Code canadien du travail, Parties I, II et III

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Motifs de décision

Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes,

requérant,

et


Adecco Employment Services limitée,

intimée,

et

Société canadienne des postes,

employeur.

Dossier du Conseil : 28291-C

Référence neutre : 2010 CCRI 556

Le 10 décembre 2010

Un banc du Conseil canadien des relations industrielles (le Conseil), composé de Me Elizabeth MacPherson, Présidente, ainsi que de Mes Louise Fecteau et William G. McMurray, Vice-présidents, a examiné la demande susmentionnée.

L’article 16.1 du Code canadien du travail (Partie I – Relations du travail) (le Code) prévoit que le Conseil peut trancher toute affaire dont il est saisi sans tenir d’audience. Ayant pris connaissance de tous les documents au dossier, le Conseil est convaincu que la documentation dont il dispose lui suffit pour trancher cette affaire sans tenir d’audience.

Procureurs inscrits au dossier
Me James Robbins, pour le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes;
Me John-Paul Alexandrowicz, pour Adecco Employment Services limitée;
Me Roy. C. Filion, c.r., pour la Société canadienne des postes.

Les présents motifs de décision ont été rédigés par Me William G. McMurray, Vice-président.

I – Nature de la demande

[1] Le 27 juillet 2010, le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (le STTP ou le syndicat) a présenté une demande fondée sur l’article 18 du Code dans laquelle il réclamait que le Conseil exerce son pouvoir discrétionnaire en réexaminant et en annulant la décision qu’il avait rendue le 7 juillet 2010 (voir la décision Adecco Employment Services limitée, 2010 CCRI 528 (la décision 528)). Dans cette décision, le Conseil avait rejeté une demande du syndicat fondée sur l’article 35 du Code qui visait à ce que le Conseil fasse une déclaration d’employeur unique ou, subsidiairement, à ce que le Conseil déclare que la Société canadienne des postes (la SCP ou l’employeur) était le véritable employeur de certains employés d’Adecco Employment Services limitée (Adecco) qui travaillaient à des installations postales nommées.

[2] Le syndicat soutient que la décision 528 du Conseil est erronée et qu’elle doit être réexaminée en application de l’article 18 du Code pour les raisons suivantes :

  1. le Conseil a enfreint un principe de justice naturelle en ne se prononçant pas sur la question de l’identité du véritable employeur des superviseurs de premier niveau du Programme des importations postales assujetties à des droits de douane (PIPAD) qui travaillent dans les sites de traitement secondaire ainsi qu’en ne prenant pas en considération les éléments de preuve relatifs à cette question;
  2. le Conseil a commis une erreur de droit et de principe en exigeant que, pour constituer des entreprises associées ou connexes pour l’application de l’article 35 du Code, les entités associées ou connexes liées par contrat doivent aussi être des entreprises semblables;
  3. le Conseil a commis une erreur de droit et de principe en fondant ses conclusions sur la forme – les ententes contractuelles –, plutôt que sur le fond – la situation factuelle.

II – Portée du réexamen

[3] Les décisions rendues par le Conseil sont définitives et sont protégées par une clause privative prévue à l’article 22 du Code. En vertu de l’article 18 du Code, le Conseil a le pouvoir discrétionnaire de réexaminer, d’annuler ou de modifier ses décisions, notamment pour les motifs énoncés à l’article 44 du Règlement de 2001 sur le Conseil canadien des relations industrielles (le Règlement). Suivant l’article 44 du Règlement, les circonstances dans lesquelles le Conseil peut réexaminer une décision comprennent : la survenance de faits nouveaux qui, s’ils avaient été portés à la connaissance du Conseil avant l’audience, l’auraient vraisemblablement amené à une conclusion différente; la présence d’erreurs de droit ou de principe qui remettent véritablement en question l’interprétation du Code donnée par le Conseil; et le non-respect par le Conseil d’un principe de justice naturelle.

[4] Le pouvoir de réexamen conféré au Conseil est limité et ne vise pas à permettre aux parties d’interjeter appel d’une décision, de plaider de nouveau les questions présentées à un autre banc du Conseil, ou de remettre en cause les faits et les questions sur lesquels le Conseil s’est déjà prononcé. Le banc de réexamen ne peut pas substituer sa propre appréciation des faits à celle du banc qui était saisi de l’affaire (voir l’arrêt Williams c. Section Locale 938 de la Fraternité Internationale des Teamsters, 2005 CAF 302). Il incombe au requérant d’établir l’existence de motifs valables ou même de circonstances exceptionnelles justifiant le réexamen d’une décision (voir la décision Banque Canadienne Impériale de Commerce, 2008 CCRI 403).

III – Décision contestée

[5] En l’espèce, il est utile d’examiner les diverses conclusions auxquelles le Conseil est arrivé dans la décision 528 et qui l’ont finalement mené à rejeter la demande de déclaration d’employeur unique du syndicat. L’examen de la décision 528 semble montrer que toutes les parties s’entendaient sur les cinq critères dont le Conseil devait tenir compte dans le contexte d’une telle demande et, de plus, que toutes les parties convenaient que seuls deux de ces critères étaient en litige. Le paragraphe 82 de la décision 528 est ainsi rédigé :

[82] Compte tenu de ce qui précède, il reste au Conseil deux questions à trancher. Premièrement, il lui faut décider si la SCP et Adecco sont des entreprises associées ou connexes et, deuxièmement, si elles assurent en commun le contrôle ou la direction des entreprises.

[6] En outre, le Conseil a alors rappelé aux parties qu’en fin de compte, au-delà des cinq critères, toute décision portant sur une demande de déclaration d’employeur unique comporte un élément discrétionnaire. Le Conseil s’est prononcé de la sorte au paragraphe 78 de la décision 528 :

[78] Comme l’indique la jurisprudence du Conseil, la détermination d’un employeur unique est en général un processus en deux étapes dans le cadre duquel le Conseil décide d’abord si les critères susmentionnés sont objectivement remplis. Dans l’affirmative, il doit décider s’il doit exercer son pouvoir discrétionnaire et faire la déclaration demandée. Ce pouvoir discrétionnaire est fondé sur le principe qu’il doit y avoir un objectif valable en matière de relations du travail pour faire la déclaration en question.

[7] Pour ce qui est des critères en litige, le Conseil a d’abord conclu que les deux entreprises n’étaient pas associées ou connexes. Cette conclusion est exposée au paragraphe 87 de la décision 528 :

[87] Quant à l’argument selon lequel les ententes contractuelles entre la SCP et Adecco signifient que les entreprises sont associées ou connexes, les observations du STTP ne convainquent pas le Conseil. Ce dernier est d’avis que, en dépit de l’existence de l’entente de sous-traitance entre la SCP et Adecco, la preuve n’étaye pas la position du syndicat selon laquelle les entreprises sont associées ou connexes. Le travail que fait Adecco à titre de fournisseur de services de ressources humaines n’est ni comparable ni semblable à celui que fait la SCP à titre de service postal national du Canada. Il n’y a pas de propriété ou de gestion communes entre la SCP et Adecco et aucune indication qu’elles sont verticalement intégrées de quelque façon. Le Conseil est également convaincu que le travail que font les employés d’Adecco en exécutant les fonctions de l’ASFC est distinct de celui que font les membres de l’unité de négociation du STTP. Adecco ne s’occupe de colis que lorsqu’ils relèvent directement de la responsabilité et du contrôle de l’ASFC et sont séparés du circuit postal général, et ce, jusqu’à ce que l’ASFC en décide autrement. La présence de la zone d’inspection secondaire n’est pas un simple artifice; elle sert plutôt à délimiter clairement la nature du travail qu’exécutent les employés d’Adecco et celui qu’exécutent les membres de l’unité de négociation du STTP. Il est également important de signaler que ce travail, malgré les affirmations contraires du STTP, n’a jamais été exécuté par des membres du STTP et que, avant 1992, c’était des agents des douanes qui s’en occupaient.

[8] Ensuite, le Conseil a conclu que l’exigence d’un exercice en commun du contrôle et de la direction n’était pas remplie. Les paragraphes 100 et 104 de la décision 528 sont particulièrement pertinents à cet égard :

[100] Les décisions rendues dans OC Transpo et Air Canada sont instructives, mais non déterminantes en l’espèce. Chaque cas est un cas d’espèce qui doit être examiné en se fondant sur les faits et les circonstances applicables. Le contrat conclu entre la SCP et Adecco, comme dans le cas des contrats de sous-traitance dans OC Transpo et Air Canada, est exhaustif, mais il ne constitue pas, de l’avis du Conseil, une situation où la gestion, le contrôle ou la direction sont exercés en commun. Conformément au contrat conclu avec l’ASFC, la SCP a manifestement et réellement intérêt à s’assurer que des questions telles que l’embauche, la formation, les évaluations et les mesures disciplinaires sont traitées d’une manière qui cadre avec ses obligations et ses engagements envers l’ASFC. Bien que certains gestionnaires de la SCP puissent prendre l’initiative de temps à autre d’outrepasser leurs responsabilités de supervision (comme nous le verrons plus en détail ci-après), le Conseil est convaincu que la supervision qu’exerçait la SCP n’annulait ni n’amoindrissait de quelque façon le rôle et les responsabilités d’Adecco. La preuve présentée n’a pas établi que la SCP jouait un rôle déterminant dans l’embauche, la formation, l’évaluation ou les mesures disciplinaires en ce qui avait trait aux employés d’Adecco.

...

[104] Le Conseil est convaincu que la conduite de M. French était motivée par son désir de s’assurer qu’Adecco se conformait de manière absolue et complète aux clauses et aux dispositions du contrat de sous-traitance. Il prenait ses responsabilités au sérieux et, parfois, cela l’amenait à s’intéresser aux activités d’Adecco à un point qui dépassait le cadre ses fonctions et de ses responsabilités réelles, mais ce fait, de l’avis du Conseil, ne mettait pas la SCP dans une situation de contrôle et de direction exercés en commun.

[9] Pour ce qui est de la dernière question, celle de savoir si le Conseil était prêt à exercer son pouvoir discrétionnaire afin de rendre une déclaration d’employeur unique, le Conseil a conclu que « même si tous les critères qui s’appliquent à une déclaration d’employeur unique avaient été remplis, il doute qu’il aurait fait la déclaration demandée » (voir le paragraphe 105). Le Conseil a donné davantage d’explications au sujet de l’élément discrétionnaire de toute déclaration d’employeur unique au paragraphe 106 de la décision 528 :

[106] Est-il question en l’espèce d’une situation dans laquelle les droits de négociation du syndicat sont menacés, minés ou érodés (Air Canada et autres (1989), 79 di 98; 7 CLRBR (2d) 252; et 90 CLLC 16,008 (CCRT no 771); et Télébec ltée, 2004 CCRI 300)? Est-il nécessaire que le Conseil préserve la relation de négociation du syndicat (Air Canada et autres (1989), précitée)? La SCP a-t-elle tenté de faire obstacle aux dispositions des conventions collectives qu’elle a conclues avec le STTP (Muir’s Cartage Ltd. et Société canadienne des postes, précitée)? Améliorerait-on les relations du travail des parties en faisant une déclaration d’employeur unique (Autocar Royal (9011-4216 Québec Inc), 1999 CCRI 42)? Compte tenu des faits présentés, le Conseil serait enclin, selon toute vraisemblance, à répondre aux questions qui précèdent par la négative. Le travail en question n’a jamais été exécuté par des membres de l’unité de négociation du STTP et rien n’indique que la SCP a conclu une entente avec Adminserv et, plus tard, Adecco dans le but de faire obstacle aux droits du STTP ou de s’y soustraire, ou d’affaiblir sa position de négociation. En fait, rien n’indique que les modalités actuelles ont affaibli ou érodé la position de négociation du syndicat.

[10] En résumé, dans la décision 528, le Conseil a conclu que la SCP et Adecco n’étaient pas des entreprises associées ou connexes et qu’il n’y avait pas d’exercice commun du contrôle et de la direction. De toute manière, le Conseil a conclu que, même si les critères objectifs avaient été remplis, il n’était pas certain qu’il aurait rendu une déclaration d’employeur unique.

IV – Analyse

A – Allégation de violation d’un principe de justice naturelle

[11] Le syndicat allègue que le Conseil a enfreint un principe de justice naturelle en ne se prononçant pas sur la question de l’identité du véritable employeur des superviseurs de premier niveau du PIPAD qui travaillent dans les sites de traitement secondaire et en ne prenant pas en considération les éléments de preuve relatifs à cette question. Le syndicat a avancé les arguments suivants :

6. Le banc n’a pas du tout traité la question de l’identité de l’employeur des superviseurs de premier niveau – les « responsables et superviseurs sur place ». Cette question est essentielle autant à l’égard de la question de savoir si Adecco et la SCP constituent un employeur unique qu’à celle de savoir si la SCP est le véritable employeur des employés qui travaillent dans les sites de traitement secondaire du PIPAD.

...

18. Compte tenu de ces critères bien établis, si le banc avait conclu que les personnes qui exerçaient le contrôle quotidien sur le personnel des sites de traitement secondaire du PIPAD étaient elles-mêmes, dans les faits, des employés de la SCP, il n’aurait pas pu raisonnablement tirer les conclusions auxquelles il est arrivé relativement à la gestion conjointe, à l’exercice commun du contrôle et à l’identité du véritable employeur de ce personnel. Ces conclusions reposaient sur la prémisse voulant que les superviseurs de premier niveau étaient des employés d’Adecco plutôt que de la SCP.

(traduction)

[12] Le Conseil estime que l’argument du syndicat à cet égard n’est pas fondé. Au paragraphe 32 de la décision 528, le Conseil a examiné et résumé les arguments du syndicat qui portaient notamment sur les superviseurs sur place. Le Conseil a soupesé ces arguments au paragraphe 112 de la décision 528, où il est spécifiquement fait mention, entre autres, des responsables et superviseurs sur place. Le Conseil a conclu que c’était Adecco, par l’entremise de ses responsables et superviseurs sur place, qui gérait le travail au jour le jour. Le Conseil a peut-être examiné cette question succinctement, mais la lecture des paragraphes 32 et 112 de la décision 528 révèle que, contrairement à ce que le syndicat prétend, le Conseil s’est bel et bien prononcé sur la question de l’identité de l’employeur des superviseurs de premier niveau et qu’il a effectivement pris en considération les éléments de preuve relatifs à cette question. Par conséquent, le Conseil rejette l’allégation selon laquelle il y a eu violation d’un principe de justice naturelle à cet égard.

B – Allégation d’erreurs de droit et de principe

1 – Entreprises semblables

[13] Le syndicat allègue que le Conseil a commis une erreur de droit et de principe en exigeant que, pour constituer des entreprises associées ou connexes pour l’application de l’article 35 du Code, les entités associées ou connexes liées par contrat doivent aussi être des entreprises semblables. Le syndicat a avancé les arguments suivants :

20. L’analyse faite par le banc de la question de savoir si Adecco et la SCP étaient associées ou connexes diverge de la jurisprudence établie au sujet des liens contractuels et représente un changement de politique quant à l’application de l’article 35 du Code aux relations contractuelles.

...

27. En imposant la nouvelle exigence selon laquelle, pour constituer des entreprises associées ou connexes, les entreprises doivent être semblables non seulement à l’égard du travail effectué, mais aussi quant aux structures et aux objectifs globaux de l’entreprise, le banc a limité de façon importante, si ce n’est absolue, l’application de l’article 35 du Code aux entreprises liées par contrat. Cette modification a des incidences considérables sur le plan des politiques, particulièrement en ce qui a trait à la protection des droits des employés et de leurs agents négociateurs dans les cas où les travailleurs sont « prêtés » ou autrement fournis par des agences de placement.

(traduction)

[14] Le Conseil estime qu’une interprétation de bonne foi des paragraphes pertinents de la décision 528 permet de rejeter cet argument. Essentiellement, le syndicat soutient que, dans les motifs de la décision 528, le Conseil a établi une nouvelle exigence pour les demandes de déclaration d’employeur unique – que les entreprises soient semblables – et que cela constituait une erreur de droit et de principe. En fait, les conclusions du Conseil au sujet des activités associées ou connexes sont exposées aux paragraphes 83 à 87 de la décision 528. Au paragraphe 83, le Conseil a cité et s’est fondé sur la décision Presse Canadienne et autres (1976), 13 di 39, [1976] 1 Can LRBR 354, 76 CLLC 16,013 (CCRT no 60), et a énoncé un certain nombre de facteurs identifiés dans cette décision-là, facteurs dont il faut tenir compte pour trancher la question du degré d’interrelation des activités de deux entreprises. L’un de ces facteurs est de savoir « si les entreprises fournissent des services et des produits semblables », mais le Conseil a clairement expliqué qu’il s’agissait seulement d’un des divers facteurs dont il faut tenir compte (voir le paragraphe 83 de la décision 528). Les conclusions du Conseil à cet égard sont exposées au paragraphe 87 de la décision 528. Contrairement à ce qu’avance le syndicat, le Conseil n’est pas d’avis que le paragraphe 87 établit une nouvelle exigence selon laquelle les entreprises associées ou connexes liées par contrat doivent aussi être des entreprises semblables. Même si, dans la décision 528, le Conseil a souligné que l’entreprise de placement de personnel d’Adecco n’était pas comparable à l’entreprise de services postaux de la SCP, c’est l’absence de propriété et de gestion communes ainsi que d’intégration qui a convaincu le Conseil que les entreprises ne constituaient pas un employeur unique. Le Conseil ne voit donc là aucune erreur de droit ou de principe. Dans la mesure où des observations ont été formulées sur les différences entre les activités des deux entreprises, le Conseil est incapable de conclure que ces observations constituaient une erreur de droit ou de principe qui remet véritablement en question l’interprétation du Code.

2 – Forme et fond

[15] Le syndicat allègue aussi que le Conseil a commis une erreur de droit et de principe en fondant ses conclusions sur la forme – les ententes contractuelles –, plutôt que sur le fond – la situation factuelle. Le syndicat a avancé les arguments suivants :

29. Le banc s’est écarté de l’approche classique des commissions des relations du travail – y compris celle du CCRI – qui consiste à analyser les faits essentiels des relations d’emploi au lieu de fonder ses conclusions sur la forme contractuelle de la relation.

...

44. En l’espèce, la décision du banc de s’écarter du principe selon lequel le fond doit l’emporter sur la forme représente une modification importante de la politique du Conseil. Alors qu’auparavant, le Conseil se préoccupait de découvrir l’état réel des relations du travail et n’hésitait pas à soulever les voiles corporatifs ou contractuels, le banc a maintenant statué que, en choisissant les bons mots, les employeurs pourront dorénavant se soustraire aux obligations que leur impose le Code tout en ignorant les droits des employés et des syndicats.

(traduction)

[16] Manifestement, l’audience a donné lieu à de longs débats au sujet de la forme et du fond. L’allégation du syndicat selon laquelle le Conseil a accordé l’importance à la forme plutôt qu’au fond semble découler principalement de l’analyse du Conseil des éléments de preuve relatifs au rôle du gestionnaire de la SCP qui était responsable du PIPAD aux niveaux local et national. Le Conseil a souligné que « [l]e rôle et les fonctions de M. French ont fait l’objet d’un examen particulier, et son interrogatoire principal ainsi que son contre-interrogatoire ont été longs et détaillés » (voir le paragraphe 23 de la décision 528). Au paragraphe 103, le Conseil a reconnu que « [l]e syndicat se fonde en grande partie sur les propos et la conduite de M. French pour étayer sa prétention selon laquelle la SCP exerçait en commun avec Adecco le contrôle et la direction des employés en cause ». Le Conseil a aussi conclu et reconnu que, de temps à autre, certains gestionnaires – dont M. French – prenaient l’initiative d’outrepasser les responsabilités de supervision que leur conférait le contrat.

[17] Toutefois, après avoir analysé soigneusement tous les éléments de preuve, y compris ceux qui avaient trait à M. French, le Conseil a rejeté la position du syndicat selon laquelle le contrôle et la direction de l’entreprise étaient exercés en commun. Comme il a été souligné précédemment, les conclusions du Conseil au sujet du contrôle et de la direction prétendument exercés en commun sont principalement exposées aux paragraphes 100 et 104 de la décision 528, qui ont été reproduits ci-dessus. Contrairement à ce que le syndicat a avancé à l’appui de sa demande de réexamen, le Conseil ne s’est pas fondé sur des raisonnements convenus et circulaires pour rejeter les arguments selon lesquels le contrôle et la direction étaient exercés en commun. Le banc de réexamen estime que, dans la décision 528, le Conseil n’a pas privilégié la forme – les relations contractuelles – aux dépens du fond – la nature factuelle de la relation entre les deux employeurs en cause. Par conséquent, le Conseil ne peut pas conclure que le banc chargé de statuer sur la demande a commis une erreur de droit ou de principe en concluant que la surveillance exercée par certains gestionnaires de la SCP ne signifiait pas que la SCP et Adecco exerçaient en commun le contrôle et la direction de l’entreprise.

V – Dispositif

[18] Pour tous les motifs exposés ci-dessus, le Conseil conclut que le syndicat requérant n’a pas établi que la décision 528 est entachée par une violation des principes de justice naturelle ou par une erreur de droit ou de principe qui remettrait véritablement en question l’interprétation du Code donnée par le Conseil. Par conséquent, le Conseil n’exercera pas son pouvoir discrétionnaire de réexaminer ou d’annuler la décision 528.

[19] La demande de réexamen est donc rejetée.

[20] Il s’agit d’une décision unanime du Conseil.

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