Code canadien du travail, Parties I, II et III

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Motifs de décision

Grain and General Services Union (SIDM - Canada),

requérant,

et


Viterra inc.,

employeur.

Dossier du Conseil : 28978-C

Référence neutre : 2012 CCRI 633

Le 9 mars 2012

Le Conseil canadien des relations industrielles (le Conseil) était composé de Me Graham J. Clarke, Vice-président, ainsi que de MM. André Lecavalier et Norman Rivard, Membres.

Les présents motifs de décision ont été rédigés par Me Graham J. Clarke.

Représentants des parties au dossier
M. Hugh J. Wagner, pour le Grain and General Services Union (SIDM – Canada);
Me Chantel T. Kassongo, pour Viterra inc.

I – Nature de la demande

[1] L’article 16.1 du Code canadien du travail (Partie I – Relations du travail) (le Code) prévoit que le Conseil peut trancher toute affaire ou question dont il est saisi sans tenir d’audience. Ayant pris connaissance de tous les documents au dossier, le Conseil est convaincu que la documentation dont il dispose lui suffit pour trancher la présente demande d’accréditation sans tenir d’audience.

[2] Le 29 septembre 2011, le Conseil a reçu du Grain and General Services Union (SIDM – Canada) (le GSU) une demande d’accréditation visant une unité de négociation composée d’employés travaillant à une fabrique d’aliments exploitée par Viterra inc. (Viterra) :

tous les employés travaillant à la fabrique d’aliments de Viterra, à Chilliwack (C.-B.), à l’exclusion des employés de bureau, des directeurs adjoints et de ceux de niveau supérieur.

(traduction)

[3] Le GSU a estimé qu’il y avait 42 employés dans l’unité, qu’il a décrite comme englobant les employés de production et d’entretien.

[4] Viterra a contesté l’unité proposée par le GSU, et a milité en faveur d’une unité plus grande qui comprendrait, entre autres, les employés de bureau. L’unité proposée par Viterra porterait le nombre d’employés de l’unité de négociation à environ 76.

[5] Le Conseil a examiné les observations des parties ainsi que les dispositions applicables du Code. Le Conseil a décidé d’accréditer le GSU pour le type d’unité qu’il avait proposé. Le 16 février 2012, le Conseil a rendu son ordonnance d’accréditation (ordonnance no 10143-U).

[6] Le Conseil a indiqué aux parties que, exceptionnellement, il leur fournirait des motifs plus détaillés concernant sa décision d’accorder l’accréditation. Voici ces motifs.

II – Contexte

[7] Viterra oeuvre dans l’industrie de la manutention des grains et dans l’agro-industrie. Elle exploite une entreprise mondiale. La fabrique d’aliments de Chilliwack (la fabrique) produit, vend et distribue des produits d’alimentation pour animaux ainsi que des nutriments pour l’industrie des productions animales et pour celle d’aliments pour animaux de compagnie. La fabrique fait partie des activités de transformation de Viterra au Canada.

[8] Le GSU a présenté une demande d’accréditation pour représenter les employés de production et d’entretien de la fabrique. Viterra a contesté l’habileté à négocier collectivement de l’unité de négociation proposée par le GSU et a soutenu que l’unité devrait inclure les employés de bureau et le personnel administratif (y compris le personnel des ventes) ainsi que les directeurs adjoints (y compris le personnel de surveillance).

[9] Dans des observations détaillées, Viterra a soutenu qu’une unité composée de tous les employés serait souhaitable pour son installation. La fabrique est une installation fortement intégrée, et une division inutile des employés dans plusieurs unités de négociation ne permettrait pas d’avoir une négociation collective efficace.

[10] Viterra a renvoyé à ses autres unités de négociation que le Conseil avait accréditées. Ces unités ont une portée générale et englobent souvent tous les employés qui travaillent à une installation précise. Selon Viterra, l’historique des relations de négociation entre Viterra et le GSU a démontré la nécessité d’avoir une seule unité qui englobe tous les employés de la fabrique.

[11] Viterra a ensuite fait valoir que les personnes qui occupent les postes de directeur adjoint et de surveillant de l’entretien sont des employés de première ligne qui n’ont aucun pouvoir d’embaucher ou de congédier. Ils devraient donc aussi être inclus dans l’unité de négociation.

[12] Le GSU a insisté sur le fait qu’il s’agit de la première demande d’accréditation pour un groupe d’employés de la fabrique. Il a rappelé au Conseil qu’un des facteurs importants dont il faut tenir compte pour décider s’il y a lieu d’accréditer une unité de négociation est de donner accès à la négociation collective. Le GSU a soutenu que, bien qu’il représente de grandes unités de négociation qui englobent tous les employés de Viterra, un grand nombre de ces unités sont issues de fusions réalisées au fil des années.

[13] Le GSU a également souligné que le rôle du Conseil à l’égard d’une demande d’accréditation est d’examiner si l’unité qu’il a proposée était habile à négocier collectivement; la question n’était pas de savoir quelle serait l’unité la plus habile à négocier collectivement.

[14] Après avoir reçu le rapport de l’agent des relations industrielles (l’ARI), les parties ont chacune présenté des renseignements supplémentaires. Cela a entraîné la formulation de diverses descriptions de l’unité de négociation proposée par chaque partie. Malgré ces descriptions contradictoires, le Conseil est convaincu que le GSU avait toujours cherché à représenter les employés de production et d’entretien de la fabrique. Viterra, quant à elle, avait soutenu que l’unité devrait inclure tous les employés, comme les employés de bureau et le personnel des ventes, sous réserve uniquement de l’exclusion des personnes qui ne sont pas des employés en vertu du Code.

III – Analyse et décision

i) Le cadre juridique

[15] La présente demande d’accréditation visant des employés au service de la fabrique relève de la compétence du Conseil en raison de la déclaration qui se trouve à l’article 76 de la Loi sur la Commission canadienne du blé, L.R.C. (1985), ch. C-24 :

76. Sans préjudice de la portée générale de toute déclaration faite dans le cadre de la Loi sur les grains du Canada et portant que des silos constituent des ouvrages à l’avantage général du Canada, les minoteries, les fabriques ou entrepôts d’aliments pour les animaux et les stations de nettoiement des semences, actuels – notamment ceux qui figurent à l’annexe – et futurs, constituent collectivement et séparément des ouvrages à l’avantage général du Canada.

[16] L’alinéa 2h) du Code renvoi expressément à de telles déclarations :

2. Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

« entreprises fédérales » Les installations, ouvrages, entreprises ou secteurs d’activité qui relèvent de la compétence législative du Parlement, notamment :

...

h) les ouvrages ou entreprises qui, bien qu’entièrement situés dans une province, sont, avant ou après leur réalisation, déclarés par le Parlement être à l’avantage général du Canada ou de plusieurs provinces;

[17] Comme cela a été examiné par le Conseil dans la décision Coastal Shipping Limited, 2005 CCRI 309 (Coastal 309), l’article 28 du Code énonce le cadre analytique utilisé pour les demandes d’accréditation :

28. Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, le Conseil doit accréditer un syndicat lorsque les conditions suivantes sont remplies :

  1. il a été saisi par le syndicat d’une demande d’accréditation;
  2. il a défini l’unité de négociation habile à négocier collectivement;
  3. il est convaincu qu’à la date du dépôt de la demande, ou à celle qu’il estime indiquée, la majorité des employés de l’unité désiraient que le syndicat les représente à titre d’agent négociateur.

[18] Le Conseil examinera d’abord les trois éléments énoncés à l’article 28 :

  1. la demande d’accréditation;
  2. l’unité de négociation;
  3. l’appui au syndicat.

a) La demande d’accréditation (alinéa 28a))

[19] Le requérant qui présente une demande d’accréditation doit répondre à la définition du terme « syndicat », énoncée à l’article 3 du Code :

3.(1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente partie.

...

« syndicat » Association – y compris toute subdivision ou section locale de celle-ci – regroupant des employés en vue notamment de la réglementation des relations entre employeurs et employés.

[20] Le GSU est un syndicat qui existe depuis longtemps et qui détient de nombreuses ordonnances rendues par le Conseil. Il est indiscutable que le GSU continue d’être un syndicat au sens du Code.

[21] Le paragraphe 24(1) du Code confirme que le syndicat présente initialement la description de l’unité pour laquelle il sollicite l’accréditation :

24.(1) Sous réserve des autres dispositions du présent article et des règlements d’application de l’alinéa 15e), un syndicat peut solliciter l’accréditation à titre d’agent négociateur d’une unité qu’il juge habile à négocier collectivement.

(c’est nous qui soulignons)

[22] Le GSU a demandé l’accréditation d’une unité d’employés de production et d’entretien, même s’il y a d’autres types d’employés qui travaillent à la fabrique.

b) L’unité de négociation (alinéa 28b))

[23] La majorité des questions que le Conseil examine dans les demandes d’accréditation sont soulevées à cette étape de l’analyse.

i) Le statut d’employé

[24] Pour être incluse dans une unité de négociation, une personne doit être un « employé » au sens de l’article 3 du Code :

3.(1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente partie.

...

« employé » Personne travaillant pour un employeur; y sont assimilés les entrepreneurs dépendants et les agents de police privés. Sont exclus du champ d’application de la présente définition les personnes occupant un poste de direction ou un poste de confiance comportant l’accès à des renseignements confidentiels en matière de relations du travail..

(c’est nous qui soulignons)

[25] L’article 3 du Code donne des définitions précises des expressions « entrepreneur dépendant » et « agent de police privé », telles qu’elles sont utilisées dans la définition du terme « employé ». Ces expressions ne sont pas pertinentes pour la présente demande d’accréditation du GSU.

[26] Le Code ne définit pas davantage ce que sont « les personnes occupant un poste de direction » ou celles occupant « un poste de confiance comportant l’accès à des renseignements confidentiels en matière de relations du travail ». Dans sa jurisprudence, le Conseil a examiné et interprété ces concepts en profondeur.

[27] Si le Conseil est convaincu qu’une personne « occupe un poste de direction » ou est visée par l’exception voulant qu’elle occupe un « poste de confiance comportant l’accès à des renseignements confidentiels », alors cette personne n’est pas un employé au sens du Code. De telles personnes ne peuvent pas être incluses dans une unité de négociation. Comme cela sera examiné plus loin, le Code établit une distinction entre des personnes « occupant un poste de direction » et des « surveillants ».

[28] La question de savoir si une personne « occupe un poste de direction » ou si elle est visée par l’exception voulant qu’elle occupe un « poste de confiance comportant l’accès à des renseignements confidentiels » est aussi une question séparée de l’analyse ultérieure portant sur les « employés » qui seront inclus dans l’unité de négociation ou qui en seront exclus.

ii) La description de l’unité de négociation

[29] Le Conseil, quoiqu’il examine l’unité de négociation proposée par le syndicat, a ultimement le pouvoir de déterminer l’unité qui est habile à négocier collectivement :

27.(1) Saisi par un syndicat, dans le cadre de l’article 24, d’une demande d’accréditation pour une unité que celui-ci juge habile à négocier collectivement, le Conseil doit déterminer l’unité qui, à son avis, est habile à négocier collectivement.

(c’est nous qui soulignons)

[30] Le Conseil examine ce qui constitue une unité de négociation habile à négocier collectivement; il ne détermine pas l’unité la plus habile à négocier collectivement (voir, de manière générale, Alberta Government Telephones Commission (1989), 76 di 172 (CCRT no 726)).

[31] L’article 16 du Code met aussi l’accent sur le pouvoir du Conseil à l’égard des unités de négociation :

16. Le Conseil peut, dans le cadre de toute affaire dont il connaît :

...

p) trancher, dans le cadre de la présente partie, toute question qui peut se poser à l’occasion de la procédure, et notamment déterminer :

...

(v) si un groupe d’employés constitue une unité habile à négocier collectivement...

(c’est nous qui soulignons)

[32] La détermination des descriptions des unités de négociation, qui est une question de fait et non une question de droit, est au coeur des connaissances spécialisées des relations du travail du Conseil (voir la décision Coastal 309, précitée, au paragraphe 27).

[33] Lorsqu’un syndicat présente une demande d’accréditation, le Conseil, en se fondant sur son expérience en matière de relations du travail, examine la question de savoir si l’unité proposée « constitue une unité habile à négocier collectivement », au sens où cette expression est utilisée au sous-alinéa 16p)(v) du Code.

[34] Dans la décision BCT.TELUS, 2000 CCRI 73, le Conseil a expliqué de manière générale l’analyse qu’il fait pour déterminer la composition d’unités de négociation. L’analyse est différente selon qu’il s’agisse d’une demande d’accréditation initiale ou d’une demande de révision d’unités de négociation en vertu de l’article 18.1 du Code :

[17] Le Conseil a élaboré des critères et des principes bien établis dont il tient compte lorsqu’il doit déterminer si une unité est habile à négocier collectivement ou lorsqu’il doit réviser et restructurer des unités de négociation existantes. À cet égard, il tient compte d’un certain nombre de facteurs et évalue le poids à leur accorder, notamment la communauté d’intérêts, la viabilité de l’unité, les désirs des employés, la pratique ou le modèle du secteur; les antécédents de la négociation collective avec l’employeur, la structure organisationnelle de l’employeur et la préférence générale du Conseil pour des unités de négociation plus larges pour des raisons telles que l’efficacité administrative et la commodité des négociations, la mobilité latérale des employés, la similitude des conditions d’emploi et la stabilité industrielle (voir AirBC Limited (1990), 81 di 1; 13 CLRBR (2d) 276; et 90 CLLC 16,035 (CCRT no 797), et Société canadienne des postes (1988), 73 di 66; et 19 CLRBR (NS) 129 (CCRT no 675). La méthodologie du Conseil est bien décrite dans Chemin de fer Quebec North Shore & Labrador (1992), 90 di 110; et 93 CLLC 16,020 (CCRT no 978), dont voici un extrait :

« Les critères de détermination de l’habileté à négocier d’une unité de négociation tiennent compte à la fois des intérêts des employés et de ceux de leur employeur. Sans prétendre en faire une liste exhaustive, soulignons entre autres la communauté d’intérêts entre les employés, le mode d’organisation et d’administration de l’entreprise, l’histoire des négociations collectives chez l’employeur et dans le secteur d’activité visé, l’interchangeabilité des employés et la recherche de la paix industrielle. Les critères pourront avoir un poids différent selon les cas d’espèce notamment selon qu’il s’agisse d’une demande d’accréditation ou d’une demande de révision. En effet, dans le premier cas, le Conseil doit permettre aux employés d’accéder à la négociation collective. Dans l’autre, il doit étudier la structure de négociation existante afin de rendre plus efficaces les mécanismes de négociation et d’application des conventions collectives. Cependant, il doit toujours tenter d’équilibrer des intérêts souvent divergents pour déterminer des unités de négociation viables en vue d’assurer des négociations efficaces et des relations de travail les plus harmonieuses possibles.

(pages 123-124; et 14,147-14,148) »

(c’est nous qui soulignons)

[35] Le Conseil, dans United Parcel Service du Canada ltée, 2008 CCRI 433, a décrit certains facteurs qu’il considère pour déterminer si une unité de négociation plus petite qu’une unité englobant « tout l’effectif » est habile à négocier collectivement :

[21] Il est important de souligner que même si le Conseil privilégie généralement une unité englobant tout l’effectif ou la création d’unités de négociation plus importantes, il lui arrive de créer des unités qui n’englobent pas tout l’effectif ou de fragmenter l’unité lorsqu’il a des motifs impérieux de le faire. Parmi les facteurs qui militent en faveur d’unités plus petites, on compte l’absence de communauté d’intérêts, la situation géographique, des dispositions législatives particulières, la probabilité qu’une unité plus importante ne soit pas viable et le désir de permettre aux employés d’être représentés.

[36] Le Conseil n’est pas tenu d’accepter l’unité de négociation proposée par le syndicat, ou une unité proposée sur consentement des parties (voir, en particulier, Quick Coach Lines (2000), 96 A.C.W.S. (3d) 397 (C.A.F.)).

[37] Une fois que le Conseil a décidé d’une unité de négociation habile à négocier collectivement, il doit alors déterminer les employés qui font partie de l’unité.

iii) Les inclusions et les exclusions

[38] Le Code confère au Conseil le pouvoir discrétionnaire d’inclure ou d’exclure des employés de l’unité de négociation. Cette question est différente de la question de savoir s’il s’agit de personnes « occupant un poste de direction », ou occupant un « poste de confiance comportant l’accès à des renseignements confidentiels », et étant donc exclues du statut d’« employé » en vertu du Code.

[39] En vertu du paragraphe 27(2) du Code, le Conseil peut décider quels « employés », au sens de l’article 3 du Code, devraient être inclus dans une unité de négociation habile à négocier collectivement :

27.(2) Dans sa détermination de l’unité habile à négocier collectivement, le Conseil peut ajouter des employés à l’unité proposée par le syndicat ou en retrancher.

(c’est nous qui soulignons)

[40] Contrairement à plusieurs compétences provinciales, le Code, aux paragraphes 27(3) à (6), étend les droits de négociation collective à des membres de professions libérales et à des personnes qui occupent des postes de surveillance, à condition qu’ils répondent à la définition du terme « employé » énoncé à l’article 3 du Code. Le Conseil peut inclure des surveillants dans une unité de négociation proposée. Il pourrait aussi accréditer une unité composée uniquement de surveillants :

27.(3) Si l’unité proposée par le syndicat regroupe ou comprend des membres de profession libérale, le Conseil doit, sous réserve des paragraphes (2) et (4), déterminer que l’unité habile à négocier collectivement est celle qui ne regroupe que des membres de profession libérale, sauf si l’unité n’est pas par ailleurs habile à négocier collectivement.

(4) Dans sa détermination, dans le cadre du paragraphe (3), de l’unité habile à négocier collectivement, le Conseil peut incorporer dans l’unité :

  1. des membres de professions libérales différentes;
  2. des employés qui, sans en avoir les qualifications, exercent les fonctions d’un membre de profession libérale.

(5) Le Conseil peut, sous réserve du paragraphe (2), décider qu’une unité proposée par le syndicat et regroupant ou comprenant des employés dont les tâches consistent entre autres à surveiller d’autres employés est habile à négocier collectivement.

(6) Le Conseil ne peut incorporer un agent de police privé dans une unité groupant d’autres employés.

(c’est nous qui soulignons)

[41] Le Conseil a notamment la tâche d’établir une distinction entre les personnes « occupant un poste de direction » ou occupant un « poste de confiance comportant l’accès à des renseignements confidentiels » et celles occupant un poste de surveillant. Si le Conseil conclut que des personnes sont des surveillants, et donc des « employés » en vertu du Code, il doit alors examiner une autre question : celle de savoir si, du point de vue des relations du travail, il est acceptable d’inclure ces personnes dans l’unité de négociation.

[42] Ce n’est pas simplement parce qu’une personne a le statut d’employé au sens du Code qu’elle devrait automatiquement faire partie d’une unité de négociation. Cette décision n’est prise qu’après que le Conseil a analysé la question de savoir si, du point de vue des relations du travail, il est acceptable d’inclure ces personnes dans l’unité de négociation. Cette décision dépendra des circonstances de chaque affaire.

c) L’appui au syndicat (alinéa 28c))

[43] Comme le prévoit l’alinéa 28c) du Code, le Conseil détermine si le syndicat a l’appui de la majorité à la date de la présentation de la demande d’accréditation. Exceptionnellement, le Conseil peut choisir une autre date pour déterminer l’appui au syndicat.

[44] Si les cartes d’adhésion du syndicat requérant démontrent que ce dernier a l’appui de la majorité des employés de l’unité que le Conseil a jugée habile à négocier collectivement, alors le Conseil, sous réserve de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’ordonner la tenue d’un scrutin de représentation en vertu du paragraphe 29(1) du Code, doit l’accréditer. Si le syndicat a l’appui de 35 % à 50 % des employés, alors le scrutin de représentation devient obligatoire selon le paragraphe 29(2) du Code.

[45] Si un syndicat demande d’être accrédité pour représenter une unité que le Conseil a jugée inhabile à négocier collectivement, et que le syndicat ne détient pas l’appui requis de la majorité des employés d’une unité que le Conseil juge habile à négocier collectivement, alors la demande d’accréditation sera rejetée.

[46] Le Conseil a récemment formulé les commentaires suivants concernant ce genre de situation dans United Parcel Service du Canada ltée, 2011 CCRI 591 (UPS 591) :

[47] Bien que le Conseil ait conclu qu’une unité composée d’employés de bureau à un emplacement géographique donné de UPS peut être habile à négocier collectivement, les Teamsters n’ont pas convaincu le Conseil que l’unité de négociation proposée, qui est composée de 12 employés de bureau du centre terrestre, est habile à négocier collectivement.

[48] En l’espèce, le Conseil est convaincu que l’unité habile à négocier collectivement devrait inclure tous les employés de bureau de l’établissement de Windsor de UPS. Si le Conseil accréditait les Teamsters pour l’unité de négociation proposée, une deuxième demande d’accréditation pourrait être présentée, cette fois pour les employés de bureau du centre international. L’existence de plus d’une unité de négociation d’employés de bureau pour un seul emplacement géographique comptant moins de 60 employés de bureau au total ne serait pas justifiée du point de vue des relations du travail.

[49] Les Teamsters n’ont pas convaincu le Conseil que les employés de bureau du centre terrestre sont suffisamment distincts de ceux du centre international ou qu’ils n’ont pas une communauté d’intérêts suffisante avec eux pour justifier l’existence d’une unité de négociation distincte. Bien que le Conseil puisse accorder l’accréditation pour des unités de négociation de petite taille, la division des employés de bureau de l’établissement de Windsor de UPS entraînerait des problèmes en matière de relations du travail, problèmes qui seraient évités avec une unité de négociation bien structurée.

[50] En outre, le Conseil est préoccupé par l’interaction continue entre des employés des deux centres. Par exemple, un des employés du centre terrestre va régulièrement chercher des colis dans la zone de travail du centre international et les met sur une courroie transporteuse pour les envoyer au centre terrestre. Dans un autre cas, un employé du centre international travaille dans le centre terrestre chaque jour pour enregistrer des produits pour un client.

[51] Le Conseil conclut que, dans les circonstances, une unité de négociation composée d’une seule partie des employés de bureau de l’établissement de Windsor de UPS ne serait pas habile à négocier collectivement. Si les Teamsters veulent représenter des employés de bureau de cet établissement, l’unité de négociation devrait, au minimum, être semblable aux unités pour lesquelles le Conseil a déjà accordé l’accréditation à St. Catharines, à Stoney Creek et à Brantford, c’est-à-dire des unités qui englobent tous les employés de bureau de chacun de ces établissements.

[52] Le Conseil est d’avis que, en l’espèce, l’unité habile à négocier collectivement devrait englober tous les employés de bureau de l’établissement de Windsor de UPS. Compte tenu de la preuve d’adhésion présentée, les Teamsters ne semblent pas détenir l’appui nécessaire parmi les employés qui composeraient une telle unité de négociation. Le Conseil doit donc rejeter la demande d’accréditation.

[47] Bien que les demandes d’accréditation, selon les circonstances, ne soulèvent pas toujours les mêmes questions, le Conseil se concentre souvent sur les mêmes questions dans son analyse, notamment celles qui suivent :

  1. Le requérant est-il un syndicat? (article 3 et alinéa 28a) du Code);
  2. Quelles personnes sont des « employés » en vertu du Code? (article 3 et alinéa 28c));
  3. L’unité proposée par le syndicat est-elle habile à négocier collectivement? (paragraphes 24(1) et 27(1) et alinéa 28b) du Code);
  4. Si l’unité proposée n’est pas habile à négocier collectivement, quelle unité serait habile à négocier collectivement? (sous-alinéa 16p)(v), paragraphe 27(1) et alinéa 28b) du Code);
  5. Quels employés, selon la définition du Code, devrait-on inclure dans une unité de négociation habile à négocier collectivement? (paragraphes 27(2) à (6)) du Code);
  6. Le syndicat détient-il l’appui de la majorité des employés , ou l’appui requis parmi les employés pour justifier la tenue d’un scrutin, dans une unité de négociation que le Conseil a jugée habile à négocier collectivement? (alinéa 28c) et paragraphes 29(1) et (2) du Code).

ii) Analyse de la demande d’accréditation du GSU

[48] La conclusion du Conseil formulée au début des présents motifs ne signifie pas nécessairement que le Conseil ne partage pas l’avis de Viterra selon lequel ses employés occupant des fonctions de surveillance, et ceux ayant le titre de « directeur adjoint », pourraient être des employés au sens de l’article 3 du Code et être inclus dans une unité de négociation. Selon l’article 27 du Code, le Conseil peut se demander s’il y a lieu d’inclure ces types d’employés exerçant des fonctions de surveillance dans une unité de négociation.

[49] De même, le Conseil a examiné la proposition avancée par Viterra d’ajouter des employés de bureau à l’unité de négociation des employés de production et d’entretien proposée par le GSU. Cette structure constitue assurément une option, parmi tant d’autres, que le Conseil pourrait choisir.

[50] Le Conseil a analysé le point de vue de Viterra lorsqu’il a évalué la question de l’habileté à négocier collectivement de l’unité des employés de production et d’entretien proposée par le GSU. Le Code prévoit expressément que le syndicat doit proposer initialement l’unité de négociation. Le Conseil intervient rarement dans la description de l’unité de négociation proposée par le syndicat, à moins qu’il ne conclue que l’unité n’est pas habile à négocier collectivement.

[51] Bien que Viterra ait présenté divers arguments concernant ce qui constituerait la meilleure unité de négociation à la fabrique, le Conseil ne peut conclure que ces arguments démontrent que l’unité proposée par le GSU n’était pas habile à négocier collectivement.

[52] Le Conseil estime qu’une unité composée d’employés de production et d’entretien au nombre d’environ 41 employés peut être une unité habile à négocier collectivement en vertu du Code. Elle est suffisamment grande pour être viable et n’entraîne pas une division inutile, contrairement à la situation où le Conseil a refusé l’accréditation de l’unité proposée par le syndicat dans UPS 591, précitée.

[53] Les employés sont bien placés pour déterminer l’existence d’une communauté d’intérêts, en l’espèce, pour une unité composée d’employés de production et d’entretien à la fabrique. Il convient de rappeler les commentaires suivants formulés par le Conseil dans Maritime-Ontario, Parcel Division, 2000 CCRI 100, au paragraphe 37, en ce qui concerne l’importance de l’unité proposée par le syndicat :

[37] Si les employés déterminent eux-mêmes qu’ils ont une communauté d’intérêts et qu’ils définissent une unité de négociation distincte s’appuyant sur des conditions de travail, une structure ou une fonction bien définies, le Conseil ne devrait pas rejeter leur demande d’accréditation au seul motif qu’une unité plus grande, ou d’autres agencements des conditions de travail, des structures ou des fonctions permettraient d’établir une unité plus habile à négocier collectivement. Bref, le Conseil devrait respecter les souhaits des employés dans la mesure du possible si le groupement qu’ils ont proposé constitue une unité habile à négocier collectivement, comme il est précisé dans l’affaire Alberta Wheat Pool (1991), 86 di 172 (CCRT no 907) :

« Dans le cas de demandes comme la présente, la politique du Conseil sur ce qui constitue une unité de négociation habile à négocier est bien établie. Lorsque des employés non syndiqués exercent leur droit de participer à la négociation collective, le Conseil leur donne une occasion réelle de le faire et il ne leur refuse pas ce droit fondamental en imposant des conditions artificielles ou inutiles quant à la composition des unités de négociation. Dans ces situations, le Conseil accepte des unités de négociation qui ne sont peut-être pas les plus habiles à négocier, quels que soient les inconvénients administratifs qui peuvent en résulter pour l’employeur. (Pour un aperçu de ces politiques et un exemple de leur application pratique, voir Sedpex Inc. et autres (1985), 63 di 102 (CCRT no 543), et Purolator Courrier Ltée (1989) 77 di 1 (CCRT no 730).)

(page 176) »

[54] De plus, contrairement à plusieurs compétences provinciales, le Code confère au Conseil le pouvoir, sur demande, d’effectuer une révision de la structure d’unités de négociation, qui lui permet d’effectuer une fusion ou une réorganisation d’unités de négociation existantes :

18.1(1) Sur demande de l’employeur ou d’un agent négociateur, le Conseil peut réviser la structure des unités de négociation s’il est convaincu que les unités ne sont plus habiles à négocier collectivement.

(c’est nous qui soulignons)

[55] Viterra a soulevé certains problèmes hypothétiques qui pourraient se poser si le Conseil acceptait l’unité de négociation proposée par le GSU. L’article 18.1 du Code permettrait au Conseil de résoudre des problèmes découlant de multiples unités de négociation accréditées, si jamais une telle situation se présentait.

[56] Il ne s’agit certainement pas d’une situation nouvelle en matière de relations du travail, de voir une unité administrative et une unité de production et d’entretien accréditées séparément. Cela démontre la raison pour laquelle il n’a pas paru au Conseil, en l’espèce, qu’une seule unité composée d’employés de production et d’entretien telle qu’elle a été proposée par le GSU était inhabile à négocier collectivement.

[57] En résumé, le Conseil est d’accord avec le GSU qu’une unité composée d’employés de production et d’entretien est une unité habile à négocier collectivement en vertu du Code. Le Conseil convient avec Viterra qu’il n’y a aucune raison d’exclure de l’unité les employés saisonniers affectés à la production. La description de l’unité accréditée a été énoncée dans l’ordonnance d’accréditation no 10143-U datée du 16 février 2012. L’unité inclut le préposé à l’entrepôt qui accomplit des tâches liées à la production et à l’entretien.

[58] En outre, le Conseil est convaincu que le GSU avait l’appui de la majorité des employés de l’unité que le Conseil a jugée habile à négocier collectivement.

[59] Il s’agit d’une décision unanime du Conseil.

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