Code canadien du travail, Parties I, II et III

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Motifs de décision

Canadian First Nations Police Association,

requérante,

et


Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory,

intimé,

Police provinciale de l'Ontario et Ontario First Nations Police Commission,

parties intéressées.

CITÉ: Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga

Mohawk Territory

Dossier du Conseil: 20230-C

Décision no 89

le 25 septembre 2000


Question constitutionnelle préliminaire visant à déterminer si la Police provinciale de l'Ontario jouit de l'immunité de la Couronne. Cette question est soulevée dans le cadre d'une demande d'accréditation fondée sur l'article 24 du Code canadien du travail, Partie I.

Compétence constitutionnelle - Immunité de la Couronne - Dans la décision Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, [2000] CCRI no 64; et 2001 CLLC 220-005, le Conseil a rendu une décision préliminaire selon laquelle le Code s'appliquait à la Police provinciale en vertu d'une entente tripartite sur les services policiers conclue entre cinq Premières nations en Ontario, la Couronne fédérale et la Couronne provinciale; il a été statué que la Police provinciale était l'employeur des agents des Premières nations en Ontario, à moins qu'il soit démontré qu'elle jouissait de l'immunité de la Couronne - Le Conseil devait déterminer si la Police provinciale était liée par le Code par mention expresse ou par déduction nécessaire ou si elle avait perdu son droit à l'immunité du fait de sa conduite - Le Conseil applique la théorie de la renonciation implicite énoncée par la Cour suprême du Canada - La Couronne ne peut revendiquer les avantages de la loi sans en assumer également les obligations; toutefois, il doit exister un lien suffisant entre les avantages et les obligations - Le Conseil conclut qu'il existe un lien suffisamment étroit entre le contrôle des services policiers dans les réserves aux fins de la Loi sur les services policiers de l'Ontario et la détermination des conditions d'emploi découlant de la prestation de ces services; la conséquence est l'application de la législation fédérale régissant les relations de travail - Le Conseil a conclu à l'existence d'un lien assez étroit entre le Code et l'entente sur les services de police (pour le compte de la Police provinciale) pour statuer que l'Ontario avait renoncé à son immunité et était visée par les dispositions du Code canadien du travail en ce qui concerne les agents des Premières nations des Mohawks of (the Bay of Quinte) Tyendinaga représentés par la Canadian First Nations Police Association - Ordonnance d'accréditation rendue.


Le Conseil se composait de Me Michele A. Pineau, Vice- présidente, siégeant seule en application du paragraphe 14(3) du Code canadien du travail (Partie I - Relations du travail), L.R.C., 1985, ch. L-2, mod. 1998, ch. 26.

Avocats inscrits au dossier

Mes Peter Landmann et Lori Sterling, pour le Solliciteur général de l'Ontario;

Me John D. Middlebro, pour la Canadian First Nations Police Association.

I - Introduction

[1] Dans Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, [2000] CCRI no 64, le Conseil a rendu une décision partielle selon laquelle, aux termes de la Ontario First Nations Policing Agreement [l'entente sur les services policiers des Premières nations en Ontario](«l'Entente»), une entente tripartite sur les services policiers conclue entre cinq Premières nations en Ontario, le gouvernement fédéral représenté par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et le Procureur général du Canada (le Canada), et le gouvernement provincial représenté par le Solliciteur général de l'Ontario (l'Ontario), le Code canadien du travail (le Code) s'appliquait à la Police provinciale de l'Ontario (la «Police provinciale»). Par conséquent, à moins de démontrer qu'elle jouit de l'immunité de la Couronne, la Police provinciale est l'employeur des agents des Premières nations en Ontario.

[2] Avant de délivrer un certificat d'accréditation, le Conseil, dans Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, précitée, a demandé aux parties de présenter d'autres observations sur les deux questions suivantes.

La Police provinciale, en sa qualité de mandataire de la Couronne du chef de l'Ontario,

a) est-elle liée par le Code soit par mention expresse ou par déduction nécessaire ou

b) a-t-elle perdu son droit à l'immunité du fait de sa conduite?

[3] La requérante, la Canadian First Nations Police Association (CFNPA), et l'Ontario, au nom de la Police provinciale, ont présenté des observations au Procureur général du Canada ainsi qu'aux procureurs généraux des provinces et des territoires et les ont avisés qu'elles soulèveraient une question constitutionnelle. Le Conseil n'a pas reçu d'autres observations. La question constitutionnelle, à savoir si l'immunité de la Couronne s'appliquait à la Police provinciale, a été tranchée sans audience.

II - Les arguments des parties

[4] Dans ses observations, l'Ontario convient que la Police provinciale est un mandataire de la Couronne provinciale, mais elle fait valoir que la Police provinciale n'est pas visée par les dispositions du Code et qu'elle n'a pas renoncé explicitement ou implicitement à l'immunité de la Couronne. Elle prétend jouir de l'immunité de la Couronne en l'espèce pour les motifs suivants.

a) Aux termes du Code, rien ne lie explicitement la Couronne provinciale à la Police provinciale puisque les secteurs relativement auxquels la Couronne provinciale est liée sont expressément énoncés notamment aux articles 5.1, 123 et 167.

b) Le Code ne démontre pas une intention claire de lier la Police provinciale. Contrairement à ce que la Cour d'appel fédérale a conclu dans Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec c. Hydro-Québec, [1995] 3 C.F. 3, qui a cré‚ un vide en matière de relations de travail pour un groupe d'employés, le Parlement n'a pas adopté de dispositions explicites en vue de lier les mandataires de la Couronne provinciale qui exploitent des installations nucléaires.

c) L'objet du Code ne serait pas complètement mis en échec s'il était déterminé que la Police provinciale n'est pas liée par ses dispositions. Une telle omission dans un régime législatif n'empêche pas de conclure que la Couronne jouit de l'immunité.

[5] L'Ontario soutient également que la Couronne peut renoncer à son immunité seulement de façon expresse ou implicite en invoquant un régime ou une loi du gouvernement fédéral. Elle prétend qu'il n'existe pas de «lien étroit» entre l'Entente conclue par l'Ontario et le régime fédéral des relations de travail établi aux termes du Code, qui justifierait la perte de son immunité. L'entente de partage des coûts conclue avec le gouvernement fédéral ne permet pas à l'Ontario de réaliser des économies; au contraire, cette Entente entraîne des dépenses additionnelles dont une partie est assumée par l'Ontario. Bien que l'Entente soit censée avantager les résidents des réserves, tout «avantage» que peuvent en tirer l'Ontario ou la Police provinciale n'est pas assez important pour entraîner la perte de l'immunité de la Couronne. Enfin, l'Ontario affirme que la Couronne a accepté d'être assujettie aux avantages et aux restrictions de l'Entente, non à ceux du Code; par conséquent, il n'existe pas de lien étroit entre l'entente de partage des coûts visant à assurer le financement des services policiers des Premières nations et les obligations de la Police provinciale si le Code s'applique. L'Ontario nie vouloir «revendiquer» les dispositions d'un régime prévu par la loi qui l'avantagent tout en réclamant l'immunité relativement à l'application d'autres dispositions connexes du même régime.

[6] Au contraire, la CFNPA soutient que l'Entente comporte obligatoirement l'administration des relations de travail entre la bande et les agents des Premières nations et, en sa qualité de signataire de l'Entente, l'Ontario a perdu l'immunité de la Couronne. Elle soutient de plus que, en négociant une entente de partage des coûts relativement aux services policiers des Premières nations, lesquels services sont de son ressort exclusif, la CFNPA a reçu un avantage du gouvernement fédéral dont elle peut se prévaloir. Elle maintient que la Police provinciale a renoncé à son immunité en outrepassant son mandat dans la mesure où elle a empiété sur la compétence fédérale en acceptant de nommer les candidats proposés par les Premières nations, usurpant ainsi une responsabilité exclusive du gouvernement fédéral eu égard aux Indiens et aux terres réservées aux Indiens. En adoptant l'article 55 de la Loi sur les services policiers, qui autorise le Solliciteur général à prendre d'autres dispositions avec la Couronne du chef du Canada dans certaines situations, l'Ontario a nécessairement envisagé la nécessité pour des agents de police d'agir à titre de représentants du gouvernement fédéral et, par conséquent, la possibilité d'être liée par le Code.

III - Jurisprudence des tribunaux supérieurs

[7] Pour situer la conclusion du Conseil dans son contexte, il y a lieu d'analyser un certain nombre de décisions importantes pour comprendre l'évolution de la doctrine de l'immunité de la Couronne dans la jurisprudence.

[8] Dans Sparling c. Québec (Caisse de dépôt et placement du Québec), [1988] 2 R.C.S. 1015, la Caisse de dépôt, un mandataire de la Couronne du chef du Québec, invoquait ce qui était alors l'article 16 [maintenant l'article 17] de la Loi d'interprétation pour contester l'application de la Loi sur les sociétés commerciales canadiennes. La Caisse de dépôt, qui détenait 10 % des actions d'une entreprise fédérale (Domtar), refusait de produire un rapport d'initié comme l'exigeait la Loi. La Cour suprême a statué que l'immunité de la Couronne n'est pas absolue et a énoncé la théorie de la renonciation implicite: la Couronne ne peut revendiquer les avantages de la loi sans en assumer également les obligations; il n'importe pas que l'avantage et la restriction concernés découlent de lois différentes; toutefois, il doit exister un lien suffisant entre les avantages et les obligations. La Cour suprême a conclu qu'il existait un lien suffisamment étroit entre le fait de détenir des actions et le respect de la Loi sur les sociétés commerciales canadiennes. Par conséquent, la Caisse de dépôt a été obligée de produire un rapport d'initié étant donné qu'elle ne pouvait manifestement pas se prévaloir de ses droits (par exemple, voter), d'une part, et refuser de s'acquitter des obligations auxquelles elle ne souscrivait pas, d'autre part. La Cour a statué que le lien entre les droits et les obligations dévolus à l'acheteur d'une action est «si étroit aussi bien du point de vue conceptuel qu'historique» que la Couronne est liée par l'ensemble de la Loi.

[9] Dans Alberta Government Telephones c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), [1989] 2 R.C.S. 225, CNCP a demandé au CRTC de rendre une ordonnance en vue d'obliger Alberta Government Telephones (AGT) à fournir des services de raccordement à CNCP moyennant un droit. La requête a été présentée conformément à la Loi sur les chemins de fer, qui régissait auparavant les services télégraphiques. Le CRTC a conclu que AGT, en devenant membre de Télécom Canada (TCTS), une société relevant de la compétence du CRTC, avait de ce fait renoncé à son droit à l'immunité. AGT a notamment fait valoir devant la Cour suprême que, à titre de mandataire de la Couronne provinciale, elle n'était pas liée par l'article 16 [maintenant l'article 17] de la Loi d'interprétation (la doctrine de l'immunité de la Couronne) et que, par conséquent, elle échappait à la compétence du CRTC.

[10] La Cour suprême a confirmé à nouveau la doctrine de la renonciation implicite, aussi appelée la théorie de l'exception fondée sur les avantages et les obligations, mais elle a conclu que, bien que AGT puisse obtenir de nombreux avantages du CRTC au moyen d'ententes de raccordement, ce serait «pousser la théorie un peu loin» que de conclure que AGT, par sa seule participation aux accords de TCTS, a accepté la compétence du CRTC.

[11] Dans un jugement complémentaire, FIOE c. Alberta Government Telephones, [1989] 2 R.C.S. 318, la Cour suprême a statué que, même si AGT est un ouvrage ou une entreprise de nature fédérale au sens de l'alinéa 92(10)a) de la Loi constitutionnelle, l'article 16 [maintenant l'article 17] de la Loi d'interprétation s'appliquait parce que le Parlement n'avait pas exprimé clairement dans le Code son intention de lier AGT à titre de mandataire de la Couronne du chef de l'Alberta. Elle a également conclu que AGT n'avait pas renoncé à son immunité étant donné l'inexistence de lien entre les activités de AGT et les dispositions pertinentes du Code. AGT n'avait pas outrepassé le mandat qui lui était conféré en vertu de la loi en concluant divers accords de raccordement comme membre de Télécom Canada.

[12] En 1993, la Cour suprême a statué, dans Ontario Hydro c. Ontario (Commission des relations de travail), [1993] 3 R.C.S. 327, que le Code s'appliquait aux relations de travail dans le secteur de l'énergie nucléaire en raison de l'article 18 de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique, une loi fédérale. Quelques jours plus tard, le syndicat des ingénieurs d'Hydro-Québec a présenté une demande d'accréditation en vertu du Code. Dans Hydro-Québec (1994), 95 di 34 (CCRT no 1080), le CCRT de l'époque a jugé que, à titre de mandataire de la Couronne, Hydro-Québec jouissait de l'immunité conférée par l'article 17 de la Loi d'interprétation et qu'elle n'était liée par le Code ni par mention expresse ni par déduction nécessaire. Il a en outre conclu qu'Hydro- Québec n'avait pas outrepassé les limites de son mandat en pénétrant dans un domaine de réglementation fédérale. Le fait qu'Hydro-Québec était liée par la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique ou qu'elle avait conclu une convention collective ne constituait pas une renonciation à son immunité. Par conséquent, les ingénieurs visés par la demande se trouvaient dans un vide juridique à l'égard duquel ni le Code du travail du Québec ni le Code canadien du travail ne s'appliquaient.

[13] La Cour d'appel fédérale a confirmé la décision du Conseil dans Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec c. Hydro-Québec, précité, et a invité le Parlement à modifier le Code en vue de combler le vide juridique. Le juge Décary, s'exprimant au nom de la Cour, s'est fondé sur le fait que la Cour suprême, dans AGT, précité, avait statué que AGT n'avait pas renoncé à son droit à l'immunité de la Couronne du simple fait qu'elle avait conclu des accords de raccordement avec un réseau national de télécommunications régi par la Loi sur les chemins de fer et réglementé par le CRTC. Selon lui, l'immunité est d'autant plus préservée que l'organisme de réglementation qui accorde censément les avantages, en l'occurrence le CCRT, n'est même pas mentionné dans la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique. Par conséquent, le juge Décary n'a pu déterminer l'existence de «lien étroit» très important entre les avantages et les obligations dans une situation où la loi elle-même ne confère pas au Conseil le droit de réglementer ce secteur. Il a donc statué qu'il n'y avait pas de lien entre les activités d'Hydro-Québec à titre d'ouvrage ou d'entreprise de nature fédérale et les dispositions de la Partie I du Code.

IV - Analyse et décision

[14] En l'espèce, le Conseil est aux prises avec des intérêts opposés qu'il doit mettre en équilibre avec les objectifs du Code et la doctrine de l'immunité de la Couronne énoncée par les tribunaux supérieurs. D'une part, l'Ontario demande le maintien de l'immunité de la Couronne; d'autre part, la CFNPA demande l'application du Code à l'égard de la Police provinciale parce que celle-ci a perdu son immunité en concluant l'Entente. L'Ontario estime que l'exception relative à la renonciation ne s'applique pas parce qu'il n'y a pas de lien suffisant entre le Code et l'Entente et que la Couronne ne tire aucun avantage de la loi fédérale.

[15] En vertu de l'article 17 de la Loi d'interprétation, la Couronne n'est ni liée ni touchée sauf si la réglementation contient des termes exprès à cet effet:

17. Sauf indication contraire y figurant, nul texte ne lie Sa Majesté ni n'a d'effet sur ses droits et prérogatives.

[16] Nous avons appris à la lecture de AGT, précité, que cet article s'applique aux Couronnes fédérale et provinciales. Par le passé, les arguments voulant que le Code ne puisse s'appliquer à la Couronne, sauf par mention expresse ou par déduction nécessaire, comme il a été soutenu dans Hydro-Québec, précitée, ont porté fruit. Il est également de notoriété publique que le Parlement est intervenu peu de temps après pour modifier le Code en ajoutant l'article 121.1.

[17] En l'espèce, la CFNPA affirme que, en concluant l'Entente, la Police provinciale a outrepassé son mandat en mettant sur pied une entreprise fédérale. Néanmoins, l'article 19 de la Loi sur les services policiers de l'Ontario, L.R.O., 1990, ch. P.15, précise qu'il incombe à la Police provinciale «1. [d']offrir des services policiers à l'égard des parties de l'Ontario qui n'ont pas de corps de police municipal, sauf des agents municipaux d'exécution de la loi». La Police provinciale n'a donc pas compromis son immunité en excédant son pouvoir; les réserves indiennes ne sont pas des enclaves fédérales à l'abri des lois provinciales comme il a été dit dans Cardinal v. Canada, [1992] 4 C.N.L.R. 1 (C.F., D.P.I.).

[18] Afin de déterminer si la doctrine de la renonciation s'applique en l'espèce, il faut procéder à une analyse des avantages et des obligations, comme l'a indiqué le juge La Forest, qui cite un passage de l'ouvrage de Colin H.H. McNairn, Governmental and Intergovernmental Immunity in Australia and Canada, Toronto, University of Toronto Press, 1977:

Il n'est pas essentiel... à l'applicabilité du principe de l'assujettissement de la Couronne que l'avantage conféré et la restriction qui s'y attache découlent de la même loi. La question cruciale consiste plutôt à savoir si les deux éléments sont suffisamment liés de sorte qu'il ait été prévu que l'avantage conféré était conditionnel au respect de la restriction imposée.

(page 11; traduction; reproduit à la page 1025 de Sparkling, précité; c'est nous qui soulignons)

[19] De l'avis du Conseil, ce qui distingue la Police provinciale de AGT c'est le fait que la Police provinciale a compromis son immunité en signant une Entente tripartite qui incorpore notamment un régime de relations de travail relatif aux services policiers dans la réserve. Il s'agit d'un régime de relations de travail vu que l'Entente décrit les salaires et les avantages sociaux, la méthode d'embauchage, les tâches, la formation ainsi que le processus disciplinaire des agents des Premières nations. Dans AGT, la Cour suprême se devait de prêter une attention toute particulière aux activités commerciales de AGT et aux avantages corollaires découlant de l'appartenance à un important réseau de télécommunications réglementé par le CRTC. La Cour a statué que l'immunité de AGT n'était pas compromise du fait de son appartenance au réseau. En d'autres termes, tant qu'elle n'outrepassait pas les limites du mandat qui lui avait été conféré par la loi, AGT ne renonçait pas à son droit à l'immunité. Ce n'est pas le cas en l'espèce. Au paragraphe 33, l'Entente prétend déterminer qui est l'employeur aux termes des diverses dispositions relatives aux services policiers:

33.(a) Lorsqu'un gouvernement des Premières nations ou un groupe de gouvernements des Premières nations assume la responsabilité d'un service policier pour les Premières nations mentionnées à la clause 4(a)(i) ou 4(a)(ii), à moins d'accords contraires, l'administration de ce service policier des Premières nations relève de l'organisme responsable du service policier des Première nations qui est l'employeur des agents des Premières nations et du personnel civil, qui reconnaît et qui accepte les responsabilités et obligations qui incombent aux employeurs en vertu de la loi.

(b) La Police provinciale ou un autre service policier concerné continue d'assumer la responsabilité de l'administration des services policiers avec les gouvernements des Premières nations qui choisissent de ne pas mettre sur pied leur propre service policier aux termes de la clause 4(a)(i) ou qui choisissent de ne pas faire partie du service policier régional des Premières nations aux termes de la clause 4(a)(ii).

(c) Dans les accords mentionnés aux clauses 4(a)(iii) ou 4(a)(iv), le gouvernement des Premières nations est l'employeur des agents des Premières nations et du personnel civil et le commissaire ou le chef de police compétent administre les services policiers des Premières nations conjointement avec les gouvernements des Premières nations concernés.

(d) Aux fins du présent paragraphe, «administration» comprend la responsabilité du paiement des salaires, de la rémunération, des avantages sociaux et des autres frais de fonctionnement engagés par le service policier des Premières nations.

(e) L'organisme responsable des services policiers qui prend en charge l'administration des services policiers aux termes de la clause 33(a) tient les registres et les dossiers, applique les procédures et prend les précautions obligatoires en ce qui a trait aux fonds alloués sous l'autorité du Parlement et de l'Assemblée législative respectivement.

(f) Rien dans le présent paragraphe n'interdit aux parties aux accords de services policiers des Premières nations de conclure des accords particuliers.

(pages 27-29; traduction; c'est nous qui soulignons)

[20] Même si l'Ontario, le Canada et les Premières nations peuvent conclure des ententes visant à offrir des services policiers dans les réserves et à partager les frais d'administration de ces services, le fait qu'elles ont désigné l'organisme qu'elles considèrent comme l'employeur des agents des Premières nations n'enlève pas au Conseil la responsabilité d'interpréter et de trancher les questions touchant l'application de l'article 4 du Code en ce qui a trait aux relations de travail régissant les ouvrages ou entreprises relevant de l'article 2, à savoir l'alinéa i), en application de l'alinéa 81(1)c) de la Loi sur les Indiens.

[21] S'il n'en était pas ainsi, les parties pourraient, par simple contrat, exclure leurs relations de travail de l'application de la loi fédérale, ce qui leur permettrait de créer leur propre code du travail. Comme il est indiqué dans le Préambule du Code, l'établissement de bonnes relations de travail et de méthodes de règlement positif des différends sert l'intérêt véritable du Canada; par conséquent, on ne peut prétendre que le Parlement voulait que des régimes particuliers de relations de travail aient préséance sur le Code.

[22] Dans Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, précitée, le Conseil a statué non seulement que le Code régit les relations de travail de la bande et de ses agents des Premières nations, mais également que c'est la clause 33(b) et non la clause 33(c) qui s'applique à la situation de fait mettant en cause la Police provinciale et les Mohawks of (the Bay of Quinte) Tyendinaga. Par conséquent, il a conclu que la Police provinciale est l'employeur au sens où l'entend le Code. Le Conseil n'a pas jugé que les parties ne pouvaient pas adapter leurs relations de travail aux réalités des services policiers dans les réserves; il a plutôt statué que, dans la mesure où la Police provinciale administre les conditions de travail, y compris les aspects financiers, et où les décisions de la bande sont assujetties au veto du commissaire de la Police provinciale, ce service policier relève de la compétence fédérale pour ce qui est de l'administration d'un régime de négociation collective avec les agents des Premières nations.

[23] Par conséquent, le Conseil souscrit au point de vue exprimé par le professeur François Chevrette dans un commentaire qu'il a publié et dans lequel il affirme que l'issue de l'affaire AGT aurait été différente s'il y avait eu un contrat, car c'était le maillon manquant de la chaîne. Le professeur Chevrette souligne l'importance de cet élément dans les termes suivants (voir Le téléphone et la Constitution (1990), 24 R.J.T. 185):

... Dans un passage repris avec approbation par le juge en chef du Canada, le juge Reed observe que CN-CP n'est pas membre du consortium Télécom. Elle ajoute que, s'il l'avait été et que sa demande avait eu quelque rapport avec un accord auquel AGT eut été partie, le résultat aurait pu être différent. En ce cas, en effet, il aurait été possible de considérer CN-CP et AGT comme des contractants: AGT prendrait avantage du contrat approuvé quant à son partenaire par le CRTC et pourrait être considérée comme ayant accepté, à titre d'obligation corrélative, la compétence de ce dernier et ses conséquences...

(page 196; c'est nous qui soulignons)

[24] Le Conseil conclut que l'Entente est ce maillon manquant de la chaîne qui fait que les relations de travail sont visées par l'Entente et qu'elles sont par conséquent du ressort du Conseil.

[25] La CFNPA soutient que la Police provinciale retire des avantages du financement fédéral auquel elle n'aurait par ailleurs pas accès si l'Entente tripartite n'existait pas. L'Ontario est d'avis que la Couronne ne tire aucun avantage du Code, de l'Entente ou de toute autre loi fédérale et qu'il n'existe donc pas de «lien étroit».

[26] Dans P.G. Alberta c. Putnam, [1981] 2 R.C.S. 267, la Cour suprême a examiné le pouvoir constitutionnel des services policiers de l'Alberta de sévir contre des agents de la GRC embauchés à contrat pour assurer des services policiers dans la province. Le juge en chef Laskin a jugé qu'il n'y avait pas lieu de faire de distinction entre l'application du droit criminel, du droit provincial ou des règlements municipaux. En fait, il a jugé que les ententes sur les services policiers comportaient certains avantages pour la province et a indiqué que la province pouvait modifier l'entente comme bon lui semblait si elle n'était pas satisfaite des services fournis par la GRC.

[27] Dans Sappier v. Tobique Indian Band (Council) (1988), 87 N.R. 1 (C.A.F.), le juge Desjardins, parlant des ententes fédérales-provinciales en matière de santé, d'éducation, de services sociaux et d'autres services, a reconnu que les fonds fédéraux obtenus grâce à la conclusion d'ententes favorisant l'autonomie des Premières nations constituaient un avantage implicite. De façon analogue, le Conseil estime que la gestion par la Police provinciale des services policiers dans les réserves représente un avantage important.

[28] L'Ontario exerce son pouvoir de fournir des services policiers dans les réserves de la province de deux façons: soit par délégation de pouvoirs au conseil de bande, soit par contrat avec le Canada. Dans l'un ou l'autre cas, les deux administrations, fédérale et provinciale, ont une obligation de fiduciaire envers les Premières nations. Dans Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, précitée, le Conseil a fait remarquer que la Loi sur les Indiens a délégué certains pouvoirs aux conseils de bande, notamment ceux visés à l'alinéa 81(1)c) relativement à l'observation de la loi et au maintien de l'ordre dans la réserve. Dans Whitebear Band Council v. Carpenters Prov. Council of Sask., [1982] 3 W.W.R. 554 (C.A. Sask.), le juge Cameron décrit cette délégation de pouvoirs dans les termes suivants:

Plus particulièrement, l'art. 81 de la Loi confère aux conseils de bande, en ce qui concerne la réserve et ses résidents, les pouvoirs et obligations qui sont normalement associés aux pouvoirs et obligations d'une municipalité rurale et de son conseil: un conseil de bande peut adopter des règlements pour régir entre autres la circulation, la construction et l'entretien d'ouvrages publics, le zonage, les jeux de hasard, les divertissements, les marchands ambulants, ainsi que la construction, la réparation et l'utilisation de bâtiments. Par conséquent, un conseil de bande – par voie d'une délégation de pouvoir accordée par le Parlement – exerce ces pouvoirs et d'autres pouvoirs municipaux et gouvernementaux dans la réserve où il a été élu.

Je crois qu'il y a lieu de souligner que la Loi sur les Indiens envisage un cheminement progressif vers l'autonomie gouvernementale dans les réserves ... et, aux termes de l'art. 83, le gouverneur en conseil peut déclarer qu'une bande «a atteint un haut degré d'avancement», dans lequel cas le conseil de bande peut, sous réserve de l'approbation du Ministre, réunir des fonds en prélevant des impôts sur l'évaluation des terres dela réserve et sur l'octroi de permis de place d'affaires. Dans l'intervalle, le conseil de bande obtient l'essentiel de ses fonds du gouvernement.

(pages 559-560; traduction, sauf pour l'extrait de la Loi sur les Indiens)

[29] Par conséquent, en attendant que l'autonomie gouvernementale devienne réalité, les conseils de bande ne peuvent conclure d'entente sur les services policiers sans exercer un pouvoir qui leur a été délégué en vertu de la Loi sur les Indiens. En bout de ligne, le pouvoir de créer un service policier dans une réserve en application de la Loi sur les Indiens peut être délégué par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien uniquement à un conseil de bande ou à une autre entité désignée pour fournir de tels services. Par conséquent, en conformité avec l'objet de l'entente, le conseil de bande peut, en tout temps, moyennant l'autorisation du Ministre, opter pour un autre service policier, par exemple celui d'une municipalité voisine, la GRC, ou encore mettre son propre service sur pied. Ces autres services policiers auraient le pouvoir d'appliquer le Code criminel dans la réserve de Bay of Quinte par le biais d'un contrat conclu par le conseil de bande et le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (voir Paul Band v. R., [1984] 1 C.N.L.R. 87; et Putnam, précité). Vu l'absence de motif permettant de conclure que l'Ontario a la compétence exclusive de fournir des services policiers, il doit y avoir d'autres avantages à mettre sur pied un tel programme lorsque ses coûts ne sont pas entièrement pris en charge par le Canada.

[30] Le Conseil estime qu'en concluant l'Entente tripartite l'Ontario entrevoyait la possibilité de mettre en place un système plus uniforme et intégré d'administration de la justice pour tous les résidents de la province, et d'obtenir une aide financière à cet égard. Par conséquent, l'Ontario est en mesure de (i) travailler de concert avec les Premières nations et de leur fournir des services policiers adaptés à leur culture, ce qui contribue à la sécurité de la population de l'Ontario (Préambule); (ii) de négocier et d'appliquer des lignes directrices mutuellement acceptables pour régler les problèmes d'application de la loi (paragraphe 27), notamment les chasses à l'homme, les avis d'entrée sur le territoire des Premières nations aux fins d'enquête et à d'autres fins liées à l'application de la loi, l'entrée pour des motifs d'urgence ou pour un autre motif spécial et ainsi de suite (paragraphe 28); (iii) d'obtenir la collaboration des services policiers des Premières nations, de la Police provinciale et des services policiers municipaux pour appliquer les lois provinciales dans les réserves (paragraphe 29); et (iv) de recevoir du Canada des fonds équivalant à 52 % du coût d'exécution d'un tel programme (paragraphes 34 à 48 inclusivement).

[31] Comme dans Sparling, précité, le Conseil juge qu'il existe un lien suffisamment étroit entre le contrôle des services policiers dans les réserves aux fins de la Loi sur les services policiers et la détermination des conditions d'emploi découlant de la prestation de ces services. Si l'Ontario choisit de négocier la prestation des services policiers dans les réserves et d'en assumer la responsabilité (l'avantage), elle doit accepter les conséquences des lois régissant les relations de travail (les restrictions), soit en l'espèce les lois relevant de la compétence fédérale. Le rapport entre les avantages et les restrictions est «si étroit aussi bien du point de vue conceptuel qu'historique» que la Police provinciale doit accepter d'être liée par le Code.

[32] Compte tenu des faits de la présente affaire, le Conseil voit mal comment le Procureur général peut prétendre que la province ne retire aucun avantage de l'Entente. Dans Putnam, précité, le juge en chef Laskin a résumé le fond d'une entente conclue entre l'Alberta et la GRC en vue d'offrir des services policiers.

Je tiens à préciser, avant de trancher ce pourvoi, que je reconnais que les dispositions concernant des services de police prises en vertu d'un contrat, celui en l'espèce ou un autre, intervenu entre la province et la G.R.C. revêtent un certain intérêt pour les provinces. La province, au moyen de ce contrat, a simplement conclu une entente globale aux termes de laquelle les services de police sont assurés par l'engagement de la gendarmerie fédérale plutôt que par l'établissement, soit directement, soit par l'intermédiaire d'une institution municipale, de son propre corps de police. Les parties ont évidemment un intérêt constant à remplir leurs rôles respectifs conformément au contrat, ne serait-ce qu'en raison de la perspective toujours présente des négociations en vue d'un renouvellement. La province de l'Alberta, par exemple, a nécessairement un intérêt à ce que l'entente soit efficace, non seulement du point de vue économique ou du bon fonctionnement, mais aussi du point de vue du rapport entre le gouvernement de l'Alberta à travers ses ententes concernant les services de police et la collectivité qui bénéficie de ces ententes. On est cependant bien loin du droit d'une partie contractante de s'immiscer dans le mode de fonctionnement adopté par l'autre partie contractante pour assurer les services visés par l'entente. Cela tient en dépit d'un empêchement constitutionnel comme celui qui a été invoqué en l'espèce de façon tout aussi claire que dans l'affaire Keable, précitée. Je dis cela non pas pour diminuer l'effet des observations faites sur la question directement soulevée en l'espèce, mais pour mettre encontraste la position de la G.R.C., en tant qu'institution fédérale, et l'intérêt qu'a la province à ce que des services de police soient fournis partout sur son territoire. En l'espèce on ne peut prétendre que les divers paragraphes de l'art. 33 dont j'ai déjà fait mention ont leur racine dans cet intérêt provincial.

(page 278; c'est nous qui soulignons)

[33] Cela dit, on pourrait soutenir que, vu que la GRC n'a pas perdu son immunité dans Putnam, la même logique devrait être appliquée à l'endroit de la Police provinciale. En outre, la doctrine de la renonciation semble uniquement s'appliquer aux entités provinciales. Henri Brun et Guy Tremblay ont analysé la jurisprudence fondée sur l'article 17 de la Loi d'interprétation dans Droit constitutionnel, 3e éd., Cowansville, Éd. Yvon Blais, 1997:

Comme il s'agit ici de la codification législative d'une prérogative gouvernementale, il eut été légitime de croire qu'en régime fédératif un parlement ne puisse y procéder que pour son gouvernement. Celui-ci, le gouvernement, est ici en effet l'objet direct de la législation, et non pas une quelconque partie subissant accessoirement les effets d'une législation portant sur un autre objet. Or, en droit fédératif, nous l'avons vu au chapitre VI, c'est l'objet qui est le critère de la compétence.

Ce n'est toutefois pas là la direction qu'a prise la Cour suprême: A.G.T. c. C.R.T.C., supra. La Cour a jugé, dans cette affaire, que l'article 16 de la Loi d'interprétation fédérale s'appliquait au gouvernement provincial, et elle a fait bénéficier celui-ci du fait de l'absence de toute mention expresse du gouvernement dans la loi fédérale en cause. Elle a dit qu'une immunité proprement provinciale n'était ni nécessaire ni souhaitable.

La question qui se pose est de savoir si la Cour suprême acceptera aussi facilement la réciproque. Acceptera-t-elle que la mention du gouvernement dans une loi provinciale fasse en sorte que le gouvernement fédéral se trouve de ce fait lié par cette loi? Acceptera-t-elle que le gouvernement fédéral soit lié par une loi québécoise d'application générale, même sans mention, parce que cette loi n'affecte pas de droit ou prérogative du gouvernement fédéral? Nous en doutons fort, car la Cour suprême a plutôt tendance à considérer que le gouvernement fédéral jouit d'une immunité absolue à l'encontre des lois provinciales: Alberta c. Commission canadienne des transports, [1978] 1 R.C.S. 61; P.G. Québec et Keable c. P.G. Canada, [1979] 1 R.C.S. 218. Voir également Lefebvre c. Gouvernement du Canada, [1980] 2 C.F. 199 (C.A.).

(page 719; c'est nous qui soulignons)

[34] Dans Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec c. Hydro-Québec, le juge Décary mentionne l'existence d'une intention, soit que l'Hydro-Québec savait certainement qu'elle compromettait son immunité quand elle a signé la convention collective avec tous les ingénieurs travaillant pour elle dans la province, compte tenu des conséquences sur Gentilly II. Toutefois, compte tenu de l'absence de lien entre la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique et le Code, il a conclu à l'absence d'intention dans cette affaire. Cette conclusion ne signifie pas que cet élément n'est pas pertinent en l'espèce. Quelle était alors l'intention de la Police provinciale quand elle a signé l'Entente?

[35] S'appuyant sur le paragraphe 43 de l'Entente, l'Ontario a fait valoir que, en attribuant au conseil de bande le rôle d'employeur aux termes de la clause 33(c), elle évitait d'empiéter sur la compétence fédérale en raison de l'application de la Loi sur les Indiens:

43. Aucun élément de la présente Entente ne doit être interprété comme influant sur les droits, les privilèges ou les libertés des Autochtones en application d'un traité ou de la Constitution ou comme leur causant un préjudice ou constituant une dérogation à ces droits, privilèges ou libertés qui sont dévolus ou qui pourraient être dévolus aux Première nations peu importe si ces droits, privilèges et libertés sont reconnus, établis et définis avant ou après l'exécution de l'Entente.

(traduction)

[36] C'est dans cette mesure que l'Ontario estimait qu'elle ne compromettait pas son immunité. Toutefois, elle est allée un peu trop loin en officialisant la gestion des relations de travail, le maillon manquant dont il est question dans AGT. Contrairement à la décision rendue dans Hydro-Québec, le Conseil conclut à l'existence d'une intention en l'espèce.

[37] Le Conseil n'est pas lié par les désirs exprimés par les parties, mais par les réalités constitutionnelles et les paramètres du Code. Même si l'Ontario n'avait pas l'intention d'être reconnue à titre d'employeur aux fins de l'Entente, comme l'a conclu le Conseil dans Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, précitée, les options prévues dans l'Entente ne se sont jamais concrétisées par la suite, du moins pas dans le cas des Mohawks of the Bay of Quinte. Par conséquent, l'intention qui existait au moment de la signature de l'Entente a mené à une nouvelle situation où la Police provinciale a été reconnue par le Conseil comme le véritable employeur. Comme l'a indiqué le juge en chef Laskin dans Putnam, précité, si la Police provinciale n'est pas satisfaite de cette décision, peut-être est-il temps de renégocier les modalités de l'Entente.

[38] Par conséquent, le Conseil conclut à l'existence d'un lien assez étroit entre le Code et l'Entente, de sorte que l'Ontario a renoncé à son immunité et est visée par les dispositions du Code canadien du travail relativement aux agents des Premières nations des Mohawks of (the Bay of Quinte) Tyendinaga représentés par la Canadian First Nations Police Association.

[39] Le Conseil a donc rendu l'ordonnance d'accréditation qui suit.

No d'ordonnance: 7903-U

CONCERNANT LE

Code canadien du travail

- et -

Canadian First Nations Police Association,

syndicat requérant,

- et -

Mohawks of the Bay of Quinte Tyendinaga Mohawk Territory,

Tyendinaga Mohawk Territory (Ontario),

employeur.

ATTENDU QUE le Conseil canadien des relations industrielles a reçu du syndicat requérant une demande d'accréditation à titre d'agent négociateur d'une unité d'employés de Mohawks of the Bay of Quinte Tyendinaga Mohawk Territory, en vertu de l'article 24 du Code canadien du travail (Partie I - Relations du travail);

ET ATTENDU QUE, après enquête sur la demande et étude des observations des parties en cause, le Conseil a constaté que le requérant est un syndicat au sens où l'entend ledit Code et a déterminé que l'unité décrite ci-après est habile à négocier collectivement et est convaincu que la majorité des employés dudit employeur, faisant partie de l'unité en question, veut que le syndicat requérant les représente à titre d'agent négociateur.

EN CONSÉQUENCE, le Conseil canadien des relations industrielles ordonne que Canadian First Nations Police Association soit accréditée, et l'accrédite par la présente, agent négociateur d'une unité comprenant:

«tous les policiers de Tyendinaga First Nations Police Service de Mohawks of the Bay of Quinte Tyendinaga Mohawk Territory».

DONNÉE à Ottawa, ce 25e jour de septembre 2000, par le Conseil canadien des relations industrielles.

(s) Michele A. Pineau

Vice-présidente

Référence: no de dossier 20230-C


AFFAIRES CITÉES

Alberta Government Telephones c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), [1989] 2 R.C.S. 225

Band (Paul) v. R., [1984] 1 C.N.L.R. 87

Cardinal v. Canada, [1992] 4 C.N.L.R. 1 (C.F., D.P.I.)

FIOE c. Alberta Government Telephones, [1989] 2 R.C.S. 318

Hydro-Québec (1994), 95 di 34 (CCRT no 1080)

Le téléphone et la Constitution (1990), 24 R.J.T. 185

Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, [2000] CCRI no 64; et 2001 CLLC 220-005

Ontario Hydro c. Ontario (Commission des relations de travail), [1993] 3 R.C.S. 327

P.G. Alberta c. Putnam, [1981] 2 R.C.S. 267

Sappier v. Tobique Indian Band (Council) (1988), 87 N.R. 1 (C.A.F.)

Sparling c. Québec (Caisse de dépôt et placement du Québec), [1988] 2 R.C.S. 1015

Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec c. Hydro-Québec, [1995] 3 C.F. 3 (C.A.)

Whitebear Band Council v. Carpenters Prov. Council of Sask., [1982] 3 W.W.R. 554 (C.A. Sask.)

LOIS CITÉES

Code canadien du travail, Partie I, art. 2; 4; 14(3)

Loi sur les Indiens, art. 81(1)c)

Loi d'interprétation, art. 17

Loi sur les services policiers de l'Ontario, art. 19

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