Tribunal canadien des droits de la personne

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Tribunal canadien des droits de la personne

Entre :

Heather Lynn Grant

la plaignante

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

Commission

- et -

Manitoba Telecom Services Inc.

l'intimée

Décision

Membre : Sophie Marchildon

Date : Le 26 avril 2012

Référence : 2012 TCDP 10

 



I.                   La plainte et le contexte

[1]               La plaignante, Mme Heather Lynn Grant, a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) le 10 janvier 2008. Elle a allégué que son employeur, Manitoba Telecom Services Inc. (l’intimée ou MTS), a commis un acte discriminatoire au sens de l’article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H‑6 (la LCDP) quand il a décidé de mettre fin à son emploi et de garder à son service une employée ayant moins d’ancienneté qu’elle, en se fondant sur ses évaluations du rendement défavorables. La plaignante allègue que les commentaires défavorables qui ont été faits dans les évaluations du rendement étaient liés à la déficience dont elle est atteinte, le diabète de type II. Après avoir examiné son rapport et les observations faites en réponse à ce dernier, la Commission a décidé, en application du paragraphe 41(1) de la LCDP, de statuer uniquement sur le licenciement présumé, ce qui inclut les évaluations du rendement de la plaignante datées de février 2006 et de janvier 2007. Le 30 décembre 2009, en vertu de l’alinéa 44(3)a) de la LCDP, la Commission a demandé que le Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal) instruise la plainte.

[2]               La Commission n’a pas pris part à l’audition de l’affaire, qui a eu lieu les 1er, 2 et 5 novembre 2010, ainsi que du 7 au 11 février 2011.

II.                Les faits

[3]               Après avoir examiné avec soin la totalité des observations et des éléments de preuve des parties, y compris l’exposé conjoint des faits, mes conclusions de fait sont les suivantes.

[4]               La plaignante a été au service de MTS durant 26 ans, jusqu’à son licenciement le 19 février 2007.

[5]               Entre l’année 2001 et le 19 février 2007, la plaignante a travaillé auprès de MTS à titre de représentante régionale du soutien aux comptes (RRSC). Entre l’année 2003 et la date de son licenciement, soit le 19 février 2007, la plaignante a travaillé sous la supervision de Mme Ann Ukrainec. Au cours de cette dernière période, son rendement a été officiellement évalué par l’intimée (par l’entremise de Mme Ukrainec) sur une base annuelle ou semestrielle au moyen d’un document appelé [traduction] « Partenariat pour le rendement et les résultats » (l’évaluation du rendement). L’intimée se sert des évaluations du rendement comme moyen d’évaluer et de consigner le rendement de ses employés. Durant toute l’année, le supérieur immédiat d’un employé peut ajouter des commentaires à ce document.

[6]               Durant ses années de service auprès de MTS, la plaignante a été membre de la Telecommunications Employees Association of Manitoba (le syndicat ou la TEAM) et régie par une convention collective négociée par la TEAM et MTS (la convention collective).

[7]               Le 19 août 2005, le médecin de la plaignante, le Dr Barry Van Jaarsveld, du Bethesda Hospital de Steinbach (Manitoba), a diagnostiqué qu’elle souffrait d’hyperglycémie. Par la suite, vers le mois de septembre 2005, elle a reçu un diagnostic de diabète de type II.

[8]               Les Lignes directrices de pratique clinique 2008 de l’Association canadienne du diabète définissent le diabète comme suit : une glycémie à jeun supérieure ou égale à 7,0 mmol/L ou bien une glycémie veineuse occasionnelle supérieure ou égale à 11,1 mmol/L ainsi que des symptômes du diabète ou encore une glycémie de 11,1 mmol/L ou plus deux heures après l’ingestion de 75 g de glucose dans le cadre d’une épreuve d’hyperglycémie provoquée. La glycémie (ou taux de glucose dans le sang) est mesurée sous forme de valeurs instantanées, présentes à un moment précis dans le temps, et sous forme de valeurs moyennes mesurées au cours d’une période de 90 jours environ (test sur 90 jours). Les valeurs instantanées sont mesurées en laboratoire à partir de sang veineux. Les mesures du glucose dans le sang capillaire sont prises par les patients eux-mêmes à l’aide d’un glucomètre personnel. Le test de dosage de l’hémoglobine glycosylée, ou test HbA1C, fournit des informations sur la glycémie au cours des trois mois précédents. Les symptômes d’une hyperglycémie comprennent, notamment, les suivants : soif, faim accrue, mictions fréquentes, infections urinaires, infections à levures récurrentes, vision trouble, mictions fréquentes la nuit, perte de poids, assèchement de la bouche, malaises, mauvaise cicatrisation, infections, fatigue, état mental altéré, comprenant agitation, irritabilité inexpliquée, inattention, léthargie extrême ou confusion. De nombreux symptômes sont liés à la perte de glucose dans les urines. Bien que le seuil de sécrétion du glucose dans les urines varie, en moyenne une glycémie supérieure à 12 mmol/L est associée à une perte de glucose dans les urines ainsi qu’à des symptômes d’hyperglycémie. Il est possible de ramener le taux de glucose dans le sang à un niveau normal grâce à une combinaison de divers traitements : suivre un régime diabétique, perdre du poids et atteindre un poids corporel idéal, suivre un programme d’exercices régulier, respecter la prise prescrite de médicaments oraux ou d’insuline et changer ses habitudes de vie en vue de réduire les facteurs de stress. Le taux de glucose dans le sang peut parfois atteindre un pic en raison d’une maladie, d’une infection ou du stress, même si l’affection est bien gérée. Ces pics ne ressortent pas automatiquement lors d’un test sur 90 jours, comme le test HbA1C.

[9]               Le 26 septembre ainsi que les 13, 18 et 24 octobre 2005, la plaignante a consulté de nouveau son médecin, le Dr Van Jaarsveld. Après la consultation du 24 octobre 2005, ce dernier a avisé l’intimée par écrit que la plaignante ne pourrait pas travailler du 25 octobre au 30 novembre 2005 pour des raisons d’ordre médical. Le Dr Van Jaarsveld a mentionné que la plaignante était une diabétique nouvellement diagnostiquée et que, à cause du stress qu’elle subissait au travail, il lui était impossible de contrôler sa glycémie. Il a ajouté qu’il était possible que cette période de congé soit prolongée.

[10]           Du 25 octobre au 30 novembre 2005, la plaignante a pris un congé de maladie. L’intimée a embauché un coordonnateur en matière de retour au travail indépendant, Des Hathaway, pour aider la plaignante à revenir au travail en servant de liaison entre cette dernière, son médecin et l’intimée, tant pendant son congé qu’après son retour au travail. Des Hathaway a communiqué régulièrement avec la plaignante, son médecin et l’intimée (par l’entremise de Mme Ukrainec). Le 29 décembre 2005, Des Hathaway a rédigé à l’intention de l’intimée un bref rapport d’une page dans lequel il a fait part de l’avis du Dr Van Jaarsveld selon lequel la plaignante était apte à retourner au travail sans restriction et qu’elle était en mesure à ce moment-là de travailler pleinement, sans besoins spéciaux ou mesures d’accommodement destinés à soutenir son rétablissement et son retour au travail en toute sécurité. Le 30 novembre 2005, Des Hathaway a écrit à Ann Ukrainec pour dire que la plaignante retournerait au travail le 1er décembre; cependant, à cause de son état de santé et du fait que son affection était impossible à contrôler, s’il fallait qu’elle se retrouve dans la même situation que celle où elle se trouvait à son départ il y aurait un sérieux risque que son affection s’aggrave encore.

[11]           La plaignante est revenue au travail le 1er décembre 2005.

[12]           Le 14 mars 2006, le Dr Van Jaarsveld a écrit de nouveau à l’intimée pour lui faire savoir que, d’après ce qu’il avait compris, la plaignante subissait beaucoup de stress au travail. Il a mentionné qu’il ne semblait pas que la charge de travail avait une incidence sur son état. Il a écrit que le stress était un grave élément déclencheur pour la maladie dont elle souffrait et il recommandait vivement de muter la plaignante aux bureaux de l’entreprise à Brandon afin qu’elle puisse être proche de sa famille et de ses amis et bénéficier ainsi d’un solide réseau de soutien.

[13]           La supérieure de la plaignante, Ann Ukrainec, n’a pas consenti au départ à ce que la plaignante soit mutée aux bureaux de Brandon, mais, une fois que cette dernière a obtenu l’appui de son syndicat, la mutation a été approuvée. Ann Ukrainec a donné son accord à cette mesure à la condition que la plaignante règle les sources de conflits potentiels de manière à ce qu’elle puisse appuyer avec succès le personnel des ventes dans le cadre d’un travail d’équipe très exigeant.

[14]           Vers le 13 avril 2006, la plaignante a été mutée de Steinbach à Brandon; ces deux villes sont situées au Manitoba. Malgré la mutation, la plaignante a continué de travailler sous la supervision d’Ann Ukrainec.

[15]           En 2005 et en 2006, dans ses évaluations du rendement, la plaignante a été l’objet de commentaires défavorables et de critiques de la part de sa supérieure, Ann Ukrainec.

[16]           Le 2 octobre 2006, l’intimée a fait l’annonce d’une importante initiative de réduction des effectifs, dans le cadre de laquelle elle offrait aux employés membres de la TEAM un programme d’encouragement à la retraite volontaire (PERV). Ce programme permettait aux employés qui le voulaient de démissionner en échange d’une indemnité.

[17]           Soixante-dix-sept employés de la TEAM ont offert volontairement de se prévaloir du PERV, et l’intimée a accepté soixante-treize offres.

[18]           Après l’initiative du PERV, l’intimée a décidé, en raison de pressions exercées sur le marché, de continuer à réduire ses effectifs au Manitoba. L’entreprise a ciblé trente-cinq autres postes du service des ventes à éliminer. Les dirigeants de ce service ont eu pour tâche de décider de quelle façon ils allaient réduire le nombre de ses employés. Pour les postes de RRSC, il a été décidé qu’il était possible d’en éliminer jusqu’à trois sans que cela ait une incidence préjudiciable sur le service à la clientèle. La région de Brandon était sursouscrite, et elle comptait deux RRSC : la plaignante et Sharon Horner. MTS a décidé que l’une des deux serait licenciée.

[19]           L’alinéa 26.03.1 de la convention collective indique comment procéder au licenciement d’un employé qui occupe un poste à plusieurs titulaires :

[traduction] Dans le cas des postes à plusieurs titulaires, s’il n’existe entre ces derniers aucune différence sur le plan des compétences, des aptitudes, du rendement, des qualifications et du lieu de travail, le titulaire ayant le moins d’ancienneté, selon la période de service validée nette (PSVN), est le premier licencié.

[20]           Dans l’exposé conjoint des faits que les parties ont déposé, il est dit que l’alinéa 26.03.1 de la convention collective exige que l’on procède à une comparaison des compétences, des aptitudes, du rendement, des qualifications et du lieu de travail des employés occupant un poste à plusieurs titulaires. Un comité de sélection (le comité de licenciement) formé de membres non syndiqués, Brian Arnal, vice-président aux ventes, et Larry Goerzen, directeur des ventes, a eu pour tâche de choisir les employés à licencier. Le comité de licenciement a étudié le dossier personnel de la plaignante, lequel comprenait ses évaluations du rendement, et il en a fait de même pour Sharon Horner. Il a comparé les compétences, les aptitudes, les qualifications et le rendement des deux titulaires; il a également interrogé leur gestionnaire immédiat respectif qui, dans le cas de la plaignante, était Ann Ukrainec. Le comité de licenciement a décidé de licencier la plaignante et de conserver Sharon Horner, même si la plaignante était l’employée ayant le plus d’ancienneté. Il a fondé sa décision sur le fait que le rendement de Sharon Horner était supérieur à celui de la plaignante.

[21]           Une fois que le comité de licenciement a tiré sa conclusion, Don Rooney (directeur des relations de travail) a demandé que Martin Shelest, qui, à l’époque, travaillait au service des ressources humaines de MTS, fasse une comparaison indépendante entre la plaignante et Mme Horner, sans en parler à quiconque. M. Shelest a effectué cet examen et a fait savoir à Don Rooney qu’à son avis, d’après les critères énoncés à l’alinéa 26.03.1 de la convention collective, il fallait licencier la plaignante avant Mme Horner.

[22]           Le 28 février 2007, la TEAM a déposé un grief pour le compte de la plaignante, alléguant que MTS avait enfreint l’article 26 de la convention collective. Le fond du grief était que la plaignante avait été licenciée à tort, en ce sens qu’elle possédait des compétences, des aptitudes et des qualifications supérieures à celles d’au moins une autre employée qui n’avait pas été licenciée et qui occupait un poste équivalent à celui de la plaignante.

[23]           La TEAM a renvoyé le grief pour une audience d’arbitrage. Le grief a été retiré à l’étape préparatoire à l’audience, sans préjudice aux droits que la LCDP conférait à la plaignante.

III.             Droit applicable et analyse

[24]           Il convient de mentionner au début de la présente analyse que, durant l’audition de la présente affaire, l’intimée a formulé de nombreuses objections et la plaignante plusieurs autres. Certaines ont été réglées par écrit, d’autres l’ont été de vive voix dans le cadre du dossier à l’audience, et d’autres encore ont été soumises à réflexion. Les objections soumises à réflexion ont toutes été examinées, et celles qui ont eu une incidence déterminante sur l’issue de l’affaire sont analysées de manière distincte dans la présente décision. D’autres objections, n’ayant pas une incidence déterminante sur l’issue de la décision, ont été examinées en fonction de la valeur probante des éléments de preuve déposés lors de la période de réflexion et elles ne sont pas analysées de manière distincte dans la présente décision. Quoi qu’il en soit, les objections ont toutes été notées et prises en considération lors de l’appréciation des éléments de preuve soumis.

A.                La plaignante a établi l’existence d’une preuve prima facie de discrimination

[25]           Dans une instance engagée devant le Tribunal, la partie plaignante doit établir l’existence d’une preuve prima facie de discrimination. Une preuve prima facie) « […] porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l’absence de réplique de l’employeur intimé » (Ontario (Commission des droits de la personne) c. Simpsons Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536, au paragraphe 28). Pour établir l’existence d’une telle preuve, il n’est pas nécessaire que des considérations de nature discriminatoire soient le seul motif des actes en litige; il suffit que la discrimination ne soit qu’un seul motif pour lequel l’employeur a posé son geste ou pris sa décision (voir Holden c. Canadian National Railway Co. (1990), 112 N.R. 395 (C.A.F.), et Canada (Procureur général) c. Uzoaba, [1995] 2 C.F. 569). Cependant, les allégations que formule la partie plaignante doivent être crédibles pour qu’il soit possible d’étayer la conclusion qu’il existe une preuve prima facie (voir Dhanjal c. Canada (Commission des droits de la personne) (1997), 139 FTR 37 (C.F.)). Dans la décision Basi c. La Compagnie des Chemins de fer Nationaux du Canada (1988), 9 C.H.R.R. D/5029, au paragraphe 38481 (TCDP), le Tribunal a écrit :

La discrimination n’est pas un phénomène qui se manifeste ouvertement, comme on serait porté à le croire. Il est rare en effet qu’on puisse prouver par des preuves directes qu’un acte discriminatoire a été commis intentionnellement.

[26]           Il faut donc qu’un tribunal prenne en considération la totalité des circonstances pour déterminer s’il existe de « subtiles odeurs de discrimination ». La jurisprudence reconnaît qu’il est difficile de prouver une allégation de discrimination par une preuve directe.

[27]           Pour rendre une décision à ce premier stade, le Tribunal doit se borner à analyser les preuves testimoniales et documentaires que la plaignante a déposées, et faire abstraction des preuves que l’intimée a fournies (voir Lincoln c. Bay Ferries Ltd., 2004 CAF 204, au paragraphe 22 [Lincoln]). Essentiellement, toutefois, la plaignante en l’espèce doit établir l’existence d’un lien entre sa déficience et la décision qu’a prise l’employeur de la licencier (voir Roopnarine c. Banque de Montréal, 2010 TCDP 5, au paragraphe 49).

[28]           Selon la plaignante, les symptômes de sa déficience ont eu une influence défavorable sur son rendement au travail. L’intimée, même si elle était au courant de cette déficience, a évalué son rendement de manière défavorable dans ses évaluations du rendement, sans tenir compte des effets de sa déficience sur son rendement. La plaignante allègue qu’étant donné que ses évaluations du rendement ont servi à comparer son rendement à celui d’une autre employée dans le but de décider laquelle serait licenciée, sa déficience est un facteur qui a amené l’intimée à décider de refuser de la garder à son service. La plaignante allègue également qu’elle a été précisément ciblée en vue du licenciement du fait de sa déficience. À cet égard, elle soutient que l’intimée a déjà ciblé dans le passé des employés atteints d’une déficience en vue d’un licenciement et que, cela étant, le fait de la licencier à cause de son rendement était un prétexte pour poser un geste discriminatoire. La plaignante allègue sur ce fondement que l’intimée a violé l’article 7 de la LCDP, dont le texte est le suivant :

7. Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

(a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

(b) de le défavoriser en cours d’emploi.

 

[29]           La plaignante souffre d’une maladie, le diabète de type II. La déficience est au nombre des motifs de distinction illicite qui sont énumérés à l’article 3 de la LCDP, et elle est définie ainsi à l’article 25 : « [d]éficience physique ou mentale, qu’elle soit présente ou passée […] ». Étant une déficience physique, le diabète tombe donc sous le coup de cette définition. Dans le cas présent, nul ne conteste que la plaignante souffre d’une déficience. La question en litige a plutôt trait au fait d’établir un lien entre la déficience de la plaignante et son licenciement. Autrement dit, cette déficience est-elle un facteur qui a influencé la décision qu’a prise l’intimée de la licencier?

[30]           Quand le PERV a pris fin, l’employeur a voulu comprimer encore plus ses effectifs et a entrepris un processus de licenciement conçu pour éliminer un poste à Brandon, là où travaillait la plaignante après sa mutation. Deux employées, la plaignante et Sharon Horner, occupaient un poste de RRSC, dont un a été ciblé dans le cadre des mesures de licenciement.

[31]           Pour décider laquelle pouvait être licenciée à Brandon, l’employeur a pris en considération les évaluations du rendement des deux titulaires afin de déterminer s’il y avait une différence entre leur rendement respectif. La plaignante avait fait l’objet de commentaires défavorables dans ses évaluations du rendement de 2005 et de 2006, ce qui a eu une incidence négative sur l’évaluation du rendement de la plaignante en vue de décider laquelle serait licenciée.

[32]           D’après la plaignante, avant que l’on diagnostique son état diabétique, ses évaluations du rendement étaient favorables et les commentaires défavorables qui figurent dans ses évaluations du rendement de 2005 et de 2006 sont liés à sa déficience. Selon les rapports du médecin de la plaignante qui figurent dans l’exposé conjoint des faits, cette dernière avait de la difficulté à contrôler sa glycémie à cause du stress, et cela l’a amenée à prendre un congé de maladie du 25 octobre jusqu’au 30 novembre 2005. Plus tard, le 16 mars 2006, le même médecin traitant, le Dr Van Jaarsveld, a écrit que le stress était un grave élément déclencheur dans le cas de la maladie dont souffrait la plaignante et que cette dernière ressentait du stress au travail, surtout à cause de sa supérieure. Les deux rapports médicaux font état des effets préjudiciables du stress sur la déficience de la plaignante et ils correspondent à la même période dans laquelle ont été rédigées les évaluations du rendement défavorables. L’argument que l’intimée a invoqué, à savoir que le médecin n’a pas été appelé comme témoin devant le Tribunal et qu’il ne faudrait donc accorder aucun poids aux rapports médicaux, est sans fondement parce que ces rapports ont été intégrés dans l’exposé conjoint des faits et que le rapport daté du 16 mars 2006 a également servi de fondement à la mutation de la plaignante à Brandon.

[33]           Lori D. Berard, infirmière autorisée (infirmière gestionnaire, Office régional de la santé de Winnipeg, Centre des sciences de la santé de Winnipeg, Groupe de recherche sur le diabète, Personnel désigné, Université du Manitoba, Service d’endocrinologie de la Faculté de médecine) a témoigné à titre d’experte devant le Tribunal au sujet de son opinion concernant l’état de santé de la plaignante et l’effet qu’il avait sur son rendement au travail. Mme Berard a établi un rapport à la demande de la plaignante pour les besoins de la présente instance; voici ce qu’on peut y lire :

[traduction] Il est bien établi que l’apparition du diabète n’est pas immédiate et radicale. Le diabète de type 2 est souvent présent lors des six à neuf ans qui précèdent le diagnostic.

Le diagnostic du diabète de type II peut être une cause de stress, d’anxiété, de colère, de culpabilité et de peur. Les patients peuvent passer par les stades de la perte (déni et isolement; colère; négociation; dépression et acceptation) tout en étant encouragés à faire des changements propices à de saines habitudes de vie, à surveiller leur glycémie et à commencer à prendre des médicaments. Comme l’indiquent les Lignes directrices de pratique clinique de 2008 de l’Association canadienne du diabète, dans le chapitre intitulé « Aspects psychologiques du diabète » : « [p]ratiquement tous les aspects de la prise en charge du diabète et du contrôle de la glycémie qui en résulte sont associés à d’importantes exigences comportementales et à des facteurs psychosociaux problématiques. Les problèmes psychologiques liés au diagnostic et/ou aux exigences des soins auto-administrés peuvent être divers, allant de l’altération de la qualité de vie à des troubles dépressifs et/ou anxieux cliniquement significatifs. La section “The Vicious Symptom Cycle” du document intitulé “Living a Healthy Life with Chronic conditions” comprend ce qui suit : maladie – muscles tendus – douleur – stress/anxiété – émotions difficiles – dépression – fatigue […]. Facteurs d’impact : le stress peut contribuer à une élévation de la glycémie. Des choix d’habitudes de vie malsaines, comme l’obésité, de mauvaises habitudes alimentaires et un manque d’activité peuvent entraîner une hausse de la glycémie ».

[34]           Selon Mme Berard, la plaignante a fait de sérieux efforts pour améliorer son état de santé, au point de devenir une personne en très bonne santé. Cependant, elle a déclaré que le stress peut contribuer à une élévation de la glycémie, et a mentionné ceci :

[traduction] Il est établi dans les dossiers médicaux que la plaignante a été victime de stress lors de la phase initiale qui a suivi le diagnostic de diabète et qu’elle a eu de la difficulté à contrôler sa glycémie, ce qui l’a amenée à prendre un congé à la fin de 2005.

[35]           Mme Berard a examiné l’évaluation du rendement de la plaignante de 2005 et elle a fait les commentaires suivants :

[traduction] Semble ne plus se concentrer sur le travail à accomplir, difficulté sur le plan des relations et de l’éthique du travail; pourrait concorder avec un état psychologique altéré à cause d’un diabète non contrôlé et du stress causé par cette maladie.

[36]           Mme Berard a aussi analysé l’évaluation du rendement de 2006 de la plaignante :

[traduction] Semble retrouver un peu d’esprit d’initiative face au travail à accomplir – continue d’avoir de la difficulté avec le fait d’être dure et grossière, ce qui doit être amélioré et cerné, et semble avoir des sautes d’humeur qui la font passer de quelques journées sans problèmes à un désir de s’isoler. Bien qu’il semble que son diabète soit bien géré à ce stade-ci, il est possible qu’elle ait de la difficulté à faire face à la situation et éprouve des symptômes de dépression.

[37]           Il existe au moins trois moments dans le temps où les résultats ont montré que le taux de glucose dans le sang de la plaignante a atteint plus de 12 mmol/L (valeur élevée) : le 19 août 2005, le 7 septembre 2005 et le 26 septembre 2005. Un test HbA1C, passé le 13 octobre 2005, indique que la plaignante présentait une glycémie élevée moyenne sur trois mois (de juillet à octobre 2005). Il y aussi des indications que la plaignante présentait une glycémie élevée et souffrait d’un diabète de type II non contrôlé en date du 30 novembre 2005, même si son affection avait été diagnostiquée antérieurement et si elle suivait un traitement. Par


 

ailleurs, Mme Berard a mentionné dans son témoignage que, même si le résultat d’un test HbA1C est normal, cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de variations quotidiennes dans le taux de glucose dans le sang, car ce type de test ne montrera pas les pics qui peuvent survenir dans une journée donnée.

[38]           Je conclus que le médecin traitant, qui a examiné la plaignante et suivi l’évolution de son état, et l’experte, Lori Berard, ont tous deux établi que la plaignante était victime de stress et que ce facteur avait une incidence sur son taux de glucose dans le sang. Lori Berard a déclaré que les symptômes de l’hyperglycémie comprennent la fatigue, un état psychologique altéré, dont de l’agitation, une irritabilité inexpliquée, de l’inattention, une léthargie extrême ou de la confusion. Je conclus que l’experte a pu démontrer l’existence d’un lien plus que probable entre le stress au travail qui avait une incidence sur le taux de glucose dans le sang de la plaignante et le comportement négatif de cette dernière qui a été décrit dans les évaluations du rendement de 2005 et de 2006.

[39]           À l’époque où la plaignante se trouvait en congé de maladie sur l’avis de son médecin, Ann Ukrainec a écrit ce qui suit dans l’évaluation du rendement de 2005 de la plaignante :

[traduction] Objectif d’examen de fin d’année : non atteint. Les communications avec l’équipe de Steinbach sont encore problématiques et les différences n’ont pas été mises en lumière parce que Heather trouve cela difficile, car elle ne voit aucun problème. Les rencontres individuelles avec les gestionnaires de comptes ne se sont pas poursuivies au cours du dernier trimestre comme l’avait demandé la gestionnaire immédiate, ce qui ne fait que retarder les problèmes à régler.

[40]           Le 8 mars 2006, la plaignante s’est entretenue avec Ann Ukrainec dans le cadre d’une tentative pour s’attaquer à ses problèmes de rendement et elle a donné suite à cette conversation en suggérant d’apporter des changements à ses évaluations du rendement dans un courriel envoyé à sa supérieure. La plaignante a mentionné qu’il fallait changer les commentaires inscrits dans les évaluations du rendement afin de tenir compte de ses problèmes de santé. Le courriel indique aussi que le manque de communication avec son équipe immédiate était dû à sa maladie et au fait qu’elle suivait les directives de son médecin, c’est-à-dire qu’elle devait amoindrir son stress pour améliorer son état de santé. Ann Ukrainec a ajouté seulement le commentaire suivant sur les rencontres individuelles; il apparaît à la neuvième et dernière page de l’évaluation du rendement de 2005, sans autre explication :

[traduction] Heather a été en congé de maladie du 25 octobre au 2 décembre. Au début de 2005, Heather a éprouvé le vif désir de faire un changement et de travailler dans un autre secteur qui, à son avis, l’aiderait à se développer et à se tenir occupée. Cela a duré jusqu’au milieu de l’été et, ensuite, la détérioration de la perspective générale de Heather s’est transformée en aversion et en une rupture de ses communications avec son équipe immédiate. A de la difficulté à communiquer avec son équipe immédiate, ne veut pas se retrouver dans un conflit quelconque pour faire part de ses sentiments profonds, ce qui aiderait les autres à comprendre ce qui se passe avec les changements que l’équipe perçoit chez elle.

[41]           Cet énoncé concorde avec la façon dont la plaignante a décrit ses relations avec son entourage après que son médecin eut recommandé qu’elle évite les situations de stress, comme un conflit quelconque qui l’obligerait à faire part de ses sentiments profonds. Cela concorde aussi avec la façon dont la plaignante a décrit les effets de son état à la suite de son diagnostic et les raisons pour lesquelles elle a eu besoin de prendre congé du travail.

[42]           Pour déterminer s’il existait un lien entre la déficience de la plaignante et l’évaluation de son rendement au travail, je n’ai pas fondé mes conclusions sur certains des arguments que la plaignante a invoqués au sujet de présumés états de dépression, de la prise de médicaments et du cycle menstruel, et ce, pour deux raisons : ces faits étaient en litige et je n’avais pas en main assez d’éléments de preuve pour tirer une conclusion sur eux. Mes conclusions concernant le lien entre la déficience et le rendement décrit dans les évaluations du rendement de la plaignante reposent sur deux éléments de preuve importants :

(1)               les rapports médicaux du Dr Van Jaarsveld qui corroborent les informations qu’a données le témoin expert de la plaignante à propos de l’effet négatif du stress sur le contrôle du taux de glucose dans le sang;

(2)               le témoignage de Mme Lori Berard, qui était digne de foi, compte tenu surtout du fait qu’elle n’a jamais prononcé de mots absolus tels que « toujours » et « jamais », mais a plutôt employé des termes tels que « peut avoir causé ou concorde avec ». Elle a fait preuve de prudence et d’objectivité et a semblé posséder de vastes connaissances, non seulement sur la déficience et ses traitements, mais aussi sur les difficultés auxquelles sont quotidiennement confrontées les personnes atteintes du diabète de type II. De plus, elle possède une certaine expertise pour ce qui est d’apprendre aux gens à faire face à ces problèmes. Il est ressorti de la preuve produite par la plaignante qu’il était plus que probable, à l’époque où elle a obtenu ses évaluations du rendement défavorables, qu’elle était victime de stress au travail, ce qui a aggravé son état diabétique et provoqué ainsi des problèmes de rendement.

[43]           Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la déficience de la plaignante – le diabète de type II – a été au moins l’un des facteurs ayant contribué aux commentaires défavorables qui ont été faits dans ses évaluations du rendement de 2005 et de 2006. En inscrivant des commentaires dans ces deux documents, la gestionnaire n’a pas tenu compte de l’effet de la déficience de la plaignante sur son rendement. L’intimée s’est servie des évaluations du rendement de 2005 et de 2006 pour comparer le rendement de la plaignante et celui de Sharon Horner en vue de décider laquelle serait licenciée.

[44]           En ce qui concerne son allégation selon laquelle elle a été précisément ciblée en vue d’un licenciement à cause de sa déficience, la plaignante prétend qu’après sa mutation à Brandon, Ann Ukrainec a continué de la surveiller. À cet effet, elle fait référence au fait qu’Ann Ukrainec a rédigé un rapport concernant son rendement défavorable et l’a transmis à Don Rooney le 9 novembre 2006. Ce rapport avait été demandé par Larry Goerzen, juste après que l’intimée eut annoncé qu’elle allait comprimer ses effectifs et juste après l’expiration du délai prévu pour se prévaloir du programme d’encouragement à la retraite volontaire. Le courriel comporte un résumé du point de vue d’Ann Ukrainec sur les antécédents de mauvais rendement et de problèmes de communication de la plaignante. Ce rapport dénote peut-être que la plaignante a été prise pour cible en vue d’un licenciement à cause de son rendement, mais il n’y est pas dit que sa déficience est le motif pour lequel elle a été ciblée. À tout le moins, ce rapport étaye une fois de plus l’allégation selon laquelle l’intimée n’a pas tenu compte de l’effet qu’avait la déficience de la plaignante sur son rendement.

[45]           La plaignante se fonde également sur le témoignage de Larry Trach (directeur administratif au sein de la TEAM) à l’appui de son allégation selon laquelle elle a été précisément ciblée en vue d’un licenciement du fait de sa déficience. M. Trach a déclaré qu’il s’agissait de la première fois dans l’histoire de MTS que cette entreprise procédait à des licenciements après avoir atteint avec succès ses objectifs de réduction des effectifs dans le cadre d’un PERV. Selon lui, ces licenciements étaient un acte de mauvaise foi parce que le syndicat avait convaincu certains des employés qui étaient sur le point de prendre leur retraite de se prévaloir du PERV en vue de sauvegarder des emplois pour des employés plus jeunes. Au bout du compte, neuf membres additionnels de la TEAM ont été licenciés, dont la plaignante. M. Trach soutient qu’à cause de cela la TEAM s’est sentie trahie. Il est bien possible que la TEAM ait considéré les licenciements effectués après le PERV comme un acte de mauvaise foi, mais il n’y a pas assez d’indications dans le témoignage de M. Trach que la plaignante a été prise pour cible en vue d’un licenciement du fait de sa déficience. L’acte de mauvaise foi qu’évoque M. Trach semble lié aux relations de travail entre le syndicat et l’employeur, plutôt qu’à une conduite discriminatoire de la part de l’employeur.

[46]           M. Trach a également dit que, pour décider qui de la plaignante ou de Mme Horner serait licenciée, c’était la première fois que MTS comparait les compétences, les aptitudes, le rendement, les qualifications et le lieu de travail des titulaires. Selon lui, MTS avait pour habitude de licencier simplement l’employé ayant le moins d’ancienneté. C’est ce que prévoit expressément l’alinéa 26.03.1 de la convention collective. Cependant, comme les parties l’ont déclaré dans l’exposé conjoint des faits, c’était à la condition qu’il n’y ait pas de différence entre les titulaires sur le plan des compétences, des aptitudes, du rendement, des qualifications et du lieu de travail. Dans le cas présent, l’employeur a conclu qu’il y avait une différence sur le plan du rendement entre les deux titulaires choisies pour être licenciées. Sans autres informations, je ne puis voir comment l’employeur a ciblé la plaignante en vue d’un licenciement du fait de sa déficience juste parce qu’il n’a pas choisi la titulaire la moins ancienne.

[47]           Enfin, la plaignante prétend que MTS, à la suite de son initiative de réduction des effectifs, a embauché 39 vendeurs de plus. Elle ajoute que l’intimée a formé des employés au sein de l’entreprise comme nouveaux RRSC environ un mois après son licenciement et qu’elle n’a pas été rappelée, comme le prévoit la disposition de rappel de la convention collective. Cependant, à part cette allégation, et sans limiter le genre de preuve que la plaignante aurait pu produire, peu d’informations ont été fournies sur la nature des 39 recrues, sinon que l’intimée les a embauchées pour travailler à l’extérieur du Manitoba, de même que sur le fait de savoir si la plaignante aurait dû être rappelée ou sur celui de savoir si d’autres employés avaient été rappelés ou, par-dessus tout, sur la manière dont la discrimination avait joué dans la décision de l’employeur. Là encore, sans la présence d’un élément discriminatoire, la situation semble être un problème de relations de travail entre le syndicat et l’employeur, plutôt qu’une question d’acte discriminatoire. En définitive, je conclus que je n’ai pas en main assez d’éléments de preuve pour corroborer cette allégation au stade de la preuve prima facie.

[48]           Compte tenu de ce qui précède, la plaignante n’a pas établi l’existence d’une preuve prima facie qu’elle a été ciblée en vue d’un licenciement du fait de sa déficience ou que la décision qu’a prise l’intimée de licencier des employés était un prétexte pour exercer de la discrimination. Cependant, la plaignante a établi prima facie que sa déficience a eu une incidence sur son rendement au travail et que l’intimée, bien qu’étant au courant de sa déficience, n’a pas tenu compte des effets de sa déficience au moment d’évaluer défavorablement son rendement. Étant donné que le rendement et l’évaluation du rendement de la plaignante ont servi de fondement à la décision que l’intimée a prise de la licencier, il existe un lien entre la déficience de la plaignante et la perte de son emploi. De ce fait, la plaignante a établi l’existence d’une preuve prima facie de discrimination au sens de l’alinéa 7a) de la LCDP, car il semble que sa déficience ait joué dans la décision qu’a prise l’intimée de refuser de la garder à son service.

B.                 L’intimée n’a pas établi que la conduite discriminatoire à première vue n’a pas eu lieu de la manière alléguée ou n’était pas discriminatoire

[49]           Une fois que l’on a établi l’existence d’une preuve prima facie, l’intimée a la possibilité de montrer que la présumée discrimination n’a pas eu lieu de la manière alléguée ou qu’elle ne constituait pas un acte discriminatoire au sens de la LCDP (voir Maillet c. Canada (Procureur général), 2005 TCDP 48, au paragraphe 4; et l’article 15 de la LCDP).

[50]           L’intimée est d’avis que la conduite discriminatoire à première vue n’a pas eu lieu de la manière alléguée. Elle soutient que les symptômes associés à la déficience dont souffre la plaignante n’ont pas eu d’incidence sur son rendement au travail ni sur ses évaluations du rendement. Selon elle, les évaluations du rendement de la plaignante font état d’antécédents de problèmes de rendement au travail qui ne sont pas liés aux symptômes de son état diabétique. Elle soutient donc qu’elle a évalué de manière juste la plaignante dans le cadre du processus de licenciement et qu’elle était justifiée de licencier la plaignante à cause du rendement supérieur de l’autre titulaire que l’on envisageait de licencier.

La preuve d’expert

[51]           L’intimée soutient que les symptômes liés à la déficience de la plaignante n’ont pas eu d’incidence sur son rendement. À l’appui de cet argument et en réponse à la preuve d’expert sur le diabète de type II et ses symptômes que Mme Berard a fournie, l’intimée a fait comparaître la Dre Elizabeth Salamon, M.D., F.R.C.P. (C), endocrinologue.

[52]           La Dre Salamon a déclaré que, chez n’importe qui, le taux de glucose dans le sang varie toute la journée. Le diabète n’est diagnostiqué que si le taux de glucose dans le sang est supérieur à 11,2 mmol/L. Elle a ajouté que ces variations normales du taux de glucose dans le sang ne sont pas réputées causer le type de symptômes que l’on a attribués à la plaignante.

[53]           La Dre Elizabeth Salamon a souscrit aux informations générales que Mme Berard a fournies sur le diabète. Cependant, dans le rapport qu’elle a établi pour le compte de l’intimée en vue de la présente audience, elle déclare que les sautes d’humeur, les problèmes d’attitude et la mauvaise éthique du travail ne sont pas des symptômes de l’hyperglycémie. Selon elle, bien qu’il soit possible de normaliser en quelques minutes le taux de glucose dans le sang, il peut y avoir des symptômes différents qui peuvent prendre des heures, voire des jours, à se régler. Comme


 

elle l’écrit : [traduction] « Une fois que le taux de glucose dans le sang s’est stabilisé dans la plage normale, il n’y a souvent aucun symptôme d’hyperglycémie. Un taux de glucose dans le sang qui se situe systématiquement dans la plage normale ne devrait pas provoquer de tels symptômes. »

[54]           Selon la Dre Salamon, le dossier médical fourni débute par la consultation qu’a faite Mme Grant à la salle d’urgence après ses visites chez le médecin en septembre 2005. Il n’y a aucune information sur son état avant cette date-là. Elle a déclaré que, d’après le dossier médical fourni, il est impossible de déterminer si la plaignante présentait des symptômes diabétiques avant son diagnostic. Elle mentionne que la plaignante a pu avoir présenté des symptômes en septembre, voire en août 2005. Elle mentionne également dans son rapport que la plaignante a été fort probablement asymptomatique au cours d’une partie des mois d’octobre, novembre et décembre 2005. Elle constate qu’il y a en septembre 2005 des taux élevés de glucose dans le sang qui sont supérieurs à 12; le résultat d’un test HbA1C effectué en octobre 2005 est élevé, ce qui dénote qu’il y a eu des taux élevés de glucose dans le sang pendant les trois mois antérieurs. Le résultat d’un autre test HbA1C effectué le 6 janvier 2006, de 6,2 %, était normal, ce qui dénote que la majeure partie des taux de glucose dans le sang au cours des trois mois antérieurs à janvier étaient normaux. Elle mentionne aussi que les taux autodéclarés de glucose dans le sang de la plaignante se situaient dans la plage normale ou quasi normale le 12 janvier 2006, ainsi qu’il est indiqué dans le dossier et comme l’a réitéré Mme Berard.

[55]           Quant à la possibilité que le taux de glucose dans le sang de la plaignante ait connu des pics, la Dre Salamon mentionne dans son second rapport (à la suite d’une série de questions posées par la plaignante à son experte, il a été plaidé que certaines des questions ne figuraient pas dans le rapport d’expert. Le témoignage de l’experte de la plaignante a été ajourné, mais il est resté sous serment. La plaignante a produit un rapport modifié; la Dre Salamon a examiné ce document et fait part de ses réponses dans un second rapport, avant son témoignage et avant le contre-interrogatoire de l’experte de la plaignante) : [traduction« L’examen que j’ai fait du dossier médical de Mme Grant ne présente aucun “pic” du taux de glucose dans le sang.


 

Cependant, lorsqu’elle s’est présentée à la salle d’urgence, on a constaté qu’elle présentait un taux élevé de glucose dans le sang, mais ce taux est le plus élevé que l’on note dans le dossier fourni ».

[56]           La Dre Salamon a déclaré qu’un employeur peut prendre des mesures d’accommodement dans le cas d’un employé atteint du diabète : [traduction] « accorder à cet employé du temps pour consulter un médecin et se rendre à d’autres rendez-vous auprès d’une équipe de soins de santé, veiller à ce que l’employé puisse prendre des pauses-repas régulières et limiter le travail par postes si possible ou, à tout le moins, assurer un roulement raisonnable des heures de poste ». La Dre Salamon mentionne aussi : [traduction] « dans la mesure du possible, s’assurer que le diabétique n’effectue pas d’heures supplémentaires imprévues et, dans la mesure du possible, lui permettre de vivre à un endroit où des aides familiaux et professionnels externes sont disponibles si l’on juge ces aides utiles. Ces mesures pourraient aider n’importe qui à améliorer son taux de glucose dans le sang. À la demande de la patiente et de son médecin, MTS a bel et bien pris les dispositions nécessaires pour qu’elle soit mutée à un autre bureau où elle serait plus proche d’aides familiales ».

[57]           D’après la Dre Salamon, les personnes atteintes du diabète de type II peuvent accomplir tout ce qu’elles veulent, et elle a donné de nombreux noms de personnes connues, comme des athlètes, des chanteurs, des artistes et des politiciens, et a énuméré diverses professions, comme des médecins, des enseignants et des avocats. Elle a mentionné que ces personnes accomplissaient toutes très bien leurs activités professionnelles. Ces réponses sur la façon dont vivent les gens atteints du diabète de type II et sur les difficultés auxquelles ils peuvent être confrontés ne sont pas convaincantes. Je comprends ce qu’elle a tenté de faire valoir, que le fait d’être diabétique n’empêche pas de vivre pleinement sa vie, mais elle n’a pas laissé entendre qu’elle connaissait ces personnes ou leurs dossiers médicaux. Même si les personnes qu’elle a mentionnées peuvent accomplir bien des choses, nous n’avons aucune information sur ce qui s’est passé quand leur état a été diagnostiqué, sur la façon dont elles gèrent le stress et sur l’effet de ce stress sur leur état. Même la plaignante se rendait au travail, et n’importe qui pourrait dire qu’elle souffre du diabète de type II, mais qu’elle continue de travailler. Je suis d’avis que les conclusions de la Dre Salamon à propos de la manière dont vivent les personnes atteintes du diabète de type II et des difficultés auxquelles elles peuvent être confrontées ne sont pas convaincantes et font abstraction des différences individuelles qu’il peut y avoir entre les personnes aux prises avec un état diabétique. La Dre Salamon a elle-même reconnu que, dans le cas du diabète, tout est individualisé. Ces genres de réponses ne traitent pas non plus des effets psychologiques ou sociaux que le diabète de type II peut avoir sur une personne souffrant de cette maladie.

[58]           Après avoir examiné les évaluations du rendement de la plaignante, la Dre Salamon a nié qu’il y avait un lien quelconque entre le rendement au travail de la plaignante et les symptômes du diabète de type II. Elle a conclu que la plaignante exerçait un excellent contrôle sur son taux de glucose. Elle a signalé que le Dr Van Jaarsveld avait qualifié la plaignante de [traduction] « diabétique dont l’état est bien contrôlé ». En revanche, elle a exprimé des opinions différentes de celles du Dr Van Jaarsveld quant aux effets du stress sur l’état de la plaignante, car elle n’a trouvé aucune mention précise des symptômes dans le rapport. La Dre Salamon a reconnu avoir examiné les documents médicaux fournis, mais elle n’a pas discuté avec le Dr Van Jaarsveld des rapports ou de l’état de la plaignante. Elle croit que les problèmes de communication et de relations que la plaignante avait au sein de son équipe, ainsi que les commentaires défavorables que cela a suscités dans ses évaluations du rendement, ne sont pas liés à des taux élevés de glucose dans le sang.

[59]           La Dre Salamon a déclaré que les évaluations relatives au mauvais rendement de la plaignante qui ont été faites dans les évaluations du rendement ont eu lieu quand le taux de glucose dans le sang était à la fois élevé (comme l’indique le résultat anormal de son test HbA1C) et normal (comme l’indique le résultat normal de son test HbA1C). Les évaluations ne décrivent pas un fait important que l’on pourrait attribuer à un pic glycémique isolé, mais plutôt des problèmes de comportement récurrents qui, associés à des pics glycémiques, se seraient traduits par une aggravation du contrôle du taux de glucose. Cela ne se reflète pas du tout dans l’amélioration de ses résultats au test HbA1C. Cela dénote que le taux de glucose dans le sang n’était pas un facteur dans le mauvais rendement qui a été signalé.

[60]           La Dre Salamon a mentionné que les notes du médecin indiquent à maintes reprises que la patiente est stressée par son travail et au travail et que rien n’est dit au sujet d’autres symptômes ordinaires de l’hyperglycémie. Elle a toutefois reconnu que le dossier médical indique qu’en novembre 2005 l’état de la plaignante n’était pas contrôlé et que son taux de glucose dans le sang était élevé à la même époque où elle subissait du stress. Cela nuance ce qu’elle a écrit dans le rapport d’expert qu’elle a établi avant son témoignage :

[traduction] Bien que le dossier médical indique que Mme Grant a subi un stress décrit comme un stress au travail lors des visites au bureau à l’automne de 2005, le résultat du test HbA1C de Mme Grant a continué de baisser, passant d’un taux élevé de 8,6 % à un taux normal ou quasi normal de 6,2 % au cours de la même période. Ce serait le contraire qui se passerait si le stress causait une élévation du taux de glucose dans le sang. Comme il n’y a pas eu d’élévation correspondante des taux à cause du stress :

cela n’aurait pas eu d’effet sur son aptitude à accomplir ses fonctions;

il n’y aurait pas de rapport avec le mauvais rendement indiqué dans l’évaluation du rendement.

[61]           Même si son rapport indique que Mme Grant a pu avoir présenté des symptômes d’hyperglycémie en septembre et peut-être en août 2005, la Dre Salamon a mentionné qu’aucune information médicale ne permet de déterminer si la plaignante présentait des symptômes avant le mois d’août 2005. Cependant, elle a déclaré aussi que le résultat d’un test HbA1C effectué en octobre 2005 était élevé, ce qui donne à penser que le taux de glucose dans le sang avait été élevé pendant les trois mois précédents. La période de trois mois antérieure à octobre 2005 inclurait juillet 2005. C’est en juillet 2005 que la plaignante a commencé à faire l’objet de commentaires dans ses évaluations du rendement au sujet d’une [traduction] « coupure » dans ses communications. La Dre Salamon a reconnu que lorsqu’une personne ressent les symptômes d’un taux élevé de glucose dans le sang, cette personne a souvent l’impression de [traduction] « ne pas se sentir bien » et que cela peut avoir une incidence sur sa vie de tous les jours. Elle a déclaré aussi que le fait de ne pas se sentir bien et celui de ne pas vouloir socialiser constituent un lien raisonnable; il faudrait toutefois que ce lien soit associé à des taux élevés de glucose dans le sang. Elle a déclaré que ses patients ne lui décrivent pas les symptômes en détail quand ils la consultent, mais qu’ils décrivent plutôt leur état en disant qu’ils ne sentent pas bien. La Dre Salamon a plus tard déclaré que bien que la plaignante ait consulté son médecin traitant parce qu’elle ne se sentait pas bien, rien n’est dit dans le rapport au sujet des symptômes précis qui sont liés à l’hyperglycémie.

[62]           Le rapport de la Dre Salamon indique qu’il y a au moins trois moments dans le temps où le taux de glucose dans le sang de la plaignante est élevé et que, compte tenu du résultat du test HbA1C effectué en octobre 2005, il y a une indication que la plaignante présentait également un taux élevé de glucose dans le sang en juillet 2005. Après avoir pris en considération la preuve de la Dre Salamon ainsi que celle de Mme Berard, je conclus qu’une personne atteinte du diabète de type II peut manifester des problèmes communicationnels ou sociaux à cause des symptômes de son état surtout lors des moments de stress, et que la plaignante en l’espèce a présenté des taux élevés de glucose dans le sang à peu près à l’époque où son employeur a mentionné que des problèmes de communication avaient une incidence défavorable sur son rendement.

Les évaluations du rendement

[63]           L’intimée soutient que la plaignante n’a pas été licenciée du fait de sa déficience, mais simplement à cause de son mauvais rendement, comme en témoignent ses évaluations du rendement qui, soutient l’intimée, ne sont nullement viciés ou partiaux comme la plaignante veut le laisser croire.

[64]           J’ai examiné toutes les évaluations du rendement de la plaignante de 1999 à 2006, lesquelles ont été déposées dans l’exposé conjoint des faits. Comme l’intimée allègue que la plaignante a des antécédents de mauvais rendement, et que ceux-ci ont mené à son licenciement, il est pertinent et essentiel d’examiner le contenu de ces documents pour arriver à une conclusion appropriée.

[65]           Il ressort de la preuve que les évaluations du rendement qui ont été prises en considération au moment de la comparaison entre les deux titulaires en vue de procéder à un licenciement étaient celles qui s’appliquaient à la période s’étendant de l’année 2003 au milieu de l’année 2006. Avant cette période, il y a fort peu de commentaires sur la nécessité que la plaignante améliore son rendement au travail. Les paragraphes qui suivent analysent plus en détail les évaluations du rendement de la plaignante qui ont été établies pour la période allant de l’année 2003 au milieu de l’année 2006.

[66]           Les commentaires que Mme Ukrainec a consignés dans l’évaluation du rendement de 2003 de la plaignante sont, en résumé, les suivants :

[traduction] Heather est très franche et assez confiante dans ses fonctions. Semble autosuffisante et en a fait la preuve en assumant la responsabilité de son ordinateur personnel quand il a fallu qu’elle procède à une mise à niveau pour répondre aux exigences en matière de formation de son poste.

S’est adaptée aisément aux changements, partage de plein gré ses connaissances et fait des changements assez facilement quand il le faut.

Aimerais voir une relation de travail plus solide entre elle-même et son gestionnaire de compte immédiat, car cela améliorerait son milieu de travail au jour le jour.

[67]           Même s’il ressort du dernier commentaire qu’une relation plus solide entre la plaignante et son gestionnaire de compte aurait un effet bénéfique sur son milieu de travail, dans l’ensemble les commentaires sont positifs et ne dénotent pas l’existence de problèmes de rendement.

[68]           Les commentaires tirés de l’évaluation du rendement de 2004 qui figurent dans l’exposé conjoint des faits indiquent ceci :

[traduction] Prend part aux réunions et a fait savoir qu’elle est en mesure de prendre du travail supplémentaire. A également aidé à dresser des profils de client. Possède les connaissances et les compétences nécessaires pour exécuter ses


 

tâches quotidiennes et a accompli des projets additionnels pour aider l’équipe et lagestionnaire immédiate à mettre à jour les informations figurant dans les listes de comptes.

Entretient des relations bonnes et solides avec la plupart des membres de l’équipe et a toujours pris part à toutes les réunions d’équipe.

[69]           Je conclus qu’il ressort de cet énoncé que la plaignante participait aux activités de son équipe et entretenait de bonnes relations avec la plupart de ses membres. Il n’y a pas d’indications suffisantes de problèmes de rendement dans son évaluation du rendement de 2004.

[traduction] Est souple et a offert de prendre une charge de travail supplémentaire.

Fait montre d’une attitude positive à l’égard du partage d’informations et de la prise de décisions ayant une incidence sur son poste et sur la direction de l’équipe.

[70]           Sous la rubrique [traduction] « Aptitudes à communiquer efficacement », dans l’évaluation du rendement de 2004 de la plaignante, Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] Une communicatrice directe, honnête et franche qui apprécie qu’on lui donne des instructions claires et d’avoir la chance d’interagir en tant que membre d’une équipe.

A saisi la notion d’être un membre utile de l’équipe des ventes et a aidé à faire tout ce qu’elle pouvait pour faire en sorte que les ventes soient conclues et facturées pour l’équipe.

S’est adaptée à un milieu en constante évolution et est restée concentrée et ouverte aux idées qui ont amélioré soit ses propres compétences soit son degré de connaissances.

[71]           Dans les derniers commentaires qu’elle a faits dans l’évaluation du rendement de 2004, Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] Heather appuie véritablement le secteur des ventes et a montré qu’elle a véritablement à cœur de veiller à ce que nos clients soient formés et bien formés.

Fait valoir son point de vue et pose des questions si elle n’a pas clairement compris la première fois.

Même s’il existe des différences entre des membres particuliers de l’équipe, pas une seule fois elle n’a manqué de respect envers la personne même s’il y avait peut-être un désaccord.

[72]           Après avoir examiné les évaluations du rendement de la plaignante qui s’appliquent aux années antérieures à 2005‑2006, je conclus que ces évaluations lui sont favorables. Je suis d’avis que, avant que la plaignante reçoive un diagnostic de diabète, prenne un congé de maladie et obtienne une mutation, ses évaluations du rendement dénotent qu’elle est une personne positive, qu’elle communique efficacement et travaille d’arrache-pied et qu’il n’y aucun signe de problèmes de rendement. En 2003 et en 2004, la plaignante a également eu l’occasion d’inscrire ses propres commentaires dans les évaluations du rendement, sous la supervision d’Ann Ukrainec.

[73]           Dans l’évaluation du rendement de 2005, sous la rubrique [traduction] « Évaluation semestrielle », et vers l’époque où l’on a diagnostiqué que la plaignante était atteinte du diabète de type II, Ann Ukrainec a écrit :

A eu au sein de son équipe immédiate quelques problèmes de communication qu’il est nécessaire de régler. Des rencontres individuelles auront lieu pour déterminer les besoins immédiats et les classer par ordre de priorité. Il s’agit là d’un aspect à risque qu’il faudra améliorer.

[74]           Après que le diagnostic a été établi et que la plaignante est partie en congé de maladie, Ann Ukrainec a écrit sous la rubrique [traduction] « Évaluation de fin d’année », dans l’évaluation du rendement de 2005 :

[traduction] Les communications avec l’équipe de Steinbach sont encore problématiques et les différences n’ont pas été mises en lumière parce que Heather trouve cela difficile, car elle ne voit aucun problème. Les rencontres individuelles avec les gestionnaires de comptes ne se sont pas poursuivies au cours du dernier trimestre comme l’avait demandé la gestionnaire immédiate, ce qui ne fait que retarder les problèmes à régler. [Non souligné dans l’original.]

[75]           Selon moi, ce commentaire est manifestement trompeur aux yeux de la personne qui lit l’évaluation du rendement. La raison pour laquelle la plaignante n’était pas présente à l’une des rencontres individuelles était qu’elle se trouvait en congé de maladie étant donné qu’elle avait reçu depuis peu son diagnostic de diabète et qu’elle avait besoin de stabiliser son état. Ann Ukrainec a déclaré ne pas avoir inclus dans l’évaluation du rendement le fait que la plaignante était en congé de maladie entre le 25 octobre et le 2 décembre parce que les dossiers de santé étaient distincts des évaluations du rendement. Cette explication n’est pas convaincante. Le fait de ne pas avoir mentionné qu’un congé de maladie était la raison pour laquelle la plaignante avait manqué l’une des rencontres individuelles a une incidence défavorable sur son rendement au travail. Pris hors contexte, le commentaire semble indiquer que la plaignante est insubordonnée, ce qui n’est pas le cas. Ainsi qu’il a été mentionné plus tôt, après une réunion avec le syndicat et la plaignante, Ann Ukrainec a convenu d’indiquer dans l’évaluation du rendement de 2005 que la plaignante était en congé de maladie du 25 octobre au 2 décembre 2005. Cependant, aucun contexte n’est mentionné au sujet des motifs de ce congé et du stress que subissait la plaignante; le congé de maladie n’est pas non plus mentionné comme étant la raison pour laquelle la plaignante a manqué les rencontres individuelles.

[76]           Ann Ukrainec a écrit le commentaire défavorable qui suit dans l’évaluation de fin d’année 2005 :

[traduction] Le client Puratone est insatisfait du soutien de Heather et Loewen Windows trouve que Heather ne l’appuie parfois pas; j’ai pris l’initiative de demander à Loewen Windows de faire part de tout problème à Winnipeg (gestionnaire immédiate).

La plaignante a déclaré ne pas avoir été mise au courant de ce fait avant qu’il soit consigné dans l’évaluation du rendement.


 

[77]           Sous la même rubrique, Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] A formé un client additionnel en décembre 2005, centre Penner Building.

Cela s’est passé après le retour de la plaignante de son congé de maladie.

[78]           Sous l’objectif fixé au milieu de l’année 2005, on peut lire la mention : [traduction] « Délais respectés ».

[79]           L’objectif fixé pour la fin de l’année 2005 indique : [traduction] « Objectif non atteint ». Lors du second semestre de l’année, la plaignante a été absente plus d’un mois.

[80]           Sous la rubrique [traduction] « Compétences – soutien de l’équipe », l’objectif fixé pour le milieu de l’année 2005 fait état de ceci :

[traduction] A aidé à exécuter le projet Mega Link, ce qui a permis d’améliorer le processus et d’obtenir d’autres informations sur les besoins qu’avaient les RSC.

Prend part aux réunions d’équipe et fait part de ses commentaires.

Besoins. À l’heure actuelle, a une bonne connaissance concrète de son poste immédiat, mais aimerais la voir jouer un rôle plus proactif, c’est-à-dire aider les gestionnaires de compte immédiats en les déchargeant d’une partie de leurs responsabilités, en faisant preuve d’une approche plus positive. Objectif : atteint.

Améliorer les communications directes avec l’équipe de Steinbach.

Il faudra planifier une série de réunions pour régler tous les problèmes que vit Heather, car elle se sent mise de côté par les membres de son équipe et ne fait pas part de ce qu’elle ressent au sujet des situations dont il a été question lors des réunions tenues avec l’équipe de Steinbach et la gestionnaire immédiate.

[81]           Sous la rubrique [traduction] « Compétences - connaissances professionnelles », dans l’évaluation semestrielle de 2005, Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] À l’heure actuelle, a une bonne connaissance concrète de son poste immédiat, mais aimerais la voir jouer un rôle plus proactif, c’est-à-dire aider les gestionnaires de compte immédiats en les déchargeant d’une partie de leurs responsabilités, en faisant preuve d’une approche plus positive.

[82]           Dans l’évaluation de fin d’année 2005, Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] Heather possède les connaissances et les compétences nécessaires pour faire un travail exceptionnel, mais semble hésiter à répondre aux besoins de son équipe immédiate (Steinbach) et a fait part du souhait de ne pas être le premier contact, mais plutôt le dernier recours auprès de ses collègues RSC immédiats. Objectif : non atteint.

[83]           Je suis d’avis que ce commentaire concorde avec le fait que la plaignante essayait d’amoindrir son degré de stress.

[84]           Sous la rubrique [traduction] « Accent mis sur le client », dans l’évaluation de fin d’année 2005, Ann Ukrainec a écrit :

Heather ne s’est pas rappelé qu’elle travaille d’abord et avant tout avec ses gestionnaires de compte immédiats, qui se trouvent à Steinbach. Il faut que cette relation soit rétablie et améliorée, car elle a une incidence directe sur sa propre attitude professionnelle, ce qui risque d’avoir un effet direct sur les clients externes.

[85]           Je conclus que le reste des commentaires figurant dans l’évaluation du rendement de 2005 n’ont pas été consignés dans le cadre de l’évaluation semestrielle ou de fin d’année, mais uniquement à titre de commentaires généraux se rapportant à l’année tout entière. La preuve qui a été présentée au Tribunal établit que les parties n’ont pas pu mentionner le moment précis où ces commentaires ont été consignés dans l’évaluation du rendement.


 

[86]           Sous la rubrique [traduction] « Esprit d’équipe », Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] Entretient des relations quelques […] avec ses collègues RSC immédiats, les relations entretenues avec les gestionnaires de compte immédiats devront changer du tout au tout dans la nouvelle année, car il ne s’agit pas là d’une situation saine pour toutes les parties au sein du groupe régional des ventes.

[87]           Ann Ukrainec a inclus le commentaire qui suit, après que la plaignante lui a demandé de le faire :

[traduction] « A effectivement échangé des informations avec le reste de ses collègues au sujet d’un processus ». [Non souligné dans l’original.]

Il est ressorti de la preuve que ce processus portait le nom de « compte Unicorn ». Ann Ukrainec a écrit ce commentaire dans la même section que celle qui portait sur cette compétence particulière, et cela donne plus de contexte aux commentaires faits et les étoffe, contrairement au problème que pose l’évaluation du rendement de 2005 compte tenu du congé de maladie que la plaignante a pris.

[88]           De plus, dans l’évaluation du rendement de 2005, sous la rubrique [traduction] « Communiquer efficacement », Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] Au début de 2005, Heather a éprouvé le vif désir de faire un changement et de travailler dans un autre secteur qui, à son avis, l’aiderait à se développer et à se tenir occupée. Cela a duré jusqu’au milieu de l’été et, ensuite, la détérioration de la perspective générale de Heather s’est transformée en aversion et en une rupture de ses communications avec son équipe immédiate. A de la difficulté à communiquer avec son équipe immédiate, ne veut pas se retrouver dans un conflit quelconque pour faire part de ses sentiments profonds, ce qui aiderait les autres à comprendre ce qui se passe avec les changements que l’équipe perçoit chez elle.

[89]           Ce commentaire concorde avec le moment où le diabète de la plaignante a été diagnostiqué.


 

[90]           Les commentaires généraux d’Ann Ukrainec, à la dernière page de l’évaluation du rendement de 2005, sont les suivants :

[traduction] Heather a ce qu’il faut pour être l’un des RRSC les plus solides sur le plan régional si elle en a la volonté. A fait part de son souhait d’être mutée au secteur des CCE, ce qui sera encore plus stressant et difficile, car on y trouve trente gestionnaires de compte ayant des habitudes de travail différentes, ce qui pourrait peut-être constituer en soi un problème pour Heather. La complexité de notre travail et la charge de travail continueront d’augmenter, ce qui exige que les ventes d’entreprise soient dotées de personnes très performantes de façon à pouvoir répondre à ces besoins. Heather a besoin de faire un effort soutenu pour s’assurer qu’elle veut faire partie des ventes d’entreprise au sein d’un contexte d’équipe énorme, ou s’orienter vers un secteur où il y a moins de demandes et moins d’interactions avec les gestionnaires de compte.

[91]           L’évaluation du rendement de 2005 prend fin sur cette note en décembre 2005, même si, comme il a été mentionné plus tôt, la plaignante a exprimé son désaccord à l’égard de nombreux commentaires et a fait part du besoin d’expliquer sa déficience et les effets que, selon elle, sa gestionnaire devait comprendre.

[92]           L’évaluation du rendement de 2006 a été examinée jusqu’au milieu de l’année dans le cadre du processus de licenciement. Je me concentrerai donc sur l’évaluation semestrielle que comporte cette évaluation du rendement. La plaignante a accompli les quatre premiers mois de travail, de janvier à avril, à Steinbach, et elle a travaillé ensuite à Brandon. À cet égard, Ann Ukrainec a écrit les commentaires qui suivent :

[traduction] Mutée à Brandon depuis mai 2006, Heather a été extrêmement occupée à aider à prendre en charge trois gestionnaires de compte afin d’aider les nouvelles recrues qui se sont jointes à notre équipe. Elle a aussi exercé les fonctions de chef d’équipe pendant un mois de plus afin que les nouveaux RRSC aient la chance de se familiariser avec leur propre territoire et de répondre aux attentes de l’équipe.

[93]           Il n’est pas dit que la mutation fait suite à la recommandation du médecin traitant de la plaignante, c’est-à-dire que l’on tienne compte de sa déficience et que l’on amoindrisse les effets du stress sur son état de santé. Là encore, sans contexte, le lecteur ne peut comprendre la mesure dans laquelle la déficience de la plaignante s’est répercutée sur son milieu de travail.

[94]           Dans l’évaluation semestrielle de 2006, sous la rubrique [traduction] « Satisfaction de la clientèle », Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] Selon les commentaires des membres de l’équipe avec lesquels Heather est en contact direct quotidiennement, ces derniers, pour la plupart, sont en mesure de communiquer avec elle. Des communications en personne amélioreront davantage cet aspect, car sa réactivité suscite encore quelques préoccupations.

[95]           Dans l’évaluation semestrielle de 2006, sous la rubrique [traduction] « Soutien de l’équipe », Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] L’équipe de RSC a jugé que Heather est très réceptive à leurs demandes et disposée à participer.

Pour ce qui est de veiller à ce que tous les gestionnaires de compte soient à jour, il a été mentionné que cet aspect suscite parfois des préoccupations (il s’agit d’un aspect à risque).

L’évaluation à ce stade-ci sera « objectif atteint », étant entendu qu’il y aura une amélioration concernant l’aspect relevé ci-dessus.

Il y a lieu d’améliorer son image et ses communications au bureau, car, parfois, elle paraît très dure et grossière à cause des commentaires non sollicités qu’elle fait (à risque).

A pris l’initiative de participer de manière plus étroite aux réunions Web afin de l’aider à obtenir plus d’informations sur le client Un.

L’évaluation à ce stade-ci sera « objectif atteint », étant entendu qu’il y a lieu d’améliorer les communications.

[96]           Bien qu’il ne fasse pas l’objet d’une évaluation dans le cadre du processus de licenciement, l’objectif fixé pour la fin d’année 2006 est indiqué comme [traduction] « non atteint ». Cependant, je trouve quand même l’évaluation de fin d’année instructive, car Ann Ukrainec a été interrogée dans le cadre du processus de licenciement et a fait part de son impression générale à l’égard de la plaignante :

[traduction] Le service et le soutien à la clientèle sont un problème constant pour Heather et l’équipe, car elle n’est pas à la hauteur des attentes que l’on a à l’égard de l’équipe et des ventes d’entreprise. Elle semble avoir des sautes d’humeur qui la font passer de quelques journées se passant bien, où elle exécute ses fonctions de manière acceptable, à de nombreux jours où elle veut être isolée de l’équipe et de ceux avec lesquels elle doit travailler directement sur une base quotidienne.

Heather est une personne qui est tout à fait en mesure d’exécuter les fonctions d’un RSC mais, au cours de l’année écoulée, son rendement n’a pas été constant et elle continue de montrer qu’il existe une barrière entre elle-même et la plupart des membres de l’équipe. Cette dernière a appris à ressentir que cela prend trop de temps et d’énergie et cela a eu sur eux un effet négatif.

Même si j’ai fait l’essai de rencontres individuelles pour engager la discussion avec Heather sur n’importe quel sujet dont elle voudrait parler, elle reste isolée et ne répond que de manière succincte aux questions qui lui sont posées.

Je recommanderais que Heather continue de recevoir une aide professionnelle externe qui la ferait parler de ce qu’il faudrait faire pour faire partie d’une équipe, car elle ne semble pas vouloir s’exprimer de manière ouverte et honnête avec son équipe immédiate dans les régions.

[97]           Comme preuve d’autres problèmes de communication avec les membres de son équipe, l’intimée a fait valoir aussi que la plaignante a eu des difficultés avec Rob Lagemodière, un collègue de travail que l’on n’a pas autorisé à ajouter à la liste des témoins après le début de l’audience (voir Heather Lynn Grant c. Manitoba Telecom Services Inc., 2011 TCDP 1). Je conclus, en me fondant sur les témoignages des deux parties, que le problème existait entre ces deux personnes. Par ailleurs, ce problème n’est pas suffisant pour conclure que les commentaires négatifs faits dans les évaluations du rendement de 2005 et de 2006 de la plaignante dénotaient l’existence d’un problème constant de rendement ou de communication. Je ne suis pas d’avis


 

qu’il s’agit là d’un élément important dans la preuve de l’intimée. S’il l’était, cela aurait été un aspect important dont il aurait été question dans les évaluations du rendement antérieures à celles de 2005-2006.

[98]           L’intimée a également soumis au tribunal le témoignage d’Ann Ukrainec. Celle-ci, selon elle, a eu de la difficulté à obtenir de la plaignante des informations sur les problèmes au travail. Elle a déclaré que la plaignante ne donnait que des réponses succinctes aux questions posées et ne disait guère plus que : [traduction] « Je suppose qu’il va falloir que je change ». Cependant, je conclus que cela a été le cas parce qu’Ann Ukrainec ne comprenait pas la plaignante et que cette dernière n’avait pas l’impression que des communications quelconques amélioreraient les choses. Mme Ukrainec a admis avoir reçu et lu le courriel que Des Hathaway avait envoyé le 30 novembre 2005, avant le retour au travail de la plaignante le 1er décembre 2005, même si elle savait que si la plaignante revenait au travail dans la même situation que celle où elle se trouvait à son départ, il y avait un grand risque que son état empire. Ann Ukrainec a déclaré qu’elle ne pensait pas devoir faire preuve de retenue pour le règlement des problèmes de rendement de la plaignante. Selon elle, le comportement de la plaignante a changé et ses communications ont arrêté quand on lui a refusé un poste de consultante en communication d’entreprise (CCE). Cependant, elle a plus tard déclaré avoir été témoin de la rupture des communications de la plaignante ainsi que de son changement de comportement à l’époque où son diagnostic a été établi. Même si elle était au courant de l’état de la plaignante et des changements de comportement que cet état occasionnait, et même si elle a été informée des effets du stress sur son état, Mme Ukrainec n’a pas cru que la déficience de la plaignante avait une incidence sur son rendement; à cet égard, elle a déclaré qu’elle croyait qu’il s’agissait d’une excuse. Le fait que la plaignante ait dû solliciter l’aide de son syndicat pour obtenir une mutation à Brandon, après que son médecin eut recommandé que cela soit fait à titre de mesure d’accommodement, illustre aussi le genre de compréhension qu’elle a eue de la part de son employeur. Avant la mutation, dans une lettre adressée à la plaignante en date du 13 avril 2006 et incluse dans l’exposé conjoint des faits, Ann Ukrainec a écrit :

[traduction] Comme il a été mentionné, la réunion avait pour objet de veiller à ce que les parties soient toutes sur la même longueur d’onde quant aux détails entourant votre mutation ainsi qu’aux attentes futures de l’entreprise. Plus précisément, votre mutation a été accordée à la suite de l’avis médical de votre praticien de la santé, de pair avec votre engagement à régler proactivement les conflits potentiels d’une manière qui vous permettra de soutenir avec succès le personnel des ventes dans le cadre d’un travail d’équipe stimulant. Plus précisément, on vous a encouragée – et vous vous êtes engagée – à communiquer ouvertement avec moi-même, votre gestionnaire, en vue de gérer dorénavant les conflits potentiels.

À cette fin, je suis heureuse que vous deveniez membre de l’équipe des ventes de Brandon et je vous souhaite tout le succès possible là où vous travaillerez.

[99]           Cela illustre que la mutation a été traitée davantage comme une faveur que comme une mesure d’accommodement liée à la déficience de la plaignante. Même si les circonstances de la mutation ne font pas partie du licenciement, je suis d’avis qu’elles en établissent le contexte et étayent la prétention de la plaignante selon laquelle son employeur n’a pas pris sa déficience au sérieux. Ann Ukrainec a déclaré qu’elle ne croyait pas que le contenu de la lettre de mutation causerait du stress à la plaignante lorsqu’elle a indiqué quelles étaient les attentes de l’employeur après la mutation.

[100]       Dans l’ensemble et pour tous les motifs susmentionnés, de même qu’après avoir examiné le témoignage de la plaignante, je préfère ce dernier à celui d’Ann Ukrainec.

[101]       L’intimée a fait valoir aussi que la plaignante aurait dû déposer un grief au sujet d’un problème quelconque avec ses évaluations du rendement et que, comme elle ne l’avait pas fait, il fallait en tirer une inférence défavorable. Quand on lui a demandé si l’employeur pensait qu’il aurait été stressant pour la plaignante de déposer un grief au sujet du contenu de ses évaluations du rendement, Don Rooney (directeur des relations de travail chez MTS) a dit qu’il ne comprenait pas pourquoi la plaignante aurait trouvé stressant de déposer un grief pour corriger une situation. M. Shelest (service des ressources humaines) a lui aussi témoigné à l’audience. Selon lui, l’employeur, lorsqu’un gestionnaire l’avisait qu’un employé avait des problèmes de rendement, établissait souvent un plan d’action afin d’aider cet employé à obtenir un meilleur rendement. Cependant, aucun plan d’action n’a été établi pour aider la plaignante à améliorer son rendement, pas plus que sa déficience n’a été prise en considération à ce stade. Là encore, je suis d’avis que les commentaires de M. Rooney ainsi que le fait qu’aucun plan d’action n’a été établi étayent la prétention de la plaignante, à savoir que son employeur n’a pas pris au sérieux sa déficience au moment d’examiner ses problèmes de rendement au travail.

[102]       En me fondant sur les éléments de preuve que l’intimée a présentés, la conclusion à laquelle j’arrive après avoir lu les évaluations du rendement antérieures à 2005 est que la plaignante n’avait pas de problèmes de rendement. Bien qu’il soit indiqué dans l’évaluation du rendement de 2004 qu’il fallait que la plaignante s’améliore un peu dans ses communications avec autrui, rien ne semble suffisamment important pour amener à conclure qu’elle avait eu dans le passé des problèmes de communication avec des membres de son équipe. Des problèmes de communication sont devenus plus évidents dans les évaluations du rendement de 2005 et de 2006, mais ils coïncident avec le diagnostic de la déficience de la plaignante ainsi qu’avec les efforts que celle-ci a faits pour amoindrir l’effet du stress sur son état. La plaignante a tenté de régler ces problèmes avec l’intimée et de faire changer ses évaluations du rendement, mais sa déficience n’a pas été considérée comme un facteur qui influençait son rendement.

[103]       La LCDP a pour objet de donner effet au principe suivant :

le droit de tous les individus, dans la mesure compatible avec leurs devoirs et obligations au sein de la société, à l’égalité des chances d’épanouissement et à la prise de mesures visant à la satisfaction de leurs besoins, indépendamment des considérations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, la déficience ou l’état de personne graciée.

(Article 2 de la LCDP)

[104]       Dans le même ordre d’idées, de pair avec ce principe, la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, adoptée le 13 décembre 2006 lors de la soixante et unième séance de l’Assemblée générale par la résolution A/RES/61/106 signée par le Canada le 30 mars 2007 et ratifiée par lui le 11 mars 2010, indique, à l’alinéa h) de son préambule :

Reconnaissant également que toute discrimination fondée sur le handicap est une négation de la dignité et de la valeur inhérentes à la personne humaine.

[105]       Dans le contexte de l’emploi, pour garantir que les employés bénéficient tous de chances égales à celles des autres employés, un employeur est tenu de prendre des mesures raisonnables, sans s’imposer de contrainte excessive, pour composer avec les besoins d’un employé (voir l’arrêt Central Okanagan School District No 23 c. Renaud. [1992] 2 R.C.S. 970, au paragraphe 16 [Renaud]). Même si la portée de l’obligation d’accommodement varie en fonction des caractéristiques propres à chaque entreprise, des besoins précis de chaque employé et des circonstances précises dans lesquelles la décision doit être prise, tout au long de la relation d’emploi, l’employeur est tenu de s’efforcer d’« accommoder » l’employé (voir l’arrêt Centre universitaire de santé McGill (Hôpital général de Montréal) c. Syndicat des employés de l'Hôpital général de Montréal, 2007 CSC 4, au paragraphe 22). Pour examiner si un employeur s’est acquitté de son obligation d’accommodement envers un employé, « il peut souvent se révéler utile, en pratique, d’examiner séparément, d’abord, la procédure, s’il en est, qui a été adoptée pour étudier la question de l’accommodement » (Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. British Columbia Government and Service Employees' Union (B.C.G.S.E.U.) (Grief Meiorin), [1999] 3 R.C.S. 3, au paragraphe 66). Dans le cas des employés atteints d’une déficience, l’aspect procédural de l’obligation d’accommodement consiste à obtenir tous les renseignements pertinents sur la déficience de l’employé, y compris sur l’état de santé présent de l’employé, sur la probabilité de rétablissement, sur l’aptitude à exécuter les fonctions professionnelles et sur les possibilités d’offrir un travail de remplacement (voir ADGA Group Consultants Inc. c. Lane et al., 91 O.R. (3d) 649 (C.S.J.Ont., C.D.), au paragraphe 107 [Lane]). Selon la cour, dans Lane :

[traduction] L’expression « contrainte excessive » exige, dans les affaires relatives aux droits de la personne, que les intimés examinent sérieusement quelles mesures d’accommodement peuvent être prises en faveur des plaignants. Le fait de n’avoir jamais songé à la question des mesures d’accommodement ni pris cette dernière en considération, y compris les mesures, s’il en est, qui pourraient être prises, constitue un manquement à l’obligation « procédurale » d’accommodement.

(Lane, au paragraphe 107)

[106]       En général, une personne chargée d’évaluer le rendement de la plaignante, qui se fonderait sur un entretien avec Ann Ukrainec et qui lirait les évaluations du rendement de la plaignante sans aucun contexte à propos du comportement et de la déficience de cette dernière, conclurait probablement que son rendement était mauvais. En revanche, si cette personne était au courant du contexte dans son ensemble, les conclusions seraient peut-être différentes. On n’a pas offert à la plaignante la chance d’expliquer son comportement dans ses évaluations du rendement, pas plus qu’aux personnes qui devaient la comparer à Sharon Horner en vue du licenciement. L’employeur a été mis au courant à diverses reprises de la déficience de la plaignante et des effets du stress sur son état, mais il n’y a pas assez de preuves pour donner à penser que l’intimée a analysé sérieusement si la déficience de la plaignante avait un effet sur son rendement au travail et quelles mesures elle pouvait prendre pour accommoder la plaignante à cet égard. Au lieu de cela, le rendement de la plaignante a été évalué sans tenir sérieusement compte des effets de sa déficience sur son rendement au travail. Étant donné que ces évaluations du rendement ont servi de fondement au licenciement de la plaignante, sa déficience a eu une incidence dans la décision que l’intimée a prise de ne plus la garder à son service.

[107]       Après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments de l’intimée, et compte tenu du raisonnement qui précède, je conclus que l’intimée n’a pas expliqué de manière raisonnable sa conduite discriminatoire à première vue. L’intimée a donc violé l’alinéa 7a) de la LCDP en refusant de garder à son service la plaignante du fait de sa déficience.

IV.             Les mesures de redressement

[108]       Les parties ont présenté leurs conclusions finales par écrit, j’ai réservé le droit de poser des questions additionnelles qui pourraient découler de leurs observations et je traiterai de cette affaire dans le cadre de chacune des mesures de redressement demandées qui nécessitent de plus amples éclaircissements.

[109]       Lorsqu’une plainte déposée en vertu de l’article 7 de la LCDP est jugée fondée, le Tribunal a le pouvoir réparateur de rendre une ordonnance en vertu des paragraphes 53(2), (3) et (4) de la LCDP.

[110]       L’objet de la LCDP est de nature réparatrice et « […] ne vise pas à déterminer la faute ni à punir une conduite » (Robichaud c. Canada (Conseil du Trésor), [1987] 2 R.C.S. 84, au paragraphe 13 [Robichaud]). L’objet premier de la loi consiste plutôt à « […] déceler les actes discriminatoires et à les supprimer » (Robichaud, au paragraphe 13). Le Tribunal est saisi de litiges complexes et émotifs, ce qui exige qu’il [traduction] « fasse preuve d’innovation et de souplesse pour mettre au point des mesures de redressement efficaces, et la Loi est structurée de manière à favoriser cette souplesse » (Grover c. Canada (Conseil national de recherches – CNR) (1994), 80 F.T.R. 256 (C.F. 1re inst.)). Bien que le Tribunal bénéficie en vertu de l’article 53 d’une certaine souplesse et d’un certain pouvoir discrétionnaire en matière de redressement, ce pouvoir discrétionnaire n’est pas sans limites. Dans le contexte d’une analyse de la limite imposée à la responsabilité d’indemniser en vertu de la LCDP, la Cour d’appel fédérale a déclaré, dans l’arrêt Chopra c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 268 [Chopra] :

La première limite a été reconnue unanimement par les membres formant la Cour dans Morgan : il doit exister un lien de causalité entre l’acte discriminatoire et la perte alléguée. La deuxième limite, consacrée par la Loi même, consiste dans le pouvoir discrétionnaire conféré au Tribunal d’ordonner l’indemnisation de la totalité ou de la fraction des pertes de salaire entraînées par l’acte discriminatoire. L’exercice de ce pouvoir discrétionnaire doit obéir à des principes.

(Chopra, au paragraphe 37)

[111]       Pour dire les choses de façon plus générale :

[…] les ordonnances de redressement doivent être liées au litige ou au sujet de la plainte qui a été jugée fondée : le « cadre de la plainte » ou le « sujet réel ». Le redressement doit être égal à l’acte discriminatoire. Les ordonnances doivent aussi être raisonnables et le pouvoir discrétionnaire en matière de redressement doit être exercé en fonction de la preuve présentée.

(Hughes c. Élections Canada, 2010 TCDP 4 [Hughes], au par. 50)

[112]       Pour ce qui est de l’exécution des ordonnances de redressement, la Commission canadienne des droits de la personne ou d’autres parties peuvent y prendre part sur le plan de la consultation ou de la surveillance. La participation d’autres acteurs démontre que le Tribunal a un rôle juridictionnel à jouer qui se traduit mal dans les aspects techniques ou spécifiques de l’application d’une ordonnance, qui affecte souvent le fonctionnement au jour le jour d’un gouvernement intimé ou d’une entreprise intimée (voir Hugues, au paragraphe 51). Compte tenu de ces principes, voici mes motifs concernant le redressement de la discrimination exercée en l’espèce.

La responsabilité de la TEAM

[113]       L’intimée a tenté de faire ajouter la TEAM en tant que partie intimée dans la présente affaire au motif qu’elle était solidairement responsable de tout acte discriminatoire. Le Tribunal a rejeté la demande de l’intimée, mais a déclaré qu’il lui était loisible de faire valoir dans ses observations la responsabilité solidaire de la TEAM (voir Heather Lynn Grant c. Manitoba Telecom Services Inc., 2010 TCDP 26). Se fondant sur l’arrêt Renaud, l’intimée soutient que la TEAM est solidairement responsable de tout acte discriminatoire résultant de l’administration et de l’application de bonne foi de la convention collective. Cependant, en l’espèce, l’acte discriminatoire ne résulte pas de l’application de l’alinéa 26.03.1 de la convention collective; la conclusion de l’existence d’une discrimination a trait à la façon dont l’intimée a évalué le rendement de la plaignante et au rôle que ces évaluations ont joué dans son licenciement. La TEAM n’est pas intervenue dans l’évaluation du rendement de la plaignante et on n’a pas produit assez de preuves pour donner à penser que la TEAM a été partie à l’acte discriminatoire. Cela étant, rien ne permet de tenir la TEAM solidairement responsable de la discrimination exercée en l’espèce.

L’indemnité pour préjudice moral

[114]       La plaignante demande la somme de 20 000 $ pour le préjudice moral qu’elle a subi par suite de l’acte discriminatoire, en vertu de l’alinéa 53(2)e) de la LCDP. Elle soutient qu’il convient de lui accorder le montant maximal prévu par cette disposition parce que l’intimée a manifestement fait montre d’un manque d’intérêt et de compréhension à l’égard de sa situation. Elle a vécu beaucoup de stress, tant pendant la période précédant la fin de son emploi auprès de l’intimée qu’au cours de la poursuite de la présente plainte relative aux droits de la personne. Enfin, elle dit qu’elle a droit au montant maximal à cause de la manière trompeuse dont l’intimée a décidé de la licencier et a produit des éléments de preuve à l’instruction de la plainte.

[115]       Quand une personne subit un préjudice moral, aucune somme d’argent ne peut l’effacer. Le préjudice moral lié à un acte discriminatoire est de nature subjective et il varie d’une personne à une autre. Les cicatrices psychologiques sont parfois longues à guérir et peuvent se répercuter sur l’estime de soi. Du point de vue de la personne victime d’un acte discriminatoire, il y a lieu d’accorder d’importantes sommes d’argent pour tenir compte de ce que cette personne a subi ainsi que pour rendre justice. Cela dit, lorsqu’une preuve établit l’existence d’un préjudice moral, il faut tenter de l’indemniser (voir Cruden c. Agence canadienne de développement international et Santé Canada, 2011 TCDP 13, au paragraphe 170). Cependant, 20 000 $ est le montant maximal que le Tribunal peut accorder en vertu de l’alinéa 53(2)e) et il ne le fait que dans les cas les plus flagrants.

[116]       Selon la preuve médicale contenue dans l’exposé conjoint des faits et le témoignage de la plaignante, cette dernière a bel et bien souffert d’un stress lié à la discrimination qu’elle a subie. Son employeur a évalué son rendement de manière défavorable à un moment où elle avait besoin de compréhension et de mesures d’accommodement de sa part. Il lui a fallu plutôt se tourner vers son syndicat pour obtenir de l’aide.

[117]       De ce fait, j’ordonne à l’intimée de payer la somme de 10 000 $ au titre du préjudice moral que la plaignante a subi par suite de son licenciement.


 

L’indemnité pour la perpétration d’un acte discriminatoire de manière délibérée ou inconsidérée

[118]       La plaignante souhaite obtenir de l’intimée une indemnité d’un montant de 20 000 $, conformément au paragraphe 53(3) de la LCDP. Elle sollicite le montant maximal que prévoit cette disposition parce qu’elle veut que le Tribunal fasse clairement comprendre que l’intimée s’est comportée d’une manière complètement inappropriée.

[119]       L’objectif de la LCDP est de remédier aux actes discriminatoires, et non pas de les punir (Robichaud, au paragraphe 13). L’existence d’un acte discriminatoire délibéré ou inconsidéré est subordonnée à « […] une intention ou un comportement […] dénué de prudence, ou encore, un mépris des conséquences de ce comportement » (Canada (Procureur général) c. Collins, 2011 CF 1168, au paragraphe 33). Là encore, l’octroi du montant maximal que prévoit cette disposition est à réserver aux cas les plus graves.

[120]       Comme il a été exposé dans l’analyse portant sur la preuve prima facie de la plaignante, il n’y a pas eu assez de preuves pour indiquer que cette dernière a été ciblée en vue d’un licenciement du fait de sa déficience ou que l’intimée entendait agir de manière discriminatoire à son endroit. Cependant, même si elle était au courant de la déficience de la plaignante, l’intimée n’a pas considéré d’une manière suffisante les effets que cette déficience avait sur sa conduite au travail au moment d’évaluer son rendement. L’intimée n’a pas non plus tenu compte des commentaires que la plaignante a faits en réponse aux évaluations du rendement défavorables. Essentiellement, l’intimée a été « dénué[e] de prudence » relativement à l’obligation qu’elle avait d’envisager au moins de prendre des mesures d’accommodement en faveur de la plaignante. Compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, le Tribunal accorde à Mme Grant la somme de 10 000 $ sous cette rubrique.


 

La réintégration et la perte de salaire

[121]       La plaignante sollicite :

(1)               la réintégration dans ses fonctions au même endroit ou à un poste coté de manière équivalente au même endroit;

(2)               une indemnité au titre du salaire perdu, des cotisations de retraite perdues, des prestations perdues dans le cadre du régime d’actionnariat des employés, des prestations perdues dans le cadre du régime de rémunération variable, ainsi que des primes perdues relativement aux ventes de groupe;

(3)               le rétablissement de sa période de service validée nette et de la pension connexe (y compris les cotisations de l’intimée entre la date du licenciement et la date de la réintégration).

[122]       L’objectif visé dans ce cas-ci est de remettre le plus possible la plaignante dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte discriminatoire n’avait pas eu lieu. Je demeurerai saisie du dossier et donnerai aux parties l’occasion de présenter des observations sur la façon dont elles souhaitent traiter de cette mesure de redressement particulière et complexe.

Les dommages-intérêts spéciaux

[123]       La plaignante sollicite des dommages-intérêts spéciaux pour les dépenses qu’elle a supportées, conformément à l’alinéa 53(2)c) de la LCDP. À l’audience, j’ai mentionné que je demeurerais saisie du dossier au cas où une question se poserait à la suite de l’audience ou après la réception des observations écrites des parties; je reporterai donc ma décision sous cette rubrique jusqu’au moment où les parties auront présenté des observations additionnelles sur les mesures de redressement qui nécessitent des éclaircissements.


 

Les dépens

[124]       Avant que la Cour suprême du Canada rende sa décision dans l’affaire Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général), 2011 CSC 53, la plaignante a fait valoir qu’elle voulait présenter des observations sur la question des dépens si sa plainte était accueillie. Depuis que la Cour suprême a rendu sa décision, aucuns dépens ne peuvent être accordés. Cela étant, la plaignante peut présenter des observations sur ses frais ordinaires, mais non sur les dépens. Je reporterai le prononcé de ma décision sous cette rubrique jusqu’au moment où les parties auront présenté des observations additionnelles sur les mesures de redressement qui nécessitent des éclaircissements.

Les intérêts

[125]       La plaignante a demandé des intérêts sur toute indemnité accordée, conformément au paragraphe 53(4) de la LCDP. Je reporterai le prononcé de ma décision sous cette rubrique jusqu’au moment où les parties auront présenté des observations additionnelles sur les mesures de redressement qui nécessitent des éclaircissements.

La mesure de redressement visant l’intérêt public

[126]       Conformément à l’alinéa 53(2)c) de la LCDP, la plaignante sollicite également une ordonnance portant que l’intimée mette en œuvre des mesures appropriées, en consultation avec la Commission, destinées à prévenir des actes discriminatoires semblables. Je conclus que l’intimée manque de connaissances sur son obligation d’accommodement. Il est ressorti de la preuve que, chez MTS, la direction ne connaît pas très bien la LCDP et les obligations des employeurs à cet égard. J’ordonne donc à l’intimée de s’efforcer, avec le concours de la Commission, de renseigner les membres de la haute direction, comme les directeurs et les chefs du service des relations de travail, sur l’obligation d’accommodement et la LCDP. L’intimée s’efforcera, avec le concours de la Commission, de veiller à disposer d’une politique appropriée sur l’obligation d’accommodement et, sinon, elle en établira une ou modifiera sa politique actuelle. L’intimée consultera le syndicat dans le cadre de ce processus afin de tenir compte du point de vue des employés. Cette mesure de redressement doit être exécutée dans l’année suivant la présente décision.

V.                L’ordonnance

[127]       Ayant conclu que la plainte dont il est question en l’espèce est fondée, conformément au paragraphe 53(2) de la LCDP, le Tribunal rend l’ordonnance suivante :

                     L’intimée accordera à la plaignante une indemnité d’un montant de 10 000 $ au titre du préjudice moral qu’elle a subi par suite de l’acte discriminatoire commis.

                     L’intimée accordera à la plaignante une indemnité d’un montant de 10 000 $ pour avoir commis l’acte discriminatoire de manière délibérée ou inconsidérée.

                     L’intimée s’efforcera, avec le concours de la Commission, de renseigner les membres de la haute direction, comme les directeurs et les chefs du service des relations de travail, sur l’obligation d’accommodement et la LCDP. L’intimée s’efforcera, avec le concours de la Commission, de veiller à disposer d’une politique appropriée sur l’obligation d’accommodement et, sinon, elle en établira une ou modifiera sa politique actuelle. L’intimée consultera le syndicat dans le cadre de ce processus afin de tenir compte du point de vue des employés. Cette mesure de redressement sera exécutée dans l’année suivant la présente décision.

                     Dans les deux semaines suivant la présente décision, les parties feront part au Tribunal de leurs disponibilités en vue de la tenue d’une conférence téléphonique ou d’une demi-journée d’audience pour présenter des observations additionnelles et répondre à toute question ou donner des éclaircissements sur les mesures de redressement susmentionnées. Les parties devront avoir en main tous les documents et renseignements pertinents dont elles auront besoin pour cette conférence téléphonique ou cette audience.

[128]       Le Tribunal continuera de réserver sa compétence et demeurera saisi de l’affaire jusqu’au moment où les parties auront présenté leurs observations additionnelles sur les mesures de redressement accordées et le Tribunal se sera prononcé sur elles.

Signée par

Sophie Marchildon

Juge administrative

OTTAWA (Ontario)

Le 26 avril 2012

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du tribunal: T1452/7809

Intitulé de la cause: Heather Lynn Grant c. Manitoba Telecom Services Inc

Date de la décision du tribunal: Le 26 avril 2012

Lieu de l’audience: Winnipeg, Manitoba

Comparutions:

R. Ivan Holloway, pour la plaignante

Aucune comparution, pour la Commission canadienne des droits de la personne

Gerald D. Parkinson et Paul A.McDonald, pour l'intimée

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