  Dans les circonstances, je conclus que la décision du juge satisfait à la norme de la décision raisonnable telle qu’elle est énoncée dans l’arrêt Dunsmuir et exposée dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses. La demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens. Aucune question n’est certifiée aux fins d’examen par la Cour d’appel fédérale.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-721-17

LA COUR rejette la demande de contrôle judiciaire sans dépens. Aucune question n’est certifiée aux fins d’examen par la Cour d’appel fédérale.

« B. Richard Bell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 12e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

T-721-17

 

 

INTITULÉ :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION c OMID MEHDI MOHIT

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 21 novembre 2017

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE BELL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 6 décembre 2017

 

COMPARUTIONS :

Aleksandra Lipska

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Naseem Mithoowani

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

POUR LE DEMANDEUR

 

Waldman & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.