Contenu de la décision
Représentants des parties au dossier
Mme Alexiss Rusnak, en son propre nom;
Me Caroline Engmann, pour Affaires mondiales Canada.
[1] L’article 16.1 du Code prévoit que le Conseil peut trancher toute affaire ou question dont il est saisi sans tenir d’audience. Ayant pris connaissance de tous les documents au dossier, le Conseil est convaincu que la documentation dont il dispose lui suffit pour trancher la présente plainte sans tenir d’audience.
I.
Nature de la demande et contexte
[2] Mme Alexiss Rusnak (la requérante) a présenté une demande de réexamen le 11 septembre 2020. Elle demande au Conseil de réexaminer le refus opposé par le greffier de traiter une plainte pour représailles liée à la santé et à la sécurité, qu’elle a déposée en août 2020 en vertu de la partie II (Santé et sécurité au travail) du Code.
[3] Afin de bien comprendre l’affaire, le Conseil doit résumer brièvement les événements qui ont mené à la présente demande. Le Conseil souligne par ailleurs que la partie II du Code a été modifiée le 1er janvier 2021 par la substitution du terme « chef » (chef de la conformité et de l’application) au terme « ministre » (ministre du Travail). Étant donné que les faits de la présente affaire se sont produits avant l’entrée en vigueur de ces changements, le Conseil emploiera la terminologie qui était en usage avant le 1er janvier 2021.
[4] Le 5 novembre 2019, Mme Rusnak a exercé un refus de travailler en vertu du paragraphe 128(1) du Code, dans le cadre de ses fonctions à Affaires mondiales Canada. L’affaire a été transmise au Programme du travail d’Emploi et Développement social Canada, et un délégué officiel de la ministre (le délégué de la ministre) a mené une enquête sur le refus de travailler.
[5] Le 22 janvier 2020, le délégué de la ministre a communiqué une décision dans laquelle il concluait qu’il n’y avait pas de danger et que Mme Rusnak ne pouvait donc maintenir son refus de travailler. Le 28 janvier 2020, Mme Rusnak a présenté une demande pour interjeter appel de cette décision au Conseil en vertu du paragraphe 129(7) du Code. Cette demande d’appel, visant la décision concluant à l’absence de danger, a été transmise au Conseil aux fins de son examen (dossier du Conseil no 033522-C).
[7] Le 20 août 2020, Mme Rusnak a déposé une plainte pour représailles en vertu du paragraphe 133(1) du Code alléguant qu’Affaires mondiales Canada l’avait congédiée par mesure de représailles parce qu’elle avait exercé ses droits en matière de santé et sécurité au travail, ce qui contrevenait à l’article 147 du Code. Dans sa plainte, Mme Rusnak allègue que son congédiement constituait une mesure de représailles prise parce qu’elle avait soulevé des questions liées à de la violence et à un danger au travail, et qu’il était lié à son refus de travailler et à sa demande d’interjeter appel de la décision concluant à l’absence de danger. Elle affirme également que la lettre de congédiement viole son droit à la protection des renseignements personnels et donne une représentation trompeuse de ses renseignements médicaux personnels. Elle a également déposé une plainte auprès du Commissaire à la protection de la vie privée. Elle explique que les renseignements médicaux invoqués comme motifs de congédiement ont été fournis à l’employeur dans le contexte de son refus de travailler antérieur.
[8] Le 21 août 2020, un agent des relations industrielles du Conseil a avisé Mme Rusnak par téléphone du fait que le Conseil ne pouvait pas traiter sa plainte, car elle n’était pas de son ressort, ce que le greffier du Conseil a ensuite confirmé dans une lettre. Le greffier a avisé Mme Rusnak que, puisque l’employeur est Affaires mondiales Canada, un ministère fédéral, il apparaît que l’affaire est du ressort de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (CRTESPF). Les documents relatifs à la plainte lui ont été retournés, et aucun dossier n’a été ouvert.
II.
Analyse et décision
[11] Le pouvoir du Conseil de réexaminer ses décisions et ordonnances est établi à l’article 18 du Code. Selon l’article 18, le Conseil peut réexaminer, annuler ou modifier ses décisions ou ordonnances. Ce pouvoir inclut celui de réexaminer une décision rendue par un greffier autorisé à agir au nom du Conseil.
[13] Le paragraphe 123(2) du Code prévoit que la partie II du Code, qui concerne la santé et la sécurité au travail, « s’applique à l’administration publique fédérale et aux personnes qui y sont employées, dans la mesure prévue à la partie 3 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral » (la Loi).
[14] Aux termes de l’article 240 de la Loi, la partie II du Code « s’applique à la fonction publique et aux personnes qui y sont employées comme si la fonction publique était une entreprise fédérale visée par cette partie ». Il y a toutefois quelques exceptions à cette disposition, dont la suivante, qui est énoncée à l’alinéa 240a)ii) de la Loi : « pour l’application des articles 133 et 134 du Code canadien du travail, Conseil s’entend de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique ». Il est expliqué, au paragraphe 4(1) de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral, que la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique est maintenue sous le nom de Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral.
[16] Étant donné ce qui précède, le Conseil n’a pas compétence pour traiter une plainte pour représailles déposée par une employée de la fonction publique fédérale en vertu du paragraphe 133(1) du Code. Puisque Mme Rusnak était une employée d’Affaires mondiales Canada, soit un ministère fédéral, le Conseil n’a pas compétence sur sa plainte pour représailles. La question de la compétence est fondamentale pour ce qui est de la capacité du Conseil de statuer sur l’affaire. Le greffier a par conséquent confirmé que le Conseil ne pouvait traiter la plainte, car il n’a pas compétence, et a avisé Mme Rusnak que l’affaire semble être du ressort de la CRTESPF.
[18] Cet article a été ajouté lorsque le Règlement de 2001 sur le Conseil canadien des relations industrielles a été adopté. Les auteurs de Vers l’Équilibre : Code canadien du travail, Partie I, Révision, Ottawa, Développement des ressources humaines Canada, 1995 (le rapport Sims) – sur lequel se fondaient les modifications apportées au Code de 1999 – avaient recommandé que le Code permette au Conseil de prendre des règlements qui lui permettraient de déléguer à ses greffiers certains pouvoirs décisionnels sur des questions non contestées ou des questions de nature quasi administrative, pour autant qu’un réexamen par le Conseil soit prévu en cas de litige. Le rapport Sims soulignait que cela permettrait de traiter les questions courantes de manière plus expéditive.
[20] Mme Rusnak soulève trois motifs de réexamen. Premièrement, elle affirme que sa demande d’appel connexe, qui concerne la décision concluant à l’absence de danger, fait intervenir un certain nombre de documents qui contiennent des renseignements médicaux et de nature délicate. Dans le cadre de cette demande, elle a demandé une ordonnance de confidentialité pour assurer la protection de ses renseignements personnels. Elle est préoccupée par le fait que, si la plainte pour représailles est traitée par la CRTESPF, ce tribunal ne sera pas assujetti à la décision du Conseil concernant la confidentialité, ce qui, dans les faits, annulerait sa demande. Le Conseil constate toutefois que Mme Rusnak a ultérieurement retiré sa demande d’ordonnance de confidentialité dans le dossier du Conseil no 033522-C.
[23] Le Conseil reconnaît que la nécessité de présenter différentes demandes ou plaintes en matière de santé et sécurité au travail auprès d’instances différentes peut occasionner des difficultés et de la confusion, en particulier pour les parties qui se représentent elles-mêmes. Toutefois, comme on l’a expliqué ci-dessus, la plainte pour représailles est du ressort de la CRTESPF et relève du champ de compétence que le législateur a expressément exclu du ressort du Conseil. Le Conseil doit appliquer les lois telles qu’elles ont été adoptées et il n’a tout simplement pas autorité pour statuer sur une affaire qui n’est pas de son ressort. Bien qu’il puisse sembler logique que le Conseil traite une plainte fondée sur le paragraphe 133(1), lorsqu’il est saisi d’une demande d’appel visant une décision concluant à l’absence de danger fondée sur un ensemble de faits similaire, le Conseil n’a pas le droit de statuer sur une telle plainte.
III.
Conclusion
[26] Le Conseil est saisi de la demande d’appel relative à la décision concluant à l’absence de danger (dossier du Conseil no 033522-C) et il examinera cette affaire en temps voulu.
Traduction
|
____________________
|
|