Code canadien du travail, Parties I, II et III

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Motifs de décision

Syndicat des enseignantes et enseignants de la communauté Innue de Pessamit-CSN,

plaignant,

et

Conseil des Innus de Pessamit,

intimé.

Dossiers du Conseil : 29424-C, 29514-C et

29515-C

Référence neutre : 2016 CCRI 831

Le 10 juin 2016

Le Conseil canadien des relations industrielles (le Conseil) était composé de Me Louise Fecteau, Vice-présidente, ainsi que de Me Richard Brabander et M. Norman Rivard, Membres. Une audience a eu lieu à Baie-Comeau (Québec) les 9 et 10 décembre 2015.

Les trois dossiers mentionnés en rubrique ont été entendus au cours de ces deux journées d’audience. Bien que les trois plaintes déposées par le Syndicat des enseignantes et enseignants de la communauté Innue de Pessamit-CSN (le syndicat) concernent des questions distinctes, elles visent néanmoins des évènements qui se sont produits au cours d’une même période donnée, soit entre le 18 juin 2010 et le 1er avril 2012.

Ont comparu

Me Benoît Laurin, pour le Syndicat des enseignantes et enseignants de la communauté Innue de Pessamit-CSN;

Me Kenneth Gauthier, pour le Conseil des Innus de Pessamit.

Les présents motifs de décision ont été rédigés par Me Louise Fecteau, Vice-présidente.

I. Nature des plaintes

[1] Il s’agit de trois plaintes de pratique déloyale déposées en vertu des paragraphes 24(4) et 94(3) du Code canadien du travail (Partie I – Relations du travail) (le Code) par le syndicat au nom des enseignants et enseignantes (enseignants) des écoles primaire (école Nussim) et secondaire (école Uashkaikan) de Pessamit. Le syndicat allègue que l’employeur, le Conseil des Innus de Pessamit (Conseil des Innus ou l’employeur), a modifié, au printemps 2012, des conditions d’emploi des enseignants des écoles Nussim et Uashkaikan sans son consentement.

[2] La première plainte de pratique déloyale de travail (dossier no 29424-C) a été déposée auprès du Conseil le 16 mai 2012. Le syndicat allègue que l’employeur a contrevenu aux paragraphes 24(4) et 94(3) du Code en modifiant, le ou vers le 17 février 2012, les conditions de travail des enseignants; il s’agit de congés flottants qui ont été annulés par l’employeur. Le syndicat demande le rétablissement des conditions de travail qui prévalaient avant les modifications. Selon le syndicat, les enseignants auraient subi des baisses de salaire se situant entre 7 et 14 % en raison de cette annulation.

[3] La deuxième plainte de pratique déloyale de travail (dossier no 29514-C) a été déposée le 29 juin 2012. Le syndicat allègue que l’employeur aurait, le ou vers le 1er avril 2012, modifié sans son consentement les conditions d’emploi de douze enseignants spécialisés de l’école Nussim. Il aurait supprimé une prime de 800 $, somme répartie sur le salaire annuel. Le syndicat demande le rétablissement des conditions de travail qui prévalaient avant les modifications et le remboursement des sommes dues avec effet rétroactif.

[4] La troisième plainte de pratique déloyale de travail (dossier no 29515-C) a été déposée le 29 juin 2012. Le syndicat allègue que l’employeur a modifié les conditions d’emploi de certains enseignants de l’école Uashkaikan. Selon le syndicat, l’employeur aurait, le ou vers le 1er avril 2012, demandé à des enseignants de l’école Uashkaikan d’enseigner plus de 24 périodes et ce, sans leur verser le salaire qui était indiqué dans un contrat d’enseignement signé en décembre 2011 et dont les conditions avaient un effet rétroactif au mois d’août 2011.

II. Objection préliminaire

[5] Le procureur de l’employeur a soulevé une objection préliminaire selon laquelle les trois plaintes ont été déposées à l’extérieur des délais prescrits. Le Conseil a entendu les arguments à cet égard au cours de l’audience.

[6] Le Conseil rejette l’objection préliminaire soulevée par l’employeur, car il estime qu’elle a été soulevée tardivement, soit plus de trois ans après le dépôt des plaintes. À tout évènement, après avoir entendu les arguments des parties sur cette question, le Conseil n’a pas été convaincu que les plaintes ont été déposées tardivement et a décidé d’entendre le fond de l’affaire.

III. L’alinéa 94(3)e) du Code

[7] Le syndicat a déposé les trois plaintes en vertu du paragraphe 24(4) du Code, mais aussi en vertu de l’alinéa 94(3)e) du Code. Le Conseil constate que la preuve du syndicat a uniquement porté sur la prétendue violation du paragraphe 24(4) du Code.

[8] Le Conseil rejette donc la partie de la plainte reposant sur l’alinéa 94(3)e) du Code pour manque de preuve, conformément au paragraphe 16o.1) du Code.

IV. Contexte et faits entourant les trois plaintes

[9] Il est important de rappeler le contexte entourant les trois plaintes déposées par le syndicat les 16 mai et le 29 juin 2012. Les faits sur lesquels s’appuient les présentes affaires ne sont pas contestés.

[10] Le syndicat a déposé une demande d’accréditation auprès du Conseil le 21 novembre 2011. L’employeur a soulevé une objection préliminaire quant à la recevabilité de la demande d’accréditation et a signifié un avis de question constitutionnelle, conformément à l’article 57 de la Loi sur les cours fédérales, LRC 1985, c F-7.

[11] Après avoir entendu les parties sur cette question constitutionnelle, le Conseil a rejeté l’objection préliminaire de l’employeur, a déclaré qu’il avait la compétence constitutionnelle pour trancher la demande d’accréditation dont il avait été saisi le 21 novembre 2011 et a fait droit à la demande d’accréditation du syndicat (Conseil des Innus de Pessamit, 2012 CCRI 653). Le syndicat a donc été accrédité le 15 août 2012 pour représenter les enseignants de la communauté Innue de Pessamit (ordonnance no 10295-U).

[12] Les trois plaintes dont il est question ici ont donc été déposées après la demande d’accréditation datée du 21 novembre 2011.

[13] Il est donc important, à ce stade-ci, de faire l’historique des conditions de travail des enseignants qui prévalaient chez l’employeur à compter de juin 2010 :

  • Le 18 juin 2010, un Protocole d’entente (PE) est intervenu entre les enseignants des écoles Nussim et Uashkaikan de Pessamit et l’employeur prévoyant la parité salariale des enseignants avec ceux du réseau de l’enseignement primaire et secondaire du Québec.

  • Le PE prévoyait le respect des règles et des modalités d’application du Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (maintenant connu sous le nom du Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MES)) en matière d’enseignement. Il s’appliquait pour l’année scolaire 2010-2011 avec une possibilité de renouvellement pour l’année suivante.

  • À la fin mars 2011, l’employeur a fait face à des difficultés financières de taille et a donc procédé à une restructuration, qui s’est traduite par une coupure des heures régulières de travail des enseignants. Le Conseil des Innus a adopté une politique d’emploi prévoyant le gel des salaires et une réduction des heures de travail. De nouveaux contrats d’emploi ont été imposés par l’employeur, qui a modifié les horaires de travail et gelé les salaires des enseignants.

  • Le ou vers le 7 novembre 2011, l’employeur a décidé d’introduire 19 congés flottants au calendrier scolaire, dont 13 étaient considérés comme étant des « journées d’éducation autochtone » dédiées à la culture autochtone, à la suggestion des enseignants et pour pallier à leur mécontentement. Ces 13 journées d’éducation autochtone, qui se tenaient les vendredis, étaient dispensées par du personnel non-enseignant du Conseil des Innus, diminuant ainsi la charge de travail des enseignants un vendredi sur deux. Le calendrier scolaire a été réduit à 166 jours au lieu de 180 jours;

  • Le 21 novembre 2011, le syndicat a déposé sa demande d’accréditation pour représenter les enseignants des deux écoles primaire et secondaire;

  • En décembre 2011, à l’instigation du directeur intérimaire, un nouveau contrat de travail a été signé entre certains enseignants de l’école Uashkaikan et l’employeur relativement à l’ajout de périodes d’enseignement.

  • En février 2012, le MES et le Ministère des Affaires autochtones et Développement du Nord du Canada (AADNC) informaient l’employeur que le projet des journées d’éducation autochtone n’était pas conforme aux « normes d’exécution des services éducatifs » et a exigé le respect des journées d’éducation régulière, sous peine de couper 15 % des fonds octroyés. Ainsi, à partir du 17 février 2012, les enseignants ont dû enseigner tous les vendredis et reprendre les congés qui avaient été pris jusque-là.

  • Le 1er avril 2012, par suite de la revue annuelle des budgets pour l’exercice prenant fin le 31 mars 2012, le Conseil des Innus a donné instruction à la direction de l’école Uashkaikan de prendre acte que toute prime aux enseignants serait éliminée à partir d’avril 2014. Il a aussi annulé les contrats qu’il avait modifiés en décembre 2011 et a rétablis ceux qui s’appliquaient précédemment.

V. Observations écrites de l’employeur

[14] Relativement à la plainte au dossier no 29424-C, l’employeur soutient que le PE signé le 18 juin 2010 arrimant le salaire des enseignants avec celui des enseignants du MES était valide pour l’année scolaire 2010-2011, débutant le 1er septembre 2010 et se terminant le 31 août 2011.

[15] Il ajoute que la modification des horaires de travail en mars 2011 était liée à ses difficultés financières et a touché divers services, y compris l’enseignement. C’est ainsi que de nouveaux contrats d’emploi ont été signés en mars 2011, lesquels précisaient que la semaine de travail serait de 35 heures par semaine pendant 21 semaines, soit jusqu’au 26 août 2011, et de 30 ou 32,5 heures par semaine, selon le cas, pendant 31 semaines, soit jusqu’au 31 mars 2012.

[16] En ce qui concerne le contrat de Mme Mélanie Guay, l’employeur précise que le contrat signé à la fin mars 2011 prévoit un salaire de 47 427,65 $ par année selon un horaire de 35 heures par semaine jusqu’au 26 août 2011 et de 32,5 heures par semaine pendant 31 semaines, jusqu’au 31 mars 2012. Il soutient qu’il est inexact d’affirmer que les enseignants ont subi une baisse de salaire.

[17] Relativement aux 19 congés flottants, dont 13 étaient des journées d’éducation autochtone, qui ont vu le jour en novembre 2011, l’employeur indique que ce projet a été soumis pour l’approbation d’AADNC. AADNC a exigé le rétablissement du calendrier scolaire à 180 jours.

[18] L’employeur soutient que, le 9 novembre 2011, AADNC l’avait d’ailleurs informé que le nouveau calendrier scolaire était conditionnel à ce qu’il soit approuvé par le MES. Le 6 février 2012, AADNC avisait l’employeur du retour imposé au calendrier scolaire régulier. Le 17 février 2012, les enseignants ont donc dû retourner au travail selon le calendrier scolaire régulier. L’employeur soutient que les journées d’éducation autochtone ne constituaient pas des conditions de travail existantes au moment de la demande d’accréditation.

[19] En ce qui a trait à la plainte dans le dossier no 29514-C, liée à la prime de spécialiste, l’employeur estime que la lettre émise à Mme Mélanie Guay lors de la classification de son poste pour l’année 2009-2010 ne constitue pas un engagement de la part de l’employeur à verser une prime annuelle de 800 $ au-delà de l’année 2009-2010.

[20] L’employeur soutient que le PE intervenu en juin 2010 procurant la parité salariale des enseignants avec l’ensemble des enseignants de même niveau au Québec, ne prévoyait pas de prime de spécialiste. Ce protocole établissait un salaire déterminé par les échelles de traitement établies par le MES. L’employeur ajoute que le ministère ne prévoit pas de prime de spécialiste.

[21] L’employeur soutient qu’à compter du 18 juin 2010, la prime de spécialiste a été versée par erreur par le service de paie, de même que lorsque l’employeur a procédé à une restructuration en mars 2011. Il souligne néanmoins que les contrats d’emploi alors signés par les enseignants en mars 2011 ne prévoyaient pas de prime de spécialiste. L’employeur ajoute que c’est lors de la revue annuelle des budgets pour l’exercice prenant fin le 31 mars 2012 qu’il a constaté l’erreur et a rectifié la situation.

[22] En ce qui a trait à la plainte dans le dossier no 29515-C portant sur le fait que certains enseignants auraient travaillé plus de 24 périodes sans être rémunérés, l’employeur rappelle que la restructuration de mars 2011 s’est traduite par une coupure des heures normales de travail des enseignants. L’employeur reconnaît toutefois que certains enseignants ont travaillé plus d’heures que ce que prévoyaient leurs contrats de travail. Il estime que l’entente ou le contrat de travail de décembre 2011 de Mme Denise O’Leary, déposé en preuve, ainsi que ceux d’autres enseignants visés par la présente plainte sont non valides puisqu’ils sont non conformes à la Politique d’emploi en vigueur chez l’employeur à compter du 1er avril 2011. Ces contrats auraient dû être autorisés par résolution du Conseil des Innus pour être valides.

[23] Selon l’employeur, les enseignants visés par la présente plainte n’ont pas été requis d’enseigner plus de 24 périodes sans être rémunérés pour les heures supplémentaires. Il soutient que le paiement des heures supplémentaires est prévu dans un budget différent de celui des salaires, c’est-à-dire un budget de suppléance, et que toutes les heures supplémentaires faites avant le 31 mars 2012 ont été payées.

VI. La preuve

[24]  La preuve qui suit est pertinente aux trois plaintes. Le syndicat a fait entendre quatre témoins, soit Mesdames Marie-Josée Simard et Mélanie Guay, M. Jean-Marie Vollant et Mme Denise O’Leary.

[25] De son côté, l’employeur a fait entendre cinq témoins, soit Mme Manon Rock, Messieurs Jean Vollant et Jean‑Claude Vollant, et Mesdames Marie-Claude Allard et Danielle Rousselot.

[26] Seuls les témoignages pertinents aux fins de la détermination des questions en litige sont résumés ci-dessous.

A. Le syndicat

1. Mme Marie-Josée Simard

[27] Mme Simard est enseignante depuis août 1996 à l’école Nussim et occupait le poste de vice-présidente du syndicat en novembre 2014. Elle indique que l’employeur a arrimé les salaires des enseignants avec l’échelle salariale des enseignants du secteur public du Québec en juin 2010. Elle est d’avis que la parité salariale constituait une augmentation de salaire pour les enseignants des deux écoles.

[28] Mme Simard indique que le PE est entré en vigueur le 18 juin 2010 pour l’année scolaire 2010-2011 et n’a pas été reconduit pour l’année scolaire suivante.

[29] Mme Simard fait valoir que l’employeur a modifié les conditions de travail des employés à compter du 1er avril 2011, soit avant la fin de l’année scolaire 2010-2011, suivant l’introduction d’une Politique d’emploi adoptée par le Conseil des Innus au printemps 2011. Elle soutient que cette politique prévoyait un gel de salaire de tous les employés, y compris les enseignants, et entrainait une baisse de salaire. Mme Simard aurait personnellement subi une baisse de salaire équivalant à 7 %.

[30] Mme Simard indique également que cette politique adoptée par l’employeur a réduit le nombre d’heures normales de travail, lequel est passé de 35 à 32,5 heures par semaine.

[31] Mme Simard précise que M. Jean-Marie Vollant, alors Directeur général, aurait réuni tous les enseignants pour leur annoncer cette nouvelle politique en mars 2011. Elle indique que tous les enseignants ont reçu un nouveau contrat d’emploi au cours de cette rencontre, qui contenait les nouvelles conditions salariales. Elle ajoute que tous devaient signer le contrat sous peine de perdre leur emploi.

[32] Mme Simard précise que, par suite de cette diminution de salaire, les enseignants étaient mécontents et se sont réunis pour proposer à l’employeur un réaménagement du calendrier scolaire 2011-2012. L’employeur aurait accepté de réaménager l’horaire de travail des enseignants pour l’année scolaire 2011-2012; le nouvel horaire faisait en sorte qu’ils n’avaient pas à se présenter à l’école un vendredi sur deux, réduisant ainsi le nombre de jours d’enseignement à 166 plutôt que 180. Ces vendredis étaient considérés et identifiés comme étant des journées flottantes.

[33] Mme Simard indique que l’employeur a, en février 2012, modifié à nouveau le calendrier scolaire, le ramenant à 180 jours d’enseignement. Il a toutefois maintenu la réduction de salaire qui avait été décrétée en mars 2011.

[34] En contre-interrogatoire, Mme Simard a indiqué que c’était la première fois que l’employeur modifiait le calendrier scolaire comme il l’a fait en septembre 2011. Elle admet également que l’employeur faisait face à des difficultés financières sérieuses et qu’un cogestionnaire avait été imposé à l’employeur par AADNC. Mme Simard ne pouvait se souvenir à quel moment les enseignants auraient rencontré le cogestionnaire.

[35] Mme Simard admet que la convention collective des enseignants du Québec ne prévoit pas de prime de spécialiste.

2. M. Jean-Marie Vollant

[36] M. Vollant était Directeur général par intérim de 2010 à 2011 chez l’employeur, puis Directeur général de 2011 à 2012. Il est toujours au service du Conseil des Innus à titre de secrétaire et greffier. M. Vollant explique que les enseignants doivent être présents dans les écoles 200 jours par année et doivent enseigner 180 jours.

[37] M. Vollant indique que tous les employés, y compris les enseignants, ont subi en mars 2011 une baisse de salaire générée par une réduction des heures de travail. Il ajoute que les salaires ont également été gelés. Il précise que l’employeur faisait face à des difficultés financières de taille. Il ajoute que le cogestionnaire, de concert avec l’employeur, a proposé cette solution en vue de réduire le déficit accumulé. C’est dans ce contexte que les journées flottantes, à raison de deux vendredis par mois, ont été mises de l’avant pour l’année scolaire débutant en septembre 2011.

[38] M. Vollant précise que les directions d’écoles ainsi que les parents des élèves s’opposaient à la modification du calendrier scolaire. M. Vollant indique qu’après quelques réunions avec le MES et avec AADNC, il a fallu revenir au calendrier scolaire de 180 jours et reprendre les journées d’enseignement qui avaient été déclarées comme étant des journées flottantes jusque‑là.

[39] En contre-interrogatoire, M. Vollant confirme que le financement du Conseil des Innus provient essentiellement d’AADNC et de Santé Canada. Il affirme que ce sont ses deux principales sources de revenus et que l’employeur n’avait pas de pouvoir de taxation, ni ne recevait aucun revenu lié à l’impôt foncier.

[40] M. Vollant explique qu’AADNC a constaté un déficit d’environ 25 à 30 millions de dollars en 2007 et a donc imposé à l’employeur un cogestionnaire afin d’enrayer ledit déficit; la seule autre option étant la tutelle. Ainsi, de 2008-2009 à 2012, le cogestionnaire prenait toutes les décisions et avait mis en place des mécanismes pour gérer les finances.

[41] M. Vollant indique que 42 employés sur 350 ont été mis à pied en février 2011 et que les autres ont subi une réduction de leurs heures normales de travail. Il précise que tous les secteurs d’activités ont été examinés, y compris le secteur de l’enseignement.

[42] M. Vollant précise que le cogestionnaire a rédigé les nouveaux contrats d’emploi imposés aux enseignants en mars 2011.

3. Mme Mélanie Guay

[43] Mme Guay enseigne l’anglais à l’école Nussim depuis 2008. Elle dit avoir reçu un contrat d’emploi de son employeur qu’elle a signé en juin 2011. Elle indique que son contrat prévoyait une prime de spécialiste de 800 $, répartie par période de paye pour l’année en cours. Elle affirme avoir un salaire plus élevé que les autres enseignants compte tenu de sa spécialité. Mme Guay mentionne que d’autres enseignants au primaire reçoivent également cette prime, dont Mesdames Marianne Vallée (enseignement religieux), Agathe Vachon (enseignement préscolaire), Yolande Simon (enseignement préscolaire), Nicole Hervieux (enseignement préscolaire), Émilie Riverin (enseignement préscolaire), Madeleine Benjamin‑Hervieux (enseignement préscolaire) et Jacqueline Simon (services complémentaires).

[44] Mme Guay indique avoir eu droit à cette prime dès son embauche, mais que celle-ci lui a été retirée le 1er avril 2012. Mme Guay affirme ne pas s’être aperçue immédiatement que la prime ne lui était plus versée, puisque le montant était étalé sur l’année scolaire et correspondait à 0,44 $ par paye.

[45] En avril ou mai 2012, Mme Guay serait allée voir la directrice de l’école pour connaître la raison justifiant le retrait de sa prime de spécialiste. On lui aurait dit qu’il s’agissait d’une décision de l’employeur.

[46] Mme Guay fait valoir que le nouveau contrat d’emploi qu’elle a dû signer en 2011 prévoyait une réduction des heures normales de travail de 35,5 à 32,5 heures par semaine. Elle estime que cela signifiait pour elle une baisse de salaire.

[47] Mme Guay confirme le témoignage de Mme Simard selon lequel le PE daté de juin 2010 prévoyait la parité salariale avec les enseignants du secteur public au Québec. Elle précise que l’employeur ne lui a jamais indiqué que la prime de spécialiste serait retirée en juin 2010.

[48] En contre-interrogatoire, Mme Guay admet que le PE de juin 2010 a eu comme effet de diminuer ses heures de travail; elle ajoute toutefois qu’aucune mention relative au retrait de la prime de spécialiste n’y était faite.

4. Mme Denise O’Leary

[49] Mme O’Leary est enseignante depuis 1999 à l’école Uashkaikan. Elle enseigne les mathématiques à temps plein. En 2011-2012, elle revenait d’un congé de maladie et travaillait à temps partiel. Elle indique qu’elle a signé un premier contrat d’emploi avec l’employeur en mars 2011. Mme O’Leary dit avoir subi une réduction d’heures normales de travail, passant de 35 à 30 heures par semaine pour l’année scolaire 2011-2012, comme les autres enseignants de l’école.

[50] Mme O’Leary indique qu’elle aurait enseigné au-delà de 24 périodes au cours de l’année scolaire 2011-2012, malgré la réduction des heures de travail imposée par l’employeur. Elle aurait ainsi enseigné 26 périodes plutôt que 24; chacune des périodes étant de 75 minutes. Elle explique la manière de comptabiliser les périodes d’enseignement pour montrer qu’elle a subi une baisse de salaire. Elle précise qu’une prime de 5 863 $ avait été prévue dans son contrat pour l’année scolaire 2011-2012.

B. Les sommes réclamées

[51] Avant de terminer sa preuve, le procureur du syndicat a précisé les sommes réclamées pour chacune des trois plaintes en l’instance, tout en indiquant que les modifications aux conditions de travail des enseignants visés par ces plaintes sont survenues alors que la demande d’accréditation avait été déposée auprès du Conseil :

  • Pour le dossier no 29424-C : il porte à l’attention du Conseil les noms de tous les enseignants visés par cette plainte, dont la liste a été déposée en preuve. Il demande que soient rétablies les conditions de travail qui prévalaient en septembre 2011.

  • Pour le dossier no 29514-C : il demande au Conseil d’ordonner à l’employeur de rétablir le paiement de la prime de 800 $ versée aux enseignants spécialistes et de rembourser les sommes perdues et ce, rétroactivement au 1er avril 2012.

  • Pour le dossier no 29515-C : il demande au Conseil d’ordonner à l’employeur de rétablir les conditions de travail qui prévalaient avant les modifications survenues le ou vers le 1er avril 2012 et de rembourser les enseignants qui ont travaillé plus de 24 périodes d’enseignement à partir de l’année scolaire 2011-2012.

C. L’employeur

1. Mme Manon Rock

[52] Mme Rock travaille à l’école Nussim depuis 1999 auprès d’élèves ayant des difficultés d’apprentissage. Entre 2009 et 2010, elle a assuré l’intérim à la direction de l’école; elle a aussi assuré la direction de l’école entre juillet 2010 et juillet 2012.

[53] Mme Rock donne des explications au sujet du PE intervenu avec les enseignants en juin 2010, qui assurait la parité salariale avec les enseignants du secteur public du Québec. Elle explique que peu de temps après, soit en mars 2011, il y a eu une diminution des heures normales de travail pour tous les enseignants, la prestation de travail passant de 35 à 32,5 heures par semaine. Cette diminution a eu comme effet de diminuer les salaires des enseignants.

[54] Mme Rock explique que les enseignants souhaitaient obtenir un vendredi sur deux de congé, en guise de compensation par suite de la réduction des heures de travail et de la perte salariale. Elle ajoute que le fait de ne pas travailler un vendredi sur deux réduisait ainsi la semaine de travail de 32,5 heures à 26 heures par semaine.

[55] Mme Rock explique qu’AADNC a ordonné à l’employeur de revenir au calendrier scolaire prévoyant 180 jours d’enseignement à compter de février 2012. Elle précise avoir été avisée de cette situation le 15 février, dans le cadre d’une rencontre avec AADNC et le MES.

[56] En contre-interrogatoire, Mme Rock précise que ce sont les enseignants qui ont proposé à l’employeur de compenser la réduction des heures de travail par la prise de congés flottants.

2. M. Jean Vollant

[57] M. Vollant est enseignant en éducation physique à l’école Uashkaikan depuis 1989. De 2009 à 2012, il a aussi dirigé l’école.

[58] Il relate les évènements de 2011-2012 au cours desquels le cogestionnaire a imposé des mesures drastiques en coupant dans le budget.

[59] En ce qui a trait aux horaires des enseignants, il indique qu’ils doivent enseigner 24 périodes au cours d’un cycle de neuf jours. Il donne l’exemple d’un professeur qui aurait un salaire annuel de 48 000 $, pour qui enseigner 24 périodes signifie qu’il recevra 2 000 $. Il ajoute que si un professeur enseigne plus de 24 périodes, il obtiendra une rémunération supplémentaire.

[60] M. Vollant indique qu’à la lumière de l’horaire de travail de Mme O’Leary déposé en preuve, cette dernière aurait travaillé 26 périodes au cours d’un cycle de neuf jours, à raison de 75 minutes par période.

[61] M. Vollant explique que les enseignants de son école souhaitaient l’introduction de journées flottantes pour compenser les coupures de salaire de mars 2011. L’employeur a accepté d’introduire les journées flottantes au calendrier scolaire 2011-2012 dans ce contexte. Il indique que le personnel de soutien prenait alors soin des élèves et que cette pratique de journées flottantes a pris fin le ou vers le 13 février 2012.

[62] En contre-interrogatoire, M. Vollant indique que Mme Rock a suggéré d’introduire des journées flottantes au calendrier scolaire de 2011-2012. Il précise que les enseignants menaçaient de ne pas débuter l’année scolaire si cette mesure n’était pas mise en vigueur.

[63] Questionné sur le nouveau calendrier scolaire 2011-2012, M. Vollant indique qu’il a été communiqué aux enseignants au mois de juin 2011, suivant la règle habituelle.

3. M. Jean-Claude Vollant

[64] M. Vollant occupe le poste de directeur général du Conseil des Innus depuis 2012. Auparavant, il était le directeur stratégique des finances. Il explique les difficultés financières auxquelles faisait face l’employeur depuis plusieurs années et précise que c’est un cogestionnaire qui était responsable de la gestion de l’organisation. Le cogestionnaire a pris des mesures pour réduire les heures de travail de tout le personnel, y compris les enseignants.

[65] Il ajoute que, durant cette période critique, des mises à pied en bloc ont eu lieu et la semaine normale de travail pour tout le personnel est passée de 35 à 31 heures par semaine, sans que leurs responsabilités ne soient modifiées.

[66] Relativement aux enseignants, M. Vollant indique qu’il y a eu aussi une réduction des heures de travail pour l’année financière débutant le 1er avril 2011 et se terminant au 31 mars 2012. Il ajoute qu’un contrat de travail standard a été remis à tous les enseignants et qu’ils avaient l’obligation de le signer.

[67] M. Vollant explique avoir lui-même subi une baisse de salaire par suite des coupures de budget en 2011.

[68] En contre-interrogatoire, M. Vollant explique que le PE intervenu en juin 2010 relevait aussi de la responsabilité du cogestionnaire, qui est entré en poste en 2007 et a quitté en 2012.

VII. Arguments

A. Le syndicat

[69] Le procureur débute sa plaidoirie en faisant un résumé des trois plaintes en l’instance déposées en vertu du paragraphe 24(4) du Code. Ces trois plaintes s’inscrivent dans le contexte où l’employeur a imposé des modifications aux conditions d’emploi des enseignants en les obligeant à signer un nouveau contrat d’emploi s’ils désiraient conserver leurs emplois.

[70] Il soumet au Conseil la décision rendue par la Cour suprême du Canada (CSC) dans Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale 503 c. Compagnie WalMart du Canada, 2014 CSC 45, [2014] 2 R.C.S. 323 (Wal-Mart) et estime qu’elle s’applique en tous points aux présentes affaires. En ce sens, il soutient que le paragraphe 24(4) du Code a pour objet de maintenir l’équilibre dans le rapport de force entre les parties, à partir du moment où une demande d’accréditation est déposée et ce jusqu’à la signature de la première convention collective.

[71] Le procureur soutient que le fardeau de preuve repose sur l’employeur, qui doit démontrer que les conditions d’emploi existaient avant le dépôt de la demande d’accréditation, soit avant la période de gel.

[72] Relativement au dossier no 29424-C, le procureur soutient que le témoignage de Mme Simard montre qu’un PE établissant la parité salariale avec le traitement des enseignants du Québec a été mis en œuvre en 2010. Il ajoute que la parité salariale équivalait à une augmentation du salaire des enseignants du Conseil des Innus.

[73] Le procureur ajoute que, selon la preuve, le Conseil des Innus, qui faisait face à des difficultés financières, a imposé un plan de redressement en mars 2011. Il a alors modifié les conditions salariales des enseignants en réduisant leurs heures normales de travail. Le procureur renvoie le Conseil aux contrats d’emploi déposés en preuve à cet effet.

[74] Le procureur ajoute que l’employeur a par la suite introduit au calendrier scolaire 2011‑2012 les journées d’éducation autochtone mais que cela n’a pas connu le succès escompté, puisqu’il a fallu revenir au calendrier scolaire de 180 jours d’enseignement à compter de la mi‑février 2012.

[75] Le procureur soutient que plusieurs témoins, dont Mme Rock et M. Vollant, ont indiqué que l’introduction des journées d’éducation autochtone avait pour but de compenser la réduction des heures de travail imposées par l’employeur en avril 2011 pour le calendrier scolaire 2011‑2012. Il rappelle que la demande d’accréditation du syndicat avait été déposée le 21 novembre 2011.

[76] Le procureur soutient que l’employeur a rétabli le calendrier scolaire de 180 jours d’enseignement dès le 17 février 2012 et jusqu’à la fin de l’année scolaire, sans le consentement du syndicat. Il souligne donc que les enseignants ont travaillé dix jours plutôt que neuf et qu’ils n’ont pas été rémunérés en conséquence. Il estime à 210 $ par jour la perte financière subie par enseignant et que cela toucherait environ 50 enseignants. Il demande que ces sommes d’argent leur soient remboursées et ce, jusqu’à la signature de la convention collective.

[77] Relativement au dossier no 29514-C concernant les enseignants spécialisés, le procureur invoque que le salaire annuel de ces enseignants prévoyait à l’origine une prime de 800 $, et ce, avant que ne soit signé le PE intervenu le 18 juin 2010 et qui assurait la parité salariale avec les enseignants du MES.

[78] Le procureur reconnait que ledit PE ne mentionne pas de prime de spécialiste. Il soutient que les enseignants ont mis deux ans avant de constater que leur prime leur avait été retirée par l’employeur. Il soutient que l’employeur a modifié les conditions salariales de ces enseignants, et ce, sans le consentement du syndicat. Le procureur doute du fait que la modification ait eu lieu pour corriger une erreur administrative. Il réclame le versement de cette prime pour les enseignants spécialisés.

[79] Relativement au dossier no 29515-C, le procureur soutient que les enseignants visés par cette plainte n’ont pas été rémunérés pour les périodes d’enseignement effectuées au-delà de 24 périodes. Il invite le Conseil à examiner le contrat de Mme O’Leary daté du 31 mars 2011, qui prévoit 24 périodes d’enseignement, alors que son contrat daté de mars 2012 stipule 26 périodes d’enseignement.

[80] Le procureur fait valoir qu’il ne remet pas en question le fait que le Conseil des Innus ait connu des difficultés financières importantes. Il reproche toutefois à l’employeur d’avoir établi de nouvelles conditions de travail sans son consentement.

B. L’employeur

[81] D’entrée de jeu, le procureur de l’employeur soutient que le Conseil se doit d’examiner la situation présente comme celle d’un employeur raisonnable dans les mêmes circonstances. Le procureur ajoute que, contrairement au statut de l’employeur dans la décision Wal-Mart, le Conseil des Innus est une corporation publique qui est régie par la Loi sur les Indiens, LRC 1985, c I-5, et dont la raison d’être est de gérer les ressources financières que les autorités fédérales lui attribuent.

[82] Le procureur soutient que le Conseil des Innus est responsable de la protection des valeurs de la communauté qu’elle représente et que sa subsistance dépend des autorités fédérales. Il rappelle que le Conseil des Innus n’a aucune autre ressource financière et n’a aucun pouvoir de taxation.

[83] Le procureur fait valoir que la preuve montre sans équivoque que la situation financière du Conseil des Innus s’était détériorée au cours des dernières années. Il rappelle d’ailleurs au Conseil qu’on avait imposé à l’employeur un cogestionnaire à compter de 2007 pour assainir ses finances. Il s’agissait selon le procureur d’une situation particulière et inusité, car le déficit était d’au moins 20 millions de dollars.

[84] Il soutient que le cogestionnaire avait le contrôle total du budget et imposait ses directives. Malgré cette situation critique, le procureur fait valoir que l’employeur a accepté d’assurer aux enseignants la parité salariale avec ceux du Québec et de mettre en œuvre le PE le 18 juin 2010. Il soutient que le Conseil des Innus était de bonne foi et voulait satisfaire ses enseignants qui seraient les mieux rémunérés parmi tous les employés du Conseil des Innus.

[85] Il ajoute qu’en avril 2011, le cogestionnaire a imposé des mesures drastiques et que personne n’a été épargné; 46 personnes ont d’ailleurs perdu leur emploi. Le procureur soutient que, selon la preuve, tous les employés, y compris les enseignants, ont subi une réduction des heures de travail provoquant ainsi une baisse de salaire. Ainsi, tous les employés ont été soumis à de nouvelles conditions salariales en mars 2011; l’imposition de ces conditions ne relevait pas du contrôle de l’employeur.

[86] Le procureur de l’employeur fait remarquer que les journées d’éducation autochtone ont été proposées par les enseignants eux-mêmes. Les enseignants souhaitaient que cette mesure soit mise en place ou, à défaut de ce faire, qu’ils retournent à une semaine normale de travail de 35 heures par semaine. Cette mesure avait donc pour but de compenser la perte de 2,5 heures de travail qui avait été imposée pour l’année scolaire 2011-2012. Le procureur soutient d’ailleurs que durant cette période, les enseignants ont travaillé 32,5 heures par semaine et ont été rémunérés pour ces heures. Le 17 février 2012, lorsque le calendrier scolaire est revenu à 180 jours d’enseignement, les enseignants ont continué d’être rémunérés pour 32,5 heures par semaine.

[87] À tout évènement, le retour au calendrier scolaire de 180 jours a été imposé par AADNC.

VIII. Analyse et décision

[88] Dans les trois présentes plaintes, le syndicat soutient que l’employeur a enfreint le paragraphe 24(4) du Code. Ce paragraphe instaure le statu quo des conditions d’emploi après la notification d’une demande d’accréditation. En d’autres termes, le cours normal des affaires doit être assuré pour les employés lorsqu’une demande d’accréditation est déposée au Conseil. Le paragraphe 24(4) est formulé comme suit :

24(4) Après notification de la demande d’accréditation, l’employeur ne peut modifier ni les taux des salaires, ni les autres conditions d’emploi, ni les droits ou avantages des employés de l’unité visée, sauf si les modifications se font conformément à une convention collective ou sont approuvées par le Conseil. Cette interdiction s’applique, selon le cas :

a) jusqu’au retrait de la demande par le syndicat ou au rejet de celle-ci par le Conseil;

b) jusqu’à l’expiration des trente jours suivant l’accréditation du syndicat.

[89] Le Conseil a souvent explicité la nature de l’interdiction imposée à l’employeur dans ce paragraphe et le fardeau qui lui incombe, notamment dans la décision Bizeau, 2004 CCRI 261 :

[51] … Dans l’affaire Bessette Transport Inc. (1981), 43 di 64 (CCRT no 299), le prédécesseur de l’actuel Conseil, le Conseil canadien des relations du travail (CCRT), s’est exprimé ainsi au sujet de cette disposition (alors le paragraphe 124(4) du Code) :

D’autre part, tout geste de l’employeur modifiant les conditions d’emploi aurait comme conséquence de mutiler l’intégrité du libre régime de négociations collectives car, l’employeur pourrait, par des gestes calculés, «pipper» les dés en sa faveur avant de se présenter à la table de négociations, obligeant ainsi le syndicat à «remonter la côte», le plaçant donc en position nettement désavantageuse et défavorable, ce qui aurait pour conséquence de rompre l’équilibre entre les parties.

Un deuxième facteur apparaît extrêmement important dans l’examen par le Conseil d’une plainte en vertu du paragraphe 124(4). Le ratione materiae d’une violation de cette disposition se rattache spécifiquement au fait brut et matériel d’une modification des conditions, salaires, droits et privilèges, sans qualification aucune. Il ne s’agit donc pas d’évaluer ou de supputer les motifs de l’employeur, en pareille cause, contrairement à une plainte de pratique déloyale, en vertu de l’article 184 [maintenant l’article 94], où l’attitude anti-syndicale (anti union animus) peut avoir un impact considérable dans l’appréciation des faits.

Il s’agit donc de décider si, oui ou non, il y a eu changements ou modifications des conditions de travail, de l’échelle de salaires, des droits et privilèges des employés visés, sans plus.

(page 76; c’est nous qui soulignons)

[52] Cette disposition n’empêche pas un employeur d’apporter des changements à son entreprise, à la condition toutefois de satisfaire au critère du statu quo (business as before). Ce critère a été plus explicitement décrit par la Commission des relations de travail de l’Ontario dans l’affaire Spar Aerospace Products Ltd., [1979] 1 Can LRBR 61:

Il faut souligner que l’approche du «statu quo» exige que l’ensemble de la relation employeur-employé fasse l’objet d’un gel. Lorsqu’elle interprète l’article 70 [Disposition sur le gel de la Loi de 1995 sur les relations de travail de l’Ontario, L.O. 1995, ch. 1, Ann. A], la Commission n’accorde pas un poids démesuré à l’expression «taux de salaires», mais elle reconnaît qu’il faut l’interpréter dans le contexte des autres termes qui figurent dans cet article. Il faut donner également un sens aux mots «les autres conditions d’emploi, ou les droits, privilèges ou devoirs de l’employeur, du syndicat ou des employés» et, selon la Commission, l’article 70, interprété globalement, témoigne de l’intention du législateur de préserver dans son entier la relation employeur-employé qui existait auparavant.

...

Le «statu quo» ne signifie pas que l’employeur ne peut continuer de diriger ses activités. Il signifie simplement qu’un employeur doit poursuivre ses activités selon le mode établi avant l’apparition des circonstances ayant donné lieu au gel, afin de donner un point de départ clair aux négociations et d’éviter l’effet négatif du retrait d’avantages attendus sur la représentation des employés par un syndicat. Le droit de gestion est maintenu, étant assujetti seulement à la condition que les activités se poursuivent comme avant. À notre avis, cette condition ne peut être considérée comme une condition trop rigoureuse si l’on tient compte du fait que c’est la direction qui est la mieux placée pour savoir si elle maintient en réalité le statu quo...

(pages 68-69; traduction)

[90] Le Conseil note également que la CSC a précisé les exigences de l’article 59 du Code du travail, RLRQ c C-27, disposition similaire au paragraphe 24(4) du Code, dans l’arrêt Wal-Mart. La CSC a indiqué que le gel des conditions de travail visait à faciliter l’accréditation et à favoriser la négociation de bonne foi entre les parties. Elle a aussi détaillé le fardeau applicable :

[39] En conséquence, selon l’art. 59, la preuve d’une modification unilatérale revient au syndicat représentant les employés. Pour se décharger de ce fardeau, ce dernier devra démontrer : (1) qu’une condition de travail existait au jour du dépôt de la requête en accréditation ou de l’expiration d’une convention collective antérieure ; (2) que cette condition a été modifiée sans son consentement ; (3) que cette modification est survenue entre le début de la période prohibée et, selon le cas, le premier jour d’exercice du droit de grève ou de lock-out, ou encore le jour où a été rendue une sentence arbitrale.

[91] Au-delà des différences entre le libellé de l’article 59 du Code du travail et celui du paragraphe 24(4) du Code, qui établissent quelques distinctions, le Conseil est d’avis que la décision de la CSC ne change pas substantiellement la jurisprudence applicable en l’espèce.

[92] L’objectif visé par le paragraphe 24(4) du Code est d’éviter que les rapports employeurs‑employés ne soient pas perturbés en cas du rejet de la demande d’accréditation. En ce sens, il importe donc de maintenir la situation dans l’état dans lequel elle était avant le dépôt de la demande, à moins que le Conseil approuve les modifications aux conditions de travail ou que ces modifications soient conformes à une convention collective. Précisons qu’aucune demande d’autorisation n’a été déposée au Conseil par l’employeur relativement aux modifications alléguées par le syndicat et que les parties n’avaient pas conclu de convention collective.

[93] À la lumière de la jurisprudence, le Conseil doit donc d’abord déterminer s’il y a eu des modifications aux conditions de travail dans les présents dossiers. Dans l’affirmative, il doit ensuite déterminer si ces modifications s’inscrivent dans la poursuite des activités selon ce qui prévalait avant le dépôt de la demande d’accréditation.

[94] Le Conseil traitera les plaintes une à une en fonction de ces critères jurisprudentiels.

1. Plainte au dossier no 29424-C

[95] Le syndicat allègue que l’employeur a contrevenu aux paragraphes 24(4) et 94(3) du Code lorsqu’il a modifié les conditions de travail des enseignants le ou vers le 17 février 2012. Dans les faits, l’employeur a annulé des congés flottants (les journées d’éducation autochtone) octroyés un vendredi sur deux, ce qui aurait entrainé des baisses de salaires.

[96] Le Conseil retient de la preuve que l’employeur a opéré une restructuration importante en mars 2011 en raison de difficultés financières; la restructuration imposait une diminution des heures de travail et donc une baisse de salaire aux enseignants. Le Conseil retient aussi que l’employeur avait accepté d’introduire, par le biais des journées d’éducation autochtone, un calendrier scolaire réduit, et ce, à partir de septembre 2011. Ce nouveau calendrier faisait suite à une suggestion des enseignants pour amoindrir les effets de la restructuration; il devait toutefois être approuvé par AADNC et le MES.

[97] La demande d’accréditation du syndicat a été déposée le 21 novembre 2011, soit après la réduction d’heures de travail normales imposée par l’employeur en mars 2011 et après l’introduction du calendrier scolaire réduit. La plainte au dossier no 29424‑C doit être considérée dans ce contexte.

[98] Le 16 février 2012, le syndicat a transmis une lettre de mise en demeure au Conseil des Innus. Cette mise en demeure traitait de l’annulation des journées d’éducation autochtone introduites pour l’année scolaire 2011-2012. La lettre est formulée ainsi :

Madame,

Monsieur,

Par la présente, nous vous informons que nous avons reçu le mandat de notre client, le Syndicat des enseignantes et enseignants de Pessamit, de vous faire parvenir la présente.

Selon nos informations, vous vous apprêteriez à exiger des membres du Syndicat qu’ils entrent au travail les vendredis, et ce, à compter de demain.

Vous n’êtes pas sans savoir que notre client a déposé une demande d’accréditation le 21 novembre 2011. À cette date, les conditions de travail qui étaient alors en vigueur pour les membres du Syndicat n’incluaient pas de travail ou de présence aux écoles les vendredis.

Par souci de commodité, nous reproduisons les dispositions du Code canadien du travail qui interdisent à un employeur d’agir comme vous vous apprêtez à le faire :

En vertu de ce qui précède, vous ne devez pas modifier les conditions de travail des membres du Syndicat sans avoir obtenu, au préalable, l’autorisation du Conseil.

En conséquence, vous êtes par la présente mis en demeure de ne pas modifier les conditions de travail des membres du Syndicat en leur imposant de travailler ou de se rendre présents aux écoles les vendredis à compter du 17 février 2012.

Sachez qu’à défaut de vous conformer aux exigences de la loi, nous avons le mandat d’entreprendre toute procédure judiciaire jugée opportune dans les circonstances, n’excluant pas la demande d’une ordonnance provisoire.

Sans autre avis ni délai.

VEUILLEZ AGIR EN CONSÉQUENCE.

[99] L’employeur reconnait qu’il a modifié les conditions de travail de ses enseignants alors que le Conseil était saisi d’une demande d’accréditation. Il importe de préciser qu’il aurait dû obtenir le consentement du Conseil comme le prévoit le Code, ce qu’il n’a pas fait.

[100] Le Conseil doit donc déterminer si l’employeur a fourni une preuve suffisante pour démontrer que ces modifications unilatérales répondaient au critère du statu quo. Le Conseil doit ainsi examiner si l’employeur a agi dans le cours normal de ses activités. À défaut de tirer cette conclusion, le Conseil devra ordonner que soient rétablies les conditions d’emploi qui prévalaient au moment du dépôt de la demande d’accréditation.

[101] La preuve montre que le rétablissement du calendrier scolaire de 180 jours et des conditions imposées en mars 2011 par l’employeur a été fait par suite de la réception d’une lettre d’AADNC datée du 6 février 2012. Cette lettre avisait l’employeur que la mesure introduisant les journées d’éducation autochtone ne respectait pas les « normes d’exécution des services éducatifs » et contrevenait à l’obligation contractuelle de l’entente de financement. Plus précisément, la lettre disait notamment ceci :

Compte tenu de ce qui précède, considérant que les « normes d’exécution des services éducatifs » ne sont pas respectées, ce qui contrevient à l’obligation contractuelle de votre entente de financement 2011-2012, AADNC n’a d’autre choix que d’exiger le rétablissement immédiat des journées d’éducation régulières pour les élèves du primaire et du secondaire. À défaut de recevoir, au plus tard le 15 février 2012, une confirmation du Conseil quant au respect de cette condition, AADNC procèdera à des retenues de fonds sur votre entente de financement. Ces retenues seront établies à 15% de votre financement de base.

[102] Cette lettre d’AADNC a été précédée d’une autre lettre transmise le 9 novembre 2011, qui informait le Conseil des Innus qu’une reconnaissance du MES était requise avant de valider l’introduction des 13 journées d’éducation autochtone réduisant le nombre de jours d’enseignement. Elle imposait la condition d’acceptation en ces termes :

Objet : Condition d’acceptation du nouveau calendrier scolaire

Chef et vice-chefs,

Par la présente, le ministère des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada (AADNC) accuse réception de votre correspondance du 1er novembre 2011, nous informant de l’établissement d’un nouveau calendrier scolaire incluant 13 journées d’éducation autochtone.

Néanmoins, afin de démontrer que les « normes d’exécution des services éducatifs respectent les lois applicables » (clause 4.2.2 de votre entente de financement), le Conseil doit entreprendre les démarches auprès du ministère de l’Éducation, des Loisirs et des Sports (MELS) afin d’obtenir la reconnaissance nécessaire de son projet pédagogique particulier. Cette reconnaissance est requise compte tenu que le contenu des 13 « Journées d’éducation autochtone » ne fait pas partie de la liste des matières du Régime pédagogique du MELS.

Le Conseil devra, à l’intérieur du plan d’action de la gestion soumis à AADNC, démontrer trimestriellement l’avancement des démarches menées auprès des autorités provinciales compétentes. Le projet pédagogique devra avoir obtenu une reconnaissance formelle du MELS d’ici le 30 juin 2012. À défaut d’obtenir cette confirmation, le Ministère sera dans l’obligation d’exiger le rétablissement du régime pédagogique régulier.

[103] L’employeur a donc rétabli le calendrier scolaire régulier le 15 février 2012 dans ce contexte, c’est-à-dire sous peine de voir ses fonds coupés s’il ne respectait pas l’obligation imposée par le ministère. En d’autres termes, l’employeur n’avait d’autre choix que de remettre en place le calendrier scolaire régulier prévoyant les 180 jours d’enseignements.

[104] Dans ces circonstances, le Conseil est d’avis que l’employeur a respecté la doctrine du statu quo en se conformant aux instructions du MES et en rétablissant les conditions qu’il avait imposées en mars 2011, soit avant la demande d’accréditation.

[105] Par conséquent, la plainte au dossier no 29424-C est rejetée.

2. Plainte au dossier no 29514-C

[106] Le syndicat prétend que l’employeur a coupé la prime de spécialiste de certains enseignants à compter d’avril 2012, soit après le dépôt de sa demande d’accréditation, contrevenant ainsi au paragraphe 24(4) du Code.

[107] La preuve a effectivement démontré que certains enseignants avaient obtenu cette prime lors de leur embauche, soit avant le 18 juin 2010. Mme Guay est notamment venue témoigner pour expliquer qu’une lettre de l’école primaire Nussim datée du 16 septembre 2009 lui avait été transmise, indiquant qu’une prime de spécialiste de 800 $ serait ajoutée à son salaire de base.

[108] L’employeur soutient que cette prime a été annulée en juin 2010, après la signature du PE qui arrimait les salaires des enseignants aux salaires prévalant dans le réseau de l’enseignement primaire et secondaire de l’ensemble du Québec. Il précise toutefois que c’est uniquement à la fin de mars 2012 qu’il a constaté son erreur et rectifié la situation, après la revue annuelle des budgets pour l’exercice financier en cours. L’employeur explique qu’il n’a pas rectifié la situation de façon rétroactive. Mme Simard est venue témoigner sur le fait que les enseignants du Québec n’ont pas de prime de spécialiste.

[109] Le Conseil note également que le PE ne fait pas mention de primes de spécialiste :

1. OBJET DU PROTOCOLE

Le présent protocole établit les conditions de travail et de rémunération pour l’année scolaire 2010-11. Il ne reconnaît pas d’autres droits et privilèges qui n’y sont pas mentionnés.

[110] À la fin du mois de mars 2011, soit avant le dépôt de la demande d’accréditation du syndicat, l’employeur a fait signer de nouveaux contrats d’emploi à ses enseignants; ces contrats prévoyaient un gel des salaires et une réduction des heures normales de travail. Cette signature se voulait le corollaire de l’entrée en vigueur d’une nouvelle politique d’emploi en avril 2011. L’employeur s’engageait aussi à ajuster la rémunération des enseignants à compter du 1er avril 2012, pour la rendre conforme aux échelles de traitement du MES en vigueur. Aucune mention relative à une prime de spécialiste n’y était faite.

[111] De fait, la prime a-t-elle été versée par erreur aux enseignants visés après que l’employeur eut établi la parité salariale? Ce qui est certain, c’est que les échelles de traitement des enseignants sont devenues, à compter du 18 juin 2010, les mêmes que celles que le MES appliquait. La preuve a aussi montré que le MES ne prévoyait pas de prime de spécialiste pour les enseignants.

[112] Le syndicat doute que la décision de l’employeur de supprimer la prime de spécialiste découle d’une erreur administrative. Compte tenu de la preuve, le Conseil est d’avis que l’employeur a simplement corrigé une erreur dont il a pris connaissance lors de la révision de l’exercice financier prenant fin le 31 mars 2012.

[113] Dans ces circonstances, le Conseil conclut que l’employeur a agi dans le cours normal de ses activités et qu’il répondait, par conséquent, au critère du maintien du statu quo exigé par le Code.

[114] Par conséquent, la plainte 29514-C est rejetée.

3. Plainte au dossier no 29515-C

[115] Cette plainte a aussi trait à des modifications apportées par l’employeur le 1er avril 2012, soit après le dépôt de la demande d’accréditation. Elle concerne des périodes d’enseignement que certains enseignants du secondaire auraient effectuées au-delà des 24 périodes d’enseignement normalement exigées. Ces modifications seraient devenues effectives du 1er avril 2012 au 31 mars 2013.

[116] Le Conseil estime d’abord approprié de revoir la chronologie des évènements :

  • Le 1er avril 2011, suivant sa Politique d’emploi, l’employeur a imposé de nouveaux contrats de travail aux enseignants. Les contrats prévoyaient une prestation de travail de 30 heures par semaine, soit 24 périodes d’enseignement échelonnées sur neuf jours de classe.

  • Le 21 novembre 2011, le syndicat a déposé sa demande d’accréditation pour représenter les enseignants de l’école primaire Nussim et de l’école secondaire Uashkaikan.

  • En décembre 2011, un nouveau contrat de travail est signé entre certains enseignants et le Conseil des Innus, à l’instigation du directeur intérimaire. Le contrat prend acte du fait que certains enseignants travaillent plus que les 24 périodes initialement prévues et formalise ces heures additionnelles comme des heures normales de travail plutôt que des heures supplémentaires.

  • En mars 2012, lors de la revue annuelle des budgets pour l’exercice financier en cours, l’employeur se rend compte que les nouveaux contrats ne respectent pas les procédures d’autorisation en place. Il a donc décidé de rétablir, pour avril 2012, les contrats qui étaient valides avant le dépôt de la demande d’accréditation, soit ceux d’avril 2011.

[117] L’employeur soutient que toute décision relative aux modifications des contrats était interdite depuis le 1er avril 2011 et aurait dû être approuvée au préalable par une résolution du Conseil des Innus. Il prétend ainsi que le rétablissement des contrats antérieurs, lors de la revue annuelle des budgets, repose sur la découverte d’une erreur administrative. De plus, l’employeur estime que la modification des contrats aurait aussi dû être approuvée par le Conseil pour être valide.

[118] Le Conseil ne peut évidemment pas avoir approuvé les modifications apportées en décembre 2011, ni d’ailleurs celles d’avril 2012, puisqu’il n’a jamais été saisi d’une telle demande. Il appert que l’employeur n’a pas non plus consulté le syndicat avant de mettre en œuvres ces modifications.

[119] Afin de justifier une modification des conditions d’emploi, l’employeur doit usuellement démontrer qu’il a agi selon le mode de gestion établi avant le dépôt de la demande. La jurisprudence précitée précise que cette condition ne peut être considérée comme une condition trop rigoureuse si l’on tient compte du fait que c’est la direction qui est la mieux placée pour savoir si elle maintient en réalité le statu quo.

[120] Le Conseil estime toutefois que la présente plainte soulève un problème sérieux, dans la mesure où elle postule que l’employeur a modifié une condition d’emploi après le dépôt de la demande d’accréditation du syndicat et qui n’a fait l’objet d’aucune validation.

[121] Le Conseil ne possède aucune preuve lui permettant de déterminer que la modification contractuelle de décembre 2011 relevait du cours normal des activités de l’entreprise. L’employeur a lui-même fait valoir qu’elle était viciée et que c’est pour cette raison qu’il a dû rétablir le contrat de travail de ses enseignants qui était conforme à sa Politique d’emploi.

[122] Le Conseil est donc d’avis qu’il ne peut conclure que l’employeur a enfreint le paragraphe 24(4) du Code en rétablissant les conditions d’emploi qui s’appliquaient avant le dépôt de la demande d’accréditation.

[123] Par conséquent, la plainte au dossier no 29515-C est rejetée.

IX. Conclusion

[124] Il s’agit d’une décision unanime du Conseil, qui rejette les trois plaintes de pratiques déloyales de travail à l’étude.

 

 

____________________

Louise Fecteau

Vice-présidente

 

____________________

Richard Brabander

Membre

 

 

____________________

Norman Rivard

Membre

 

 

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