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Date : 19990924


Dossier : IMM-5998-98


OTTAWA (ONTARIO) LE 24 SEPTEMBRE 1999

EN PRÉSENCE DE L"HONORABLE JUGE TREMBLAY-LAMER

Entre :

     JIMMY KAMANA

     Partie demanderesse


     - et -


     LE MINISTRE

     Partie défenderesse



     ORDONNANCE



     La demande de contrôle judiciaire est rejetée.




     "Danièle Tremblay-Lamer"

                                     JUGE









        



Date : 19990924


Dossier : IMM-5998-98

Entre :

     JIMMY KAMANA

     Partie demanderesse


     - et -


     LE MINISTRE

     Partie défenderesse



     MOTIFS DE L"ORDONNANCE



LE JUGE TREMBLAY-LAMER:



[1]      Il s"agit d"une demande de contrôle judiciaire d"une décision rendue par la Commission de l"immigration et du statut de réfugié, Section du statut, en date du 9 novembre 1998 qui concluait que le demandeur n"est pas un réfugié au sens de la Convention.


[2]      Jimmy Kamana est un citoyen du Rwanda. Il appartient à la tribu tutsie. Il allègue être menacé par les membres d"une famille hutue de son village. Ceux-ci ont assassiné son père en mai 1997 pour avoir accusé leur chef du meurtre de ses parents.

[3]      En juillet 1997 ils auraient blessé un oncle et auraient menacé de tuer toute la famille du demandeur si leur parent demeurait en prison.


[4]      Le tribunal a conclu que le demandeur n"avait pas démontré l"authenticité de sa crainte de persécution compte tenu de son manque de crédibilité ainsi qu"une absence de preuve quant à l"élément objectif de sa revendication. De plus, comme conclusion subsidiaire le tribunal remarquait que le demandeur pouvait se réclamer de la protection du Burundi.


[5]      En ce qui concerne l"élément subjectif, le tribunal a jugé que le demandeur n"était pas crédible. Bien que la décision comporte quelques erreurs, après une lecture attentive de la preuve, je ne suis pas convaincue que celle-ci soit déraisonnable.


[6]      Le tribunal a constaté le fait que le demandeur a séjourné un mois et demi aux États-Unis sans faire aucune démarche pour demander le statut de réfugié. Une telle conduite n"est pas compatible avec quelqu"un qui est gravement menacé.


[7]      Il note le fait qu"une fois de retour au Rwanda en 1997 il est déménagé dans la capitale Kigali où il y séjourne pendant plusieurs mois, et ce, alors qu"il était menacé et qu"il aurait pu rejoindre une partie de sa famille au Burundi. D"ailleurs, malgré que le demandeur prétende avoir été dans l"impossibilité de retourner à cause des routes qui étaient peu sûres, ses frères s"y sont rendus sans problème.


[8]      De plus, en quittant le Rwanda, le demandeur ne se soucie pas d"emporter sa carte de la communauté des pays des Grands Lacs (CPGL) qui lui permettait de ne pas être retourné au Rwanda en cas d"expulsion d"un autre pays. Encore une fois, un tel comportement n"est pas celui de quelqu"un qui a une crainte bien fondée de persécution.


[9]      Dans ce contexte, il était raisonnable pour le tribunal de conclure que le demandeur n"avait pas établi de façon crédible l"élément subjectif de la définition de réfugié.


[10]      L"absence de preuve quant à l"élément subjectif de la revendication constitue une lacune fatale qui justifie à elle seule le rejet de la revendication puisque les deux éléments de la définition de réfugié, subjectif et objectif, doivent être rencontrés.


[11]      Quoique qu"il en soit, même si la conclusion du tribunal avait été déraisonnable quant au bien fondé de sa crainte subjective, c"est à bon droit que le tribunal concluait que le demandeur pouvait se réclamer de la protection du Burundi.


[12]      Le demandeur a admis qu"il possédait le statut de réfugié au Burundi. Sa famille bénéficie de ce statut depuis quarante ans. La preuve révèle que le statut de réfugié au Burundi comporte le droit de ne pas être expulsé de ce pays. À part le droit de vote, il a les mêmes droits que les citoyens du Burundi soit le droit à l"éducation et au travail. Il possédait une carte de la CPGL encore valable qui lui permettait de rentrer et de sortir du Burundi sans problème.


[13]      Bien qu"il témoigne à l"effet que cette carte soit au Rwanda, il n"a pas présenté de preuve qu"elle ne pouvait lui être envoyée ou qu"il était impossible de s"en procurer une autre.

[14]      Lorsque le défendeur établit prima facie que la section E de l"article 1 de la Convention de Genève est applicable, il y a un renversement du fardeau et en l"espèce le demandeur devait établir qu"il lui était impossible de récupérer ou d"obtenir une autre carte de la CPGL. Comme l"indiquait le juge Rothstein dans l"affaire Shapari :

Par ailleurs, les requérantes ne tirent aucun avantage du fait que la requérante ait détruit sa carte de résidente. À tout le moins, la présentation par l"intimé d"une preuve prima facie établissant que la section E de l"article premier s"appliquait entraînait un déplacement du fardeau de la preuve, la requérante devant alors expliquer la raison pour laquelle elle ne pouvait obtenir une nouvelle carte après avoir détruit la carte qu"elle avait en sa possession. Or, la requérante n"a fourni aucune explication sur ce point1.

[15]      En ces circonstances, la Cour ne peut intervenir. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[16]      Aucun des avocats n"a recommandé la certification d"une question.





     "Danièle Tremblay-Lamer"

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 24 septembre 1999

__________________

1      Shahpari c. Canada (M.C.I.) (le 3 avril 1998), IMM-2327-97 (C.F. 1ère inst.).

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