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Date : 20150216


Dossier : IMM-5031-14

Référence : 2015 CF 193

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 16 février 2015

En présence de monsieur le juge S. Noël

ENTRE :

JATINDER SINGH DOSANJH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR) de la décision de Monsieur Tim Crowhurst de la Section d’appel de l’immigration (la SAI), de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, datée du 28 mai 2014, rejetant l’appel interjeté par le demandeur, Jatinder Singh Dosanjh (le demandeur), à l’encontre du rejet de la demande de résidence permanente dans la catégorie du regroupement familial de son épouse, Jaspal Kaur Dosanju (Jaspal), de l’Inde.

II.                Faits

[2]               Le demandeur est un citoyen canadien âgé de 41 ans. Il est arrivé au Canada en 1998. Il a demandé l’asile, mais sa demande n’a pas été accueillie. Il est resté au Canada clandestinement jusqu’en 2004, année où il a été admis au Canada à titre de résident permanent après avoir été parrainé par sa première épouse, Lakhwant Kaur Dosanjh (Lakhwant). Celle‑ci est la sœur de Jaspal.

[3]               Le mariage du demandeur et de Lakhwant a été organisé par le frère cadet du demandeur, Harjit, en Inde. Lakhwant, qui vivait au Canada, avait accepté d’épouser le demandeur. Le mariage du demandeur et de Lakhwant a eu lieu le 4 septembre 2004. À cette époque, Harjit était l’époux de Jaspal.

[4]               Pendant qu’il était au Canada, le demandeur apportait une aide financière à son frère Harjit et à Jaspal ainsi qu’à ses parents en Inde. La première épouse du demandeur, Lakhwant, lui a dit de ne pas envoyer d’argent à sa famille en Inde. Le demandeur n’en a pas moins continué d’envoyer de l’argent. Par conséquent, Lakhwant a jeté le demandeur à la rue le 10 mai 2009.

[5]               Le demandeur s’est rendu en Inde le 31 mai 2009. Son frère est décédé dans la soirée.

[6]               Le demandeur et Lakhwant ont entrepris une procédure de divorce en novembre 2010, et le divorce a été accordé le 17 mars 2011. La maison que le demandeur et Lakhwant avaient achetée ensemble a été mise au nom de Lakhwant en août 2012.

[7]               Le demandeur s’est rendu en Inde le 12 septembre 2011 et a épousé Jaspal le 28 septembre 2011. Le demandeur a présenté une demande de parrainage pour qu’elle devienne résidente permanente au Canada. Les trois enfants de Jaspal, qu’elle a eus avec Harjit, figuraient sur la demande de résidence permanente à titre de personnes à charge.

[8]               Un agent des visas à New Delhi a rejeté la demande de parrainage de Jaspal à titre de résidente permanente dans la catégorie du regroupement familial à la faveur d’une lettre, le 11 janvier 2013. L’agent des visas contestait la légalité du mariage. Le demandeur a fait appel de cette décision devant la SAI.

[9]               La SAI a rejeté l’appel le 28 mai 2014. C’est cette décision qui est visée par le contrôle.

III.             Décision contestée

[10]           Le demandeur fait appel du rejet de la demande de résidence permanente au Canada de Jaspal, de l’Inde. La demande de Jaspal a été rejetée parce que les exigences énoncées au paragraphe 12(1) de la LIPR n’étaient pas satisfaites en ce sens que Jaspal est une personne visée par les termes exclusifs du paragraphe 4(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement). Le paragraphe 4(1) concerne les mariages, les unions de fait ou les partenariats conjugaux qui ne sont pas authentiques. Pour rejeter l’appel, la SAI doit établir que le mariage n’est pas authentique ou qu’il visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège sous le régime de la Loi.

[11]           Après avoir expliqué la relation entre le demandeur, son ex‑épouse Lakhwant, son frère Harjit et sa nouvelle épouse Jaspal, avec le portrait peu flatteur de Lakhwant, ex‑épouse du demandeur, qui a été tracé, la SAI affirme que les témoignages du demandeur et de Jaspal ne sont pas crédibles. Le demandeur n’a pas non plus respecté la directive de la SAI de ne pas parler à Jaspal pendant la pause du déjeuner, ce qui restreint le poids qui peut être conféré aux témoignages du demandeur et de Jaspal.

[12]           L’invraisemblance de la situation sous-tendant l’appel, avec les antécédents d’immigration du demandeur, de Jaspal et de leurs familles, démontrant que c’est l’immigration au Canada qui est l’objectif principal. Par conséquent, la SAI conclut que le demandeur ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que Jaspal n’est pas visée par le paragraphe 4(1) du Règlement. Le présent appel est donc rejeté.

IV.             Observations des parties

[13]           Le demandeur soutient que la SAI se trompe au sujet du réseau familial factuel et substitue ses propres opinions, impressions et préjugés sur la question. Il précise que Jaspal et lui se sont mariés pour des motifs légitimes et honorables et non pas pour un motif  lié à l’immigration au Canada. Pour sa part, le défendeur affirme que la SAI n’a pas tiré de conclusion quant à la question de savoir si le mariage de Jaspal et du demandeur était authentique, mais a plutôt conclu qu’ils s’étaient mariés à des fins d’immigration.

[14]           De plus, le demandeur affirme que le jugement de la SAI était brouillé par son incompréhension de la culture du sous-continent indien. En outre, les peu reluisants antécédents d’immigration du demandeur au Canada n’ont rien à voir avec son mariage avec Jaspal. Le défendeur réplique que le demandeur n’a pas prouvé l’existence des coutumes qu’il évoque, étant donné qu’aucun élément de preuve à l’égard de cette prétendue coutume n’a été déposé auprès de la SAI.

[15]           Enfin, le demandeur affirme que la SAI n’aurait pas dû conclure que la conversation téléphonique qu’ont eue le demandeur et Jaspal pendant la pause du déjeuner à l’audience avait une importance capitale quant à leur crédibilité. Pour sa part, le défendeur soutient que le demandeur est simplement en désaccord avec la position de la SAI concernant l’appel téléphonique et cherche à faire apprécier à nouveau les éléments de preuve par la Cour.

V.                Réponse du demandeur

[16]           Contrairement à l’argument du défendeur selon qui la SAI n’a tiré aucune conclusion quant à l’authenticité du mariage du demandeur et de Jaspal, le demandeur soutient que les conclusions de la SAI en ce qui a trait aux alinéas a) et b) du paragraphe 4(1) du Règlement. De plus, en réponse à l’argument du défendeur selon lequel le demandeur n’a fourni à la SAI aucun élément de preuve à l’égard de la prétendue coutume, il soutient que la coutume ayant trait à la légalité du mariage n’était pas en cause à l’audience  étant donné que la légalité du mariage [traduction] « a été reconnue par le ministre avant l’audience et n’a pas été examinée au cours de celle-ci » (réponse du demandeur, au paragraphe 8). En outre, des éléments de preuve relatifs aux coutumes ont bel et bien été présentés en preuve à la SAI. Qui plus est, le demandeur soutient que le défendeur ne se penche pas sur l’affirmation du demandeur selon laquelle la SAI substituait, dans la présente affaire, sa propre vision occidentale des choses.

VI.             Question en litige

[17]           Après avoir examiné les dossiers et les observations respectives des parties, je formule la question en litige en ces termes :

  1. La SAI a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le mariage visait principalement l’immigration?

VII.          Norme de contrôle

[18]           La question de savoir si la SAI a commis une erreur en concluant que le mariage visait principalement l’immigration commande l’appréciation de la norme de la décision raisonnable étant donné qu’elle soulève des questions mixtes de fait et de droit (Huynh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 748, au paragraphe 6 [Huynh]; Zheng c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 432, au paragraphe 18 [Zheng]). La Cour ne doit intervenir que si elle conclut que la décision est déraisonnable et qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] ACS no 9, au paragraphe 47).

VIII.       Analyse

[19]           Le paragraphe 12(1) de la LIPR prévoit que la sélection des étrangers dans la catégorie « regroupement familial » se fait en fonction de la relation qu’ils ont avec un citoyen canadien ou un résident permanent à titre d’époux. Le paragraphe 4(1) du Règlement, toutefois, énonce les conditions en vertu desquelles un étranger ne sera pas considéré comme un époux. Pour rendre une décision au titre du paragraphe 4(1), la SAI doit établir si le mariage visait essentiellement l’obtention d’un statut ou d’un privilège sous le régime de la LIPR ou n’est pas authentique (Singh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1077, au paragraphe 5 [Singh]). L’une ou l’autre de ces conclusions empêche l’épouse d’obtenir le visa lui permettant de venir vivre avec son conjoint au Canada (Ibid). Pour que le mariage du demandeur et de Jaspal échappe à l’application de l’exclusion prévue au paragraphe 4(1), le demandeur doit démontrer que les deux conditions énoncées au paragraphe 4(1) ne sont pas satisfaites (Ouk c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 891, au paragraphe 12 [Ouk]; Zheng, précité, au paragraphe 21). Après avoir examiné les dossiers des parties et leurs observations respectives, j’estime que la décision de la SAI est raisonnable.

[20]           En premier lieu, la SAI a examiné la chronologie des événements menant jusqu’au mariage du demandeur avec Jaspal. À cet effet, selon la jurisprudence de la Cour, le moment où a commencé une relation peut représenter une considération pertinente quant il s’agit d’établir si le paragraphe 4(1) du Règlement s’applique  (Zheng, précité, au paragraphe 25). En l’espèce, le demandeur est arrivé au Canada en 1998 et a demandé l’asile, mais il a été débouté. Il est resté au Canada clandestinement et a obtenu le statut de résident permanent en 2004 seulement, après avoir été parrainé par sa première épouse, Lakhwant. Celle-ci l’aurait jeté à la rue le 10 mai 2009. Après le décès de son frère, le 31 mai 2009, le demandeur a entamé en novembre 2010 une procédure afin de divorcer de Lakhwant, divorce qui a été prononcé en mars 2011. Six mois plus tard, en septembre 2011, le demandeur a épousé la sœur de son ex‑épouse, qui était aussi la veuve de son frère. La maison que le demandeur et Lakhwant avaient achetée ensemble n’a été mise au nom de Lakhwant qu’en août 2012, soit près d’un an et demi après que le divorce fut prononcé. Compte tenu de la chronologie des événements, du moment où a été prononcé le divorce du demandeur et Lakhwant et du mariage du demandeur avec Jaspal, ainsi que des antécédents du demandeur en matière d’immigration, il était raisonnable que la SAI conclue que le mariage visait à faciliter l’immigration au Canada de Jaspal et de ses enfants.

[21]           En deuxième lieu, la SAI a tiré plusieurs conclusions défavorables quant à la crédibilité. Les conclusions de la SAI quant à la crédibilité sont des conclusions de fait et appellent une grande retenue, étant donné que la SAI a eu la possibilité d’entendre et d’observer le demandeur et d’entendre Jaspal témoigner et qu’elle est par conséquent la mieux placée pour apprécier leur crédibilité (Granata c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 1203, au paragraphe 28 [Granata]). En l’espèce, la SAI a contesté la crédibilité du témoignage du demandeur et de Jaspal à l’audience concernant l’explication fournie en ce qui concerne le caractère difficile de Lakhwant, les problèmes d’argent de la famille du demandeur et de Jaspal en Inde, ainsi que la conversation téléphonique que le demandeur a eue avec Jaspal pendant la pause du déjeuner à l’audience, après avoir reçu instruction de la SAI de ne communiquer avec aucune des parties en cause. Cet élément sera examiné plus en détail dans les prochains paragraphes. La date de la séparation du demandeur et de Lakhwant peu avant le décès du frère du demandeur et le transfert du titre de propriété du domicile conjugal à Lakhwant plus d’un an après la fin de la procédure de divorce ont aussi eu une incidence sur la crédibilité du demandeur et de Jaspal. De plus, contrairement à ce que soutient le demandeur, la SAI n’a pas substitué ses propres opinions, impressions et préjugés sur la question, mais s’est plutôt appuyée sur les faits de l’espèce pour rendre sa décision. Là encore, la conclusion de la SAI selon laquelle le mariage visait à faciliter l’immigration de Jaspal et de ses enfants au Canada est raisonnable.

[22]           En ce qui concerne l’argument du demandeur au sujet de l’erreur que la SAI a commise au paragraphe 13 de sa décision, concernant le réseau familial, elle est mineure et sans importance et n’est pas déterminante pour trancher la question (Nsabimana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 645, au paragraphe 4 [Nsabimana]). Elle n’a aucune influence sur le résultat de la décision. En fait, les relations entre toutes les parties en cause sont clairement expliquées dans le reste de la décision.

[23]           Concernant la conversation téléphonique, la lecture de la transcription de l’audience est révélatrice. À la pause du déjeuner, la SAI informe le demandeur qu’il ne devrait pas parler à son épouse, ni à qui que ce soit d’autre, du contenu de son témoignage. Or, au début du contre‑interrogatoire de Jaspal, qui a témoigné par téléphone, l’avocat du ministre a demandé à celle-ci quand elle avait parlé à son époux pour la dernière fois :

[traduction]

Q         Quelle heure est‑il là où vous êtes?

R         Il est près de deux heures du matin; deux heures moins le quart.

Q         Êtes‑vous restée éveillée en attendant cet appel ou avez‑vous dormi un moment?

R         J’attendais l’appel.

Q         Quand avez‑vous parlé à votre mari pour la dernière fois?

R         Je lui ai parlé hier.

Q         Comment, d’après vous, s’est passé son interrogatoire aujourd’hui?

R         Quoi?

Q         D’après vous, comment s’est passé son interrogatoire avant que nous vous appelions?

R         [Quelqu’un parle dans une langue étrangère.]

Q         À qui parlez‑vous?

R         C’est à vous que je parle.

Q         D’accord, quelle est votre réponse? Nous ne l’avons pas entendue.

R         Répétez la question, je n’ai pas compris.

Q         D’après vous, comment s’est passé l’interrogatoire de votre époux aujourd’hui

R         Il a bien répondu aux questions.

Q         Comment le savez‑vous?

R         Il m’a dit qu’il avait répondu aux questions, et que vous alliez m’appeler.

Q         Quand vous a‑t‑il dit cela?

R         Il m’a téléphoné pour s’assurer que je ne dormais pas. Il m’a téléphoné.

Q         Donc, il vous a téléphoné après avoir répondu aux questions.

R         Il a dit : « Mon entrevue est terminée, ne t’endors pas. Ils vont appeler. »

Comme le montre cet échange, il est manifeste que Jaspal ment quand elle dit qu’elle avait parlé à son époux « hier » alors qu’en réalité elle reconnait plus tard lui avoir parlé pendant la pause du déjeuner. Elle dit même qu’il avait « bien répondu aux questions » et elle justifie la conversation en déclarant qu’il lui avait téléphoné pour s’assurer qu’elle ne s’endormirait pas.

[24]           Devant la SAI, l’avocat du demandeur a décidé de ne pas approfondir cet aspect et de ne pas poser de questions après le contre‑interrogatoire mené par l’avocat du ministre. Pendant ses observations, l’avocat du demandeur n’a pas abordé la question de la conversation téléphonique, sauf pour ce qui est d’un court commentaire en réponse aux observations de l’avocat du ministre qui portaient directement sur la question.

[25]           Comme on l’a vu plus tôt, l’avocat du demandeur, dans le présent contrôle judiciaire, a soutenu que la SAI avait commis une erreur en ne posant pas de questions au demandeur ou à son épouse pour obtenir des précisions sur l’appel téléphonique et que, par conséquent, elle avait eu tort de tirer une conclusion défavorable quant à la crédibilité pour cette raison. L’avocat n’a pas invoqué de jurisprudence à cet égard et s’est limité à un commentaire d’ordre général.

[26]           Cet argument peut être réfuté par les faits tels qu’ils sont présentés. La SAI a donné des directives claires au demandeur de ne pas parler de son témoignage avec son épouse. Le demandeur  a passé outre. De plus, c’est l’avocat du ministre qui a abordé la question, et à la lecture de la transcription, il semble que Jaspal ment au début lorsqu’elle dit qu’elle avait parlé à son époux « hier », puis elle hésite, même si les questions posées étaient claires et intelligibles, puis fait savoir qu’ils s’étaient parlé à midi. De plus, l’avocat du demandeur a décidé de ne pas approfondir cet aspect en ne posant pas de questions supplémentaires, et il n’en a pas fait mention dans ses plaidoiries. Il n’aborde le sujet qu’en réponse aux observations de l’avocat du défendeur et se borne à affirmer que Jaspal n’avait pas dit que le demandeur et elle avaient parlé du témoignage du demandeur.

[27]           Pourquoi la SAI aurait‑elle été tenue de poser des questions supplémentaires à ce sujet alors que l’avocat du demandeur a décidé de ne pas approfondir la question de la conversation téléphonique? Il était loisible à l’avocat du demandeur de le faire, et non pas à la SAI. La SAI doit aborder les éléments de preuve tels qu’ils sont présentés à l’audience et tirer toutes les conclusions possibles. La SAI a examiné les éléments de preuve sur la question et a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité comme il lui était loisible de le faire. L’avocat du demandeur n’a pas pu fournir de jurisprudence à l’appui de son argument sur la question. Par conséquent, en me fondant sur les faits propres à l’espèce, j’estime que la SAI n’était pas tenue d’approfondir les motifs de l’appel téléphonique ou la nature et la teneur de celui‑ci, et disposait des éléments de preuve voulus pour tirer une conclusion défavorable quant à la crédibilité.

[28]           L’avocat du demandeur a proposé une question à certifier :

[traduction] Lorsqu’un appelant téléphone à son épouse (la demandeure), contrairement aux directives de la Commission de ne pas communiquer avec celle‑ci pendant la pause à l’audience, la Commission a-t-elle raison de se borner à tirer des conclusions défavorables quant à la crédibilité des témoignages de l’appelant et de la demandeure, ou devrait-elle, avant de tirer une telle conclusion défavorable, approfondir les motifs de l’appel téléphonique et la nature et la teneur de la conversation téléphonique?

[29]           L’avocat du défendeur s’est opposé à la certification de la question parce que celle‑ci ne répond pas aux critères. Le demandeur n’a fait aucune observation au sujet de la question à certifier.

[30]           La Cour d’appel fédérale a énoncé les principes régissant la certification d’une question au titre de l’alinéa 74d) de la LIPR. La question [traduction] « doit transcender les intérêts des parties au litige et aborder des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale » (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Liyanagamage, [1994] ACF 1637, 176 NR 4, aux paragraphes 4 à 6). La question doit être grave, de portée générale et elle doit permettre de trancher l’appel (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Zazai, 2004 CAF 89, aux paragraphes 11 et 12; Varela c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 145, aux paragraphes 22 à 29).

[31]           En l’espèce, la question proposée ne répond pas aux critères susmentionnés. Elle est propre aux faits de l’affaire, n’est pas une question de portée générale et ne concerne pas des questions d’une grande portée pas plus qu’elle ne permet pas de trancher l’appel. Par conséquent, la question ne sera pas certifiée.

IX.             Conclusion

[32]           La décision de la SAI, quand on la lit dans son ensemble, est raisonnable. La SAI a conclu, comme il se doit, que le demandeur ne s’était pas acquitté de la charge qui lui incombait de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que leur relation n’est pas visée par le paragraphe 4(1) du Règlement. L’intervention de la Cour n’est pas justifiée. Comme je l’ai déjà dit, aucune question ne sera certifiée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
  2. Aucune question de portée générale ne sera certifiée.

« Simon Noël »

Juge

Traduction certifiée conforme

Line Niquet


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5031-14

 

INTITULÉ :

JATINDER SINGH DOSANJH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

vancouver (colOmbiE‑BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 5 FÉVRIER 2015

 

jugEment et motifs :

le juge s. NOËL

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 16 FÉVRIER 2015

 

COMPARUTIONS :

Malvin J. Harding

 

pour le demandeur

 

Bobby Bharaj

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Malvin J. Harding

Avocat

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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