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Date : 20170209


Dossier : IMM-3316-16

Référence : 2017 CF 146

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 9 février 2017

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

WEIHAO YAN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                    Nature de l’instance

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée par Weihao Yan (le demandeur) en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), à l’encontre d’une décision rendue le 8 mai 2016 par la Section d’appel des réfugiés (la SAR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada selon laquelle le demandeur n’a ni qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger en vertu des articles 96 et 97 de la LIPR (la décision). La demande d’autorisation a été accueillie le 8 novembre 2016.

II.                 Rappel des faits

[2]               Le demandeur est un citoyen de la Chine âgé de 21 ans. Il dit craindre d’être persécuté à cause de sa religion, plus précisément du fait de son appartenance à l’Église du Dieu tout-puissant, également connue sous le nom d’Éclair oriental (Dieu tout-puissant/Éclair oriental), dont il serait membre depuis deux ans. La religion enseignée par l’Église du Dieu tout-puissant/l’Éclair oriental est considérée en Chine comme un « culte du mal » et sa pratique, jugée illégale, est réprimée par les autorités gouvernementales chinoises.

[3]               Le demandeur allègue qu’il est devenu membre de l’Église du Dieu tout-puissant/l’Éclair oriental en octobre 2013, après avoir perdu un ami à la suite d’un accident de motocyclette et après avoir été témoin d’un autre accident de motocyclette, lui aussi mortel peu de temps après le décès de son ami. Il dit être devenu alors de plus en plus déprimé, pessimiste et déçu par la vie. Après le premier accident, un ami l’a invité à se joindre à l’Église du Dieu tout-puissant/l’Éclair oriental, mais le demandeur a refusé. Après le deuxième accident, son ami a réitéré son invitation. C’est alors que le demandeur a décidé d’assister à un office religieux.

[4]               Il a présenté sa demande d’asile à la suite d’un événement qui se serait produit en mars 2014, au cours duquel plusieurs agents du Bureau chinois de la sécurité publique (BSP) auraient fait une descente dans la maison-église où il assistait à une cérémonie de l’Église du Dieu tout-puissant/l’Éclair oriental et auraient arrêté trois membres. Le demandeur a réussi à s’échapper. Alors qu’il se cachait, le demandeur soutient que des membres du BSP se sont rendus à son domicile en espérant le trouver. Ils ont interrogé ses parents au sujet de ses activités religieuses et de ses allées et venues et ont ordonné qu’il se présente aux autorités le lendemain. Le demandeur ayant omis de se présenter, le BSP est retourné à son domicile pour y laisser une sommation. Le demandeur allègue qu’il a également été licencié. Il a donc décidé de quitter la Chine.

[5]               Le demandeur a obtenu un visa d’étudiant aux États-Unis grâce à l’aide d’un passeur qui s’est rendu aux États-Unis avec le demandeur. Après un séjour aux États-Unis d’une durée non précisée, le demandeur serait entré illégalement au Canada en traversant un parc de Seattle à Vancouver. Il a ensuite pris un vol pour Toronto où il a revendiqué le statut de réfugié. Il dit avoir effectué ces déplacements en utilisant son propre passeport. Il soutient s’être rendu au Canada en provenance des États-Unis après n’avoir passé qu’une seule journée dans ce pays; cependant, les éléments de preuve objectifs indiquent qu’il est arrivé aux États-Unis le 10 juin 2014 et qu’il a signé son formulaire Fondement de la demande d’asile (FDA) à Toronto six semaines plus tard. Le demandeur soutient que le BSP s’est présenté trois fois à son domicile après qu’il se soit enfui, le plus récemment en février 2016.

[6]               Le ministre a déposé un avis d’intervention à l’étape de l’examen par la SPR, en indiquant que des portions importantes du formulaire FDA du demandeur ressemblaient à celles de trois autres dossiers, ce qui soulevait de sérieux doutes quant à sa crédibilité. Ces autres exposés des faits ont été présentés en preuve et ont été versés au dossier certifié du tribunal, mais ne sont pas à l’étude dans le cadre du présent contrôle judiciaire.

III.               Décisions

i)          Décision de la SPR

[7]               Le 2 mars 2016, le tribunal de la SPR a conclu que le demandeur n’était pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger. Les questions déterminantes concernaient la crédibilité du demandeur et son appartenance réelle à l’Église.

[8]               Le tribunal a formulé plusieurs conclusions défavorables. Premièrement, il a tiré une inférence négative du fait que le demandeur avait pu quitter la Chine en utilisant son propre passeport. Le tribunal a tenu compte du traitement réservé aux membres de l’Église du Dieu tout-puissant/l’Éclair oriental, des éléments de preuve documentaires sur le système de gestion des entrées et des sorties en Chine, ainsi que du projet Bouclier d’or (le réseau informatique national des services de police chinois auquel sont reliées les autorités aéroportuaires), et pris acte de la corruption systématique en Chine. Le tribunal a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur a pu quitter la Chine sans difficulté, en utilisant son propre passeport, parce qu’il n’était pas recherché par le BSP.

[9]               Deuxièmement, le tribunal a tiré une inférence défavorable de l’entrée illégale du demandeur au Canada et de son défaut de présenter une demande d’asile aux États-Unis, jugeant déraisonnable et peu vraisemblable que le demandeur, qui craignait d’être arrêté en Chine, risque d’être arrêté pour entrée illégale au Canada. Il a conclu que le demandeur n’avait pas fourni d’explication raisonnable qui puisse justifier ses actions.

[10]           Troisièmement, le tribunal a jugé que la sommation délivrée au demandeur était conforme à une sommation pénale et a tiré une inférence négative du défaut du BSP de délivrer une sommation coercitive après que le demandeur eut omis de se présenter. Le tribunal a aussi tiré des inférences négatives du manque de spontanéité du demandeur, lorsque celui-ci a répondu aux questions sur son introduction à la religion, de son incapacité à répondre aux questions sur les principes fondamentaux de la religion, ainsi que de son incapacité à se rappeler l’essentiel de sa conversation initiale avec son ami. Le tribunal a accordé peu de poids aux documents à l’appui, concluant que, bien que ces documents puissent corroborer la participation du demandeur aux activités de l’Église, ils ne fournissaient aucune indication de son engagement réel envers cette Église. Le tribunal a aussi accordé peu de poids à la lettre de licenciement du demandeur.

[11]           Le demandeur a interjeté appel de cette décision auprès de la SAR.

ii)         Décision de la SAR

[12]           Le 13 juillet 2016, la SAR a confirmé la conclusion de la SPR et conclu que le demandeur n’avait ni qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger. La SAR a mis en doute la crédibilité des éléments de preuve du demandeur concernant sa sortie de la Chine en utilisant son propre passeport alors qu’il était recherché par le BSP et ses allégations selon lesquelles il était recherché par la police. Le demandeur conteste cette décision et demande qu’elle fasse l’objet d’un contrôle judiciaire.

[13]           Les motifs de la SAR sont énoncés ci-dessous, avec l’analyse de la Cour.

IV.              Les questions en litige

[14]           La question à trancher est de déterminer si la décision de la SAR est raisonnable.

V.                 Norme de contrôle et principes juridiques

[15]           Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a établi aux paragraphes 57 et 62 qu’il n’est pas nécessaire de se livrer à une analyse du critère de contrôle si « la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier ». Lorsqu’elle doit statuer sur une décision de la SAR concernant une conclusion de la SPR, notre Cour doit appliquer la norme de la décision raisonnable. Dans l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Huruglica, 2016 CAF 93, la Cour d’appel fédérale note que la SAR doit examiner les conclusions de la SPR en regard de la norme de la décision correcte, mais qu’elle peut respecter les conclusions de la SPR sur les questions de crédibilité lorsque la SPR jouit d’un « avantage certain ».

[16]           Au paragraphe 47 de l’arrêt Dunsmuir, précité, la Cour suprême du Canada explique ce que doit faire une cour lorsqu’elle effectue une révision selon la norme de la décision raisonnable :

La cour de révision se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité. Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[17]           La présomption que le demandeur dit la vérité constitue le point de départ de l’évaluation de la crédibilité : Maldonado c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1980] 2 CF 302 (C.A.). Cette présomption est toutefois réfutable et, lorsque les éléments de preuve vont à l’encontre du témoignage sous serment du demandeur, la présomption de véracité peut être réfutée : Su c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 666, au paragraphe 11, Fothergill J [Su], citant Adu c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1995), 53 ACWS (3d) 158, [1995] ACF no 114 (CAF).

[18]           Les pouvoirs pertinents quant à l’évaluation de la crédibilité et de la vraisemblance sont résumés comme suit. Premièrement, la SPR dispose d’un vaste pouvoir discrétionnaire pour préférer certains éléments de preuve à d’autres et déterminer l’importance à accorder à ceux qu’elle accepte : Medarovik c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 61, au paragraphe 16, juge Tremblay-Lamer; Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 867, au paragraphe 68, juge Blais. Deuxièmement, la Cour d’appel fédérale a confirmé que les conclusions de fait et les décisions quant à la crédibilité relèvent de l’expertise de la SPR : Giron c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1992), 143 NR 238 (CAF). Troisièmement, la SPR est reconnue comme ayant une expertise dans l’évaluation des demandes d’asile et est autorisée par voie législative à faire usage de sa connaissance spécialisée : Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 805, au paragraphe 10, juge O’Reilly; voir Siad c. Canada (Secrétaire d’État), [1997] 1 CF 608, au paragraphe 24 (CAF), où la Cour d’appel fédérale a dit que la SPR « [...] se trouve dans une situation unique pour apprécier la crédibilité d’un demandeur du statut de réfugié. Les décisions quant à la crédibilité, qui constituent “l’essentiel du pouvoir discrétionnaire des juges des faits”, doivent recevoir une déférence considérable à l’occasion d’un contrôle judiciaire, et elles ne sauraient être infirmées à moins qu’elles ne soient abusives, arbitraires ou rendues sans tenir compte des éléments de preuve ». De plus, il est bien établi que la SPR peut tirer des conclusions relatives à la crédibilité en tenant compte des invraisemblances, du bon sens et de la raison, bien qu’elle doive éviter de faire des inférences négatives quant à la crédibilité « par suite d’un examen à la loupe de questions secondaires ou non pertinentes à une affaire » : Haramicheal c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1197, au paragraphe 15, juge Tremblay-Lamer, citant Lubana c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 116, aux paragraphes 10 et 11, juge Martineau [Lubana]; Attakora c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] ACF no 444 (CAF). Quatrièmement, la SPR peut rejeter des preuves non réfutées si celles-ci « ne sont pas compatibles avec les probabilités propres à l’affaire dans son ensemble, ou si elle relève des contradictions dans la preuve » : Lubana, précité, au paragraphe 10. Cinquièmement, la SPR peut à bon droit conclure qu’un demandeur n’est pas crédible « à cause d’invraisemblances contenues dans la preuve qu’il a présentée, dans la mesure où les inférences qui sont faites ne sont pas déraisonnables et que les motifs sont formulés “en termes clairs et explicites” » : Lubana, précité, au paragraphe 9.

[19]           La Cour suprême du Canada prescrit que le contrôle judiciaire ne constitue pas une chasse au trésor, phrase par phrase, à la recherche d’une erreur; la décision doit être considérée comme un tout : Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 30 c. Pâtes & Papier Irving, Ltée, 2013 CSC 34. De plus, une cour de révision doit déterminer si la décision, examinée dans son ensemble et son contexte au vu du dossier, est raisonnable : Construction Labour Relations c. Driver Iron Inc., 2012 CSC 65; voir aussi l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62.

VI.              Analyse

A.                 La conclusion voulant que le demandeur a quitté la Chine en utilisant son propre passeport n’est pas plausible

[20]           La SAR a examiné la preuve documentaire la plus récente et pris acte des faits sur la corruption en Chine. En ce qui concerne les faits en l’espèce, la SAR a établi une distinction avec Zhang c. Canada (Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 533, juge Dawson, tel était alors son titre, Sun c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 387, juge de Montigny et Ren c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1402, juge Boswell. Je suis d’avis que la SAR a agi de manière raisonnable en l’espèce, car elle disposait de renseignements sur la situation dans le pays en cause plus à jour que ceux qui avaient été présentés à notre Cour lors des décisions antérieures, notamment au sujet des contrôles à la sortie en Chine et du projet Bouclier d’or. À mon humble avis, on ne peut considérer comme déterminantes dans l’examen de demandes ultérieures comme celle présentée en l’espèce les décisions sur le système de contrôle des sorties en Chine, qui sont fondées sur des éléments de preuve antérieurs ou différents sur la situation dans le pays en cause, bien que ces décisions appuient le principe voulant que chaque affaire doive être tranchée en fonction des éléments de preuve présentés. Les décisions sont fondées sur des faits et sur des conclusions qui commandent un certain degré de déférence, car la SPR et la SAR sont toutes deux des tribunaux spécialisés. En l’espèce, les éléments de preuve plus récents appuient la décision de la SAR sur cette question.

[21]           Je suis d’avis qu’il était raisonnable pour la SAR de conclure que la preuve était insuffisante pour établir que le passeur avait soudoyé des fonctionnaires à la frontière, qu’il était hautement improbable que le passeur ait su qui soudoyer et qu’il n’était pas plausible que le demandeur ait pu quitter la Chine en utilisant son propre passeport, étant donné le système de contrôle des sorties en vigueur en Chine. À mon humble avis, cette conclusion est raisonnable, non seulement parce qu’elle est corroborée par des éléments de preuve à jour sur la situation dans le pays en cause, mais aussi parce qu’elle fait appel au bon sens, qu’elle est rationnelle et qu’elle est fondée sur le dossier. Je note que la décision de la SAR sur cette question trouve appui dans Zeng c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 1060, juge O’Keefe, dans Su, précité, et dans Cao c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 315, juge Noël.

B.                 Défaut de demander l’asile ou d’expliquer le séjour aux États-Unis

[22]           La SAR a également tiré une conclusion défavorable du défaut du demandeur de demander l’asile aux États-Unis et du risque qu’il a pris en entrant illégalement au Canada. Elle juge que le demandeur n’a su expliquer de manière adéquate pourquoi il n’a pas présenté, ou il n’a pas pu présenter, une demande d’asile aux États-Unis. En conclusion, la SAR s’est rangée à la décision de la SPR et a conclu que le défaut du demandeur de présenter une demande d’asile aux États-Unis mine la crédibilité à la fois de ses allégations et de sa crainte subjective. Ces conclusions sont corroborées par les éléments de preuve, notamment par l’absence de preuve sur la date exacte de l’arrivée du demandeur au Canada. J’aimerais souligner que cette absence de preuve est, bien sûr, due entièrement à la décision du demandeur d’entrer illégalement au pays. Quoi qu’il en soit, il incombait au demandeur de prouver la date à laquelle il est entré au Canada s’il voulait que la SAR conclue qu’il n’a passé qu’une seule journée aux États-Unis; cependant, il n’a pas réussi à s’acquitter de son fardeau sur ce point.

C.                 Sommation non plausible

[23]           La SAR a jugé que la SPR avait omis d’expliquer d’une manière adéquate pourquoi elle en était arrivée à la conclusion que la sommation présentée par le demandeur était une sommation pénale. La SAR a examiné la question de nouveau, en se fondant non seulement sur les éléments de preuve sur la situation dans le pays en cause, mais aussi sur sa propre expertise et, à mon humble avis, a conclu de manière raisonnable que la sommation présentée par le demandeur était incompatible avec une sommation pénale. De fait, la SAR a conclu que la sommation équivalait plutôt à une sommation de la sécurité publique (sommation non coercitive). S’appuyant sur les éléments de preuve objectifs et sur les allégations du demandeur, la SAR a conclu qu’il était raisonnable de s’attendre à ce que le BSP délivre une sommation coercitive après que le demandeur eut omis de se présenter. La SAR a conclu, de manière raisonnable, que l’absence de sommation coercitive minait l’authenticité de la sommation présentée par le demandeur; je suis donc d’avis qu’il était raisonnable pour la SAR d’y accorder peu de poids. La SAR a également accepté l’évaluation faite par la SPR des autres documents présentés et statué que, quoi qu’il en soit, la lettre de licenciement ne pouvait annuler l’ensemble des conclusions défavorables quant à la crédibilité de la demande d’asile du demandeur. Je ne suis pas convaincu que la SAR ait agi de manière déraisonnable sur ce point.

D.                 Conclusions quant à la crédibilité durant l’audience

[24]           Il est également pertinent de noter que la SAR a respecté l’évaluation faite par la SPR concernant le manque de spontanéité du demandeur, ainsi que les conclusions défavorables connexes quant à sa crédibilité. La SAR a souscrit à l’interprétation de la SPR et conclu que le défaut du demandeur de discuter d’éléments importants de sa première conservation avec son ami, plus précisément de l’importance des décès de la route pour la religion, minait sa crédibilité. La SAR a également jugé que les connaissances et les pratiques du demandeur étaient incompatibles avec son profil religieux allégué, ce qui minait encore plus sa crédibilité à ce chapitre. La SAR a reconnu qu’il aurait été utile que la SPR étoffe davantage son analyse de la demande d’asile sur place, mais a néanmoins conclu que la SPR avait bel et bien pris en compte les activités du demandeur au Canada. La SAR a conclu ce qui suit :

[traduction] Ayant conclu que le demandeur ne pratiquait pas la religion en Chine, et faute d’éléments de preuve témoignant de son désir de la pratiquer au Canada, la SAR conclut, selon la prépondérance des probabilités et dans le contexte des conclusions susmentionnées, que le demandeur d’asile a participé à des activités religieuses au Canada dans le but uniquement d’appuyer une demande d’asile frauduleuse.

[25]           Là encore, ces conclusions reposent essentiellement sur la crédibilité du demandeur, une question qui exige que l’on fasse preuve de déférence envers la SAR, puisque cette question relève de son expertise.  À mon humble avis, les conclusions de la SAR quant au manque de crédibilité du demandeur sur ce point sont raisonnables.

E.                  Demande sur place

[26]           La conclusion globale quant à l’absence de crédibilité des éléments de preuve du demandeur pourrait être à la base de la décision de la SAR de passer outre aux éléments de preuve présentés à l’appui de la demande d’asile sur place. La SPR a tenu compte des activités du demandeur au Canada, mais elle a conclu que leur crédibilité avait été minée par le témoignage vague et hésitant du demandeur. Il m’est impossible de trouver des failles dans la conclusion de la SAR selon laquelle la preuve était insuffisante pour étayer une demande d’asile sur place.

[27]           Le contrôle judiciaire porte sur l’ensemble des motifs invoqués, et ceux-ci doivent être examinés comme formant un tout. Eu égard aux conclusions précitées, je conclus que la décision de la SAR appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit, conformément à Dunsmuir.

VII.            Question à certifier

[28]           Aucune des parties n’a proposé de question à certifier et, à mon avis, aucune question ne se pose.

VIII.         Conclusions

[29]           Par conséquent, en toute déférence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question ne sera certifiée.


JUGEMENT

LA COUR rejette la demande de contrôle judiciaire, sans aucune question à certifier et aucune ordonnance quant aux dépens.

« Henry S. Brown »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3316-16

 

INTITULÉ :

WEIHAO YAN c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 31 janvier 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge BROWN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 9 février 2017

 

COMPARUTIONS :

Jacqueline Lewis

 

Pour le demandeur

 

Eleanor Elstub

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lewis & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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