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Date : 20150217


Dossier : T-1284-13

Référence : 2015 CF 195

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 17 février 2015

En présence de madame la juge Mactavish

ENTRE :

WILLIAM LOUISON

demandeur

et

LA PREMIÈRE NATION D’OCHAPOWACE,

312050 SASKATCHEWAN LTD., et LE MINISTÈRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN

défendeurs

MOTIFS ET JUGEMENT RELATIVEMENT AUX DÉPENS

[1]               Par des motifs datés du 19 janvier 2015, j’ai rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par William Louison, par laquelle il visait l’annulation de l’avis d’éviction qui lui avait été signifié par la Première Nation d’Ochapowace. M. Louison a prétendu qu’il avait légalement possession des terres en question, à titre de descendant de leurs titulaires originaux et en sa qualité de membre de la Première Nation de Kahkewistahaw.

[2]               M. Louison a admis devant moi qu’il tentait essentiellement de faire valoir qu’il détenait un titre aborigène sur les terres en question. Cependant, la Cour du banc de la Reine de la Saskatchewan a déjà tranché, dans une autre instance entre ces parties, qu’il n’avait pas qualité  pour revendiquer un titre aborigène pour le compte de la Première Nation Kahkewistahaw. La Cour d’appel de la Saskatchewan a confirmé cette conclusion, et la Cour suprême du Canada ne lui a pas donné l’autorisation de se pourvoir à l’encontre de cet arrêt : Louison c Ochapowace Indian Band #71, 2011 SKQB 87, 369 SaskR 258, conf par 2011 SKCA 119, 377 SaskR 19, autorisation de pourvoi refusée, [2011] CSCR no 533.

[3]               J’ai donc conclu que M. Louison tentait de remettre en litige une question juridique qui avait déjà fait l’objet d’une décision définitive par les tribunaux de la Saskatchewan, et qu’il n’a pas qualité pour revendiquer un titre aborigène sur les terres en question pour le compte de la Première Nation Kahkewistahaw. Par conséquent, j’ai rejeté sa demande de contrôle judiciaire. Il reste à trancher la question des dépens.

[4]               Les défendeurs soutiennent qu’ils devraient avoir droit au montant de 5 000 $, à titre de dépens. Bien qu’ils reconnaissent que cela puisse être à l’échelle supérieure de la fourchette des dépens habituellement imposés à un particulier partie dans un litige en matière de droit autochtone, les défendeurs affirment qu’un tel montant est justifié en l’espèce, compte tenu de l’absence manifeste de bien‑fondé de la demande présentée par M. Louison et du fait qu’il a tiré un avantage important de sa longue occupation illégale des terres en question.

[5]               M. Louison affirme que je dois tenir compte de sa situation financière et du fait que le protonotaire Lafrenière lui a accordé les dépens dans la cause en ce qui concerne la requête des défendeurs en radiation de son avis de demande, laquelle a été rejetée. En outre, M. Louison nie qu’il a tiré un grand avantage de son occupation des terres en question, contrairement à ce qu’affirment les défendeurs.

[6]               J’ai conclu que les défendeurs ont droit au montant de 5 000 $ qu’ils réclament à titre de dépens. Ce montant inclut les débours.

[7]               Je dispose d’une preuve contradictoire en ce qui concerne l’étendue de l’avantage que M. Louison a pu tirer en raison de son occupation du territoire en question. Cependant, je reconnais qu’il concède qu’il a pu occuper une maison, utiliser un atelier, laisser ses chevaux en pâturage et faire la récolte du foin sur au moins une partie des terres visées par le litige.

[8]               Je n’ai pas à résoudre le conflit de preuve quant à cette question. Je conviens avec M. Louison que sa demande avait trait à la compétence des défendeurs sur les terres en question, et ne consistait pas en une réclamation des défendeurs en vue d’obtenir des dommages‑intérêts découlant de son utilisation non autorisée de la propriété. Selon moi, l’instance en éviction dont est saisie la Cour du banc de la Reine de la Saskatchewan est une tribune plus appropriée pour traiter de la question de savoir quel avantage M. Louison peut avoir tiré de son utilisation des terres contestées que la présente, qui traite des dépens relativement à la présente instance. Cela dit, même si je devais accepter la preuve fournie par M. Louison quant à cette question, il y a d’autres motifs pour lesquels une ordonnance prévoyant des dépens substantiels est néanmoins appropriée en l’espèce.

[9]               J’accorde peu de poids à l’offre de règlement présentée par M. Louison en novembre 2013. L’offre était ouverte seulement une journée, et elle nécessitait que les défendeurs renoncent aux  autres réclamations qu’ils pourraient avoir à l’égard de M. Louison relativement aux adjudications antérieures des dépens et à une restitution des bénéfices. De plus, l’offre aurait permis à M. Louison de garder possession du territoire en question pendant une période supplémentaire de sept mois suivant la date de l’offre.

[10]           En ce qui concerne l’ordonnance relative aux dépens rendue par le protonotaire Lafrenière, je ne suis pas d’accord avec le fait que M. Louison devrait se voir accorder un crédit pour les frais afférents à la requête sous-jacente. Le protonotaire Lafrenière a conclu que M. Louison avait droit à ses frais afférents à la requête, dans la cause, et non peu importe l’issue de la cause. L’effet d’une adjudication des dépens dans le cadre d’une instance interlocutoire sur la partie en cause est qu’elle aura droit à ses frais afférents à l’instance interlocutoire, mais seulement si elle a ultimement gain de cause dans la demande sous‑jacente : Turner c Canada, [1989] ACF no 343. Ce n’est pas le cas en l’espèce.

[11]           En ce qui concerne la situation financière de M. Louison, selon ma lecture des faits, il concède à ce stade‑ci que son indigence n’est pas un facteur pertinent quant à la décision sur la question des dépens. Je suis d’accord : voir l’arrêt Leuthold c Canadian Broadcasting Corp., 2014 FCA 174, 462 N.R. 191, au paragraphe 12.

[12]           Le facteur auquel j’ai accordé la plus grande importance est l’absence manifeste de bien‑fondé de la demande de M. Louison, ainsi que le fait qu’il a tenté de remettre en litige une question à l’égard de laquelle les tribunaux de la Saskatchewan avaient déjà rendu une décision définitive qui lui était défavorable.

[13]           L’un des objectifs de l’adjudication des dépens est de décourager les recours non fondés : Apotex Inc. c Syntex Pharmaceuticals International Ltd. (1999), 176 FTR 142, [1999] ACF no 1465, au paragraphe 2, infirmée pour d’autres motifs, 2001 CAF 137, [2001] ACF no 727. En l’espèce, une journée complète a été consacrée à l’instruction de la demande de M. Louison, et il est manifeste, au vu du dossier de la Cour, que les défendeurs ont investi une quantité considérable de ressources pour se préparer à l’audition d’une demande sans fondement. Dans les circonstances, l’adjudication d’un montant de 5 000 $ à titre de dépens est justifiée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                  La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée et que le demandeur doit verser le montant de 5 000 $ aux défendeurs à titre de dépens.

« Anne L. Mactavish »

Juge

Traduction certifiée conforme

Maxime Deslippes, LL.B., B.A. Trad.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1284-13

 

INTITULÉ :

WILLIAM LOUISON c LA PREMIÈRE NATION OCHAPOWACE, 312050 SASKATCHEWAN LTD., ET LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN

 

OBSERVATIONS QUANT AUX DÉPENS EXAMINÉES À OTTAWA (ONTARIO) CONFORMÉMENT AU JUGEMENT ET MOTIFS DATÉS DU 19 JANVIER 2015

MOTIFS QUANT AUX DÉPENS ET JUGEMENT :

LA JUGE MACTAVISH

 

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

LE 17 FÉVRIER 2015

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Adam N. Crocker

 

POUR LE DEMANDEUR

Mervin C. Phillips

Leane Phillips

 

POUR LES DÉFENDEURS

LA PREMIÈRE NATION D’OCHAPOWACE ET

312050 SASKATCHEWAN LTD.

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Stephaniuk Law Office

Barristers and Solicitors

Yorkton (Saskatchewan)

 

POUR LE DEMANDEUR

Phillips & Co.

Phillips Legal Professional Corporation

Barristers and Solicitors

Regina (Saskatchewan)

 

POUR LES DÉFENDEURS

LA PREMIÈRE NATION D’OCHAPOWACE ET

312050 SASKATCHEWAN LTD.

 

 

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