Tribunal canadien des droits de la personne

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TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE CANADIAN HUMAN RIGHTS TRIBUNAL

BOB BROWN

le plaignant

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

LA SOCIÉTÉ DE TRANSPORT DE L'OUTAOUAIS

l'intimée

DÉCISION SUR REQUÊTE

2008 TCDP 36
2008/08/29

MEMBRE INSTRUCTEUR : Karen A. Jensen

[1] L'intimée, la Société de transport de l'Outaouais (STO), a demandé au Tribunal d'adjoindre la Commission de transport régionale d'Ottawa-Carleton (OC Transpo) et le procureur général du Québec (le PGQ) à titre d'intimés dans la plainte déposée par Bob Brown contre la STO. La Commission canadienne des droits de la personne, OC Transpo et le PGQ s'opposent à cette demande.

[2] M. Brown est quadriplégique et utilise un fauteuil roulant pour se déplacer. Il habite au cur du centre-ville d'Ottawa. Lors de la fête hivernale d'Ottawa (Bal de Neige) en 2005, il n'a pu monter à bord d'un autobus de la STO qui se rendait à des activités au parc Jacques-Cartier à Gatineau, au Québec, parce que l'autobus de la STO n'était pas adapté aux fauteuils roulants. Il a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne dans laquelle il allègue que la STO a commis un acte discriminatoire à son endroit, acte fondé sur sa déficience.

[3] En 2005, la STO et OC Transpo avaient conclu une entente par laquelle ils partageaient la prestation des services d'autobus pour les activités du Bal de Neige. Les activités se tenaient tant à Ottawa qu'à Gatineau, au Québec, qui se situe en face d'Ottawa, de l'autre côté de la rivière. OC Transpo affirme que les autobus desservant les lieux où se tenait le Bal de Neige en 2005 étaient des autobus à plancher surbaissé adaptés aux personnes ayant une déficience. La STO soutient que les autobus qu'elle a utilisés à l'époque n'étaient pas adaptés aux fauteuils roulants. La STO fournissait un service de transport adapté, que M. Brown ne pouvait utiliser parce qu'il ne résidait pas au Québec. Cependant, il pouvait faire appel au service de transport adapté d'OC Transpo.

[4] Le Tribunal a compétence pour adjoindre des parties. Cependant, il ne faut utiliser ce pouvoir discrétionnaire qu'avec prudence et uniquement lorsque c'est nécessaire pour trancher la plainte (Smith c. CN, 2005 TCDP 23; Desormeaux c. OC Transpo (décision rendue à l'oral : le 2 octobre 2002 (T701/0602)); Syndicat des employés d'exécution de Québec-Téléphone c. Telus Comunications, 2003 TCDP 31).

L'adjonction d'OC Transpo à titre d'intimée

[5] La STO soutient qu'il est nécessaire qu'OC Transpo participe à la procédure en tant qu'intimée pour que soit tranchée la plainte. Étant donné que les services d'autobus étaient fournis conjointement par les deux organisations, elles doivent toutes deux être parties à la procédure, selon la STO.

[6] Je ne suis pas d'accord. C'est le service de la STO qui fait l'objet de la plainte en l'espèce, et non l'ensemble de services d'autobus qui ont été fournis durant le Bal de Neige. M. Brown allègue que, contrairement aux autres résidants non handicapés d'Ottawa qui voulaient se rendre aux activités ayant lieu du côté du Québec, il n'a pas pu monter à bord d'un autobus de la STO. Il ne critique pas les services d'autobus fournis par OC Transpo durant le Bal de Neige. Par conséquent, le fait que les services d'autobus fournis durant le Bal de Neige en 2005 aient été offerts conjointement par OC Transpo et la STO ne requiert pas l'adjonction d'OC Transpo à titre d'intimée.

[7] L'intimée soutient également qu'OC Transpo devrait être ajoutée en tant que partie parce qu'il incombe à OC Transpo de fournir des services d'autobus aux Ontariens handicapés. Cette affirmation laisse transparaître un moyen de défense contre la plainte et la nécessité, peut-être, d'appeler des témoins d'OC Transpo à comparaître. Cependant, cet argument ne soulève pas la question de la responsabilité d'OC Transpo puisque rien ne laisse croire qu'OC Transpo n'a pas fourni de services de transport à M. Brown en raison de sa déficience.

[8] Pour ce qui est de la réparation, M. Brown demande les mesures d'accommodement nécessaires pour lui permettre d'utiliser les services d'autobus de la STO pour se rendre à certains endroits au Québec, comme les voyageurs non handicapés peuvent le faire. Si la plainte est jugée fondée, la présence d'OC Transpo en tant que partie n'est pas nécessaire pour fournir de telles mesures de réparation.

[9] Pour ces motifs, la demande de la STO de faire adjoindre OC Transpo en tant qu'intimée est rejetée.

L'adjonction du PGQ à titre d'intimé

[10] La STO demande que le procureur général du Québec soit adjoint en tant qu'intimé parce que la plainte de M. Brown pourrait mettre en question la constitutionnalité de la Loi sur les sociétés de transport en commun (la Loi) et la Politique d'admissibilité au transport adapté (la Politique). Selon la STO, la Loi et la Politique exigent que les utilisateurs du transport en commun adapté soient des résidants du Québec. Puisque M. Brown demande d'être desservi peu importe son lieu de résidence, il conteste les exigences de la Loi et de la Politique. Par conséquent, la STO soutient que le PGQ doit être intimé pour défendre la constitutionnalité de la Loi et de la Politique.

[11] Cet argument doit également être rejeté. Ni M. Brown ni la Commission n'ont directement ou indirectement contesté la constitutionnalité de la Loi ou de la Politique. La question soulevée dans la plainte est de savoir si le fait de n'avoir pas fourni de transport adapté aux fauteuils roulants à M. Brown constituait ou non un acte discriminatoire. La STO peut choisir d'invoquer les exigences de résidence pour se défendre, mais la constitutionnalité de la Loi et de la Politique n'a pas été mise en cause.

[12] En outre, même si une question constitutionnelle avait été soulevée, les parties n'auraient eu qu'à en aviser le PGQ pour qu'il puisse présenter une preuve et des observations, s'il le désire (article 57 de la Loi sur les Cours fédérales). En l'espèce, le PGQ ne considère pas qu'une question constitutionnelle a été soulevée et choisit de ne pas participer à la présente affaire. Il n'est ni nécessaire ni indiqué d'adjoindre le PGQ en tant que partie contre sa volonté.

[13] Par conséquent, la demande de la STO visant à faire adjoindre le PGQ en tant qu'intimé est également rejetée.

Karen A. Jensen

OT9AWA (Ontario)

Le 27 août 2008

PARTIES AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL :

T1278/0808

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Bob Brown c. Société de transport de l'Outaouais

DATE DE LA DÉCISION SUR REQUÊTE
DU TRIBUNAL :

Le 29 août 2008

ONT COMPARU :

Bob Brown

Pour lui-même

Ikram Warsame

Pour la Commission canadienne des droits de la personne

Raymond Doray

Pour l'intimée

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