Tribunal canadien des droits de la personne

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Canadian Human Rights Tribunal Tribunal canadien des droits de la personne

ENTRE :

HELEN McALLISTER-WINDSOR

la plaignante

- et -

COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

la Commission

- et -

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES CANADA

l'intimé

MOTIFS DE DÉCISION

D.T. 2/01

2001/03/09

MEMBRE INSTRUCTEUR : Anne Mactavish, présidente

TABLE DES MATIÈRES

I. Demande de prestations d'assurance-emploi de Mme McAllister-Windsor

II. Dispositions législatives en cause

III. Objet de la législation

IV. Raison d'être et choix des limites

V. Effet de la limite de 30 semaines relative aux prestations spéciales

VI. Structure financière du régime d'assurance-emploi

VII. Principes juridiques

VIII. Analyse

A. Existe-t-il une preuve prima facie de discrimination?

i) Position de la Commission

ii) Position de DRHC

iii) Objet de la législation

iv) Choix de l'élément de comparaison approprié

v) Existe-t-il une différence de traitement fondée sur le sexe ou la déficience?

B. DRHC s'est-il acquitté de son fardeau?

i) Lien rationnel

ii) Bonne foi

iii) Contrainte excessive

C. Conclusion relative à la responsabilité

IX. Redressement

A. Mesures de redressement d'ordre législatif

B. Prestations perdues

C. Indemnité spéciale

D. Intérêts

X. Ordonnance

[1] La législation fédérale relative à l'assurance-emploi limite à 30 le nombre de semaines pendant lesquelles un prestataire peut recevoir des prestations de maternité, de maladie ou parentales (désignées collectivement sous le nom de prestations spéciales d'assurance-emploi). Helen McAllister-Windsor allègue qu'en raison de cette limite, connue sous le nom de règle anticumul, elle fait l'objet d'un traitement discriminatoire, fondé sur le sexe et la déficience, dans la fourniture d'un service destiné au public.

I. Demande de prestations d'assurance-emploi de Mme McAllister-Windsor

[2] Mme McAllister-Windsor présente une affection physique permanente connue sous le nom de béance du col utérin; à cause de cela, il lui est difficile de mener une grossesse à terme. Elle a indiqué dans son témoignage qu'elle avait été enceinte deux fois et qu'elle avait à chaque occasion perdu son bébé en cours de grossesse. Lorsqu'elle est devenue enceinte la troisième fois, son obstétricien lui a conseillé de rester au lit si elle désirait mener à terme sa grossesse.

[3] En décembre 1995, Mme McAllister-Windsor a cessé de travailler; le 12 janvier 1996, elle a fait une demande de prestations d'assurance-emploi (1). Mme McAllister-Windsor a touché des prestations de maladie durant 15 semaines, après quoi elle a commencé à recevoir des prestations en vertu du régime d'assurance-invalidité à long terme de son employeur. Le 1er juillet 1996, Mme McAllister-Windsor a donné naissance à une fille. Après son accouchement, elle a touché des prestations de maternité pendant 15 semaines.

[4] Lorsqu'elle a présenté sa demande de prestations d'assurance-emploi, Mme McAllister-Windsor a été informée que la période pendant laquelle elle pourrait recevoir des prestations spéciales était limitée à 30 semaines et qu'elle ne serait pas, par conséquent, admissible aux prestations parentales prévues par le régime d'assurance-emploi. Néanmoins, Mme McAllister-Windsor a fait également une demande de prestations parentales. On lui a d'abord dit qu'elle avait droit à des prestations parentales pendant une semaine, mais on l'a informée par la suite qu'elle n'était pas admissible aux prestations parentales puisqu'elle avait déjà reçu des prestations spéciales durant 30 semaines. Mme McAllister-Windsor a finalement bénéficié, à titre gracieux, semble-t-il, d'une semaine de prestations ordinaires de plus, à cause de la confusion entourant sa demande. Le 21 octobre 1996, Mme McAllister-Windsor est retournée au travail. Elle n'a jamais reçu de prestations parentales.

[5] Mme McAllister-Windsor allègue que le refus de lui accorder des prestations parentales parce qu'elle avait reçu des prestations de maladie et des prestations de maternité pendant 30 semaines constitue un acte discriminatoire fondé sur le sexe et la déficience qui viole la Loi canadienne sur les droits de la personne. Mme McAllister-Windsor a déclaré :

Toutes les autres mères qui travaillent ont toujours jubilé à l'idée d'être en congé pendant six mois avec leur nouveau-né. Je crois simplement qu'il n'était pas correct, parce que j'avais reçu des prestations spéciales de prestations de maladie, en fait lorsque j'étais restée à la maison à l'occasion de ma grossesse, de refuser de me verser des prestations parentales pour le motif que j'avais bénéficié de prestations de maladie lorsque j'étais enceinte. C'était à mon avis injuste, car je n'ai pas d'emprise sur la façon dont j'enfante (2).

[6] Mme McAllister-Windsor admet que son mari aurait pu demander et recevoir des prestations parentales. Elle a affirmé que non seulement son mari n'aurait pas pu nourrir sa fille au sein, mais qu'à titre de mère de l'enfant, elle aurait dû pouvoir bénéficier de prestations parentales.

II. Dispositions législatives en cause

[7] La demande de prestations d'assurance-emploi de Mme McAllister-Windsor était régie par l'article 11 de la Loi sur l'assurance-chômage (3). Les dispositions pertinentes de cet article sont les suivantes :

(1) Une fois la période de prestations établie, des prestations peuvent, à concurrence des maximums prévus au présent article, être versées au prestataire pour chaque semaine de chômage comprise dans cette période.

(3) Sous réserve du paragraphe (7), le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées au cours d'une période de prestations est :

  1. dans le cas d'une grossesse, quinze semaines;
  2. dans le cas de soins à donner à un ou plusieurs nouveau-nés du prestataire ou à un ou plusieurs enfants placés chez le prestataire en vue de leur adoption, dix semaines;
  3. dans le cas de maladie, blessure ou mise en quarantaine prévue par les règlements, quinze semaines.

(4) Sous réserve du paragraphe (7), les prestations ne peuvent être versées pendant plus de quinze semaines, dans le cas d'une seule et même grossesse, ou plus de dix, dans le cas de soins à donner à un ou plusieurs nouveau-nés d'une même grossesse ou du placement de un ou plusieurs enfants chez le prestataire en vue de leur adoption.

(5) Des prestations peuvent être versées pour plus d'une des raisons prévues au paragraphe (3), le nombre maximal de semaines de prestations versées au titre de ce paragraphe ne pouvant toutefois dépasser trente. [je souligne]

(7) Le nombre maximal de dix semaines visé à l'alinéa (3) b) et au paragraphe 4 est porté à quinze lorsque les conditions suivantes sont réunies :

  1. l'enfant en question est âgé d'au moins six mois à son arrivée à la maison ou lors du placement en vue de son adoption;
  2. un médecin ou l'agence responsable du placement atteste que l'enfant est atteint de troubles physiques, psychologiques ou affectifs qui nécessitent la prolongation de la période de soins.

[8] En l'espèce, c'est la limite imposée par le paragraphe 11 (5) qui pose problème.

[9] La « période de prestations » à laquelle il est fait référence dans les dispositions reproduites ci-dessus s'entend de la période de 52 semaines qui suit immédiatement la demande de prestations, et représente le laps de temps dans lequel les prestations d'assurance-emploi doivent être touchées. Cette période de 52 semaines ne peut être prolongée par suite du cumul de prestations.

III. Objet de la législation

[10] Gordon McFee a témoigné afin de présenter l'historique de l'assurance-emploi au Canada et d'expliquer l'objet du régime. M. McFee est directeur, Élaboration de la politique et de la législation, au sein de la Direction de l'assurance de Développement des ressources humaines Canada. Selon M. McFee, les origines du régime canadien d'assurance-emploi remontent au début des années 40. Le régime a été institué principalement par suite de la grande dépression des années 30, alors que beaucoup de gens se sont retrouvés sans emploi et complètement démunis. Le régime avait pour but de fournir temporairement un revenu de remplacement aux travailleurs qui s'étaient retrouvés sans emploi malgré eux, tout en favorisant leur réintégration au marché du travail.

[11] Au fil du temps, le marché du travail a évolué et le nombre de femmes salariées a augmenté. En 1971, on a révisé la législation en profondeur afin de tenir compte de l'évolution de la situation socio-économique, avec le résultat que le régime fournit désormais une aide non seulement en cas de pénurie de travail, mais aussi à l'occasion d'une grossesse ou d'une maladie. Selon M. McFee, même si l'intention était encore de fournir des prestations à court terme, on a inclus dans le régime modifié la grossesse et la maladie parmi les éventualités pouvant donner lieu à des versements.

[12] M. McFee a décrit les modifications de 1971 comme étant la plus profonde réforme du programme [d'assurance-emploi] depuis sa création. Avant 1971, l'assurance-emploi était strictement un régime d'assurance : par suite de l'institution des prestations de maternité et de maladie en 1971, on s'est écarté des principes purs de l'assurance et on a greffé au régime un volet social (4).

[13] Les prestations de grossesse ou de maternité ont été instituées afin de pallier la soi-disant incapacité temporaire entourant la naissance d'un enfant et, par conséquent, étaient destinées uniquement à la mère biologique d'un enfant. En 1984, le régime a été modifié à nouveau afin d'étendre les prestations aux cas d'adoption. En 1990, on a institué les prestations parentales, dont peuvent bénéficier autant les mères que les pères, qu'il s'agisse de parents naturels ou de parents d'adoption, et qui visent à accorder aux parents du temps pour prendre soin de leurs jeunes enfants.

[14] Les prestations de maternité, les prestations de maladie et les prestations parentales sont désignées collectivement sous le nom de prestations spéciales d'assurance-emploi, afin de les distinguer des prestations de chômage, qu'on appelle prestations ordinaires d'assurance-emploi. Selon M. McFee, il existe deux grandes différences entre les prestations ordinaires et les prestations spéciales; l'une d'elles a trait au motif d'admissibilité aux prestations et l'autre à l'exigence voulant que le prestataire soit disponible pour travailler. Pour ce qui est des prestations ordinaires, le nombre de semaines nécessaires pour devenir admissible varie en fonction du taux de chômage dans la région géographique où réside le prestataire; dans le cas des prestations spéciales, il faut toujours que le prestataire ait travaillé 20 semaines pendant l'année, peu importe le taux de chômage dans la région. En ce qui concerne la disponibilité pour travailler, l'une des exigences fondamentales veut que, pour être admissible aux prestations ordinaires, le prestataire soit prêt et apte à travailler; il n'existe aucune exigence du genre dans le cas des prestations spéciales.

[15] La législation relative à l'assurance-emploi continue d'évoluer. M. McFee a indiqué qu'à compter du 31 décembre 2000, le nombre maximal de semaines de prestations parentales passera de 15 à 35 (5). De ce fait, la limite quant au nombre de semaines de prestations spéciales que peut toucher un prestataire passera de 30 à 50. M. McFee a déclaré que le discours du Trône d'octobre 1999 précisait que ce changement visait à permettre aux parents de passer plus de temps à la maison avec leur enfant au cours de la première année de sa vie.

IV. Raison d'être et choix des limites

[16] Il y a toujours eu une limite en ce qui concerne le nombre de prestations ordinaires hebdomadaires. Par suite de l'institution des prestations spéciales, on a limité le nombre de prestations spéciales hebdomadaires. En l'espèce, c'est la limite fixée qu'on conteste. En outre, on a limité le nombre de prestations ordinaires hebdomadaires qu'un prestataire peut cumuler avec des prestations spéciales (6). Le prestataire ne peut en aucun cas toucher des prestations après la période de prestations de 52 semaines. Ces limites tiennent compte du fait que les prestations d'assurance-emploi revêtent un caractère immédiat. L'absence de limites contrecarrerait l'objectif du régime d'assurance-emploi, selon M. McFee, et le prestataire pourrait recevoir des prestations toute sa vie.

[17] Comme le nombre de prestations payables en vertu du régime sera toujours plafonné, la détermination de la limite appropriée dans une situation particulière, au dire de M. McFee, est fonction de plusieurs facteurs, notamment la mathématisation et la proximité entre l'emploi et le chômage et les périodes qui entourent cet événement. Dans le choix du nombre maximal de prestations de maternité, on a tenté de déterminer la période durant laquelle les femmes ont normalement besoin d'un soutien du revenu lorsqu'elles donnent naissance à un enfant. La preuve indique que les prestations parentales visent à accorder aux parents du temps pour prendre soin de leurs jeunes enfants, mais on ne sait trop comment on en est arrivé à la limite de 10 semaines pour ce genre de prestations. En ce qui concerne la décision de porter de 15 à 35 le nombre maximal de semaines de prestations parentales, M. McFee a dit ne pas connaître les considérations qui ont milité en faveur de cette décision, hormis ce qui a été dit dans le discours du Trône et dans l'allocution que le Premier ministre a prononcée une couple de jours plus tard. On ne m'a pas fourni de renseignements précis quant à la façon dont la limite de 15 semaines relative aux prestations de maladie ou celle de 30 semaines qui s'applique aux prestations spéciales ont été déterminées.

[18] La limitation du nombre de prestations spéciales hebdomadaires que peut recevoir un prestataire est une question qui a fait l'objet d'un certain examen. Dans son rapport publié en 1985 (le rapport Boyer), le Comité parlementaire sur les droits à l'égalité a fait les observations suivantes au sujet d'une version antérieure de la Loi sur l'assurance-emploi :

Il ne convient pas d'étudier la question des prestations de maternité et des prestations proposées pour le soin des enfants dans le même contexte que celui des prestations de maladie. L'accouchement est un événement normal et la nécessité de prévoir un congé de maladie devrait être considérée comme une conséquence normale de la pleine participation des femmes au marché du travail… (7)

[19] À l'époque où le rapport Boyer a été rendu public, le nombre maximal de semaines de prestations spéciales auxquelles le prestataire avait droit au cours d'une période de prestations était de 15. Le comité a fait observer ce qui suit :

Par conséquent, une femme enceinte qui tombe malade pendant son congé de maternité ne peut réclamer au total que quinze semaines de prestations. Si elle a été malade, par exemple, pendant deux semaines, ces deux semaines sont soustraites des quinze semaines dans le calcul du nombre des prestations de maternité qui lui seront versées. De même, un parent adoptif qui réclame la somme totale des prestations d'adoption n'est pas en mesure de réclamer des prestations de maladie, pour quelque raison que ce soit pendant la même période de prestations. Le Comité est d'avis que cette restriction est inutilement sévère pour les parents, naturels ou adoptifs, qui tombent malades et qu'elle devrait être éliminée par suite des autres changements que nous recommandons.

[20] L'année suivante, la Commission d'enquête sur l'assurance-chômage (la Commission Forget) en est arrivée à une conclusion similaire (8).

V. Effet de la limite de 30 semaines relative aux prestations spéciales

[21] M. Jean-François LaRue, chef - Groupes spéciaux, Politique de l'assurance-emploi, Développement des ressources humaines Canada, a témoigné au sujet des conséquences de la suppression de la limite de 30 semaines applicable aux prestations spéciales. Il a fourni des données sur les demandes d'assurance-emploi afin de déterminer combien de personnes sont touchées par la limite de 30 semaines qui s'applique aux prestations spéciales. Selon M. LaRue, on a dénombré, en 1998-1999, 2 360 cas où l'on a refusé de verser des prestations parce que la limite de 30 semaines applicable aux prestations spéciales avait déjà été atteinte. Il s'agissait dans tous les cas de prestataires de sexe féminin. M. LaRue a expliqué que, compte tenu des limites relatives au nombre de semaines pendant lesquelles il est possible de recevoir les divers types de prestations spéciales, les seuls prestataires qui risquaient d'être touchés par la limite de 30 semaines étaient ceux qui avaient bénéficié à la fois de prestations de maternité et de prestations de maladie. Or, les prestations de maternité sont réservées aux femmes.

[22] M. LaRue a également témoigné à propos des conséquences financières de la suppression de la règle interdisant le cumul de prestations. Selon M. LaRue, l'élimination de la règle anticumul ferait augmenter de 2 789 928 $ le coût du régime d'assurance-emploi, compte tenu du nombre de demandes enregistré en 1998-1999.

VI. Structure financière du régime d'assurance-emploi

[23] M. McFee a indiqué que l'assurance-emploi est un régime d'assurance autofinancé. Autrement dit, le régime est financé à même les primes acquittées par les employeurs et les employés. Les taux de cotisation sont fixés par la Commission de l'assurance-emploi et doivent être approuvés par le ministre des Ressources humaines et le ministre des Finances. Les cotisations perçues servent à financer le versement des prestations ainsi que le coût de l'administration du régime. Bien qu'il soit administré par Développement des ressources humaines Canada, le régime d'assurance-emploi n'est aucunement financé à même le Trésor du Canada.

[24] La situation financière du régime d'assurance-emploi a varié au fil du temps, le régime enregistrant d'une année à l'autre parfois des déficits et parfois des surplus. Le dernier déficit enregistré remonte à 1994. Sur une base cumulative, le régime affiche un surplus depuis 1996 ou 1997. Selon M. McFee, le Compte d'assurance-emploi affiche actuellement un surplus de l'ordre de 29 milliards de dollars.

VII. Principes juridiques

[25] La plainte de Mme McAllister-Windsor a été déposée en vertu de l'article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (9). Aux termes de cet article, le fait, pour le fournisseur de biens, de services, d'installations ou de moyens d'hébergement destinés au public, d'en priver un individu ou de le défavoriser à l'occasion de leur fourniture constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite. L'article 3 de la Loi précise que le sexe (y compris la grossesse et l'accouchement) et la déficience constituent des motifs de distinction illicite.

[26] Aux termes de l'alinéa 15. (1) g) de la Loi, le refus de donner à un individu accès à un service ne constitue pas un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif justifiable.

[27] La Cour suprême du Canada a récemment eu l'occasion de réexaminer la méthode à adopter dans des cas comme celui qui nous intéresse, dans les affaires Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. BCGSEU (10) (Meiorin) et Colombie-Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie-Britannique (Council of Human Rights) (11) (Grismer). La distinction historique entre la discrimination directe et la discrimination indirecte fait place désormais à une méthode unifiée de traitement des plaintes relatives aux droits de la personne. En vertu de cette méthode, il incombe toujours à la partie plaignante d'établir une preuve prima facie de discrimination. La preuve prima facie est celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la partie plaignante, en l'absence de réplique de la partie intimée (12).

[28] Une fois qu'une preuve prima facie de discrimination a été établie, il revient à la partie intimée de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la politique ou norme discriminatoire comporte un motif justifiable. Dans cette optique, la partie intimée doit désormais prouver :

  1. qu'elle a adopté la norme à une fin ou dans un but qui est rationnellement lié à la fonction exécutée;
  2. qu'elle a adopté la norme de bonne foi, en croyant qu'elle est nécessaire à l'atteinte de la fin ou du but en question;
  3. que la norme est raisonnablement nécessaire pour accomplir la fin ou le but poursuivi, en ce sens que la partie intimée ne peut composer avec les personnes qui présentent les caractéristiques de la partie plaignante sans subir une contrainte excessive.

[29] Le terme contrainte excessive n'est pas défini dans la Loi. Toutefois, les arrêts Meiorin et Grismer aident beaucoup à déterminer si une défense fondée sur une contrainte excessive a été établie. Dans Meiorin, la Cour suprême a fait observer que l'utilisation du mot excessive laisse supposer qu'une certaine contrainte est acceptable; pour satisfaire à la norme, il faut absolument que la contrainte imposée soit excessive (13). La Cour suprême a également fait remarquer que le défendeur, afin de prouver que la norme est raisonnablement nécessaire, doit toujours démontrer qu'elle inclut toute possibilité d'accommoder sans qu'il en résulte une contrainte excessive (14). Il incombe au défendeur d'établir qu'il a examiné et raisonnablement rejeté toutes les formes viables d'accommodement. Le défendeur doit démontrer qu'il était impossible d'incorporer dans la norme des aspects d'accommodement individuels sans qu'il en résulte une contrainte excessive (15). Dans certains cas, le coût excessif peut justifier le refus de composer avec les personnes atteintes de déficiences. Toutefois, il faut se garder de ne pas accorder suffisamment d'importance à l'accommodement. Il est beaucoup trop facile d'invoquer l'augmentation des coûts pour justifier le refus d'accorder un traitement égal. (16) L'adoption de la norme du défendeur doit être étayée par des éléments de preuve convaincants. La preuve impressioniste d'une augmentation des dépenses ne suffit pas généralement (17). Enfin, la Cour suprême a indiqué que les facteurs tels que le coût des méthodes d'accommodement possibles devraient être appliqués d'une manière souple et conforme au bon sens, en fonction des faits de chaque cas (18).

VIII. Analyse

A. Existe-t-il une preuve prima facie de discrimination?

[30] Personne ne conteste que la fourniture par DRHC de prestations d'assurance-emploi est un service destiné au public, au sens de l'article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (19). De même, on n'a pas tenté de laisser croire que l'affection physique permanente de Mme McAllister-Windsor n'est pas une déficience au sens de la Loi. La question litigieuse est la suivante : la norme en question -- c'est-à-dire la règle interdisant le cumul des prestations spéciales prévues au paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage -- a-t-elle un effet discriminatoire sur Mme McAllister-Windsor en raison de son sexe ou de sa déficience?

i) Position de la Commission

[31] De l'avis de l'avocat de la Commission canadienne des droits de la personne, nous sommes ici en présence d'un cas classique de ce qui a traditionnellement été qualifié de discrimination par suite d'un effet préjudiciable (20). Autrement dit, la règle neutre interdisant le cumul des prestations prévues au paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage impose un fardeau supplémentaire et préjudiciable à Mme McAllister-Windsor, en raison de sa grossesse et de sa déficience, lequel fardeau n'est pas partagé par les autres prestataires du régime d'assurance-emploi. Mme McAllister-Windsor n'a pu toucher de prestations parentales à la suite de la naissance de sa fille, tandis que d'autres qui n'ont pas demandé de prestations de maternité ou de prestations de maladie durant leur période de prestations ont pu recevoir des prestations parentales. Selon l'avocat de la Commission, cela constitue une preuve prima facie de discrimination fondée sur le sexe et la déficience.

ii) Position de DRHC

[32] En revanche, l'avocate de DRHC soutient qu'aucune preuve prima facie de discrimination n'a été établie en l'espèce. La règle interdisant le cumul des prestations spéciales s'applique uniformément dans tous les cas et n'est pas discriminatoire à l'endroit de certains groupes. Aucun individu -- homme ou femme, valide ou invalide -- ne peut toucher plus que les 30 semaines de prestations spéciales prévues par le régime d'assurance-emploi.

[33] De l'avis de DRHC, il faut tenir compte de la raison d'être du régime d'assurance-emploi dans toute évaluation des limites qui s'appliquent aux prestations spéciales. On a conclu dans de nombreuses instances judiciaires que le régime d'assurance-emploi vise à fournir des prestations de remplacement du revenu à court terme (21). Au dire de DRHC, la plaignante cherche en l'espèce à transformer l'essence même du régime pour en faire un régime d'assurance-invalidité.

[34] Les régimes d'assurance imposent invariablement des limites en ce qui a trait aux prestations. En l'occurrence, le législateur a décidé de limiter le nombre de prestations spéciales hebdomadaires que peut toucher un prestataire. De l'avis de DRHC, il n'appartient pas aux cours ou au présent tribunal de faire des conjectures au sujet de cette décision de principe.

[35] Enfin, DRHC a fait observer que la législation en matière d'assurance-emploi ne prévoyait pas à l'origine le versement de prestations de maternité, de maladie ou parentales. L'ajout de telles prestations, sur une base limitée, visait à améliorer le régime. Les prestataires qui touchent des prestations spéciales bénéficient de certains avantages par rapport aux personnes qui demandent des prestations ordinaires : les prestataires touchant des prestations spéciales n'ont pas à être disponibles pour travailler, possibilité de complémenter le revenu d'assurance-emploi afin qu'il représente jusqu'à 95 p. 100 du salaire normal et le versement possible de prestations durant un séjour à l'étranger.

iii) Objet de la législation

[36] La première étape de mon analyse consiste à examiner la raison d'être du régime d'assurance-emploi. Les tribunaux se sont beaucoup penchés sur cette question dans le cadre de procédures ayant trait à divers paragraphes de l'article 11 de la Loi sur l'assurance-chômage qui ont été intentées en vertu de l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés. Dans chacune des affaires citées par DRHC, les tribunaux ont conclu que le régime d'assurance-emploi vise à fournir des prestations de remplacement du revenu à court terme. La principale raison d'être de la législation est … de venir en aide aux travailleurs qui perdent leur emploi et qui sont incapables d'en trouver un autre immédiatement (22). Les tribunaux ont fait observer que la législation met l'accent sur les circonstances entourant l'emploi et le chômage, plutôt que sur la formation de familles (23), et que le régime est essentiellement un régime d'assurance qui vise à aider les personnes qui sont aptes à travailler, et non un régime d'assurance-invalidité (24).

[37] Ces commentaires sont particulièrement pertinents par rapport aux prestations ordinaires d'assurance-emploi. De toute évidence, le régime d'assurance-emploi a été institué pour protéger les employés contre le chômage involontaire en attendant qu'ils trouvent un autre emploi. Toutefois, comme M. McFee l'a indiqué dans son témoignage, le régime d'assurance-emploi, par suite de l'institution des prestations de maternité et des prestations de maladie en 1971, s'est écarté des principes purs de l'assurance et un volet social a été greffé au régime. Comme l'a fait observer la Cour d'appel de l'Ontario dans Shafer,

[Traduction] tant la loi de 1971 que celle de 1984 [qui a institué les prestations parentales] avait expressément pour objet d'assurer un remplacement partiel du revenu pendant les périodes d'inactivité en raison d'une grossesse et d'un accouchement ou du soin d'un enfant (25).

[38] Même si les prestations de maladie n'étaient pas l'objet du litige dans Shafer, les observations de la Cour d'appel à propos de la raison d'être des prestations de maternité et des prestations parentales s'appliquent, sous réserve des adaptations nécessaires, aux prestations de maladie.

[39] Il est évident que, au moment où il a été institué, le régime d'assurance-emploi visait uniquement à fournir des prestations de remplacement à court terme aux personnes qui étaient prêtes et aptes à travailler, mais qui se retrouvaient sans emploi. Bien que cela demeure la principale raison d'être de la législation, le régime a évolué au cours des 30 dernières années, avec le résultat qu'il fournit également, sur une base limitée, des prestations à des personnes qui ne sont peut-être pas disponibles pour travailler en raison d'une maladie, d'un accouchement ou du soin d'un enfant.

iv) Choix de l'élément de comparaison approprié

[40] Comme la Cour suprême du Canada l'a indiqué dans Gibbs c. Battlefords and District Co-operative Ltd. (26), l'égalité est un concept comparatif. Pour qu'on puisse conclure qu'il y a discrimination, le demandeur doit subir un fardeau ou être privé d'un avantage comparativement à d'autres. Il est donc nécessaire de trouver l'élément de comparaison approprié pour cerner la différence de traitement et les motifs de la distinction (27).

[41] Dans Law c. Canada, la Cour suprême du Canada a indiqué que le point de départ naturel lorsqu'il s'agit d'établir l'élément de comparaison pertinent consiste à tenir compte du point de vue du plaignant. C'est généralement le plaignant qui choisit la personne avec laquelle il désire être comparé aux fins de l'analyse relative à la discrimination. Cependant, le juge peut approfondir la comparaison soumise par le plaignant lorsqu'il estime justifié de le faire (28).

[42] De l'avis de l'avocat de la Commission, Mme McAllister-Windsor a comparé sa situation à celle des autres prestataires du régime d'assurance-emploi (qui comprennent, peut-on présumer, les personnes qui touchent à la fois des prestations ordinaires et des prestations spéciales), et qu'il s'agit là du groupe de comparaison approprié aux fins de l'analyse relative à la discrimination. Bien que l'avocate de DRHC n'ait pas expressément abordé la question de l'identification du groupe de comparaison dans ses exposés, je crois comprendre qu'elle a basé son analyse sur le même groupe de comparaison (29).

[43] L'examen du témoignage de Mme McAllister-Windsor révèle qu'elle n'a pas comparé sa situation à celle des autres prestataires qui demandent des prestations ordinaires. Mme McAllister-Windsor s'est plutôt comparée aux autres personnes qui demandent des prestations spéciales et, plus particulièrement, aux autres nouvelles mères qui ont pu toucher à la fois des prestations de maternité et des prestations parentales après la naissance d'un enfant.

[44] Afin de déterminer le groupe de comparaison approprié, il est nécessaire d'examiner la raison d'être du régime de prestations en cause (30). J'ai déjà conclu que le régime d'assurance-emploi a deux objectifs : d'une part, fournir des prestations de remplacement du revenu à court terme (prestations ordinaires d'assurance-emploi) aux personnes qui sont prêtes et aptes à travailler mais qui sont sans emploi, et, d'autre part, accorder une aide ponctuelle (prestations spéciales) aux personnes qui ne sont pas disponibles pour travailler en raison d'une maladie, d'un accouchement ou du soin d'un enfant.

[45] À mon avis, il est illogique de comparer Mme McAllister-Windsor aux autres personnes qui sont aptes au travail, mais qui ne peuvent trouver un emploi convenable. Comme l'a souligné le juge Sopinka dans Brooks c. Canada Safeway Ltd. (31), le fait de comparer les prestations qui sont accordées à des individus à diverses fins n'aide pas à déterminer s'il y a discrimination. On devrait plutôt comparer la situation de Mme McAllister-Windsor avec celle des autres prestataires du régime qui ne sont pas disponibles pour travailler, c'est-à-dire les personnes qui demandent des prestations spéciales.

v) Existe-t-il une différence de traitement fondée sur le sexe ou la déficience?

[46] Les régimes d'assurance imposent souvent des limites quant aux prestations auxquelles ils donnent droit. Les assureurs ne sont pas tenus de verser indéfiniment des prestations, et il faut tracer une ligne quelque part (32). Cela dit, une fois qu'un fournisseur de services décide d'offrir des prestations, il doit le faire de façon non discriminatoire (33).

[47] La question est donc la suivante : le paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage a-t-il un effet discriminatoire sur Mme McAllister-Windsor en raison de son sexe ou de sa déficience?

[48] L'avocate de DRHC soutient que les prestataires touchant des prestations spéciales ne sont pas défavorisés; en fait, ils bénéficient de certains avantages dont ne jouissent pas les prestataires qui reçoivent des prestations ordinaires. Cet argument est fondé sur l'hypothèse selon laquelle les personnes qui sont dans la même situation que Mme McAllister-Windsor doivent être comparées à celles qui touchent des prestations ordinaires. Comme je l'ai indiqué au départ, il convient selon moi de comparer en l'espèce la situation de Mme McAllister-Windsor avec celle des autres personnes touchant des prestations spéciales.

[49] Bien que les tribunaux se soient penchés à maintes reprises sur les dispositions de l'article 11 de la Loi sur l'assurance-chômage à la lueur des dispositions de l'article 15 de la Charte, on ne m'a cité aucun cas où les questions soulevées par la plainte de Mme McAllister-Windsor ont carrément été abordées. Une affaire d'arbitrage entendue par le juge Jerome en vertu de la Loi sur l'assurance-chômage -- CUB 19483 (Irving) -- est celle qui ressemble le plus au cas de Mme McAllister-Windsor. L'affaire Irving avait trait à une version antérieure du paragraphe 11 (5). À l'époque, la Loi sur l'assurance-chômage prévoyait des maximums de 15 semaines de prestations de maternité, de 15 semaines de prestations parentales et de 15 semaines de prestations de maladie, mais le nombre de semaines de prestations spéciales était limité à 15. Mme Irving avait reçu le nombre maximal de prestations de maternité, soit 15. Peu après son retour au travail, elle est tombée malade et a demandé des prestations de maladie. Sa demande a été rejetée pour le motif que la Loi limitait à 15 le nombre de semaines de prestations spéciales que pouvait recevoir un prestataire au cours d'une même période de prestations. Mme Irving a contesté la Loi en vertu de l'article 15 de la Charte, alléguant qu'elle était victime de discrimination en raison de son sexe, puisque les femmes étaient le seul groupe dont les prestations pouvaient être réduites du fait qu'elles avaient obtenu des prestations de maternité. Le juge Jerome a conclu que la Loi n'avait pas pour effet de priver Mme Irving de prestations en raison de son sexe, faisant valoir que tous les prestataires, de sexe masculin ou féminin, avaient droit au plus à 15 semaines de prestations spéciales (34). En conséquence, il a conclu que le droit en cause revêtait un caractère économique et ne s'est pas intéressé aux caractéristiques personnelles de Mme Irving.

[50] DRHC soutient que la règle anticumul applicable aux prestations spéciales dont il est question en l'espèce s'applique uniformément à tous les cas et que cette règle, tout comme la disposition dont il est question dans Irving, n'est pas discriminatoire à l'endroit de certains groupes. Personne, selon DRHC, ne peut bénéficier de plus de 30 semaines de prestations spéciales en vertu du régime d'assurance-emploi.

[51] Le régime législatif dont il est question en l'espèce est à première vue neutre et s'applique également en théorie à toutes les personnes qui demandent des prestations spéciales. Toutefois, ma tâche ne consiste pas à appliquer la Loi canadienne sur les droits de la personne de façon à assurer une égalité formelle, mais plutôt de manière à réaliser ce que la Cour suprême du Canada a décrit dans Meiorin comme la promesse d'égalité réelle (35). Contrairement aux dispositions législatives dont il était question dans Irving, les limites qui s'appliquent en l'espèce aux divers genres de prestations spéciales ont été conçues de telle façon que, en fait, seules les femmes enceintes qui ont demandé des prestations de maladie ont un accès limité aux prestations spéciales en raison de l'application des limites. Dans son témoignage, M. LaRue a démontré ce fait à l'aide d'un graphique. Il a indiqué que 2 360 personnes toutes des femmes seraient touchées par la suppression de la limite qui s'applique aux prestations spéciales. Comme l'a souligné M. LaRue, les femmes sont les seules à pouvoir bénéficier de prestations de maternité, qui ont rapport aux aspects physiques de la grossesse et de l'accouchement.

[52] En conséquence, je conclus que, bien que le paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage énonce, à première vue, une règle neutre, il a non seulement un effet disproportionné mais également un effet préjudiciable uniquement sur les femmes enceintes qui, à l'instar de Mme McAllister-Windsor, ont demandé des prestations de maladie. Même si certaines femmes visées par le paragraphe 11 (5) ne sont sans doute pas atteintes d'affections pouvant être qualifiées de déficiences au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne (36), personne ne conteste que ce soit le cas de Mme McAllister-Windsor. Le fait que Mme McAllister-Windsor ait été à la fois enceinte et invalide l'a rendue inadmissible aux prestations parentales prévues par la Loi sur l'assurance-chômage. Cela équivaut à une preuve prima facie de discrimination fondée sur le sexe et la déficience.

B. DRHC s'est-il acquitté de son fardeau?

[53] Comme j'ai conclu qu'il existe une preuve prima facie de discrimination fondée sur le sexe et la déficience, il incombe à DRHC d'établir que la règle anticumul est fondée sur un motif justifiable. Afin de démontrer l'existence d'un motif justifiable, il faut établir trois éléments. J'examinerai chacun de ces éléments à tour de rôle.

i) Lien rationnel

[54] Compte tenu de la méthode définie par la Cour suprême du Canada dans Meiorin et Grismer, DRHC doit, afin de prouver que la norme en question repose sur un motif justifiable, d'abord démontrer qu'il a adopté ladite norme à une fin ou dans un but qui est rationnellement lié à la tâche à accomplir. L'analyse à cette étape ne porte pas principalement sur la validité de la norme en cause, mais plutôt sur la validité de son objet plus général (37).

[55] L'avocat de la Commission soutient qu'il n'existe pas de lien rationnel entre la règle anticumul et l'objet de la Loi sur l'assurance-chômage. Au dire de la Commission, le fait d'interdire le cumul de prestations spéciales n'a pas pour effet de fournir des prestations de remplacement du revenu aux personnes qui ont perdu leur emploi, tout en favorisant leur réintégration au marché du travail. La suppression de la règle anticumul ne permettrait pas aux prestataires de toucher indéfiniment des prestations. Les prestataires seraient encore soumis aux limites qui s'appliquent à chaque type de prestations spéciales qu'une personne peut toucher au cours d'une période de prestations de 52 semaines. De toute évidence, la Commission n'est aucunement préoccupée par la légitimité des limites maximales qui s'appliquent aux divers types de prestations spéciales hebdomadaires, ou par la période de prestations de 52 semaines.

[56] À cette étape des procédures, il s'agit non pas de s'interroger sur la légitimité de la limite de 30 semaines qui s'applique aux prestations spéciales, par opposition à certaines autres prestations hebdomadaires, mais plutôt d'examiner s'il existe un lien rationnel entre les limites temporelles et l'objet du régime. À cet égard, il est important de noter que la Commission semble admettre la légitimité des limites fixées quant au nombre de semaines pendant lesquelles les diverses catégories de prestations spéciales peuvent être versées, ainsi que de la limite de 52 semaines qui s'applique à la période de prestations.

[57] Je suis convaincue qu'il existe un lien rationnel entre la règle anticumul et ce qui constitue, selon mes conclusions, la raison d'être générale des prestations spéciales prévues par la Loi sur l'assurance-chômage, soit assurer un remplacement limité du revenu à court terme pour les personnes qui sont incapables de travailler en raison d'une maladie, d'une grossesse ou d'un accouchement, ou encore du soin d'un enfant.

ii) Bonne foi

[58] Le deuxième élément que doit établir DRHC conformément au critère énoncé dans Meiorin et Grismer est qu'il a adopté la norme en question de bonne foi, estimant qu'elle était nécessaire à l'atteinte de la fin ou du but poursuivi. Si la norme n'a pas été considérée comme raisonnablement nécessaire, ou si son adoption a été motivée par des considérations discriminatoires, alors elle ne peut être justifiée.

[59] La Commission soutient qu'on ne m'a présenté aucun élément de preuve démontrant comment on a établi la limite de 30 semaines, et que la décision de fixer à 30 le nombre maximal de semaines prestations spéciales représentait un choix arbitraire. Au dire de la Commission, il s'agit d'une preuve circonstancielle de mauvaise foi.

[60] On a effectivement présenté au Tribunal très peu d'éléments de preuve quant aux motifs sur lesquels repose le choix des diverses limites prévues par le régime d'assurance-emploi, hormis l'affirmation générale de M. McFee selon laquelle il fallait imposer des limites pour empêcher le versement de prestations de façon illimitée. Plus particulièrement, on n'a pas expliqué pourquoi on a opté, dans le cas des prestations spéciales, pour une limite de 30 semaines plutôt que pour une autre limite.

[61] Cela dit, les régimes d'assurance doivent inévitablement fixer des limites, comme les tribunaux l'ont souvent fait observer (38). Le régime d'assurance-emploi étant autofinancé, les responsables de son administration ont la responsabilité d'assurer sa viabilité financière permanente. Il ressort clairement du témoignage de M. LaRue que la suppression de la limite qui s'applique aux prestations spéciales entraînerait d'importantes conséquences financières. Compte tenu du témoignage de M. McFee, je suis prête à admettre que, lorsqu'il a imposé la règle anticumul qui s'applique aux prestations spéciales versées aux prestataires en vertu du régime d'assurance-emploi, DRHC a agi de bonne foi, estimant que la norme était nécessaire à l'atteinte de la fin ou du but poursuivi.

iii) Contrainte excessive

[62] Enfin, il incombe à DRHC, pour démontrer l'existence d'un motif justifiable, d'établir que la norme est raisonnablement nécessaire à l'atteinte de son but, dans le sens où il ne peut composer avec les personnes qui présentent les caractéristiques de la plaignante, sans subir une contrainte excessive.

[63] Essentiellement, DRHC a fait valoir, en ce qui concerne le troisième élément de l'analyse relative au motif justifiable, que la suppression de la règle anticumul imposerait un fardeau financier considérable au régime d'assurance-emploi, ainsi qu'aux cotisants, fardeau qui représenterait une contrainte excessive. À cet égard, DRHC a cité M. LaRue, qui a déclaré dans son témoignage que l'élimination de la règle anticumul accroîtrait de 2 789 928 $ le coût du régime d'assurance-emploi, compte tenu du nombre de demandes enregistré en 1998-1999.

[64] L'avocat de la Commission conteste l'estimation de coût de M. LaRue, faisant remarquer que les personnes qui demandent des prestations de maladie en vertu du régime d'assurance-emploi ne seront pas toutes atteintes d'une déficience au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Les femmes qui sont défavorisées par la limite de 30 semaines en raison de l'effet combiné de leur maladie (autre qu'une déficience) et de leur grossesse n'auront pas été victimes d'une discrimination fondée sur la déficience au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Par conséquent, l'avocat de la Commission soutient que l'estimation de coût de M. LaRue devrait être révisée à la baisse pour tenir compte de cette réalité.

[65] Il est pour le moins contestable, à mon avis, que le fait que la grossesse soit un facteur dans la différence de traitement dont les femmes feraient l'objet selon l'exemple de M. Taylor serait suffisant pour constituer une preuve prima facie de discrimination fondée sur le sexe (39). En conséquence, je ne suis pas persuadée qu'il soit vraiment nécessaire de réviser l'estimation de coût.

[66] Le témoignage de M. LaRue au sujet du coût qu'entraînerait le changement doit être examiné dans le contexte de celui de M. McFee à propos de la situation financière générale du régime d'assurance-emploi. Selon M. McFee, le régime d'assurance-emploi affiche un surplus depuis 1996 ou 1997; à l'heure actuelle, le surplus est de l'ordre de 29 milliards de dollars.

[67] Il est donc évident que le surplus qu'affiche le Compte d'assurance-emploi permettrait d'absorber très facilement l'augmentation de coût qu'entraînerait la suppression de la règle anticumul, sans qu'il en résulte des conséquences immédiates pour les cotisants.

[68] Plutôt que d'absorber l'augmentation de coût résultant de l'élimination de la règle anticumul à même le surplus accumulé du régime, DRHC pourrait décider de refiler l'augmentation aux cotisants. À cet égard, l'avocat de la Commission soutient que le service en question est fourni par DRHC, et que je devrais tenir compte uniquement de la position de DRHC par rapport à la question de la contrainte excessive. Je ne devrais pas me préoccuper des conséquences que les modifications qui seraient apportées au régime d'assurance-emploi pourraient avoir pour les cotisants. Je ne suis pas d'accord. À titre d'administrateur du régime d'assurance-emploi, DRHC est responsable de la viabilité générale du régime. Dans Grismer, la Cour suprême du Canada a conclu que, dans l'administration du système de délivrance de permis de conduire de la Colombie-Britannique, le surintendant des Véhicules automobiles avait le droit de tenir compte non seulement du pouvoir de délivrer des permis, mais aussi de la sécurité des personnes qui circulent sur les routes de la province. À mon avis, il est tout aussi nécessaire d'examiner les effets que des modifications au régime d'assurance-emploi pourraient avoir sur les cotisations et les cotisants que leurs conséquences possibles du point de vue de la viabilité du régime.

[69] Cela dit, aucun élément de preuve ne m'a été présenté relativement à l'effet que l'augmentation de coût liée à ces modifications aurait sur les cotisations (40), pas plus qu'au sujet des conséquences de tout relèvement des cotisations pour les cotisants ou pour l'ensemble du régime.

[70] À mon avis, la preuve présentée par DRHC ne satisfait pas à la norme de preuve adoptée dans la jurisprudence pour établir que le fait de composer avec des femmes telles que Mme McAllister-Windsor en supprimant la règle anticumul entraînerait une contrainte excessive.

C. Conclusion relative à la responsabilité

[71] J'ai conclu que la limite prévue au paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage a un effet discriminatoire sur les femmes telles que Mme McAllister-Windsor. J'ai également conclu que DRHC n'a pas fait la preuve qu'il ne pourrait composer avec les personnes présentant les caractéristiques de la plaignante, sans subir une contrainte excessive. Eu égard à ces motifs, la plainte de Mme McAllister-Windsor est accueillie.

IX. Redressement

[72] Ayant jugé DRHC responsable, il me reste à déterminer si Mme McAllister-Windsor a droit à un redressement et, le cas échéant, la mesure qui conviendrait dans son cas. À cet égard, la compétence du Tribunal est régie par l'article 53 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. La Loi a été modifiée le 30 juin 1998 (41); les modifications apportées à cette occasion ont influé sur les pouvoirs du Tribunal en matière de redressement. Les parties s'accordent à dire que les dispositions de la version antérieure à celle de 1998 s'appliquent en l'espèce.

A. Mesures de redressement d'ordre législatif

[73] Lorsqu'il juge qu'une loi a un effet discriminatoire, le Tribunal canadien des droits de la personne a le pouvoir d'ordonner à l'intimé de cesser d'appliquer la disposition législative dont il s'agit (42). L'avocate de DRHC est d'avis qu'il n'est pas nécessaire de rendre une telle ordonnance en raison des modifications qui ont été apportées à la Loi le 31 décembre 2000.

[74] Les modifications apportées à la Loi sur l'assurance-emploi ont fait passer de 15 à 35 le nombre maximal de semaines de prestations parentales, et de 30 à 50 le nombre de semaines de prestations spéciales qui peuvent être versées en vertu du régime. Les limites quant au nombre de semaines de prestations de maternité ou de maladie n'ont pas été modifiées. En vertu de la Loi modifiée, la limite quant au nombre de semaines de prestations spéciales que peut toucher un prestataire durant une période de prestations continuera de s'appliquer uniquement aux femmes qui touchent à la fois des prestations de maladie et des prestations de maternité. Autrement dit, les modifications apportées n'ont pas réglé le problème décrit dans la présente décision.

[75] Le législateur peut recourir à divers moyens pour s'assurer que les femmes qui sont dans la même situation que Mme McAllister-Windsor ne sont pas traitées de façon discriminatoire par la législation relative à l'assurance-emploi. Ces solutions vont de la mesure extrême consistant à supprimer complètement les prestations spéciales à des mesures moins draconiennes telles que la révision des limites qui s'appliquent à chaque genre de prestations spéciales hebdomadaires, de façon à ce que les femmes comme Mme McAllister-Windsor ne fassent plus l'objet d'un traitement différentiel et préjudiciable. Le législateur est mieux placé que quiconque pour déterminer la façon de résoudre le problème cerné dans la présente décision par rapport à la législation (43).

[76] J'ai conclu que le paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage fait preuve de discrimination fondée sur le sexe et la déficience, en contravention de l'article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. En conséquence, j'ordonne à DRHC de cesser d'appliquer les dispositions du paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage. L'application de cette ordonnance sera suspendue pendant une période de 12 mois à compter de la date de cette décision afin de permettre à DRHC de consulter la Commission canadienne des droits de la personne quant aux mesures à prendre pour empêcher que les mêmes problèmes ou des problèmes similaires se posent à l'avenir, et pour permettre au législateur de corriger la situation comme bon lui semble.

B. Prestations perdues

[77] De l'avis de la Commission, Mme McAllister-Windsor a droit aux prestations d'assurance-emploi qui lui ont été refusées par suite de l'acte discriminatoire commis par DRHC. Je ne suis pas d'accord. Les pouvoirs d'un tribunal des droits de la personne en matière de redressement visent à remettre la victime d'un acte discriminatoire dans la position où elle aurait été, n'eut été de l'acte discriminatoire (44). Cependant, cet objectif est assujetti aux principes de la prévisibilité et de l'atténuation des pertes. Mme McAllister-Windsor a déclaré qu'après que sa demande de prestations parentales eut été refusée, elle a reçu une semaine de prestation ordinaires, puis est retournée au travail. Rien n'indique qu'elle ait dans les faits subi une contrainte financière parce qu'elle n'a pas touché de prestations parentales. Par conséquent, je refuse de lui consentir quelque montant que ce soit au titre des prestations parentales non versées.

C. Indemnité spéciale

[78] Lorsqu'il en vient à la conclusion que l'acte discriminatoire commis par l'intimé a été délibéré ou inconsidéré, ou que la victime de l'acte en question a subi un préjudice moral ou a été blessée dans son amour-propre, le Tribunal peut ordonner à l'intimé de verser une indemnité spéciale pouvant atteindre 5 000 $ (45). Selon l'avocat de la Commission, Mme McAllister-Windsor devrait avoir droit à l'indemnité maximale prévue par la Loi.

[79] Tel qu'indiqué plus haut, je ne suis pas persuadée que DRHC a agi de mauvaise foi en l'espèce. Je ne suis pas persuadée non plus qu'il a agi de façon délibérée ou inconsidérée, ou qu'une indemnité devrait être accordée pour ce motif.

[80] La question à savoir si Mme McAllister-Windsor a droit à une indemnité du fait qu'elle a subi un préjudice moral ou qu'elle a été blessée dans son amour-propre pose davantage problème. La jurisprudence ne nous éclaire guère quant aux principes qui devraient régir l'exercice par le Tribunal du pouvoir discrétionnaire que lui confère l'alinéa 53 (3) b). Dans Druken, une autre affaire relative à l'admissibilité aux prestations d'assurance-emploi, la Cour d'appel fédérale s'est demandée s'il était dans l'intérêt public d'accorder une indemnité à ce titre, alors que l'acte discriminatoire ayant causé le préjudice moral découlait d'un mandat accordé par le législateur. Ces observations ont été faites à titre de remarques incidentes, la question n'ayant de toute évidence pas été débattue par les parties à l'instance.

[81] La Cour suprême du Canada a fait observer que la législation en matière de droits de la personne vise à corriger une situation plutôt qu'à punir (46). Au regard de ce principe, il me semble que je devrais à cette étape des procédures me concentrer sur l'effet que le refus d'accorder les prestations a eu sur Mme McAllister-Windsor, et non sur les motifs qui ont amené DRHC à agir comme il l'a fait.

[82] Il ressort clairement du témoignage de Mme McAllister-Windsor, et particulièrement de son comportement alors qu'elle décrivait les conséquences de ces événements pour elle, que le refus de lui accorder des prestations parentales l'a à la fois blessée et mise en colère. À mon avis, il convient, au regard de toutes les circonstances, de lui accorder une indemnité de 2 500 $.

D. Intérêts

[83] Des intérêts doivent être payés à l'égard des dommages-intérêts accordés à titre d'indemnité spéciale (47); toutefois, le versement d'intérêts ne doit pas entraîner le dépassement de la limite de 5 000 $ prescrite par la Loi en ce qui touche l'indemnité spéciale (48). J'ordonne que des intérêts soient payés sur les montants accordés conformément à cette décision et à la règle 9 (12) des Règles de procédure provisoires du Tribunal canadien des droits de la personne. Le calcul des intérêts devrait porter sur la période comprise entre le 12 janvier 1996, soit la date où Mme McAllister-Windsor a été informée qu'elle n'était pas admissible aux prestations parentales, et la date du paiement. Cependant, le montant total versé à titre d'indemnité spéciale, y compris les intérêts, ne doit en aucun cas dépasser 5 000 $.

X. Ordonnance

[84] Eu égard aux motifs énoncés ci-haut, je déclare que le paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage fait preuve de discrimination fondée sur le sexe et la déficience, et que DRHC a violé les droits de Mme McAllister-Windsor en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, et j'ordonne :

  1. que DRHC cesse d'appliquer les dispositions du paragraphe 11 (5) de la Loi sur l'assurance-chômage. L'application de cette ordonnance sera suspendue pendant une période de 12 mois à compter de la date de cette décision afin de permettre à DRHC de consulter la Commission canadienne des droits de la personne quant aux mesures à prendre afin d'éviter que les mêmes problèmes ou des problèmes similaires se produisent à nouveau à l'avenir, et de permettre au législateur de corriger la situation comme il le juge à propos;
  2. que DRHC verse à Mme McAllister-Windsor un montant de 2 500 $ à titre d'indemnité spéciale;
  3. que DRHC verse des intérêts à l'égard de l'indemnité spéciale accordée en vertu de la présente décision, conformément à la règle 9 (12) des Règles de procédure provisoires du Tribunal canadien des droits de la personne. Le calcul des intérêts portera sur la période comprise entre le 12 janvier 1996 et la date du paiement. Le montant total accordé à titre d'indemnité spéciale, y compris les intérêts, ne doit pas dépasser 5 000 $.

Anne L. Mactavish

OTTAWA (Ontario)

Le 9 mars 2001

TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER DU TRIBUNAL No : T575/3300

INTITULÉ DE LA CAUSE : Helen McAllister-Windsor c. Développement des ressources humaines Canada

LIEU DE L'AUDIENCE : Ottawa (Ontario)

(les 29 et 30 novembre et les 18 et 19 décembre 2000)

DATE DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL : le 9 mars 2001

ONT COMPARU :

Helen McAllister-Windsor pour elle-même

Eddie Taylor avocat de la Commission canadienne des droits de la personne

Anne Turley avocate de Développement des ressources humaines Canada

Référence : D.T. 3/01 (K. Popaleni et P. Janssen c. DRHC)

Le 9 mars 2001

1. À l'époque où Mme McAllister-Windsor a fait sa demande, le régime fédéral d'assurance-emploi était connu sous le vocable assurance-chômage. Le 30 juin 1996, le régime a été rebaptisé assurance-emploi; toutefois, aucune modification importante n'a alors été apportée aux dispositions législatives dont il est question dans cette instance. La terminologie courante sera utilisée dans l'ensemble de cette décision.

2. Transcription, p. 35.

3. L.R. 1985, chap. U-1, art. 11, 1985, chap. 4 (4e supp.), art. 2; 1990, chap. 40, art. 9.

4. M. McFee n'est pas le seul à penser que les prestations ordinaires d'assurance-emploi et les prestations spéciales revêtent un caractère fondamentalement différent. Dans le rapport du Comité d'enquête relatif à la Loi sur l'assurance-chômage (le rapport Gill), publié en novembre 1962, les auteurs se demandaient si le régime d'assurance-emploi devrait prévoir également des prestations de maternité. Le Comité a conclu que les prestations de maternité devraient être traitées séparément, faisant remarquer que ces prestations relevaient strictement de quelque autre régime de sécurité sociale (par. 112).

5. Voir la Loi d'exécution du budget, 2000, L.C. 2000, chap. 14, art. 3.

6. La limite qui s'applique dans le cas d'un tel cumul de prestations est examinée en rapport avec les plaintes de Katherine Popaleni et Pamela Janssen, qui ont été instruites en même temps que celle d'Helen McAllister-Windsor. Ma décision au sujet des plaintes de Mmes Popaleni et Janssen sera rendue en même temps que la présente décision.

7. Rapport du Comité parlementaire sur les droits à l'égalité, pp. 15 et 16.

8. Commission d'enquête sur l'assurance-chômage, 1986, p. 124.

9. La plainte de Mme McAllister-Windsor porte sur des événements survenus en 1996. Par conséquent, pour ce qui est des questions de fond, je me fonderai sur la Loi telle qu'elle existait en 1996.

10. [1999] 3 R.C.S. 3.

11. [1999] 3 R.C.S. 868.

12. Commission ontarienne des droits de la personne et O'Malley c. Simpson Sears Limited, [1985], 2 R.C.S. 536, p. 558.

13. À cet égard, l'arrêt Meiorin est conforme à la décision rendue dans Central Okanagan School District c. Renaud, [1992] 2 R.C.S. 984.

14. Grismer, supra, par. 32.

15. Grismer, supra, par. 42.

16. Grismer, supra, par. 41.

17. Grismer, supra, par. 41 et 42.

18. Meiorin, supra, par. 63. Voir aussi Chambly c. Bergevin, [1994] 2 R.C.S. 525, p. 546.

19. En fait, il existe à cet égard un jugement qui a force exécutoire. Voir l'arrêt rendu par la Cour fédérale dans Gonzalez c. Canada (Commission de l'emploi et de l'immigration), [1997] 3 C.F. 646.

20. Si elle a perdu une partie de son sens par suite de l'adoption par la Cour suprême du Canada de la méthode unifiée exposée dans Meiorin et Grismer, l'expression discrimination par suite d'un effet préjudiciable n'en demeure pas moins utile, car elle décrit la nature de la discrimination alléguée en l'espèce.

21. Voir, par exemple, Sollbach c. Canada (Procureur général), (1999), non publié (C.A.F.), Canada (Procureur général) c. Faltermeier, (1995) 128 D.L.R. (4e) 481 (C.A.F.), CUB 19483 (Irving), CUB 58460 (Miller), CUB 22373 (Lemieux), Schafer c. Canada (Procureur général), (1997), 35 O.R. (3e) 1 (C.A. Ont.) et Tinkham c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1995), 16 B.C.L.R. (3e)) 79 (B.C.S.C.).

22. Faltermeier, supra, p. 487. Voir aussi Sollbach, supra, p. 139.

23. Shafer, supra, p. 15.

24. Tinkham, supra, p. 83.

25. Page 15.

26. 27 C.H.R.R. D/87, par. 29. Voir aussi Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143, 10 C.H.R.R. D/5719.

27. Law c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1999] 1 R.C.S. 497, p. 531.

28. Supra, p. 532.

29. Tout au cours de ses exposés, Me Turley a comparé la situation de Mme McAllister-Windsor à celle des autres prestataires du régime d'assurance-emploi.

30. Ontario Nurses Association c. Orillia Soldiers Memorial Hospital, (1999), 36 C.H.R.R. D/202 (C.A. Ont.). Demande de pourvoi refusée, [1999] S.C.C.A. no 118), par. 29 à 33.

31. (1989), 59 D.L.R. (4e) 321, p. 337.

32. Voir Granovsky c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [2000] 1 R.C.S. 703 (C.S.C.), p. 746, et Schafer, supra, p. 28.

33. Gibbs, supra.

34. Le fait qu'un homme puisse toucher 15 semaines de prestations de maladie et ne puisse, par conséquent, demander de prestations parentales illustre le caractère non sexiste de ce régime législatif.

35. Supra, par. 41.

36. Voir Ouimette c. Lily Cups Ltd., (1990), 12 C.H.R.R. D/19, Naval c. Globe Foundry Ltd., (1993) 21 C.H.R.R. D/136, et Elkas c. Blush Stop Inc., (1994), 25 C.H.R.R. D/158.

37. Meiorin, supra, par. 59.

38. Granovsky, supra, p. 746, et Schafer, supra, p. 28.

39. Holden c. Canadian National Railway Co., (1990), 14 C.H.R.R. D/12, 91 C.L.L.C. 17,028, 112 N.R. 395 (C.A.F.)

40. Bien qu'il ait déclaré qu'il avait fait des calculs pour déterminer l'impact des modifications en question sur les cotisations, M. LaRue n'a pas fait part au Tribunal des résultats des calculs en question.

41. Voir la Loi modifiant la Loi sur la preuve au Canada, le Code criminel et la Loi canadienne sur les droits de la personne relativement aux personnes handicapées et, en ce qui concerne la Loi canadienne sur les droits de la personne, à d'autres matières, et modifiant d'autres lois en conséquence, L.C. 1998, chap. 9.

42. Druken c. Canada (Commission de l'emploi et de l'immigration), [1989] 2 C.F. 24, 23 C.C.E.L. 15 (C.A.F.).

43. À cet égard, je souscris aux opinions énoncées par la Cour fédérale dans Gonzalez, supra. Voir aussi Schachter c. Canada, [1988] A.C.F. no 515.

44. Voir Canada (Procureur général) c. Morgan, [1992] 2 C.F. 401, et Canada (Procureur général) c. McAlpine, [1989] 3 C.F. 530.

45. Paragraphe 53 (3) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

46. Canada (Conseil du Trésor) c. Robichaud, (1987), 8 C.H.R.R. D/4326 (C.S.C.), par. 33940.

47. Canada (Procureur général) c. Morgan, [1992] 2 C.F. 401.

48. Voir Hébert c. Canada (Forces armées canadiennes), (1993), 23 C.H.R.R. D/107.

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