Tribunal de santé et sécurité au travail Canada

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CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II

SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

 

Révision, en vertu de l'article 146 du Code canadien du travail, Partie II,

d'une instruction donnée par un agent de sécurité

 

 

Décision no : 00-010

Demandeur : Trevor Mills, Chef de district

Développement des ressources humaines Canada

Représenté par : Robert Jaworski

Avocat

 

Intimée : Alliance de la fonction publique du Canada

Représentée par : M. Tom Hamilton

Agent aux griefs et à l'arbitrage des griefs

 

Mis-en-cause : Rod Noel

Agent de sécurité

Développement des ressources humaines Canada

 

Devant : Serge Cadieux

Agent régional de sécurité

Développement des ressources humaines Canada

 

 

Une audition orale a été tenue le 11 avril 2000 à London, en Ontario.

 

 

Contexte

 

En janvier 1999, l'agent de sécurité Rod Noel a été affecté à l'enquête concernant une plainte de la part d'un employé de Cogeco Cable Inc. (« Cogeco »), Mme Joan Ellis. Ayant décidé que la plainte de Mme Ellis était justifiée, l'agent de sécurité Noel a mené une inspection de son lieu de travail chez Cogeco. Aux termes de son enquête, l'agent de sécurité a donné une longue instruction (du 19 janvier 1999) à Cogego dans laquelle il constatait dix‑huit (18) violations du Code canadien du travail, partie II, (le « Code ») et du Règlement canadien en matière de santé et de sécurité au travail (le « Règlement »). Cette instruction ne fait pas l'objet du présent examen.

 

Cependant, à la suite de l'enquête de l'agent de sécurité, le Directeur régional de DRHC et le ministre du Travail ont reçu des plaintes officielles de Cogeco dirigées contre l'agent de sécurité, selon lesquelles ce dernier aurait fait preuve d'une conduite abusive et d’un manque de sens professionnel. En conséquence de la plainte adressée au ministre, le gestionnaire de l'agent de sécurité, M. Trevor Mills, a relevé temporairement du dossier Cogeco l'agent de sécurité pendant qu'il faisait enquête au sujet des plaintes. S’étant convaincu du fait que Cogeco s'efforçait de se conformer à l'instruction du 19 janvier 1999, M. Mills a fermé le dossier Cogeco. Par la suite, il a relevé de façon permanente l'agent de sécurité du dossier Cogeco. L'agent de sécurité a réagi en donnant à son gestionnaire une instruction (voir l’ANNEXE) selon laquelle ce dernier contrevenait à l'article 143 du Code. L'agent de sécurité a accusé M. Mills de gêner ou d'entraver l'action d'un agent de sécurité dans l'exercice de ses fonctions selon le Code. L'instruction a fait l'objet d'un appel de la part de M. Mills.

 

Chronologie des événements

 

L'agent de sécurité Rod Noel a expliqué qu'il était arrivé sur les lieux de travail de Cogeco le 8 janvier 1999 vers 10 h. Il a été reçu par la directrice suppléante du Centre d'appel, Mme Kelly Bird, qui avait dû s'absenter d'une réunion importante à l'arrivée de l'agent de sécurité. Ce dernier a déclaré que Mme Bird était indisposée du fait qu'il n'avait pas pris rendez‑vous pour inspecter les lieux de travail de Cogeco; également elle lui avait demandé de revenir un autre jour. L'agent de sécurité a alors informé Mme Bird que son bureau avait comme politique de ne pas appeler à l'avance au moment d'une inspection de santé et de sécurité. Il lui a ensuite expliqué le but de sa visite et lui a demandé qu'un représentant en santé et sécurité soit présent pour l'accompagner au cours de son inspection. M. Noel a estimé à ce moment‑là que Mme Bird ne collaborait pas, puisque de nombreux retards lui avaient été imposés. Il l'a alors informé de son devoir de collaboration aux termes de l'article 142 du Code. Il a ensuite commencé à inspecter le lieu de travail en présence de Mme Bird et de M. Paul Padbury, le représentant en santé et sécurité. L'agent de sécurité a fait état du fait que M. Padbury avait collaboré avec lui durant l'inspection, tandis que Mme Bird s'était montrée impatiente et généralement peu serviable.

 

Vers midi, Mme Bird a informé l'agent de sécurité qu'elle avait appelé son gestionnaire, M. Trevor Mills qui, selon ses dires, allait le rappeler. M. Mills a appelé l'agent de sécurité peu de temps après et lui a expliqué que Mme Bird s'était plainte du fait que l'agent de sécurité avait rendu visite à Cogeco sans s'annoncer à l'avance. Il lui a déclaré qu'elle avait menacé d'appeler la police pour le faire évincer des lieux. M. Mills a alors précisé qu’il avait expliqué à Mme Bird que l'agent de sécurité exerçait ses fonctions conformément au Code et qu'il avait le droit de se trouver à cet endroit. Mme Bird s'était alors plainte du fait que l'agent de sécurité occupait une trop grande partie de son temps et avait demandé que M. Mills donne instruction à l'agent de sécurité de cesser son inspection. M. Mills a informé Mme Bird qu'il n'allait pas agir de la sorte et que l'agent de sécurité allait poursuivre son inspection, ce qu'il a fait pour le reste de la journée.

 

L'inspection s’est poursuivie à 10 h le mardi suivant, 12 janvier 1999. L'agent Noel était accompagné et aidé par M. Mark Kohli, ingénieur de protection contre les incendies de DRHC. L'agent de sécurité a mené une inspection détaillée du lieu de travail. Il a constaté plusieurs infractions, notamment en matière de sécurité‑incendie, comme l'absence d'un plan de sécurité‑incendie aussi bien que de procédures d'évacuation. Le 19 janvier 1999, l'agent Noel s'est rendu sur les lieux de travail de Cogeco accompagné de l'agent de sécurité Peggy Wright, également de DRHC, pour donner des instructions à l'employeur.

 

Lettres de plaintes

 

Le 22 janvier 1999, les avocats de Cogeco ont écrit à M. Bob Howsam, Directeur régional, DRHC, pour demander une révision de l'instruction donnée par l'agent de sécurité Noel à Cogeco. La lettre énonce la position de l'entreprise concernant les instructions données par l'agent de sécurité et informe M. Howsam du fait que l'entreprise n'a pas l'intention de se conformer à la demande de l'agent de sécurité d’afficher les instructions. On soutient également dans la lettre que l'agent de sécurité Noel a mené son enquête avec un entêtement excessif et sans le souci d'équité qui s'imposait dans les circonstances et on demande qu'un autre agent de sécurité assume la responsabilité du dossier Cogeco.

 

Le 23 septembre 1999, une autre plainte officielle a été logée, cette fois‑ci par un autre cabinet d'avocats représentant Cogeco, auprès du ministre du Travail. La plainte visait l'agent de sécurité Noel et on y alléguait que l'entreprise entretenait « de très graves inquiétudes pour ce qui est de la conduite tout à fait inconvenante et du manque de sens professionnel... » ( Traduction) de l'agent Noel qui, prétendait‑on, avait été extrêmement impoli et grossier, pour ne mentionner que ces deux épithètes, à l'égard de Mme Bird au cours de son enquête. Également, selon la lettre, l'entreprise se déclarait « fort inquiète d'apprendre comment le gestionnaire de district Trevor Mills avait accueilli les doléances de Mme Bird » (Traduction). Il était question dans ce cas du soutien accordé par M. Mills à l'agent de sécurité à la suite de l'appel téléphonique que lui avait adressé Mme Bird le 8 janvier 1999. La lettre décrit le comportement prétendument agressif de l'agent de sécurité à l'endroit de Mme Bird au cours de ses inspections du 8 et du 12 janvier 1999. On y décrit également l'attitude prétendument entêtée de M. Noel à l'égard de M. Bill Williams, le directeur du Centre d'appel, lorsqu'il s'est rendu à nouveau chez Cogeco le 5 août 1999 pour une inspection de suivi, alors qu'il était accompagné par l'agent de sécurité Paul Danton, de DRHC. Les représentants de l'entreprise ont tenu à dire qu'ils souhaitaient que l'agent de sécurité Noel n'obtienne plus jamais la permission de revenir sur les lieux de Cogeco à l'avenir. L'entreprise demandait également que l'agent de sécurité rédige une lettre officielle d'excuses adressée à Cogeco et à Mme Bird, compte tenu de son comportement supposément inconvenant et non professionnel.

 

Enquêtes internes concernant les plaintes

 

M. Trevor Mills est le surveillant immédiat de l'agent de sécurité Rod Noel et le gestionnaire de district du district sud-ouest, de la Région de l'Ontario de DRHC. Il a déjà été signalé plus haut que M. Mills avait également été identifié dans la plainte de Cogeco, selon laquelle il avait lui aussi harcelé Mme Bird durant l'enquête de l'agent Noel. M. Mills a nié l'allégation et renvoyé cette question à son Directeur, M. Bob Howsam, aux fins d'enquête. Jusqu'à ce qu'il reçoive un exemplaire de la plainte de Cogeco adressée au ministre du Travail, M. Mills a accordé son appui à l'agent de sécurité et lui a permis de poursuivre son enquête chez Cogeco.

 

M. Mills a transmis une copie de la plainte adressée au ministre à l'agent de sécurité afin de donner à ce dernier l'occasion d'en prendre connaissance. Il a organisé une rencontre avec l'agent de sécurité le 15 octobre 1999 afin de discuter du contenu de la plainte. M. Mills a divisé la plainte en 21 points, qu'il a passés en revue de façon détaillée avec l'agent de sécurité. Ce dernier a nié toute faute et réfuté toutes les allégations formulées par Cogeco. M. Mills a néanmoins décidé de relever temporairement l'agent de sécurité de l'enquête pendant qu'il menait lui‑même sa propre enquête concernant les allégations de Cogeco. En agissant de la sorte, il estimait servir les intérêts du Programme du travail, compte tenu du mécontentement suscité par le comportement de l'agent de sécurité et du fait qu'un conflit de personnalité était vraisemblable.

 

M. Mills a alors convoqué chacun à son tour les agents de sécurité Paul Danton et Peggy Wright ainsi que l'ingénieur de protection contre les incendies Mark Kohli, étant donné que ces trois personnes avaient accompagné l'agent de sécurité Noel à divers moments au cours des inspections et avaient été en mesure de constater son comportement. L'agent Danton a dit avoir constaté certains comportements agressifs de la part de l'agent Noel au cours de l'enquête de suivi du 9 août 1999, tout en signalant que la situation s'était améliorée à mesure que la journée avançait. L'agent Wright et M. Kohli ont reconnu que les événements dont il était question dans les plaintes formulées par écrit avaient bel et bien eu lieu mais que « les situations n'étaient pas les mêmes que celles décrites par Cogeco » (Traduction). Ils étaient tous les deux favorables à la position de M. Noel et estimaient que c'était du côté de Cogeco que l'esprit de collaboration avait fait défaut.

 

Le 15 novembre 1999, M. Mills a soumis à son directeur, M. Bob Howsam, un rapport dans lequel il faisait état de ses constatations à la suite des entrevues. Il expliquait avoir limité son enquête aux rencontres susmentionnées du fait qu'il était également cité dans la plainte de Cogeco. Il déclarait en guise de conclusion que ses constatations ne permettaient pas de déterminer si les allégations pouvaient être confirmées ou non.

 

Le 19 novembre 1999, l'agent de sécurité Noel faisait savoir à M. Mills par courrier électronique qu'il continuait d'être préoccupé par l'attitude de non‑observation de Cogeco pour ce qui est des diverses infractions énumérées dans l'instruction du 19 janvier 1999, et notamment celles ayant rapport à la sécurité‑incendie. Il demandait que lui‑même ou un autre agent de sécurité, soit réaffecté au dossier de manière à pouvoir vérifier l'observation de son instruction et, le cas échéant, amorcer un processus pouvant mener à une poursuite éventuelle de Cogeco. M. Mills a par la suite rencontré l'agent de sécurité Noel pour discuter de ces questions.

 

En consultation avec M. Noel, M. Mills a alors confié à M. Paul Danton, un agent de sécurité d'expérience, la tâche de vérifier si Cogeco se conformait à l'instruction du 19 janvier 1999, notamment par rapport aux deux aspects les plus importants liés à la sécurité‑incendie qui avaient été soulevés par l'agent Noel lors de sa rencontre avec M. Mills. L'agent de sécurité Danton a rendu visite à Cogeco vers le 3 décembre 1999. Il a lors été été en mesure de confirmer dans son rapport à M. Mills que, tant pour ce qui est des questions de sécurité qu'il avait pour tâche de vérifier, que pour certaines autres questions ayant trait au SIMDUT [1] , tout était conforme à l'instruction donnée. L'agent Danton a alors mis un terme à son affectation chez Cogeco.

 

À l'occasion d'une autre rencontre avec l'agent de sécurité Noel, M. Mills a expliqué à ce dernier que, pour éviter tout conflit et pour assurer une bonne image, il était préférable que l'agent Noel ne retourne pas sur les lieux. L'agent de sécurité s'est montré insatisfait de la tournure des événements pour l'ensemble du dossier, notamment en matière de sécurité‑incendie. Il s'est inquiété également du fait qu'il ne serait bientôt plus possible d'intenter une poursuite contre Cogeco. M. Mills a permis à l'agent de sécurité de déposer un mémoire concernant une poursuite éventuelle contre Cegoco pour non‑observation. Or, il était déjà trop tard pour intenter une poursuite et la recommandation de le faire a été rejetée. M. Mills a alors informé l'agent de sécurité du fait qu'il était satisfait des efforts de Cogeco en matière d'observation de l'instruction et que, conséquemment, il allait fermer le dossier Cogeco.

 

À mesure qu'il menait son enquête, M. Mills a pu se convaincre du fait que la dynamique qui s'était installée entre Cogeco et l'agent de sécurité avait bien davantage rapport à la confrontation de perceptions subjectives qu'à des questions de sécurité. Conséquemment, M. Mills a relevé l'agent de sécurité du dossier Cogeco de façon permanente. L'agent de sécurité Noel a fait savoir qu'il tenait beaucoup à être réaffecté au dossier compte tenu du fait qu'un grand nombre d'aspects relatifs à la sécurité restaient à résoudre et que, à son avis, Cogeco continuait d'être en infraction à de nombreux égards par rapport à l'instruction qu'il lui avait donnée. L'agent de sécurité estimait, compte tenu des circonstances et du fait qu'il avait été relevé du dossier, qu'il avait le devoir de prendre une mesure décisive en s'appuyant sur le Code de manière à protéger la santé et la sécurité des employés de Cogeco et à donner suite à cette affaire. L'agent de sécurité a alors avisé M. Mills que sa suspension revenait à gêner et à entraver un agent de sécurité dans l'exercice de ses fonctions. Il a donné à M. Mills une instruction (voir l'ANNEXE).

 

Arguments à l'appui de l'employeur

 

M. Jaworski a proposé trois arguments à l'appui de sa demande d'annulation de l'instruction.

 

Il a tout d'abord soutenu que cette affaire en était une « de relations de travail et non pas une affaire ayant trait au Code du travail » (Traduction). Le Code, a-t-il soutenu, ne prévoit nullement qu'un agent de sécurité oppose des instructions à son propre gestionnaire. M. Jaworski a soutenu que le législateur, dans l'article 143 du Code, n'a jamais envisagé la situation où un agent de sécurité donnerait à son gestionnaire une instruction pour entrave à son travail. M. Jaworski a soutenu également que le Ministère n'était pas empêché de contester l'instruction de M. Noel du simple fait qu'il n'avait pas interjeté appel d'une instruction donnée antérieurement par un agent de sécurité à son gestionnaire en Colombie‑Britannique.

 

Ensuite, M. Jaworski a fait valoir que rien ne permet de croire que M. Mills a gêné ou entravé un enquête auprès de Cogeco. Selon M. Jaworski, il ressort des éléments de preuve que M. Mills :

 

  • a fait preuve de discernement avant de relever l'agent Noel de l'enquête;

  • a soutenu M. Noel au cours de l'enquête et ne l'a suspendu qu'après avoir reçu la plainte adressée au ministre;

  • a donné à M. Noel l'occasion de réagir à toutes les allégations et a rencontré ceux parmi les collègues de ce dernier qui l'ont accompagné au cours de l'enquête auprès de Cogeco de manière à obtenir leurs avis concernant les allégations;

  • a affecté un autre agent de sécurité, M. Paul Danton, de manière à ce que ce dernier fasse enquête concernant les violations les plus importantes en matière de sécurité;

  • a pris la décision de fermer le dossier à partir de renseignements selon lesquels Cogeco faisait des efforts d'observation et à partir du rapport et des observations compétentes de M. Danton, le tout confirmant que Cogeco cheminait vers la conformité.

 

M. Jaworski a ajouté que les éléments de preuve soumis par M. Kohli, ingénieur de protection contre les incendies de DRHC, lors de l'audience qui a analysé les plans de sécurité‑incendie fournis par l'agent Danton, l'ont été après le fait. Étant donné que M. Noel ne s'est pas appuyé sur cette information pour donner son instruction, on ne doit pas en tenir compte.

 

Enfin, M. Jaworski a soutenu que l'agent de sécurité était mis en cause dans cette affaire et que, de ce fait, il ne devrait pas se voir accorder les droits d'une partie. Par conséquent, les éléments de preuve présentés par son représentant, M. Hamilton, doivent être accueillis avec prudence, voire rejetés.

 

 

Mémoire à l'appui de l'employé

 

Le mémoire complet de M. Hamilton, y compris le témoignage de M. Mills, figure au dossier et ne sera pas répété ici. M. Hamilton a soutenu que « les actions de M. Mills constituent très nettement une réaction à une situation politique. La Loi sur la gestion des finances publiques n'accorde pas à M. Mills le pouvoir d'intervenir ou d'écarter les instructions d'un agent de sécurité dûment habilité. Si M. Mills avait attribué l'ensemble du dossier à un autre agent, l'agent de sécurité Noel n'aurait eu aucune raison de donner l'instruction tel qu'il l'a fait. » (Traduction) M. Hamilton a souligné que le rôle de M. Mills consistait uniquement à attribuer des dossiers et à soutenir les agents de sécurité. Il ne consiste pas à traiter lui‑même de questions touchant le Code et à intervenir par rapport aux instructions données. M. Hamilton se dit convaincu que l'article 143 du Code interdit à quiconque, y compris un gestionnaire, d'intervenir dans une enquête. En fin de compte, a déclaré M. Hamilton, « les actions de M. Mills ont permis à Cogeco de réaliser par des moyens politiques ce qu'elle ne pouvait pas faire légalement » (Traduction). M. Hamilton invite également l'Agent régional de sécurité à interpréter au désavantage de la partie adverse l'absence de M. Danton des délibérations.

 

 

Décision

 

Il s'agit dans la présente affaire de décider si l'instruction donnée par l'agent de sécurité Noel à son gestionnaire, M. Trevor Mills, est justifiée dans les circonstances. J'ai décidé que la meilleure façon d'en arriver à une détermination, compte tenu du mandat qui m'est conféré aux termes du paragraphe 146(3) du Code, consiste à faire porter mon attention sur l'instruction (voir l'ANNEXE) donnée, qui vise précisément une infraction à l'article 143 du Code canadien du travail, partie II (le Code). À cette fin, je dois répondre aux questions suivantes :

 

1. L'article 143 du Code s'applique-t-il à M. Mills?, et, le cas échéant

2. M. Mills a-t-il violé l'article 143 du Code?

 

 

 

1. L'article 143 du Code s'applique-t-il à M. Mills?

 

M. Jaworski a soutenu que cette affaire en était une de relations de travail et que je devais annuler l'instruction étant donné que l'article 143 du Code ne s'applique pas. Il est évident que, en règle générale, le rapport entre un agent de sécurité, en sa qualité d'employé de DRHC, et son gestionnaire relève clairement du domaine des relations de travail. Il est cependant prévu dans le Code que, lorsqu'un agent de sécurité exerce ses fonctions aux termes du Code, toute mesure ayant pour effet de faire obstruction ou d'entraver son travail sera visée par l'article 143 du Code. Ainsi, en conséquence directe de l'existence de l'article 143, je ne puis déterminer que cette affaire relève des relations de travail sans tout d'abord envisager l'application de l'article 143 du Code.

 

Le libellé de l'article 143 est le suivant :

 

  1. Il est interdit de gêner ou d'entraver l'action de l'agent de sécurité dans l'exercice des fonctions que lui confère la partie II ou de lui faire, oralement ou par écrit, une déclaration fausse ou trompeuse.

 

L'utilisation de « no person » (dans le libellé anglais) à l'article 143 englobe, à mon avis, toutes les personnes qui gênent ou entravent l'action de l'agent de sécurité, indépendamment de la nature de leur travail, la seule limitation de la disposition a trait au fait que l'action de gêner ou d'entraver doit avoir lieu alors que l'agent de sécurité est en train d'exercer les fonctions que lui confère le Code. Par conséquent, l'article 143 pourrait s'appliquer aux gestionnaires de l'agent de sécurité alors que cet agent de sécurité est en train d'exercer des fonctions que lui confère le Code. Il est important de le signaler. En effet, quelle que soit l'issue de l'affaire à l'étude, cette disposition semble restreindre le pouvoir du gestionnaire d'un agent de sécurité à l'exercice d'une gestion conforme au pouvoir que lui confère la Loi sur la gestion des finances publiques.

 

Que j'aie constaté ou non l’application de l'article 143 du Code au gestionnaire d'un agent de sécurité, il me faudrait, pour conclure que l'action de l'agent de sécurité a été gênée ou entravée, tenir compte du droit du gestionnaire à gérer des agents de sécurité et m'assurer que ce droit soit en harmonie avec les fonctions des agents de sécurité aux termes du Code. Je conviens donc, précisément en rapport avec l'instruction donnée, de poser la question suivante : M. Mills a-t-il violé l'article 143 du Code?

 

 

  1. M. Mills a-t-il violé l'article 143 du Code?

 

Pour déterminer si M. Mills a violé l'article 143, je dois envisager deux questions qui découlent de la disposition. Il faut tout d'abord déterminer si l'agent de sécurité Noel était dans l'exercice des fonctions que lui confère le Code lorsque son action a été gênée ou entravée, comme on le prétend. Il faut en deuxième lieu déterminer si les actions de M. Mills, dans l’exercice de ses fonctions de gestionnaire, ont été de nature à gêner ou entraver l'action de l'agent de sécurité Noel aux termes de l'article 143. Les deux questions sont interreliées et seront traitées ensemble.

 

Il est précisé à l'article 143 que certaines actions sont interdites lorsque l'agent de sécurité agit « dans l'exercice des fonctions que lui confère la partie II ». Il y a donc lieu de se demander quelles sont les fonctions de l'agent de sécurité selon la partie II du Code. Le mot « fonction » n'est pas défini dans le Code. Par conséquent, selon les règles d'interprétation, je dois m'en remettre à la définition du dictionnaire puisque le terme n'est pas défini dans la loi. Ainsi, voici comment on définit « fonction » (duty) dans l’édition 1993 du New Shorter Oxford English Dictionary : « 5 : Tâches exigées par l'entreprise, la profession ou l'activité d'une personne; le fait d'exécuter certaines activités imposées par les exigences de l'entreprise, de la profession ou du poste occupé par une personne. » La notion clé de cette définition que je retiens aux fins de l'affaire qui nous occupe est celle d'« exigences ».

 

Pour déterminer quelles sont les actions exigées d'un agent de sécurité dans l'exercices des fonctions ou des responsabilités que lui confère le Code, je m'en remettrais normalement aux dispositions du Code. Dans le cas qui nous intéresse, si l'on fait exception à l'article 140 qui prévoit que les agents de sécurité sont nommés aux fins de la partie II du Code, et de l'article 129 qui précise quels sont les devoirs de l'agent de sécurité en situation de refus de travailler, le Code reste vague sur les fonctions de l'agent de sécurité. Cependant, le Parlement a également créé le ministère du Développement des ressources humaines aux fins d'élaborer et de mettre en oeuvre les diverses politiques nécessaires à l'administration du Code par le truchement de son Programme du travail.

À cette fin, le Ministère a attribué à des personnes diverses fonctions ou responsabilités aux divers paliers du système hiérarchique. Certains énoncés de fonctions ou de responsablités pertinents à la présente affaire figurent dans les descriptions de postes des gestionnaires et des agents de sécurité.

 

Selon la description de poste du gestionnaire, l'énoncé de fonctions de M. Mills englobe notamment les aspects pertinents suivants :

 

Planifie, surveille, dirige et coordonne les activités d'enquête relatives aux plaintes et à l'application de la partie II du Code canadien du travail... en veillant notamment à :

 

  • gérer la répartition des affectations aux agents de manière à réaliser les objectifs du plan de travail;

  • surveiller l’exécution des affectations...;

  • discuter des rapports d'inspection et d'enquête avec les Agents des affaires du travail (AAT)...;

  • répartir les affectations en fonction de l'expérience, de la compétence et de l'objectivité des agents;

  • décider des mesures qui s'imposent pour mettre un terme aux infractions ou contrer tout phénomène de non-observation, y compris le fait de recommander des poursuites; (Traduction)

 

 

Selon la description de poste de l'agent de sécurité, l'énoncé de fonctions de M. Noel englobe notamment les aspects pertinents suivants :

 

Relevant du Gestionnaire de district... Fonctions

 

  • donner des instructions ou des ordres de suspension des travaux en l'absence de toute entente d'observation volontaire ou lorsque la situation l'impose (en cas de danger, par exemple);

  • surveiller la mise en oeuvre de toute entente d'observation volontaire et de toute instruction;

  • recommander au Directeur régional que des poursuites soient intentées en cas de non‑observation;

  • recueillir les renseignements pertinents et préparer un sommaire pour tout dossier à soumettre à l'examen des Services juridiques;

  • rédiger un mémoire de poursuite une fois reçue l'autorisation ministérielle d'intenter une poursuite;

  • rédiger un rapport final relatif à chaque affectation. (Traduction)

 

Il ressort clairement des énoncés de fonctions qui précèdent que le gestionnaire des agents de sécurité assume l'entière responsabilité en matière de planification, de surveillance, de direction et de coordination des affectations des agents de sécurité ou de leur réaffectation pour ce qui est des activités d'enquête et des activités d'application aux termes du Code. Ces responsabilités englobent toute la gamme des initiatives que doit prendre le gestionnaire pour que la loi soit administrée de façon correcte et efficace. Si un gestionnaire juge utile de prendre certaines initiatives précises pour réaliser les objectifs du Code, il est autorisé à le faire en vertu de la politique.

 

Pour arriver à la conclusion qu'un gestionnaire a gêné ou entravé les actions d'un agent de sécurité dans l'exercice des fonctions que lui confère le Code, il faudrait prouver que le gestionnaire a sciemment et de mauvaise foi ou en faisant preuve d'une totale indifférence à l'égard de la sécurité des employés, nui directement à un agent de sécurité qui exerçait ses fonctions conformément au Code. Une telle preuve pourrait être très difficile à établir. En effet, lorsque le gestionnaire exerce son mandat à titre de gestionnaire d'agents de sécurité, il agit dans le cadre d'un système légitime établi par le Ministère pour assurer une administration efficace de la loi. Par conséquent, nul ne peut interpréter les agissements de bonne foi d'un gestionnaire dans un tel cadre comme étant susceptibles de gêner ou d'entraver un agent de sécurité selon l'article 143 du Code. Le gestionnaire ne fait qu'assumer sa responsabilité de gérer, laquelle découle de la relation employeur‑employé qui existe entre un agent de sécurité et son gestionnaire.

 

Le rôle de l'agent de sécurité, qui relève de l'autorité de son gestionnaire est par contre, beaucoup plus circonscrit et ponctuel. Dans l'exercice de ses fonctions conformément au Code, l'agent de sécurité maîtrise la situation sur les lieux de travail sous enquête ou faisant l'objet de l'inspection du fait des pouvoirs très considérables que lui confère la loi (art. 141, art. 145). De tels pouvoirs sont censés servir à l'application du Code et viser, à peu d'exceptions près, les parties en présence sur les lieux du travail d'une façon générale. Cependant, une fois que l'agent de sécurité a mené son enquête et donné son instruction, comme l'a fait l'agent de sécurité Noel en l'occurrence, sa participation ultérieure au dossier relève de l'autorité de son gestionnaire. Par exemple, l'agent de sécurité peut contrôler l’observation de son instruction mais n'a pas le pouvoir de décider d'une poursuite. Il ne peut que recommander une poursuite au Directeur régional, représenté dans le cas qui nous intéresse par le Gestionnaire de district, M. Mills. De plus, l'agent de sécurité ne peut décider de sa propre initiative d'enquêter à nouveau sur une affaire. En effet, dans ce cas également, c'est le gestionnaire qui a le pouvoir d'agir.

 

L'agent Noel s'est jugé gêné et entravé du fait que M. Mills n'avait affecté ni lui, ni un autre agent de sécurité, à retourner chez Cogeco pour régler les cas de non‑conformité présumés en matière de sécurité et pour prendre des mesures correctives décisives au sujet des infractions encore constatées. Selon ce que prétend M. Hamilton : « Si M. Mills avait affecté le dossier complet à un autre agent, l'agent de sécurité Noel n'aurait eu aucune raison de donner l'instruction à M. Mills comme il l'a fait. » (Traduction) Cependant, le Code ne prévoit nullement qu'un agent de sécurité puisse décider d'effectuer une enquête de suivi ou d'intenter une poursuite. Comme nous l'avons vu précédemment, cette responsabilité, comme bien d'autres, a été confiée au gestionnaire de l'agent de sécurité ou à d'autres intervenants du Programme du travail. Il découle de ce qui précède que l'agent de sécurité Noel ne peut faire valoir aucun pouvoir qui lui serait conféré par rapport à ces responsabilités. Si un gestionnaire décide de fermer un dossier, en le faisant de bonne foi et après s'être satisfait, comme l'a fait M. Mills, que des mesures d'observation étaient prises, ou de réaffecter un dossier à un autre agent de sécurité, rien dans le Code ne l'empêche d'agir de la sorte.

 

À mon avis, M. Mills ne faisait qu'exercer ses responsabilités de gestionnaire lorsqu'il a confié une affectation à l'agent de sécurité Noel, lorsqu'il a exercé une surveillance sur l'état de la situation à la suite de plaintes, lorsqu'il a discuté avec l'agent de sécurité des efforts d'observation de Cogeco et, aspect le plus important, lorsqu'il a assumé la maîtrise de l'affectation en raison du fait que, à son avis, l'agent de sécurité avait perdu son objectivité dans les circonstances. M. Mills n'entretenait aucun lien avec le lieu de travail de Cogeco et n'avait rien à voir non plus avec les questions de sécurité qui concernaient Cogeco. Il n'avait aucun avantage personnel à tirer de l'issue de l'enquête de M. Noel. Il a tout simplement décidé que le temps était venu de mettre un terme à une enquête qui avait suivi son cours et qui, à son avis, ne justifiait aucune démarche supplémentaire. Il a jugé que l'agent de sécurité avait perdu son objectivité au moment où il s'est rendu compte que les rapports entre l’agent de sécurité et Cogeco prenaient une tournure antagoniste. À mon avis, M. Mills a obtenu des assurances suffisantes du fait que Cogeco faisait des progrès en matière d'observation et a donc eu raison de fermer le dossier.

 

M. Hamilton nous a livré son interprétation des actions de M. Mills. Cependant, M. Hamilton n'a jamais prouvé que les motifs de M. Mills étaient douteux, ni que ce dernier a abusé de son pouvoir. En dernière analyse, donc, M. Noel était mécontent de s'être vu retirer le dossier et n'a pas accepté la décision de son gestionnaire de le relever en permanence du dossier Cogeco en raison du fait qu'il manquait d'objectivité. L'agent de sécurité n'a pas su bien évaluer ses pouvoirs et la portée des fonctions que lui conférait le Code lorsqu'il a donné à son gestionnaire une instruction, en estimant que ce dernier l'avait gêné et entravé dans l'exercice de fonctions qui étaient les siennes à titre d'agent de sécurité conformément au Code. Cependant, à la lumière des éléments de preuve soumis dans cette affaire, je considère que M. Mills n'a pas contrevenu à l'article 143 du Code. Par conséquent, l'instruction n'est pas justifiée.

 


Pour toutes ces raisons, J'ANNULE PAR LES PRÉSENTES l'instruction donnée aux termes du paragraphe 145(1) du Code le 31 décembre 1999 par l'agent de sécurité Rod Noel à son gestionnaire, M. Trevor Mills.

 

 

Décision rendue le 27 juin 2000

 

 

 

 

 

Serge Cadieux

Agent régional de sécurité


ANNEXE

 

DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II - SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

 

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

 

Le 30 décembre 1999, l’agent de sécurité soussigné est arrivé au lieu de travail exploité par le Programme du travail de Développement des ressources humaines Canada, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail et sis au 5e ÉTAGE DU 457, RUE RICHMOND, À LONDON, EN ONTARIO, dans le but d’exercer les pouvoirs prévus au paragraphe 141(1) de la partie II du Code canadien du travail.

 

Le 15 octobre 1999, l’agent de sécurité soussigné a reçu, de son gestionnaire, Trevor Mills, l’ordre de suspendre temporairement une enquête sur des plaintes portées par les employés de Cogeco Cable Systems Inc., de Burlington, en Ontario, concernant la sécurité et la santé au travail.

 

Trevor Mills a déclaré audit agent de sécurité qu’il fallait suspendre cette enquête pendant que DRHC étudiait les plaintes déposées au cabinet de la ministre du Travail, Claudette Bradshaw, par Cogeco Cable Systems, à la suite de l’inspection dudit agent de sécurité et des instructions concernant vingt (20) infractions au Code commises entre janvier et mai 1999 que ce dernier avait données à cet employeur à la suite de cette inspection.

 

Le 30 décembre 1999, Trevor Mills a aussi ordonné audit agent de sécurité de mettre définitivement fin à ses activités visant à assurer la conformité de Cogeco et de ne plus jamais communiquer avec cet employeur ni avec aucun de ses lieux de travail.

 

Trevor Mills a aussi déclaré audit agent de sécurité que, même si l’employeur, Cogeco, avait :

 

interjeté appel des instructions puis retiré cet appel la veille du jour où il devait être entendu;

 

critiqué le processus de révision de l’agent régional de sécurité, qui aurait été le forum le plus approprié pour entendre sa plainte;

 

déclaré clairement, dans une lettre au directeur régional du Programme du travail, son intention d’enfreindre le Code;

 

critiqué les interventions de l’agent de sécurité, qui étaient pourtant conformes aux politiques et procédures publiées du Ministère;

 

ces faits n’influeraient pas sur sa décision.

-2-

 

On a aussi déclaré audit agent de sécurité qu’un projet de poursuite soumis par lui serait rejeté par le Programme du travail de DRHC.

 

Ledit agent de sécurité a déclaré à Trevor Mills que la suspension de ses activités dans ce dossier était inutile et même nuisible et l’empêchait d’exercer ses fonctions.

 

L’article 143 du Code stipule qu’ « Il est interdit de gêner ou d’entraver l’action de l’agent de sécurité dans l’exercice des fonctions que lui confère la partie II ou de lui faire, oralement ou par écrit une déclaration fausse ou trompeuse. »

 

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu du paragraphe 145(1) de la partie II du Code canadien du travail, de prendre immédiatement les mesures propres à assurer la conformité à l’article 143 de la partie II du Code canadien du travail, en permettant à l’agent de sécurité soussigné désigné par le ministre du Travail d’exercer ses fonctions.

 

Fait à London (Ontario), le 31 décembre 1999.

 

 

 

 

ROD NOEL

Agent de sécurité

no 2010

 

À : DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES CANADA

PROGRAMME DU TRAVAIL

DOMINION PUBLIC BUILDING

457, RUE RICHMOND, 5e ÉTAGE

LONDON (ONTARIO)

N6A 3E3

 

À l’attention de Trevor Mills, Gestionnaire de district


SOMMAIRE DE LA DÉCISION DE L'AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ

 

Décision no : 00-010

 

Demandeur : Trevor Mills, Gestionnaire de district

Développement des ressources humaines Canada

 

Intimé : Rod Noel

Agent de sécurité

Développement des ressources humaines Canada

 

MOTS CLÉS

 

Gêner, entraver, droit de gestion du gestionnaire, fonctions, descriptions de postes, question de relations de travail, affectations, bonne foi, mauvaise foi.

 

 

DISPOSITIONS

Code : articles 122, 129, 141, 143 et paragraphe 145(1)

Règlements : s.o.

RÉSUMÉ :

 

À la suite d'une enquête portant sur la plainte d'un employé et menée sur les lieux de travail de Cogeco, l'entreprise s'est plainte du fait que l'agent de sécurité avait exercé son autorité de façon abusive et avait été très impoli au cours de son enquête. L'entreprise a tout d'abord adressé sa plainte au gestionnaire de l'agent de sécurité, lequel a appuyé l'agent de sécurité. Elle a ensuite porté plainte officiellement au ministre du Travail. Le gestionnaire a relevé temporairement du dossier l'agent de sécurité à la suite de la plainte adressée au ministre pendant qu'il faisait lui‑même enquête. Le gestionnaire a chargé un autre agent de sécurité de vérifier si l'entreprise se conformait à l'instruction que lui avait donnée le premier agent de sécurité. Ayant pu se satisfaire du fait que l'entreprise faisait des progrès en matière d’observation, le gestionnaire a fermé le dossier. L'agent de sécurité concerné se faisait cependant insistant et estimait devoir être réaffecté au dossier pour pouvoir prendre des mesures à l'encontre de l'entreprise concernant des infractions qui, selon lui, continuaient d'être commises. Au cours de son enquête sur la question, le gestionnaire en est venu à se convaincre que les rapports entre l'entreprise et l'agent de sécurité devenaient subjectifs et antagonistes et il a donc relevé en permanence l'agent de sécurité du dossier Cogeco. Ce dernier a par la suite estimé que son gestionnaire le gênait et l'entravait dans son travail et a donné au gestionnaire une instruction de contravention à l'article 143 du Code.

 

Après avoir examiné la question, l'ARS en est arrivé à la conclusion que l'article 143 pouvait s'appliquer dans certaines circonstances exceptionnelles au gestionnaire d'un agent de sécurité. Cependant, l'ARS a estimé qu'il fallait établir la preuve d'une contravention à l'article 143 par le gestionnaire. L'ARS a jugé que les initiatives prises par le gestionnaire pour assurer l'application

-2-

 

du Code ne peuvent être interprétées comme pouvant gêner ou entraver l'action de l'agent de sécurité. L'ARS a constaté également que le Code ne précise pas, autrement que pour ce qui est du droit de refus, quelles sont les fonctions des agents de sécurité. L'ARS s'est appuyé sur la définition du dictionnaire et les descriptions de postes de l'agent de sécurité et de son gestionnaire pour déterminer quelles étaient les fonctions de l'un et de l'autre. Il a constaté que les fonctions sont attribuées à l'agent de sécurité par un gestionnaire qui a la pleine maîtrise de la gestion des affectations. Ainsi convaincu que le gestionnaire n'avait pas contrevenu à l'article 143 du Code, l'ARS a ANNULÉ l'instruction.



[1] SIMDUT : Système d'information sur les matières dangereuses utilisées au travail.

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