Tribunal de santé et sécurité au travail Canada

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Tribunal de santé et sécurité au travail Canada

 

Référence :

Caron Transportation Systems Partnership, 2012 TSSTC 14

 

 

 

 

 

Date :

2012-04-24

 

Dossier :

2011-59

 

Rendue à :

Ottawa

 

 

Entre :

 

Caron Transportation Systems Partnership, appelante

 

 

 

 

Affaire :

Appel interjeté en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail de l’instruction d’une agente de santé et de sécurité

 

Décision :

L’instruction est modifiée.

 

Décision rendue par :

M. Michael Wiwchar, agent d’appel

 

Langue de la décision :

Anglais

 

Pour l’appelante :

Mme Lilie MacInnis, responsable de la sécurité et de la conformité, Caron Transportation Systems Partnership

 




MOTIFS DE DÉCISION

 

  • [1] La présente décision concerne l’appel interjeté en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail (le Code) de l’instruction émise le 9 novembre 2011 par l’agente de santé et de sécurité (Ag. SS) Dawn MacLeod.

 

Contexte

 

  • [2] Le 1er novembre 2011, aux environs de 7 h 10 (HNR), un employé de KAL Tire, société dont les services d’entretien de pneus ont été retenus en vertu d'un contrat par Caron Transportation Systems Partnership (Caron Transportation), procédait à la pose d’un cric sous l’essieu arrière d’un camion gros porteur qui était stationné dans le coin nord-ouest de la cour de Caron Transportation.

 

  • [3] N’ayant pas remarqué la présence de l’employé de KAL Tire, un préposé de la baie de lavage employé par Caron Transportation a mis le véhicule en marche et l’a conduit jusqu’à la baie de lavage. Pendant la manœuvre, l’employé de KAL Tire a été écrasé par le véhicule et a subi des blessures non mortelles, notamment des égratignures à la fesse droite et des ecchymoses à la cheville droite.

 

  • [4] L’Ag. SS MacLeod est arrivée sur les lieux aux environs de 22 h, le jour de l’incident. Elle a commencé son enquête en compagnie d’un autre Ag. SS, arrivé peu après. Les Ag. SS ont été informés que le camion gros porteur impliqué dans l’accident, propriété de Interload Services, avait été déplacé jusqu’à la baie de lavage par l’employé de Caron Transportation pour y être lavé. L'employé ne savait pas que quelqu’un se trouvait sous le véhicule à ce moment.

 

  • [5] Le 2 novembre 2011, les Ag. SS se sont rendus au Terminal d’Edmonton de Caron Transportation pour y rencontrer le directeur du Terminal, le directeur RH, et M MacInnis, responsable de la sécurité et de la conformité. Au cours de cette rencontre, on a confirmé que l’employé de KAL Tire n’avait pas été grièvement blessé lors de l’incident. L’Ag. SS MacLeod a toutefois souligné que même si les blessures dans ce cas précis étaient somme toute mineures, l’accident aurait très bien pu se conclure par un décès.

 

  • [6] Après un examen des obligations de l’employeur en vertu du Code, effectué avec toutes les personnes présentes, M MacInnis a confirmé que Caron Transportation n’avait pas de politiques ni de procédures écrites en matière d’accès au lieu de travail. Bien que les employés de KAL Tire se présentaient au lieu de travail deux fois par jour, à peu près aux mêmes heures, pour vérifier si leurs services étaient requis, ils n’étaient alors ni surveillés ni tenus de signer de registre chaque fois qu'ils accédaient au site.

 

  • [7] L’employeur a également informé les Ag. SS que les préposés de la baie de lavage n’étaient pas obligés d’être titulaires d’un permis de conduire de classe 1 ou de classe 3 pour déplacer les véhicules sur la propriété de Caron Transportation. L’Ag. SS MacLeod a indiqué avoir discuté des exigences en matière de permis de conduire avec Alberta Occupational Health and Safety. Ces discussions ont porté sur les qualifications requises pour conduire un véhicule muni de freins pneumatiques et de certaines configurations d’essieux. Cependant, rien n’a permis de confirmer l’existence de telles exigences pour conduire un véhicule utilisé dans un lieu appartenant à un employeur.

 

  • [8] Le 7 novembre 2011, l’Ag. SS MacLeod a rédigé une Promesse de conformité volontaire (PCV) et, le lendemain, une instruction dans laquelle elle dressait quatre contraventions. Le 9 novembre 2011, l’instruction et la PCV ont été transmises à M. Williams, représentant de l’employeur.

 

  • [9] L’instruction du 9 novembre 2011 émise à Caron Transportation par l’Ag. SS MacLeod en vertu du paragraphe 145(1) du Code énumérait quatre contraventions. Elle se lit comme suit :

 

[Traduction]
DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II − SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

 

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

 

Le 1er novembre 2011, l’agente de santé et de sécurité soussignée a procédé à une enquête au lieu de travail exploité par CARON TRANSPORTATION SYSTEMS PARTNERSHIP, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis au Terminal d’Edmonton situé au 13310, 156e rue, Edmonton, Alberta, T5V 1L3, ledit lieu étant parfois connu sous le nom de Caron Transportation Systems Partnership.

 

Ladite agente de santé et de sécurité est d’avis que les dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail ont été enfreintes.

 

Contravention no 1

 

Alinéa 125(1)z.14) de la partie II du Code canadien du travail :

 

L’employeur, Caron Transportation Systems, a retenu les services d’un tiers en vertu d'un contrat pour effectuer des travaux de réparation sur les pneus de son parc de véhicules, contrat aux termes duquel l'entrepreneur se rend au lieu de travail deux fois par jour pour effectuer des travaux. Il n'y a pas de procédure ou de protocole écrits en vigueur qui permettent de vérifier que l’employeur a informé les personnes admises dans le lieu de travail de l'employeur des risques existants ou prévisibles auxquels leur sécurité est exposée.

 

Contravention no 2

 

Alinéa 125(1)w) de la partie II du Code canadien du travail et article 12.1 du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail :

 

L’employeur n’a pas veillé à ce que les travailleurs à contrat travaillant sur le lieu de travail de l'employeur utilisent un équipement de protection afin de prévenir les risques liés au déplacement des véhicules. Le 1er novembre 2011, un employé de Caron Transportation Systems a conduit un camion gros porteur à benne Western Star, soit le véhicule 1233 appartenant à Interload Services Ltd, de l’endroit où il était garé, dans le coin nord-ouest de la cour, à l’installation de lavage sur le lieu de travail de l’employeur. Un travailleur à contrat qui se trouvait sous le véhicule au moment de l’incident a subi des blessures mineures. Rien n’indiquait que des travaux étaient en cours sur le véhicule 1233 au moment de l’incident : aucune barricade et aucun avertissement n’avaient été installés pour signaler la possibilité qu’un entrepreneur soit en train de travailler sur cet équipement en particulier.

 

Contravention no 3

 

Alinéa 125(1)q) de la partie II du Code canadien du travail et alinéa 14.23(1)c) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail :

 

Le 1er novembre 2011, un préposé à la baie de lavage, employé de Caron Transportation Systems, a entrepris de déplacer un camion gros porteur à benne Western Star, soit le véhicule 1233, de l’endroit où il se trouvait, dans le coin nord-ouest de la cour de l’employeur, jusqu’à la baie de lavage. Le véhicule faisait face à l’extrémité sud de la cour. L’employé n’avait pas inspecté la zone autour du camion gros porteur à benne avant de le conduire jusqu’à la baie de lavage et il ignorait qu'un entrepreneur se trouvait sous le véhicule. L’employeur n’avait pas informé les employés qui exécutent des tâches relatives à la baie de lavage de la procédure à suivre pour conduire les véhicules qui doivent être déplacés jusqu'aux baies de lavages pour y être lavés.

 

Contravention no 4

 

Alinéa 125(1)q) de la partie II du Code canadien du travail et alinéa 14.24b) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail :

 

Les employés embauchés à titre de préposés à la baie de lavage doivent déplacer divers véhicules avec roues tandem ou tridem et des véhicules Super B, de la cour à la baie de lavage pour qu'ils y soient lavés. L’employeur n’exige pas que ces employés soient titulaires d’un permis de conduire à jour et valide (classe 1, classe 3, etc., pour une configuration d’essieux particulière), ce qui n'est pas conforme à la réglementation provinciale et aux exigences relatives aux conducteurs fournies par le fabricant.

 

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l'alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail, de cesser toute contravention au plus tard le 30 novembre 2011.

 

De plus, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)b) de la partie II du Code canadien du travail, de prendre, au plus tard dans le délai imparti par l’agente de santé et de sécurité, les mesures pour empêcher la continuation de la contravention ou sa répétition.

 

Fait à Edmonton, ce 9e jour de novembre 2011.

 

 

Dawn MacLeod

Agente de santé et de sécurité

Certificat : ON6951

 

  • [10] Les trois premières contraventions énumérées dans l’instruction portent sur l’information donnée aux entrepreneurs qui travaillent au lieu de travail de l’employeur, et sur le déplacement de véhicules par les employés de Caron Transportation dans des situations où, à leur insu, des entrepreneurs travaillaient sous le véhicule. Ces trois constats ne sont pas visés par le présent appel.

 

  • [11] Le 25 novembre 2011, Caron Transportation en a appelé au présent Tribunal de l’instruction du 9 novembre 2011 relativement à la contravention nº 4, et a déposé une demande de suspension de la mise en œuvre de l'instruction. Outre la demande écrite de suspension, M MacInnis et M. Pattison, vice-président, Opérations, ont participé à une audience téléphonique le 30 novembre 2011 avec l’agent d’appel Douglas Malanka. Une deuxième audience téléphonique a eu lieu le 1 décembre 2011. La suspension de la mise en œuvre de l’instruction relative à la quatrième contravention a été accordée par l’agent d’appel Malanka le 2 décembre 2011, en attendant que le fond de l’affaire soit entendu et qu’une décision soit rendue par un agent d’appel.

 

Question en litige

 

  • [12] Je dois déterminer si l’Ag. SS MacLeod a erré en donnant à Caron Transportation une instruction alléguant une contravention en vertu de l’alinéa 125(1)q) du Code et, par le fait même, de l’alinéa 14.24b) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail (le Règlement), pour violation des exigences législatives de l’Alberta en matière de permis de conduire pour l’équipement décrit à la contravention nº 4 de l’instruction.

 

Observations de l’appelante

 

  • [13] L’appelante a fait valoir que l’article 51de la loi intitulée Traffic Safety Act de l’Alberta, qui traite des permis de conduire, s’applique aux conducteurs de véhicules automobiles lorsqu’ils sont sur la voie publique, et non pas à ses employés lorsqu’ils conduisent un véhicule sur la propriété privée de Caron Transportation exclusivement. Elle en conclut qu’il n’est pas nécessaire que ces conducteurs en particulier soient titulaires d’un permis de conduire à jour et valide.

 

  • [14] L’appelante a soumis que le personnel qui travaille dans la cour de Caron Transportation ne quitte jamais la propriété privée de l’employeur, et qu’il ne se déplace pas sur la voie publique dans un véhicule dont la conduite exige un permis de classe 1 ou de classe 3. Elle affirme que la distance des déplacements des véhicules sur la propriété de l’employeur n’est jamais supérieure à un kilomètre, et que lesdits déplacements se font toujours à basse vitesse (environ 15 kilomètres à l’heure). L’appelante a ajouté que les cours dans lesquelles sont conduits les véhicules ne sont pas accessibles au public et que des panneaux de mise en garde, portant les mentions [Traduction] « AVIS : Personnel autorisé seulement » et [Traduction] « Tous les visiteurs doivent s’inscrire au bureau », sont affichés à tous les points d’accès. Les barrières de la cour ne sont ouvertes que pendant les heures de travail et il faut une carte-clé pour les franchir en dehors de ces heures.

 

  • [15] L’appelante a fait remarquer que le rapport de l’Ag. SS renvoie à une discussion que celle-ci a eue avec le fabricant du véhicule impliqué dans l’incident. L'Ag. SS a été informée qu’il faut être titulaire d’un permis de classe 1 pour conduire ce type de véhicules, puisqu’ils sont munis de freins pneumatiques et que de tels freins exigent que l’on suive une procédure précise avant de pouvoir les utiliser. L’appelante a soutenu que cette recommandation du fabricant ne concerne que les personnes qui conduisent ces véhicules sur la voie publique et que l’avis du fabricant ne constitue pas une obligation juridique.

 

  • [16] L’appelante a affirmé qu’après avoir reçu l’instruction, Caron Transportation a adopté un ensemble de mesures visant à assurer la sécurité de ses employés et de toutes les personnes qui ont accès à son lieu de travail. En résumé, Caron Transportation a élaboré un nouveau type de formation pratique pour les employés, dans lequel est documentée la formation qu’ils reçoivent d’un superviseur qualifié de leur équipe. Cette étape est suivie d’un cours de conduite des véhicules dans la cour, d’un test de compétences et d’un examen de conduite pratique. L’appelante a assuré que l’employeur donnera une nouvelle formation à ses employés actuels, de la manière décrite ci-dessus, et qu'il formera pareillement tous les nouveaux employés. Qui plus est, l’employeur a embauché un consultant indépendant en gestion des risques, dont la tâche consiste à étudier l’ensemble des descriptions de tâches, des procédures, de la formation et des évaluations des risques, pour en vérifier l’efficacité et la conformité à toutes les exigences législatives.

 

Analyse

 

  • [17] Afin de déterminer si la quatrième contravention dans l’instruction de l’Ag. SS à l’employeur datée du 9 novembre 2011 était bien fondée, je dois décider de la nature de l’obligation prévue à l’alinéa 14.24b) du Règlement.

 

  • [18] Par souci de commodité, je reproduis les exigences législatives et réglementaires en cause, soit l’alinéa 125(1)q) du Code et l’alinéa 14.24b) du Règlement, qui se lisent comme suit :

 

Code canadien du travail :


125(1) Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève :

[...]

q) d’offrir à chaque employé, selon les modalités réglementaires, l’information, la formation, l’entraînement et la surveillance nécessaires pour assurer sa santé et sa sécurité;

 

 

Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail :

 

14.24 L’employeur ne peut obliger un employé à manœuvrer un appareil de manutention motorisé ou manuel que si cet employé, à la fois :

[...]

b) détient un permis d’opérateur délivré par une province, dans les cas où les lois de la province où l’appareil est utilisé l’exigent. [Je souligne.]

 

  • [19] La loi provinciale applicable en l’espèce est la loi intitulée Traffic Safety Act de l’Alberta. L’article 51 de la Traffic Safety Act énonce l’obligation générale pour quiconque de détenir un permis de conduire valide pour conduire un véhicule automobile sur la voie publique.

 

[Traduction]
Permis de conduire

 

51 À moins que cela ne soit autrement permis en vertu de la présente loi, nul ne peut :

  • (a) conduire un véhicule automobile sur une voie publique, sauf si cette personne est titulaire d’un permis de conduire valide;

  • (b) conduire un véhicule automobile sur une voie publique, sauf si la classe du permis dont cette personne est titulaire l’autorise à conduire un véhicule de la classe ou du type du véhicule en question;

 

  • [20] En ce qui concerne la conduite d’un véhicule muni de freins pneumatiques, l’article 27 du règlement intitulé Operator Licensing and Vehicle Control Regulation de l’Alberta, pris en vertu de la Traffic Safety Act, exige que le conducteur soit titulaire d’un permis de classe 1 ou de l’une des équivalences suivantes :

 

[Traduction]
Freins pneumatiques

 

27 Nul ne peut conduire un véhicule automobile muni de freins pneumatiques, sauf si cette personne :

  • (a) est titulaire d’un permis de conduire de classe 1;

  • (b) est titulaire d’un permis de conduire de classe 2, 3, 4 ou 5 approuvé par le Registraire et autorisant la conduite d’un véhicule automobile muni de freins pneumatiques;

  • (c) est titulaire d’un permis de conduire de classe 2, 3, 4 ou 5 et que le véhicule automobile est un véhicule agricole de classe 2 assujetti au sous-alinéa 77(1)b)(ii);

  • (d) apprend à conduire un véhicule automobile muni de freins pneumatiques et que cette personne et son superviseur se conforment à l’article 31.

 

  • [21] À la lumière de ces deux articles, on pourrait interpréter le régime albertain de conduite et d’immatriculation des véhicules automobiles comme restreignant complètement la conduite sans permis d’un véhicule muni de freins pneumatiques, qu’un tel véhicule soit conduit sur la voie publique ou non. Cependant, je ne suis pas convaincu que ce soit nécessairement le cas. Même si l’article 27 du Operator Licensing and Vehicle Control Regulation ne précise pas si un permis de classe 1 ou une équivalence est obligatoire pour conduire un véhicule muni de freins pneumatiques, en tout lieu ou seulement sur la voie publique, on ne devrait pas interpréter cet article indépendamment de l’article 51 de la Traffic Safety Act.

  • [22] La Traffic Safety Act de l’Alberta et le règlement pris en vertu de celle-ci forment un seul régime. Par conséquent, ce règlement doit être interprété conformément aux exigences générales de sa loi habilitante, la Traffic Safety Act. À cet égard, l’article 27 du Operator Licensing and Vehicle Control Regulation devrait être considéré comme un complément des exigences établies à l’alinéa 51b) de la Traffic Safety Act, qui interdit à quiconque de conduire un véhicule automobile sur la voie publique sans le permis de conduire approprié.

 

  • [23] Une telle interprétation me semble compatible avec d’autres lois provinciales imposant des exigences en matière de permis conduire pour les véhicules automobiles. Le paragraphe 32(1) du Code de la route de l’Ontario, sous la rubrique « Permis de conduire », énonce :

 

32(1) Nul ne doit conduire un véhicule automobile sur une voie publique à moins que ce véhicule automobile n’appartienne à une catégorie de véhicules automobiles pour laquelle la personne est titulaire d’un permis de conduire délivré en vertu de la présente loi. [Je souligne.]

 

La définition de « voie publique » [« highway »] est donnée au paragraphe 1(1) de la loi ontarienne.

 

1(1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

[...]

« voie publique » S’entend notamment d’une route ordinaire ou d’une voie publique, d’une rue, d’une avenue, d’une allée, d’un boulevard, d’une place, d’un pont, d’un viaduc ou d’un pont sur chevalets dont une partie quelconque est prévue pour le passage de véhicules ou utilisée par le public à cette fin. Est incluse dans la présente définition la zone comprise entre les limites latérales de propriété de ces ouvrages.
[Je souligne.]

 

  • [24] Dans la même veine, au Nouveau-Brunswick, le paragraphe 78(1) de la Loi sur les véhicules à moteur stipule :

 

78(1) Sauf les personnes expressément exemptées ou autorisées en vertu de la présente loi, nul ne doit conduire un véhicule à moteur ni un tracteur agricole sur une route de la province à moins d’avoir un permis valide délivré en application des dispositions de la présente loi. [Je souligne.]

 

La loi néo-brunswickoise définit le mot « route » [« highway »] à son article 1.

 

1 Dans la présente loi

[...]

« route » désigne toute la largeur comprise entre les lignes de démarcation de chaque rue, chemin, voie, passage, parc, terrains de stationnement, ciné-parcs, cour d’école, terrains de pique-nique, plage, et les chemins d’hiver permettant de traverser sur la glace ou place lorsqu’une partie quelconque de ces lieux est utilisée par le public pour le passage ou le stationnement des véhicules et comprend aussi les ponts qui s’y trouvent et, à moins que le contexte ne l’indique autrement ou à moins que le renvoi ne soit contenu dans une disposition qui est en conflit avec une disposition de la Loi sur la Société de voirie du Nouveau-Brunswick, une route qui est sous l’administration et le contrôle de la Société de voirie du Nouveau-Brunswick ou d’un gérant de projet;
[Je souligne.]

 

  • [25] Au Québec, l'article 60.2 du Code de la sécurité routière, au Titre II, « Permis relatifs à la conduite des véhicules routiers », stipule expressément que les exigences en matière de permis s'appliquent sur les chemins accessibles au public [« highway ] :

60.2 Les dispositions du présent titre sont applicables sur les chemins publics, sur les chemins soumis à l’administration du ministère des Ressources naturelles et de la Faune ou entretenus par celui-ci, sur les chemins privés ouverts à la circulation publique des véhicules routiers ainsi que sur les terrains de centres commerciaux et autres terrains où le public est autorisé à circuler.

 

  • [26] Pas plus que la Traffic Safety Act de l’Alberta, aucune de ces lois provinciales ne restreint explicitement la conduite sans permis d’un véhicule en dehors d’une voie publique, d’un chemin privé ou d’une propriété privée accessible au public. Par conséquent, je dois maintenant déterminer si le terrain de Caron Transportation correspond à la définition légale d’une voie publique.

 

  • [27] Tout comme c’est le cas pour les définitions données dans les trois lois provinciales citées ci-dessus, la définition de « voie publique » [« highway »] de la Traffic Safety Act de l’Alberta se caractérise par la dimension de l’accessibilité au public. L’alinéa 1(1)p) de la Traffic Safety Act donne la définition suivante d’une voie publique.

 

[Traduction]
1(1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

[...]

(p) « voie publique » désigne toute voie de circulation, rue, route, piste, avenue, promenade, entrée, ruelle, allée, place, passerelle, chaussée, ainsi que tout viaduc, pont sur chevalets ou autre lieu, ou une partie de ceux-ci, de propriété publique ou privée et que le public est habituellement autorisé à utiliser pour le passage ou le stationnement de véhicules, et comprend :

(i) un trottoir, y compris un boulevard adjacent au trottoir;

(ii) en présence d’un fossé longeant parallèlement la voie publique, ledit fossé;

(iii) en cas de droit de passage entre des clôtures ou entre une clôture et un côté de la chaussée, tout le terrain se trouvant entre les clôtures, ou tout le terrain se trouvant entre la clôture et le bord de la chaussée, selon le cas, à l’exclusion de tout autre lieu décrété par règlement comme n’étant pas une voie publique;

 

  • [28] Comme il a été mentionné ci-dessus, l’appelante fait valoir dans ses observations que la cour au lieu de travail de Caron Transportation, dans laquelle sont conduits des véhicules de classe 1 ou de classe 3, n’est pas accessible au public. La cour est clôturée et n’est ouverte que pendant les heures de travail. L’accès après les heures normales de travail se fait au moyen d’une carte-clé. Des panneaux « AVIS : Personnel autorisé seulement » sont installés à tous les points d’accès. En outre, l’appelante affirme que tous les visiteurs de la propriété de Caron Transportation doivent s’inscrire au bureau avant de pénétrer sur les lieux. Ce bureau accessible au public est situé à l’extérieur de la cour clôturée et est doté de son propre terrain de stationnement et de son propre accès à la voie publique.

 

  • [29] Qui plus est, il convient de noter que l’Ag. SS affirme dans son rapport que même les Transportation Safety Services de l’Alberta ont été incapables de donner une réponse définitive quant à savoir si les exigences en matière de permis de conduire pour un véhicule de classe 1 s’appliquent lorsqu’un tel véhicule est conduit sur la propriété privée d’une entreprise.

 

  • [30] À la lumière de ces faits, il m’apparaît évident que la cour se trouvant sur la propriété privée de Caron Transportation ne s’inscrit pas dans la notion d’accessibilité au public qui caractérise la définition légale d’une voie publique dans la Traffic Safety Act de l’Alberta. Ainsi, les exigences de l’article 51 de la Traffic Safety Act quant au fait de devoir être titulaire d’un permis pour conduire pour un véhicule muni de freins pneumatiques sur une voie publique ne s’étendent pas à l’activité consistant à déplacer un tel véhicule sur une propriété privée à des fins d’entretien ou de lavage, pourvu que la propriété ne soit pas accessible au public.

 

  • [31] Par conséquent, je conclus que Caron Transportation n’a pas enfreint la législation albertaine en matière de permis de conduire en ce qui concerne l’équipement précisé à la contravention nº 4 dans l'instruction et, par conséquent, l’employeur n’a donc pas contrevenu à l’alinéa 125(1)q) du Code ni à l’alinéa 14.24b) du Règlement.

 

  • [32] Quant à la question du renvoi par l’Ag. SS aux recommandations du fabricant concernant les exigences relatives à la conduite des véhicules qu’il fabrique, je souscris à l’opinion de l’appelante : ces recommandations n’entraînent aucune obligation juridique pour Caron Transportation.

 

  • [33] Néanmoins, soulignons que l’appelante, dans ses observations, a indiqué que si cela était jugé nécessaire, Caron Transportation serait disposée à demander à tous ses employés qui conduisent un véhicule muni de freins pneumatiques et qui sont uniquement titulaires d’un permis de conduire de classe 5 qu'ils soient tenus d’obtenir un certificat « Q » du Registraire d’Alberta Transportation, qui autorise la conduite d’un tel équipement sans avoir à être titulaire d’un permis de conduire de classe 1 ou 3. On peut obtenir un tel certificat après avoir suivi un cours théorique de six heures et un cours pratique d’une heure sur les freins pneumatiques, suivis d’un court examen de 25 questions. Toutefois, étant donné que la disposition concernant le certificat de conduite se répète à l’article 27 du Operator Licensing and Vehicle Control Regulation, j’adopte pour le certificat « Q » le même raisonnement que celui adopté pour le permis de classe 1 et, par conséquent, je conclus à l’inexistence d’une telle obligation pour l’employeur.

 

  • [34] Néanmoins, étant donné le faible fardeau que cela imposerait à la société et au personnel de la cour, je suggère fortement à Caron Transportation d’adopter une politique afin que tous ses employés soient tenus d'avoir un certificat « Q » pour conduire un véhicule muni de freins pneumatiques. À mon avis, une telle mesure cadrerait parfaitement avec l’esprit général du Code énoncé à l’article 122.1, soit prévenir les accidents et les maladies liées à l’occupation d’un emploi.

 

Décision

 

  • [35] Pour ces motifs et en vertu du pouvoir que me confère l’alinéa 146.1 (1)a) du Code, je modifie par les présentes l’instruction émise par l’Ag.SS MacLeod le 9 novembre 2011 et je supprime la contravention nº 4, conformément à l’instruction annexée à la présente décision.

 

 

 

Michael Wiwchar

Agent d’appel


 

 

 

 

 

ANNEXE

 

DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II − SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

 

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

 

Le 1er novembre 2011, l’agente de santé et de sécurité Dawn MacLeod a procédé à une enquête au lieu de travail exploité par CARON TRANSPORTATION SYSTEMS PARTNERSHIP, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis au Terminal d’Edmonton situé au 13310, 156e rue, Edmonton, Alberta, T5V 1L3, ledit lieu étant parfois connu sous le nom de Caron Transportation Systems Partnership.

 

Ladite agente de santé et de sécurité est d’avis que les dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail ont été enfreintes.

 

Contravention no 1

 

Alinéa 125(1)z.14) de la partie II du Code canadien du travail :

 

L’employeur, Caron Transportation Systems, a retenu les services d’un tiers en vertu d'un contrat pour effectuer des travaux de réparation sur les pneus de son parc de véhicules, contrat aux termes duquel l'entrepreneur se rend au lieu de travail deux fois par jour pour effectuer des travaux. Il n'y a pas de procédure ou de protocole écrits en vigueur qui permettent de vérifier que l’employeur a informé les personnes admises dans le lieu de travail de l'employeur des risques existants ou prévisibles auxquels leur sécurité est exposée.

 

Contravention no 2 :

 

Alinéa 125(1)w) de la partie II du Code canadien du travail et article 12.1 du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail :

 

L’employeur n’a pas veillé à ce que les travailleurs à contrat travaillant sur le lieu de travail de l'employeur utilisent un équipement de protection afin de prévenir les risques liés au déplacement des véhicules. Le 1er novembre 2011, un employé de Caron Transportation Systems a conduit un camion gros porteur à benne Western Star, soit le véhicule 1233 appartenant à Interload Services Ltd, de l’endroit où il était garé, dans le coin nord-ouest de la cour, à l’installation de lavage sur le lieu de travail de l’employeur. Un travailleur à contrat qui se trouvait sous le véhicule au moment de l’incident a subi des blessures mineures. Rien n’indiquait que des travaux étaient en cours sur le véhicule 1233 au moment de l’incident : aucune barricade et aucun avertissement n’avaient été installés pour signaler la possibilité qu’un entrepreneur soit en train de travailler sur cet équipement en particulier.

 

 

Contravention no 3 :

 

Alinéa 125(1)q) de la partie II du Code canadien du travail et alinéa 14.23(1)c) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail :

 

Le 1er novembre 2011, un préposé à la baie de lavage, employé de Caron Transportation Systems, a entrepris de déplacer un camion gros porteur à benne Western Star, soit le véhicule 1233, de l’endroit où il se trouvait, dans le coin nord-ouest de la cour de l’employeur, jusqu’à la baie de lavage. Le véhicule faisait face à l’extrémité sud de la cour. L’employé n’avait pas inspecté la zone autour du camion gros porteur à benne avant de le conduire jusqu’à la baie de lavage et il ignorait qu'un entrepreneur se trouvait sous le véhicule. L’employeur n’a pas informé les employés qui exécutent des tâches relatives à la baie de lavage de la procédure à suivre pour conduire les véhicules qui doivent être déplacés jusqu'aux baies de lavages pour y être lavés.

 

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail, de cesser toute contravention au plus tard le 30 novembre 2011.

 

De plus, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)b) de la partie II du Code canadien du travail, de prendre, au plus tard dans le délai imparti par l’agente de santé et de sécurité, les mesures pour empêcher la continuation de la contravention ou sa répétition.

 

Instruction modifiée à Ottawa, Ontario, ce 24e jour d’avril 2012.

 

 

 

 

Michael Wiwchar

Agent d’appel

 

 

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