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Date : 20170106


Dossier : IMM-2385-16

Référence : 2017 CF 26

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 6 janvier 2017

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

EDISON JAMES NWABUEZE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La demande de statut de résident permanent au Canada de M. Nwabueze fondée sur des considérations d’ordre humanitaire a été rejetée en raison de sa participation au Mouvement pour l’actualisation de l’État souverain du Biafra (MASSOB) pendant qu’il était au Nigéria. Il ne nie pas sa participation au MASSOB. Il prétend que le MASSOB n’est pas une organisation terroriste.

[2]  M. Nwabueze fait valoir que la décision de l’agent n’est pas raisonnable. Il soutient aussi que son droit à l’équité procédurale n’a pas été respecté, puisque les renseignements sur lesquels l’agent s’est fondé pour conclure que le MASSOB est une organisation terroriste n’ont pas été communiqués à M. Nwabueze.

[3]  Je suis d’accord pour dire que le droit de M. Nwabueze à l’équité procédurale n’a pas été respecté, et la demande de contrôle judiciaire est accueillie pour ce motif.

[4]  Si la Cour conclut qu’il y a eu manquement à l’obligation d’équité, elle n’a d’autre choix que d’accueillir la demande de contrôle judiciaire : voir l’arrêt Sketchley c Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, au paragraphe 54.

[5]  Dans un contexte semblable, la Cour a fait les observations suivantes dans l’affaire Karakachian c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 948 :

[38] L’individu qui se présente devant une autorité gouvernementale n’est généralement pas en position d’égalité, et ne présumera généralement pas qu’il est en droit de voir les documents qui peuvent se trouver sur le bureau de la personne qui le reçoit en entrevue. L’agente ne l’ayant pas explicitement invité à consulter les documents sur lesquels elle se basait, le demandeur pouvait raisonnablement croire qu’il n’avait pas le droit de les voir. Je reconnais que le devoir d’agir équitablement est relativement peu rigoureux dans le cadre d’une demande de résidence permanente. Il n’en demeure pas moins que la capacité du demandeur de répondre aux préoccupations de l’agente à propos de la véritable nature de l’ARF a été sérieusement entravée par l’ignorance dans laquelle on l’a laissé eu égard aux documents consultés. Par conséquent, je suis d’avis que l’on a contrevenu aux droits à l’équité procédurale du demandeur.

[6]  En l’espèce, l’agent a effectué des recherches indépendantes sur le MASSOB et s’est fié au résultat de ces recherches pour tirer une conclusion d’interdiction de territoire à l’égard de M. Nwabueze. Les renseignements n’ont pas été communiqués à M. Nwabueze malgré les demandes formulées pour que l’agent fournisse les renseignements sur lesquels il se fondait.

[7]  Dans Osama Fi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1125 [Osama Fi], aux paragraphes 8 à 10, la Cour a conclu qu’un décideur viole le droit du demandeur à l’équité procédurale lorsqu’il consulte la preuve documentaire extrinsèque qu’il a trouvée sur Internet et à l’égard de laquelle le demandeur n’a pas eu la possibilité de faire des commentaires. Même si l’affaire Osama Fi visait une demande d’examen des risques avant renvoi, les mêmes considérations s’appliquent au contexte d’une demande pour considérations d’ordre humanitaire.

[8]  En l’espèce, M. Nwabueze n’a pas eu l’occasion de commenter les renseignements que l’agent avait trouvés sur Internet. De plus, l’agent a reproché à l’expert du demandeur, le docteur Obiora Okafor, son omission de commenter des incidents particuliers de [traduction] « terreur », sur lesquels l’agent s’est fondé pour conclure que le MASSOB était une organisation terroriste. L’expert n’a toutefois pas eu l’occasion d’aborder ces incidents particuliers, puisque les renseignements sur lesquels l’agent s’est fondé ne lui ont pas été communiqués.

[9]  Les renseignements sur lesquels l’agent s’est fondé n’ont pas été communiqués à M. Nwabueze avant que la décision soit rendue. Étant donné qu’il est grave d’être qualifié de membre d’une organisation terroriste, ces renseignements auraient dû être communiqués à M. Nwabueze. Par conséquent, son droit à l’équité procédurale n’a pas été respecté.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour un nouvel examen;

  2. Aucune question de portée générale n’est proposée par les parties et aucune n’est soulevée.

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Ann Marie McDonald »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 9e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2385-16

INTITULÉ :

EDISON JAMES NWABUEZE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 14 décembre 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

DATE DES MOTIFS :

Le 6 janvier 2017

COMPARUTIONS :

Adrienne Smith

Pour le demandeur

Teresa Ramnarine

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jordan Battista LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

Pour le demandeur

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

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