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Date : 20150401


Dossier : IMM-6448-10

Référence : 2015 CF 413

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 1er avril 2015

En présence de monsieur le juge Phelan

ENTRE :

MILAN LASAB, MILADA LASABOVA ET ELVIS KULASIC

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               Le présent contrôle judiciaire concerne trois personnes dont la demande d’asile a été rejetée par la Section de la protection des réfugiés [la SPR] sur le fondement de conclusions défavorables quant à la crédibilité et l’existence de la protection de l’État.

[2]               La présente affaire a été plaidée en même que le dossier IMM-5543-10, apparemment parce que les conclusions quant à la protection de l’État comportaient des lacunes dans les deux cas.

[3]               Toutefois, chaque affaire est un cas d’espèce et doit être examinée ainsi. Il ne s’agit pas d’un recours collectif. Avec égards pour l’avocat, chaque cas mérite d’être analysé et débattu séparément et l’un ne peut être autorisé à tirer parti de l’autre ou à miner la force de l’autre. Le fait que chaque affaire concernait des Roms vivant en République tchèque ne crée pas une fusion inextricable.

II.                Contexte

[4]               Les demandeurs sont une famille de la République tchèque. La demanderesse est une Rom et le demandeur mineur est en partie d’origine ethnique rom.

[5]               Le demandeur, Milan Lasab, n’a jamais été victime de discrimination ou de violence jusqu’à ce qu’il rencontre la demanderesse, qui est d’origine ethnique rom. Monsieur Lasab a affirmé qu’ils ont fait l’objet d’insultes raciales, qu’ils ont eu des problèmes avec des collègues de travail, qu’il a lui‑même été rétrogradé, qu’il a subi une baisse de salaire et qu’il a été forcé de transférer de section. Il a également déclaré qu’ils avaient des problèmes lorsqu’ils allaient faire des courses et qu’ils étaient victimes d’ostracisme lorsqu’ils allaient nager. Un skinhead a frappé la demanderesse à la tête avec une bouteille. Enfin, la demande comportait des allégations selon lesquelles le fils des demandeurs a subi du harcèlement psychologique et physique à l’école.

[6]               Dans la décision de la SPR, le commissaire a relevé bon nombre d’incohérences marquées entre les déclarations des demandeurs au moment de comparer le témoignage, le FRP et les autres documents figurant au dossier. Par exemple, Milan Lasab n’a pas indiqué qu’il a été renié par sa famille, que sa mère priait pour que la relation se termine et que sa sœur vivait avec un skinhead.

[7]               Les demandeurs ont affirmé que le demandeur mineur avait été agressé verbalement et physiquement à l’école, mais cette agression n’a pas été mentionnée aux agents d’immigration. De même, l’agression par un skinhead, qui a fracassé une bouteille sur la tête de la demanderesse, n’avait pas été indiquée au PDE.

[8]               En outre, la demanderesse a affirmé avoir connu de nombreux problèmes avec la police à la suite de l’incident impliquant la bouteille de bière. Pourtant, ces problèmes ne figurent pas dans le FRP. Elle n’a pas non plus indiqué dans son FRP que son conjoint de l’époque avait été malmené par un [traduction] « grand homme raciste ».

[9]               Bien que les demandeurs aient tenté d’expliquer les incohérences, la SPR n’a pas accepté les excuses. La SPR a estimé que les demandeurs manquaient de crédibilité et a conclu que les incidents n’avaient pas eu lieu.

[10]           De plus, la SPR a conclu que les demandeurs n’avaient pas réfuté la présomption de protection de l’État. Le commissaire a fait référence à la démocratie fonctionnelle de la République tchèque, à son contrôle de son territoire et à sa constitution (qui interdit la discrimination). La SPR s’est fondée sur des documents actuels concernant la protection de l’État. Elle a reconnu que les Roms étaient victimes de discrimination, mais a indiqué que le gouvernement tchèque fait de « très grands pas » vers l’élimination de cette discrimination.

III.             Analyse

[11]           Il est maintenant bien établi en droit que la décision de la SPR quant à la crédibilité et la protection de l’État doit faire l’objet d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190).

[12]           La partie la plus faible de la décision de la SPR est son analyse du caractère adéquat de la protection de l’État. La notion de protection de l’État ne devient pertinente que si les demandeurs établissent qu’ils ont été persécutés ou avaient autrement besoin d’une protection, protection qui n’était pas offerte par leur État d’origine.

[13]           La difficulté à laquelle se heurtent les demandeurs est que leur récit a été jugé invraisemblable. La conclusion de la SPR sur la question de la crédibilité doit faire l’objet d’une retenue considérable. Sa conclusion est raisonnable à tous égards. Les divergences et omissions étaient majeures et l’explication offerte par les demandeurs était faible. La SPR était tout à fait habilitée à rejeter l’explication.

[14]           Par conséquent, comme les demandeurs n’ont pas établi les faits ayant mené à la demande, la question de la protection de l’État est théorique. Il n’en demeure pas moins que la SPR a tenu compte de la protection de l’État et des observations des demandeurs, comme elle était habilitée à le faire, et a favorisé des éléments de preuve objectifs plus récents pour en arriver à sa conclusion.

IV.             Conclusion

[15]           Par conséquent, la décision, interprétée dans son ensemble, est raisonnable. Le présent contrôle judiciaire sera rejeté. Il n’y a aucune question à certifier.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Michael L. Phelan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau, B.A. en trad.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-6448-10

 

INTITULÉ :

MILAN LASAB, MILADA LASABOVA ET ELVIS KULASIC c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 20 FÉVRIER 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE PHELAN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 1ER AVRIL 2015

 

COMPARUTIONS :

Zakir Mashadi

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Prathima Prashad

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Rocco Galati Law Firm

Société professionnelle

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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