Tribunal de la protection de |
Environmental Protection Tribunal of Canada |
Date de publication : |
Le 29 juin 2021 |
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Référence : |
Cormier c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2021 TPEC 6 |
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Numéro de dossier du TPEC : |
0012-2020 et 0013-2020 |
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Intitulé : |
Cormier c. Canada (Environnement et Changement climatique) |
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Demandeur : |
Jean-Marie Cormier |
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Défendeur : |
Ministre de l’Environnement et du Changement climatique du Canada |
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Objet de la procédure : Révision, au titre de l’article 15 de la Loi sur les pénalités administratives en matière d’environnement, L.C. 2009, ch. 14, art. 126, des pénalités infligées en vertu de l’article 7 de cette loi relativement à une violation du paragraphe 5(a) de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch. 22 ainsi, qu’à une violation de l’alinéa 15(1)(e) du Règlement sur les oiseaux migrateurs, C.R.C., ch. 1035. |
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Instruit : |
Le 9 juin 2021 (par téléconférence) |
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Comparutions : |
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Parties |
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Avocat ou représentant |
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Jean-Marie Cormier |
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Représenté par lui-même |
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Ministre de l’Environnement et du Changement climatique du Canada |
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Marilou Bordeleau |
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DÉCISION RENDUE PAR : |
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PAUL DALY |
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Introduction
[1] Jean-Marie Cormier (« le demandeur ») a reçu deux procès-verbaux relativement à des évènements qui sont survenus le 11 octobre 2019.
[2] Le demandeur a été intercepté par des agents du Ministre de l’Environnement et Changement climatique Canada (« le Ministre ») qui l’ont filmé tirant sur des oiseaux migrateurs à partir d’un bateau.
[3] Les agents ont décidé de donner deux procès-verbaux, un concernant une violation de l’article 15(1)(e) du Règlement sur les oiseaux migrateurs, CRC c 1035 (« le ROM ») selon lequel il est interdit de tirer sur des oiseaux migrateurs au moyen d’un bateau en mouvement, et un autre procès-verbal concernant une violation de l’article 5(a) de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs (« la Loi de 1994 »), une disposition qui interdit la possession illégale d’oiseaux migrateurs.
[4] Le demandeur ne conteste pas le procès-verbal relatif au ROM. Il conteste seulement celui concernant la Loi de 1994, soutenant qu’il n’était pas « en possession » d’oiseaux migrateurs. Ainsi, il invoque la compétence du Tribunal en vertu de la Loi sur les pénalités administratives en matière d'environnement, LC 2009, c 14, art 126 (« la LPAME »).
[6] En l’espèce, le Tribunal est d’avis que le demandeur était en possession illégale d’oiseaux migrateurs.
[7] Pourtant, le Ministre a erré dans son calcul du montant de la pénalité. Il n’y avait pas lieu d’imposer un montant supplémentaire pour dommages environnementaux. Le Ministre aurait dû imposer ce montant supplémentaire sur le premier procès-verbal concernant l’article 15(1)(e) du ROM, que le demandeur renonce à contester.
[8] Il y a donc lieu d’accueillir en partie la demande de révision.
Contexte
[9] Le 11 octobre 2019, aux alentours de 8h50, les agents Félix Hamel et Louis-Philippe Supper de Pêches et Océans ont effectué, dans le cadre de leur travail, une patrouille nautique dans le secteur de l’Île du Havre à Havre St-Pierre.
[10] Lors de cette patrouille nautique, les deux agents ont entendu des coups de feu provenant du sud de l’île du Havre. L’agent Hamel est alors débarqué sur l’île du Havre, muni d’une caméra, et s’est dirigé vers le côté sud de l’île pour observer les chasseurs.
[11] C’est alors que l’agent a aperçu une embarcation nautique à bord de laquelle deux personnes prenaient place, identifiées par après comme étant le demandeur et M. Richard Cormier. L’agent Hamel a ainsi filmé et pris des photos des individus, qu’il suspectait de pratiquer la chasse aux oiseaux migrateurs.
[12] Sur la vidéo, on constate clairement que le demandeur a tiré à partir d’un bateau en mouvement.
[13] L’agent Hamel est par la suite venu retrouver l’agent Supper. Les deux agents sont alors allés rejoindre l’embarcation du demandeur et de M. Richard Cormier.
[14] L’agent Supper s’est présenté aux individus en sa qualité d’agent des pêches.
[15] Il les a alors avisés qu’ils étaient en infraction pour chasse d’oiseaux migrateurs à l’aide d’une embarcation en mouvement.
[16] Les agents Supper et Hamel ont de plus vérifié les armes à bord de l’embarcation et ont constaté qu’il s’agissait d’un fusil semi-automatique de marque Adler pour le demandeur et d’un fusil à un coup pour M. Richard Cormier.
[17] Suite à cette intervention, les agents ont informé le demandeur que le dossier serait transféré au Ministère provincial des Forêts, de la Faune et des Parcs. Après vérification, il fut déterminé que le dossier devait plutôt être transféré au Ministre. Se basant sur les notes des agents Supper et Hamel, ainsi que sur le complément de rapport d’infraction rempli par l’agent Hamel, l’agent Yann Bolduc a émis, le 24 février 2020, deux procès-verbaux à l’attention du demandeur.
[18] Un premier procès-verbal d’un montant de base de 400 $, portant le no 9200-1378, a été émis au demandeur puisque selon les observations des agents Hamel et Supper, il avait en sa possession un oiseau migrateur et contrevenait ainsi au paragraphe 5(a) de la Loi de 1994. Cette sanction est également accompagnée d’un montant additionnel de 600 $ constituant un facteur aggravant, soit dommage environnemental.
[19] Un second procès-verbal d’un montant de base de 400 $, portant le no 9200-1379, a été émis pour avoir chassé des oiseaux migrateurs au moyen d’un des véhicules précisés, soit un bateau à moteur en mouvement, et contrevenant ainsi au paragraphe 15(1)(e) du ROM.
[20] Les deux procès-verbaux ont été signifiés au demandeur le 24 février 2020.
[21] Après discussion entre le demandeur et la représentante du Ministre le 9 décembre 2020, le demandeur confirme qu’il ne conteste pas le procès-verbal portant le no 9200-1379 émis pour avoir chassé des oiseaux migrateurs au moyen d’un bateau à moteur en mouvement. Il conteste cependant le procès-verbal portant le no 9200-1378 émis pour possession d’un oiseau migrateur en contravention aux règlements ainsi que le facteur aggravant afférent.
[22] À l’audience, les agents Hamel et Bolduc ont témoigné. Le demandeur a aussi relaté sa version des faits.
[23] Pourtant, il n’y avait pas beaucoup de désaccord sur les faits saillants aux fins de la demande de révision actuelle.
[24] D’abord, le demandeur a tiré à partir d’un bateau en mouvement sur des oiseaux migrateurs, le tout capté par vidéo. Quand le demandeur a été intercepté par les agents, il y avait au moins un oiseau migrateur, soit un eider commun, mort dans le bateau, dont le demandeur était un des deux occupants.
Analyse et constatations
Cadre analytique général
[25] Dans le cadre d’une demande de révision déposée sous l’égide la LPAME, le fardeau de preuve est sur le Ministre, qui doit démontrer selon la prépondérance des probabilités qu’une violation a été commise telle qu’alléguée dans le procès-verbal visé par la demande de révision (l’article 20(2) de la LPAME). Il incombe au Tribunal de vérifier, le cas échéant, que le montant de la pénalité ainsi applicable a été calculé correctement (l’article 20(3) de la LPAME).
[26] La LPAME prévoit un régime de responsabilité absolue en excluant des moyens de défense basés sur la diligence raisonnable ou la bonne foi : l’article 11 de la LPAME; Sirois c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 6, au par. 41; F. Legault c. Canada (Environnement et Changement climatique); R. Legault c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2021 TPEC 1, au par. 52.
[27] Une infraction de la Loi de 1994 est assujettie à la procédure prévue par la LPAME, dont l’article 5 prévoit que certaines violations des lois environnementales canadiennes spécifiées par règlement justifient l’imposition de sanctions administratives pécuniaires calculées conformément aux formules établies dans le Règlement sur les pénalités administratives en matière d'environnement, DORS/2017-109 (« le RPAME »). Notamment, l’Annexe 1, Partie 4, Section 1 du RPAME identifie une infraction de la Loi de 1994 comme étant « une violation punissable au titre de la Loi » (l’article 5(1)(a) de la LPAME).
Infraction
[28] Il convient de commencer avec le texte de l’article 5 de la Loi de 1994 :
Sauf conformément aux règlements, nul ne peut, sans excuse valable : a) avoir en sa possession un oiseau migrateur ou son nid;
b) acheter, vendre, échanger ou donner un oiseau migrateur ou son nid, ou en faire le commerce |
Except as authorized by the regulations, no person shall, without lawful excuse, (a) be in possession of a migratory bird or nest; or
(b) buy, sell, exchange or give a migratory bird or nest or make it the subject of a commercial transaction. |
[29] Dans l’article 2(2) de la Loi de 1994, la définition de « possession » est très large :
Pour l’application de la présente loi : a) une personne est en possession d’une chose lorsqu’elle l’a en sa possession personnelle ou que, sciemment : (i) soit elle l’a en la possession ou garde réelle d’une autre personne, (ii) soit elle l’a en un lieu qui lui appartient ou non ou qu’elle occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d’une autre personne; b) lorsqu’une personne, au su et avec le consentement d’une ou plusieurs autres, a une chose en sa garde ou possession, cette chose est censée en la garde et possession de toutes ces personnes et de chacune d’elles |
For the purposes of this Act, (a) a person has anything in possession when the person has it in their personal possession or knowingly (i) has it in the actual possession or custody of another person, or (ii) has it in any place, whether or not that place belongs to or is occupied by the person, for their own use or benefit or for the use or benefit of another person; and (b) where a person has anything in their possession or custody with the knowledge and consent of another person or other persons, it is in the possession and custody of each and all of them. |
[30] Au minimum, le demandeur était en possession au sens de l’article 2(2)(b) parce que, de son propre aveu, il était dans un bateau où se trouvait au moins un cadavre d’oiseau migrateur.
[31] Le demandeur n’a pas soulevé la possibilité qu’un oiseau migrateur mort ne soit pas un oiseau migrateur au sens de la Loi de 1994, mais un tel argument ne surmonterait qu’avec difficulté la définition large d’ « oiseau migrateur » à l’article 2, soit « Tout ou partie d’un oiseau migrateur visé à la convention, y compris son sperme et ses oeufs, embryons et cultures tissulaires » (“a migratory bird referred to in the Convention, [including] the sperm, eggs, embryos, tissue cultures and parts of the bird”). Si une partie d’un oiseau migrateur est un « oiseau migrateur » à ce sens, il est difficile de voir comment le tout d’un oiseau migrateur mort ne se qualifierait pas ainsi.
[32] Il y a lieu de conclure que le demandeur était en possession d’oiseaux migrateurs.
[33] Il faut maintenant déterminer si le demandeur était ainsi en possession de ces oiseaux « conformément aux règlements ». Une réponse négative s’impose.
[34] Le Ministre soutient que la possession n’était pas légale parce qu’elle était le fruit d’une violation de l’article 15(1)(e) du ROM.
[35] Selon cette disposition, il est interdit de chasser les oiseaux migrateurs « au moyen d’un aéronef, d’un bateau à voiles ou à moteur, d’un véhicule automobile ou d’un véhicule tiré par une bête de trait ». Pour bien saisir sa portée, il faut lire cette disposition dans tout son contexte.
[36] Premièrement, la définition de « chasser » dans le ROM est large, s’étendant selon l’article 2(1) du ROM à « pourchasser, poursuivre, harceler, traquer, suivre un oiseau migrateur ou être à son affût, ou tenter de capturer, d’abattre, de blesser ou de harceler un oiseau migrateur, que l’oiseau soit ou non capturé, abattu ou blessé ». Cette définition comprend non seulement des actions qui mènent à la mort d’un oiseau migrateur, mais aussi des actions entreprises préalablement, qu’ils causent une mort ou pas : Sirois c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 6, au pars. 44-49.
[37] Deuxièmement, il est interdit de chasser à partir d’un bateau en mouvement parce que l’article 2(3) du ROM précise qu’aux fins du ROM « une mention de l’usage d’un bateau à moteur ne comprend pas l’usage d’un bateau à moteur dont le moteur est à l’arrêt et qui a cessé d’avancer ».
[38] Lisant les articles 2(3) et 15(1)(e) ensemble, il faut conclure qu’il est interdit de tirer sur des oiseaux migrateurs à partir d’un bateau dont le moteur n’est pas à l’arrêt et qui n’a pas cessé d’avancer.
[39] Pour le Ministre, la possession d’un oiseau migrateur qui est tributaire à la chasse entreprise à partir d’un bateau en mouvement est illégale, c’est-à-dire, une possession non conforme aux règlements telle que mentionnée dans l’article 5 de la Loi de 1994. À la lumière des dispositions analysées ci-dessus, le Ministre a entièrement raison à ce sujet.
[40] Pour sa part, le demandeur prétend que les oiseaux migrateurs trouvés à bord du bateau n’étaient pas tués par les tirs captés sur la vidéo. Ils étaient, selon lui, tués en toute légalité.
[41] Pourtant, le témoignage de l’agent Hamel démontre qu’il est probable qu’au moins un oiseau migrateur ait été tué par les coups de fusil observés sur la vidéo. Il relate, autant de vive voix que par voie d’affidavit, qu’il a vu le demandeur se pencher pour ramasser quelque chose dans l’eau. En fait, il a pris une photo :
[42] À la lumière du témoignage de l’agent Hamel, appuyé par la vidéo et la photo déposées en preuve, le Tribunal constate que (1) le demandeur a tiré à partir d’un bateau en mouvement, contrevenant ainsi à l’article 15(1)(e) du ROM; (2) un oiseau migrateur a été tué par un des coups de fusil provenant du bateau; et (3) le demandeur a pris un oiseau migrateur ainsi tué à bord du bateau.
[43] Il y a lieu de conclure qu’il est probable que le demandeur était en possession d’oiseau migrateur d’une manière qui n’était pas conforme aux règlements applicables, soit l’article 15(1)(e) du ROM, comme le prévoit l’article 5 de la Loi de 1994.
[44] Le Ministre s’étant ainsi déchargé de son fardeau de preuve selon la prépondérance des probabilités, le demandeur a commis une violation à l’article 5 de la Loi de 1994, telle qu’alléguée dans le procès-verbal visé par sa demande de révision.
Pénalité
[45] Par l’entremise du procès-verbal, une pénalité de 1000 $ a été imposée au demandeur. Ce montant comprend un montant de base de 400 $ ainsi qu’un montant supplémentaire pour dommages environnementaux.
[46] Il faut calculer le montant d’une sanction administrative pécuniaire émise sous l’égide de la LPAME selon la formule se trouvant dans l’article 4(1) du RPAME :
(1) Le montant de la pénalité applicable à une violation de type A, B, ou C est calculé selon la formule suivante : W + X + Y + Z où : W représente le montant de la pénalité de base prévu à l’article 5; X le cas échéant, le montant pour antécédents prévu à l’article 6; Y le cas échéant, le montant pour dommages environnementaux prévu à l’article 7; Z le cas échéant, le montant pour avantage économique prévu à l’article 8. |
(1) The amount of the penalty for each Type A, B or C violation is to be determined by the formula W + X + Y + Z where W is the baseline penalty amount determined under section 5; X is the history of non-compliance amount, if any, as determined under section 6; Y is the environmental harm amount, if any, as determined under section 7; and Z is the economic gain amount, if any, as determined under section 8. |
[47] En l’espèce, nous nous intéressons à « W » et à « Y ».
[48] Considérons d’abord le montant de base. À cet égard, l’article 5 du RPAME nous apprend où trouver les montants pertinents :
The baseline penalty amount for a violation is the amount set out in column 3 of Schedule 4 or of Schedule 5 that corresponds to the category of the violator and the type of violation committed as set out in columns 1 and 2, respectively, of the applicable schedule. |
[49] Selon le RPAME, le montant de base pour une violation de l’article 5 de la Loi de 1994 est de 400 $ lorsque la violation a été commise par une personne physique. Il s’agit d’une violation de type B : RPAME, Annexe 1, Partie 4, Section 1. Le montant de base applicable en lien avec une violation de type B est de 400 $ : RPAME, Annexe 4, Article 1, Colonne 3.
[50] Le montant de la pénalité de base – le « W » dans la formule – a été calculé correctement.
[51] Tournons le regard vers le montant supplémentaire pour dommages environnementaux. L’article 7 du RPAME nous apprend dans quelles situations un tel montant est applicable :
Si des dommages environnementaux découlent de la violation commise, le montant pour dommages environnementaux est celui prévu à la colonne 5 de l’annexe 4, selon l’auteur et le type de violation commise figurant, respectivement, aux colonnes 1 et 2 de cette même annexe |
If the violation has resulted in harm to the environment, the environmental harm amount is the amount set out in column 5 of Schedule 4 that corresponds to the category of the violator and the type of violation committed as set out in columns 1 and 2, respectively, of that Schedule. |
[52] Le montant applicable en l’espèce pour dommages environnementaux est de 600 $ : RPAME, Annexe 4, Article 1, Colonne 5.
[53] Pourtant, le Tribunal est d’avis qu’il n’y avait pas lieu d’imposer le montant supplémentaire au demandeur.
[54] Comme le Tribunal a constaté dans des décisions antérieures, l’article 7 exige un lien de causalité entre la violation commise et les dommages environnementaux qui en « découlent ». Dans Sirois c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 6, au par. 54 et F. Legault c. Canada (Environnement et Changement climatique); R. Legault c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2021 TPEC 1 au par. 72, le lien de causalité était présent. Si les demandeurs avaient chassé de façon conforme aux règlements, la mort des espèces protégées n’aurait jamais eu lieu.
[55] Pourtant, dans Nyobe c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 7, aux pars. 32-33, le lien de causalité était absent. Le demandeur a importé de la viande après un voyage en Afrique. Il s’agissait d’une violation des lois environnementales canadiennes. Or, le Ministre n’a pas pu démontrer que des dommages environnementaux ont découlé de l’importation de la viande en question. Pour reprendre les propos du Tribunal dans Nyobe, aux pars. 32-33 :
[32] Le Tribunal se rappelle qu’il faut démontrer que des « dommages environnementaux découlent de la violation commise ». Or, en l’espèce, il n’y a aucune preuve au dossier reliant la contravention du demandeur à des dommages environnementaux qui auraient eu lieu au Cameroun. Le demandeur a importé de la viande au Canada, certes, mais le demandeur n’a ni chassé une espèce protégée au Cameroun ni acheté la carcasse trouvée dans ses bagages.
[33] Même si on acceptait la proposition du Ministre voulant que des dommages à la biodiversité au Cameroun puissent constituer des dommages environnementaux aux fins de l’article 7 du RPAME, il est impossible de dire à la lumière de la preuve au dossier que les dommages environnementaux ont découlé de la contravention commise par le demandeur.
[56] En l’espèce, nous nous trouvons dans une situation qui est plus comparable au scénario de Nyobe c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 7 que les scénarios de Sirois c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 6 et de F. Legault c. Canada (Environnement et Changement climatique); R. Legault c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2021 TPEC 1.
[57] Lorsque le demandeur a commis l’infraction à la Loi de 1994, le mal avait déjà été fait. Avoir un oiseau migrateur mort en sa possession était illégal. Et la mort d’un oiseau migrateur est bel et bien un dommage environnemental : Sirois c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 6, au par. 54. Certes, contrairement à M. Nyobe, M. Cormier a activement participé dans une chasse illégale. Mais le Tribunal ne peut conclure que des dommages environnementaux ont découlé de la possession du demandeur d’un oiseau migrateur mort. Les dommages environnementaux ont plutôt découlé de la violation de l’article 15(1)(e) du ROM, soit tirer à partir d’un bateau en mouvement. Certes, sa violation de l’article 15(1)(e) mène à la conclusion que le demandeur a commis une violation de la Loi de 1994. Mais elle ne mène pas le Tribunal pour autant à la conclusion que les dommages environnementaux ont découlé de la violation de la Loi de 1994.
[58] Si le Ministre avait imposé le montant supplémentaire pour dommages environnementaux sur le procès-verbal concernant la violation de l’article 15(1)(e), il y aurait eu lieu de rejeter une demande de révision. Il est même possible en principe que le Tribunal puisse corriger une telle erreur dans un procès-verbal, rajoutant de son propre chef le montant supplémentaire que le procès-verbal aurait dû comprendre (l’article 20(3) de la LPAME). Pourtant, vu que le demandeur a retiré sa demande de révision du procès-verbal concernant l’article 15(1)(e), le Tribunal ne peut plus maintenant corriger ledit procès-verbal.
Conclusion
[59] Le Ministre a démontré selon la prépondérance des probabilités que le demandeur a commis une infraction à l’article 5 de la Loi de 1994. Pourtant, le calcul de la pénalité ainsi imposée n’était pas exact. Il y a lieu d’accueillir la demande de révision en partie en modifiant le montant de la pénalité imposée au demandeur.
Décision
[60] La demande de révision est accueillie en partie. Le procès-verbal N9200-1378 est maintenu, mais le montant de la SAP est modifié de 1000 $ à 400 $.
La demande de révision est accueillie en partie. Le montant de la SAP est modifié. |
« Paul Daly » |
PAUL DALY RÉVISEUR |