Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Résumé :

Cette affaire concerne Earl Ka-Nowpasikow, qui a eu des problèmes avec sa maison dans une réserve.

M. Ka-Nowpasikow est membre de la Nation crie de Poundmaker (la « Nation »). Il habite la maison 103 de la réserve depuis 2003. Cette maison est en très mauvais état. Il y a des problèmes de moisissure, de dégâts d’eau et même de rongeurs qui vivent à l’intérieur. Cette maison appartient à la Nation.

Au début, M. Ka-Nowpasikow vivait dans la maison avec sa femme, mais ils se sont séparés en 2010. Depuis la séparation, il vit seul dans la maison. Il a demandé à plusieurs reprises de l’aide pour réparer sa maison et même pour en construire une nouvelle, mais la Nation ne lui a pas vraiment répondu.

M. Ka-Nowpasikow a eu l’impression d’être victime de discrimination parce qu’il fait partie de la famille Tootoosis, qui n’appuie pas le chef actuel de la Nation. Cependant, certains membres de la famille Tootoosis ont obtenu un nouveau logement. L’appartenance à cette famille n’expliquait donc pas les problèmes de logement de M. Ka-Nowpasikow.

De plus, M. Ka-Nowpasikow a trouvé que la Nation le discriminait en raison de ses problèmes de santé et de son célibat. Ses problèmes de santé comprennent des problèmes de poumons et de dos qui l’empêchent de travailler ou de se déplacer.

La Nation a fait valoir qu’elle n’avait pas beaucoup d’argent pour les logements et qu’elle l’utilisait principalement pour les urgences. Le budget de logement n’a pas augmenté depuis 1996 malgré l’inflation et la croissance de la population. Le budget n’est que de 296 970 $. En raison de ce budget limité, la Nation donne la priorité aux logements des femmes célibataires, des enfants et des personnes âgées. Selon la Nation, il est normal de demander à M. Ka-Nowpasikow de réparer lui-même sa maison parce qu’il est célibataire.

Cependant, le Tribunal n’était pas d’accord avec la Nation. La maison de M. Ka-Nowpasikow était en si mauvais état que la situation aggravait ses problèmes pulmonaires. M. Ka-Nowpasikow ne pouvait donc pas réparer la maison lui-même en raison de son état de santé. Par conséquent, M. Ka-Nowpasikow a fait l’objet de discrimination parce qu’il était un homme célibataire atteint d’une déficience.

Le Tribunal a donc ordonné à la Nation de verser 10 000 $ à M. Ka-Nowpasikow pour préjudice moral. Il a également ordonné le versement de 5 000 $ parce que la Nation n’avait pas correctement tenu compte de la situation de M. Ka-Nowpasikow lorsqu’il a demandé de l’aide pour son logement. Le Tribunal a aussi demandé aux deux parties de collaborer pour trouver un moyen d’améliorer la situation de M. Ka-Nowpasikow en matière de logement.

Contenu de la décision

Tribunal canadien
des droits de la personne

Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2023 TCDP 38

Date : le 8 septembre 2023

Numéro du dossier : T2407/6619

Entre :

Earl Ka-Nowpasikow

le plaignant

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Nation crie Poundmaker

l'intimée

Décision

Membre : Jennifer A. Orange


Table des matières

I. Aperçu 1

II. Décision 2

III. Contexte procédural 2

IV. Questions en litige 3

V. Position des parties 3

A. Positions du plaignant 3

B. Positions de l’intimée 4

C. Les positions de la Commission canadienne des droits de la personne 6

VI. Cadre juridique 7

D. Droit autochtone et droit coutumier autochtone 7

E. Discrimination en vertu de la LCDP 10

F. Caractère exécutoire 12

VII. Analyse 13

G. Le plaignant a-t-il droit à la protection contre la discrimination du fait qu’il possède une caractéristique protégée? 13

La santé de M. Ka-Nowpasikow et la connaissance qu’a la NCP de sa déficience 14

H. Le plaignant a-t-il subi un effet préjudiciable relativement à son logement en raison du refus d’effectuer des réparations à sa maison ou de lui accorder une nouvelle maison? 15

L’état de la maison 103 16

Les mauvaises conditions de logement dans la réserve 18

I. La caractéristique personnelle du plaignant a-t-elle été un facteur dans le traitement défavorable ou le désavantage? 19

a) Le statut de M. Ka-Nowpasikow en tant que membre de la famille Tootoosis a-t-il été un facteur du traitement défavorable ou du désavantage? 19

b) Le statut de M. Ka-Nowpasikow en tant qu’homme célibataire ayant une déficience a-t-il été un facteur dans le traitement défavorable ou le désavantage? 20

J. L’intimée a-t-elle offert un motif valable de ses actes autrement discriminatoires? 21

a) L’approche de la NCP en matière d’attribution des logements est-elle rationnellement liée à un objectif légitime? 22

b) La NCP croyait-elle honnêtement et de bonne foi que sa norme était nécessaire pour atteindre l’objectif visé? 25

c) La norme était-elle raisonnablement nécessaire, en ce sens que la norme ne pouvait pas être assouplie sans causer de contrainte excessive en matière de santé, de sécurité ou de coûts? 25

K. Si la NCP ne peut justifier ses actes, quelles mesures de redressement convient-il d’accorder par suite de la discrimination? 28

Mesures de redressement d’intérêt personnel 29

Mesures de redressement d’intérêt public 32

VIII. Ordonnances 33


I. Aperçu

[1] M. Earl Ka-Nowpasikow, le plaignant, est membre de l’intimée, la Nation crie Poundmaker (la « NCP » ou la « Nation ») depuis 1997. La NCP est située en Saskatchewan, près de North Battleford. La NCP est signataire du Traité no 6 et constitue une bande au sens de la Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I-5.

[2] M. Ka-Nowpasikow prétend avoir été victime de discrimination de la part de la NCP dans l’attribution de logements en raison de son statut de membre de la famille Tootoosis, de son statut d’homme célibataire vivant seul et de son statut de personne ayant une déficience, en contravention à l’article 6 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6 (la « Loi » ou la « LCDP »).

[3] M. Ka-Nowpasikow vit dans la maison 103 de la réserve depuis 2003. Au début, il vivait dans la maison avec son épouse, Sherri Dunstan. Il a continué d’y vivre après que Mme Dunstan et lui se sont séparés en 2010. La maison 103 est une maison appartenant à la bande.

[4] Il dépose la présente plainte dans le but que la NCP lui fournisse un meilleur logement qui n’aggravera pas sa déficience et l’indemnise pour les préjudices subis.

[5] La présente plainte ne peut être examinée séparément du contexte de la situation désastreuse du logement dans la réserve de la NCP. La NCP a reçu la même allocation de logement de base de Services aux Autochtones Canada (SAC) depuis plus de 30 ans, sans augmentation en fonction de l’inflation ou des changements démographiques. La preuve a démontré que la Nation n’a pas suffisamment de fonds pour offrir un logement décent à tous ses membres. La majeure partie de l’allocation de logement est utilisée pour les situations d’urgence en hiver, comme le remplacement ou la réparation de chaudières brisées, pour assurer la survie. La NCP doit faire des choix difficiles quant à la façon de répartir les fonds destinés au logement en raison de ses ressources limitées.

II. Décision

[6] La plainte est accueillie en partie. M. Ka-Nowpasikow n’a pas présenté de preuve prima facie pour démontrer qu’il a été victime de discrimination parce qu’il est membre de la famille Tootoosis.

[7] M. Ka-Nowpasikow a établi une preuve prima facie de discrimination fondée sur le recoupement de son statut d’homme célibataire et de personne ayant une déficience. La NCP n’a pas prouvé qu’il existait un motif justifiable à la discrimination.

[8] M. Ka-Nowpasikow a droit à des mesures de redressement en vertu de la Loi, et il convient d’accorder des mesures de redressement d’intérêt personnel et d’intérêt public. Comme la situation du logement de M. Ka-Nowpasikow a peut-être changé depuis l’audience, le Tribunal conserve sa compétence pour aider à régler cet aspect de la plainte.

III. Contexte procédural

[9] Le 9 janvier 2018, M. Ka-Nowpasikow a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (la « CCDP ») contre la NCP dans laquelle il soutient avoir été victime de discrimination relativement à la fourniture de logements dans la réserve de la NCP (la « plainte »). Le 15 juillet 2019, la CCDP a renvoyé la plainte au Tribunal pour instruction. Le membre George E. Ulyatt a présidé l’audience, qui a eu lieu virtuellement en raison de la pandémie de COVID-19 sur une période de dix jours entre le 16 août 2021 et le 14 septembre 2021. Treize témoins ont témoigné à l’audience, et des éléments de preuve ont été présentés sur un éventail de questions. La CCDP a participé pleinement à l’audience.

[10] Les parties ont déposé leurs observations finales écrites au printemps 2022.

[11] Malheureusement, le membre Ulyatt est décédé peu après.

[12] Les parties ont convenu que l’affaire serait tranchée par un nouveau membre du Tribunal en se fondant sur les transcriptions, l’enregistrement de l’audience et le dossier. Cette tâche m’a été confiée.

IV. Questions en litige

[13] Les questions en litige que le Tribunal doit trancher sont les suivantes :

  1. Le plaignant a-t-il établi une preuve prima facie, selon la prépondérance des probabilités, qu’il a été traité de façon défavorable en ce qui concerne la fourniture d’un logement en raison de ce qui suit :
    1. son statut de membre de la famille Tootoosis;
    2. son état matrimonial en tant qu’un homme célibataire sans enfant vivant avec lui;
    3. sa déficience en tant que personne souffrant de problèmes pulmonaires et dorsaux?
  2. Dans l’affirmative, la NCP a-t-il établi une justification valable et non discriminatoire de sa conduite et que le fait d’offrir des mesures d’adaptation au plaignant imposerait une contrainte excessive à la NCP?
  3. Si la NCP ne peut justifier ses actes, quelles mesures de redressement convient-il d’accorder par suite de la discrimination?
  4. Les mesures de redressement ordonnées par le Tribunal sont-elles exécutoires contre la NCP?

V. Position des parties

A. Positions du plaignant

[14] M. Ka-Nowpasikow soutient que la NCP a fait preuve de discrimination à son endroit dans la fourniture d’un logement en raison de sa déficience, de sa situation de famille et de son état matrimonial, contrairement à la LCDP. Il soutient qu’il a présenté une preuve prima facie de discrimination conformément à la décision Ledoux c. La Première Nation de Gambler, 2018 TCDP 26. Il soutient qu’il a besoin de réparations importantes à sa maison actuelle ou d’une nouvelle maison en raison de sa déficience, pour laquelle il n’a reçu aucune mesure d’adaptation, que la NCP ne lui a pas fourni un meilleur logement en raison de sa famille d’appartenance, et que la NCP n’a pas donné la priorité à ses demandes de logement parce qu’il est célibataire.

[15] M. Ka-Nowpasikow soutient qu’il demande de l’aide pour améliorer sa situation de logement depuis de nombreuses années. Malgré les demandes répétées de réparations et de soutien pour la construction d’une nouvelle maison, la NCP n’a pas répondu ou a répondu avec dédain.

[16] M. Ka-Nowpasikow soutient que la NCP a fait preuve de discrimination à son égard parce que sa famille n’appuie pas le chef actuel. De plus, parce qu’il est un homme et qu’il vit seul, la NCP n’appuiera pas ses demandes pour obtenir un meilleur logement. Il affirme que ces deux facteurs constituent une preuve prima facie de discrimination fondée sur la situation familiale et l’état matrimonial.

[17] M. Ka-Nowpasikow soutient également que la NCP savait qu’il souffrait d’une déficience exacerbée par l’état de sa maison. Malgré la présentation de notes médicales, la Nation n’a pas tenu compte de sa demande de le reloger dans une nouvelle maison, de réparer sa maison ou de l’aider à construire une nouvelle maison qui assurerait la protection de sa santé. Il soutient que ces actes constituent de la discrimination fondée sur sa déficience.

[18] M. Ka-Nowpasikow soutient que la mesure de redressement appropriée est la fourniture d’un logement adéquat et des dommages-intérêts pour l’indemniser du préjudice moral subi, ainsi que des dommages-intérêts spéciaux en raison de la discrimination délibérée ou inconsidérée de la NCP.

B. Positions de l’intimée

[19] Dans ses observations finales, la NCP a soutenu qu’elle ne conteste pas les caractéristiques personnelles de M. Ka-Nowpasikow. Elle reconnaît qu’il est membre de la famille Tootoosis, qu’il est célibataire et qu’il a une déficience.

[20] La NCP soutient que les ressources de logement sont réparties conformément à son droit coutumier.

[21] La NCP nie avoir fait preuve de discrimination à l’égard de M. Ka-Nowpasikow en ce sens qu’elle ne l’a pas traité défavorablement dans le contexte de la vie dans la réserve. La NCP reconnaît le mauvais état de la maison de M. Ka-Nowpasikow, mais affirme que bon nombre des maisons de sa réserve sont en mauvais état. La NCP soutient que les membres ne reçoivent pas d’aide pour construire des maisons ou effectuer des rénovations ou des réparations à moins de circonstances extrêmes. Le budget limité de la Nation en matière de logement est presque entièrement consacré aux situations d’urgence, et le fait de fournir à M. Ka-Nowpasikow le financement nécessaire pour construire la nouvelle maison qu’il voulait aurait imposé une contrainte excessive à la Nation.

[22] C’est dans le contexte du budget et du droit coutumier que les priorités sont établies pour l’attribution des logements, en particulier pour les femmes célibataires, les enfants et les aînés. Par conséquent, la Nation soutient que toute distinction faite en fonction de l’état matrimonial parce que M. Ka-Nowpasikow est un homme célibataire est justifiée par ce contexte.

[23] La NCP nie toute discrimination contre M. Ka-Nowpasikow en raison de sa situation familiale en tant que membre de la famille Tootoosis. Elle soutient qu’elle a apporté des améliorations aux logements de plusieurs membres de la famille de M. Ka-Nowpasikow.

[24] La NCP nie avoir été au courant de la déficience de M. Ka-Nowpasikow jusqu’au dépôt de la présente plainte en janvier 2018. Dans ses observations finales, la NCP a déclaré que lorsqu’elle a pris connaissance de la déficience de M. Ka-Nowpasikow, elle a élaboré des plans pour l’aider, qui ont été perturbés par la pandémie de COVID-19 et les difficultés de financement.

[25] La NCP soutient en outre que si le Tribunal conclut qu’une preuve prima facie de discrimination a été établie, la NCP avait un motif justifiable lié à la protection de ses membres.

[26] La NCP affirme que le Tribunal devrait conclure que la Nation n’a pas fait preuve de discrimination à l’égard de M. Ka-Nowpasikow et que la plainte devrait être rejetée.

[27] La NCP soutient que toute décision du Tribunal contre la NCP n’est pas exécutoire parce qu’elle détient ses propres pouvoirs de gouvernance en vertu du droit coutumier.

C. Les positions de la Commission canadienne des droits de la personne

[28] La CCDP ne prend pas position sur la question de savoir si la NCP a fait preuve de discrimination contre M. Ka-Nowpasikow en raison de sa situation familiale en raison de son appartenance à la famille Tootoosis ou de son état matrimonial parce qu’il est célibataire.

[29] La CCDP est d’avis que l’incapacité de la NCP de terminer la nouvelle maison de M. Ka-Nowpasikow, de lui attribuer une autre maison ou de rénover sa maison actuelle a eu un effet différentiel défavorable sur lui en raison de sa déficience.

[30] La CCDP soutient en outre que, comme M. Ka-Nowpasikow occupe un logement qui appartient à la NCP avec la connaissance et le consentement de la Nation et que la NCP est responsable de l’attribution des logements sur les terres qu’elle gouverne, il incombe à la NCP de prendre les mesures nécessaires pour répondre aux besoins liés aux déficiences de ses membres jusqu’à la contrainte excessive.

[31] La CCDP affirme que la NCP n’a pas fourni d’éléments de preuve à l’appui d’un argument de contrainte excessive. Bien que les éléments de preuve montrent que le financement de base annuel de la NCP pour le logement est de 296 970 $ et que son portefeuille de logements est déficitaire, la NCP n’a pas fourni de preuves concernant le coût des réparations pour répondre aux préoccupations de M. Ka-Nowpasikow en matière de logement. La CCDP soutient qu’en l’absence d’éléments de preuve précis et concrets, la NCP n’a pas établi l’existence d’une contrainte excessive en raison des coûts.

[32] La CCDP ne prend pas position sur les mesures de redressement d’intérêt personnel à accorder à M. Ka-Nowpasikow.

[33] La CCDP soutient que si le Tribunal conclut qu’il convient d’accorder des mesures de redressement, il conviendrait d’accorder les mesures de redressement d’intérêt public suivantes :

  1. La NCP cesse de commettre chaque acte discriminatoire désigné par le Tribunal et s’abstient de le faire;

  2. La NCP prend des mesures pour corriger les pratiques discriminatoires ou empêcher que de telles pratiques se reproduisent à l’avenir, en consultation avec la CCDP au sujet des objectifs généraux des mesures. Ces mesures pourraient comprendre les suivantes :

i. la création ou l’examen, en consultation avec la CCDP, de politiques portant sur la construction, la réparation et l’attribution de logements sur les terres régies par la NCP;

ii. La prestation d’une formation au personnel de la NCP responsable de l’administration et de l’application des politiques de logement.

[34] La CCDP demande que le Tribunal demeure saisi de l’affaire et conserve sa compétence pour recevoir des éléments de preuve ou rendre d’autres ordonnances, au besoin, jusqu’à ce que les parties confirment que les mesures de redressement ordonnées par le Tribunal ont été mises en œuvre.

VI. Cadre juridique

D. Droit autochtone et droit coutumier autochtone

[35] Comme il a été mentionné précédemment, la NCP s’appuie sur son droit coutumier pour justifier la répartition de ses ressources en matière de logement. La NCP soutient que son droit coutumier demeure inchangé et codifié dans le Traité no 6.

[36] M. Ka-Nowpasikow soutient que les dispositions de la Loi sur les Indiens l’emportent sur l’affirmation du droit coutumier de la NCP concernant l’attribution des logements.

[37] Il est donc nécessaire d’examiner les cadres applicables du droit autochtone et du droit coutumier autochtone.

[38] L’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 (Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (Royaume-Uni), 1982, ch. 11) reconnaît et confirme « [l]es droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada ».

[39] En vertu de la Loi sur les Indiens, le titre de propriété des terres de réserve est dévolu à la Couronne, qui le détient à l’usage et au profit de la Première Nation. Le gouvernement du Canada fournit du financement et d’autres formes d’aide aux Premières Nations pour améliorer le logement dans les réserves des Premières Nations. La Première Nation est responsable de l’attribution des logements et de la gestion de son offre de logements dans les réserves.

[40] L’article 1 de la Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.C. 2008, ch. 30, a abrogé l’article 67 de la LCDP. L’article 67 protégeait auparavant toute décision prise en vertu de la Loi sur les Indiens contre un examen sous le régime de la LCDP. Je déduis de l’abrogation de l’article 67 que les décisions prises par les Premières Nations en vertu de la Loi sur les Indiens sont maintenant assujetties à la LCDP.

[41] La NCP a soutenu qu’elle répartit les logements selon son droit coutumier et que, dans la mesure où la conduite de la Nation peut faire l’objet d’un examen, l’analyse du Tribunal fait intervenir l’article 1.2 de la Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui précise ce qui suit :

Dans le cas d’une plainte déposée au titre de la Loi canadienne sur les droits de la personne à l’encontre du gouvernement d’une première nation, y compris un conseil de bande, un conseil tribal ou une autorité gouvernementale qui offre ou administre des programmes et des services sous le régime de la Loi sur les Indiens, la présente loi doit être interprétée et appliquée de manière à tenir compte des traditions juridiques et des règles de droit coutumier des Premières Nations et, en particulier, de l’équilibre entre les droits et intérêts individuels et les droits et intérêts collectifs, dans la mesure où ces traditions et règles sont compatibles avec le principe de l’égalité entre les sexes.

[42] La CCDP a fait valoir que l’article 1.2 ne précise pas que l’existence de traditions juridiques ou de droits coutumiers des Premières Nations constitue une défense complète contre une allégation de discrimination, mais que ceux-ci fournissent une lentille pour interpréter la LCDP, y compris une analyse contextualisée des motifs de discrimination, des pratiques et des moyens de défense.

[43] La CCDP a également fait valoir que la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, L.C. 2021, ch. 14, incorpore la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) (A/RES/61/295, adoptée par l’Assemblée générale le 13 septembre 2007; adoptée par le Canada en 2016) dans les lois nationales et fournit une feuille de route pour veiller à ce que les lois adoptées par le Parlement soient conformes aux modalités de la Déclaration.

[44] Les articles suivants de la DNUDPA sont particulièrement pertinents en l’espèce :

Article premier Les peuples autochtones ont le droit, à titre collectif ou individuel, de jouir pleinement de l’ensemble des droits de l’homme et des libertés fondamentales reconnus par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et le droit international relatif aux droits de l’homme.

Article 2 Les autochtones, peuples et individus, sont libres et égaux à tous les autres et ont le droit de ne faire l’objet, dans l’exercice de leurs droits, d’aucune forme de discrimination fondée, en particulier, sur leur origine ou leur identité autochtones.

Article 3 Les peuples autochtones ont le droit à l’autodétermination. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.

Article 4 Les peuples autochtones, dans l’exercice de leur droit à l’autodétermination, ont le droit d’être autonomes et de s’administrer eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales, ainsi que de disposer des moyens de financer leurs activités autonomes.

Article 5 Les peuples autochtones ont le droit de maintenir et de renforcer leurs institutions politiques, juridiques, économiques, sociales et culturelles distinctes, tout en conservant le droit, si tel est leur choix, de participer pleinement à la vie politique, économique, sociale et culturelle de l’État.

Article 21 (1) Les peuples autochtones ont droit, sans discrimination d’aucune sorte, à l’amélioration de leur situation économique et sociale, notamment dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, de la formation et de la reconversion professionnelles, du logement, de l’assainissement, de la santé et de la sécurité sociale.

Article 22 (1) Une attention particulière est accordée aux droits et aux besoins spéciaux des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones dans l’application de la présente Déclaration.

Article 23 Les peuples autochtones ont le droit de définir et d’élaborer des priorités et des stratégies en vue d’exercer leur droit au développement. En particulier, ils ont le droit d’être activement associés à l’élaboration et à la définition des programmes de santé, de logement et d’autres programmes économiques et sociaux les concernant, et, autant que possible, de les administrer par l’intermédiaire de leurs propres institutions.

Article 24 (2) Les autochtones ont le droit, en toute égalité, de jouir du meilleur état possible de santé physique et mentale. Les États prennent les mesures nécessaires en vue d’assurer progressivement la pleine réalisation de ce droit.

[45] Depuis l’adoption de l’article 1 de la Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, une partie du rôle du Tribunal consiste à déterminer si les décisions et les mesures prises par les Premières Nations en vertu de la Loi sur les Indiens contreviennent à la LCDP. Ce faisant, le Tribunal doit « tenir compte des traditions juridiques et des règles de droit coutumier des Premières Nations et, en particulier, de l’équilibre entre les droits et intérêts individuels et les droits et intérêts collectifs » (art. 1.2 de la Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne). Les articles de la DNUDPA et de la Loi sur la DNUDPA appuient l’équilibre entre les droits et les intérêts individuels et les droits et intérêts collectifs.

E. Discrimination en vertu de la LCDP

[46] La LCDP a pour objet de « compléter la législation canadienne en donnant effet, dans le champ de compétence du Parlement du Canada, au principe suivant : le droit de tous les individus, dans la mesure compatible avec leurs devoirs et obligations au sein de la société, à l’égalité des chances d’épanouissement et à la prise de mesures visant à la satisfaction de leurs besoins, indépendamment des considérations » d’ordre discriminatoire (art. 2 de la LCDP; Bird c. Première Nation Paul, 2022 TCDP 17).

[47] L’article 6 de la LCDP traite de la discrimination dans la répartition des logements. Il est ainsi libellé :

6 Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, pour le fournisseur de locaux commerciaux ou de logements :

a) de priver un individu de leur occupation;

b) de le défavoriser à l’occasion de leur fourniture.

[48] Les parties conviennent que la NCP est responsable de fournir le logement dans la réserve. Le Tribunal a conclu que les décisions des Premières Nations concernant l’attribution des logements dans la réserve, y compris les décisions sur la modification ou la réparation d’une maison en réponse à des besoins liés à une déficience, sont assujetties à un examen en vertu de l’article 6 de la LCDP (Ledoux c. Première Nation de Gambler, 2018 TCDP 26).

[49] Les motifs de distinction illicite, énoncés à l’article 3 de la LCDP, incluent l’état matrimonial, la situation de famille et la déficience.

[50] La norme de preuve pour chacune des questions juridiques en l’espèce est la norme civile de la prépondérance des probabilités. D’après cette norme, le Tribunal doit « examiner la preuve pertinente attentivement pour déterminer si, selon toute vraisemblance, le fait allégué a eu lieu » (F.H. c. McDougall, 2008 CSC 53, au par. 49).

[51] Le fardeau d’établir une preuve prima facie de discrimination incombe à la partie plaignante. Une preuve prima facie de discrimination est « […] celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l’absence de réplique de l’employeur intimé » (Commission ontarienne des droits de la personne et O’Malley c. Simpsons-Sears, 1985 CanLII 18 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 536 (« Simpsons-Sears »), à la p. 558).

[52] Afin d’établir une preuve prima facie de discrimination, M. Ka-Nowpasikow doit prouver les faits suivants :

  1. il possède une ou plusieurs caractéristiques protégées par la LCDP contre la discrimination;

  2. il a subi un traitement défavorable ou un désavantage, en l’occurrence le refus de réparer son logement ou de lui accorder un nouveau logement;

  3. ses caractéristiques protégées ont constitué un facteur dans la manifestation de l’effet préjudiciable.

(Simpsons-Sears, à la p. 558)

[53] Bien que M. Ka-Nowpasikow doive démontrer un lien entre un motif de distinction illicite et la discrimination prétendue, le motif de discrimination ne doit être qu’un facteur dans le traitement défavorable. Il n’est pas nécessaire que ce soit le seul facteur dans l’allégation de discrimination (Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Bombardier Inc. (Bombardier Aéronautique Centre de formation), 2015 CSC 39 (Bombardier), au par. 52).

[54] M. Ka-Nowpasikow n’a pas à prouver que la NCP avait l’intention d’avoir un effet discriminatoire (Hughes c. Élections Canada, 2010 TCDP 4, aux par. 45-48; CN c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1987] 1 RCS 1114, aux p. 1137-1139).

[55] Si M. Ka-Nowpasikow établit l’existence d’une preuve prima facie d’une violation de l’article 6 de la LCDP, il incombera à la NCP de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il y a un motif justifiable de la discrimination au sens de l’alinéa 15(1)g) et que la prise de mesures d’adaptation pour répondre aux besoins de M. Ka-Nowpasikow imposerait à la Nation une contrainte excessive en matière de santé, de sécurité et de coûts conformément au paragraphe 15(2) de la LCDP (Colombie-Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie-Britannique (Council of Human Rights), [1999] 3 RCS 868).

[56] L’alinéa 15(1)g) est ainsi libellé :

15(1) Ne constituent pas des actes discriminatoires : […]

g) le fait qu’un fournisseur de biens, de services, d’installations ou de moyens d’hébergement destinés au public, ou de locaux commerciaux ou de logements en prive un individu ou le défavorise lors de leur fourniture pour un motif de distinction illicite, s’il a un motif justifiable de le faire.

[57] Le paragraphe 15(2) prévoit ce qui suit :

Les faits prévus [...] sont des exigences professionnelles justifiées ou un motif justifiable, au sens de l’alinéa (1)g), s’il est démontré que les mesures destinées à répondre aux besoins d’une personne ou d’une catégorie de personnes visées constituent, pour la personne qui doit les prendre, une contrainte excessive en matière de coûts, de santé et de sécurité.

F. Caractère exécutoire

[58] La NCP est d’avis que toute décision du Tribunal concernant l’attribution des logements ne devrait pas être exécutoire contre elle, car elle détient son propre pouvoir de gouvernance. Je ne suis pas d’accord.

[59] En vertu de la Loi sur les Indiens, la NCP a le pouvoir d’attribuer les logements dans la réserve. Depuis l’abrogation de l’article 67 de la LCDP en 2008, les décisions prises en vertu de la Loi sur les Indiens sont assujetties à la LCDP. Il s’ensuit donc logiquement qu’une décision prise par le Tribunal concernant la question de savoir si la NCP a fait preuve de discrimination à l’égard de l’un de ses membres dans l’attribution des logements est assujettie à la LCDP, y compris à toute mesure de redressement ordonnée par le Tribunal en vertu de la Loi.

[60] Je remarque que depuis l’abrogation de l’article 67 en 2008, le Tribunal a rendu des ordonnances contre des Premières Nations en vertu de la LCDP, notamment dans les affaires Ledoux c. La Première Nation de Gambler, Kamalatisit c. Première Nation de Sandy Lake, 2019 TCDP 20, et Bird c. Première Nation Paul.

VII. Analyse

[61] Afin de déterminer si la NCP a fait preuve de discrimination à l’égard de M. Ka-Nowpasikow, je vais d’abord analyser la question de savoir si M. Ka-Nowpasikow a présenté une preuve prima facie de discrimination selon les trois étapes susmentionnées.

G. Le plaignant a-t-il droit à la protection contre la discrimination du fait qu’il possède une caractéristique protégée?

[62] Oui, je conclus que le plaignant est membre de la famille Tootoosis, qu’il est célibataire et qu’il a une déficience, et qu’il est donc admissible à la protection contre la discrimination. M. Ka-Nowpasikow a établi dans son témoignage qu’il est membre de la famille Tootoosis et qu’il vit seul depuis 2010. Il a également établi, par son témoignage et ses notes médicales, qu’il vit avec des problèmes pulmonaires et de dos qui correspondent à la définition d’une déficience en vertu de la LCDP. Ces caractéristiques sont acceptées par les parties. Il a donc satisfait au premier volet du critère de la preuve prima facie de discrimination. À certains égards, ces caractéristiques peuvent être abordées séparément, mais il y a des recoupements entre son statut d’homme célibataire et celui de personne ayant une déficience qui ont une incidence sur les expériences vécues par M. Ka-Nowpasikow et l’analyse de sa plainte.

La santé de M. Ka-Nowpasikow et la connaissance qu’a la NCP de sa déficience

[63] M. Ka-Nowpasikow vit avec plusieurs problèmes de santé. Il a dit que le mauvais état de sa maison nuit à sa santé et qu’en raison de son état de santé, il est incapable de réparer sa maison tout seul. M. Ka-Nowpasikow a déclaré qu’il avait des restrictions en raison de ses problèmes pulmonaires. Il ne peut pas courir ni travailler, et il a des essoufflements. Il a également déclaré qu’il avait un problème de dos qui l’empêchait de travailler depuis environ 2015.

[64] Une question clé en l’espèce est le moment où la NCP a appris que M. Ka-Nowpasikow avait une déficience qui l’empêchait de réparer la maison 103 et que l’état de la maison avait un effet néfaste sur sa santé.

[65] Dans son exposé des précisions, M. Ka-Nowpasikow a soutenu qu’il souffre d’une déficience et qu’il n’est pas en mesure de travailler depuis 2017. Il a déclaré à l’audience qu’il avait présenté au bureau du conseil de bande de la NCP une note de son médecin de famille, le Dr Moolla, datée du 12 octobre 2017, dans laquelle on peut lire ce qui suit : [traduction] « Cet homme a besoin d’une nouvelle maison exempte de moisissure pour des raisons médicales ». Contrairement à d’autres demandes de logement que M. Ka-Nowpasikow prétend avoir livrées au bureau du conseil de bande, dont certaines ont été corroborées par le témoignage de son épouse d’alors, Sherri Dunstan, ce document ne porte pas d’estampille de date et M. Ka-Nowpasikow n’a pas indiqué la date à laquelle il a remis la note médicale. J’estime que le témoignage de M. Ka-Nowpasikow sur la remise de la note médicale est moins fiable à cet égard. La NCP prétend qu’elle n’a jamais reçu cette note et plusieurs témoins, comme Brandon Favel, en ont témoigné.

[66] D’après le témoignage de M. Ka-Nowpasikow, la note médicale présentée en preuve et le témoignage des témoins de la NCP, je ne peux conclure que le plaignant a établi, selon la prépondérance des probabilités, que la NCP a reçu la note du Dr Moolla du 12 octobre 2017, avant qu’il ne dépose sa plainte auprès de la CCDP le 9 janvier 2018. Toutefois, compte tenu du dépôt de la plainte et du témoignage du chef Antoine selon lequel, à partir de janvier 2018, il était au courant de l’état de santé de M. Ka-Nowpasikow et de son désir d’obtenir un nouveau logement, je conclus qu’à partir du 9 janvier 2018 ou vers cette date, la NCP était au courant du souhait de M. Ka-Nowpasikow d’obtenir un nouveau logement et du fait qu’il prétendait avoir une déficience attestée par des documents médicaux.

[67] M. Ka-Nowpasikow a également fourni une note médicale plus récente de son nouveau médecin de famille, le Dr Khurana, datée du 30 juin 2021, qui fournit de plus amples renseignements. La note mentionne que M. Ka-Nowpasikow a des antécédents de maux de dos, de maladie pulmonaire obstructive chronique, de pneumonie, de toux chronique et d’essoufflement. Il n’est pas contesté que la NCP a reçu cette note le 30 juillet 2021, avant l’audience.

[68] À l’audience, plusieurs des témoins de la NCP ont témoigné qu’ils n’étaient pas au courant de la déficience de M. Ka-Nowpasikow avant le dépôt de la plainte en 2018 ou qu’ils croient actuellement que M. Ka-Nowpasikow n’a pas de déficience parce qu’il semble être un homme physiquement apte. Dans ses observations finales, toutefois, la NCP a confirmé qu’elle accepte que M. Ka-Nowpasikow est une personne ayant une déficience.

[69] Compte tenu du témoignage de M. Ka-Nowpasikow et du certificat médical du Dr Khurana, je conclus que les problèmes de santé de M. Ka-Nowpasikow constituent une déficience au sens de l’article 25 de la LCDP. Je conclus que la NCP savait que M. Ka-Nowpasikow avait une déficience. Je déduis de ses problèmes pulmonaires et de dos que sa déficience l’a empêché de travailler à la réparation de sa maison depuis au moins la date à laquelle la plainte a été déposée, le 9 janvier 2018.

H. Le plaignant a-t-il subi un effet préjudiciable relativement à son logement en raison du refus d’effectuer des réparations à sa maison ou de lui accorder une nouvelle maison?

[70] Oui, j’estime que M. Ka-Nowpasikow a subi un effet préjudiciable parce qu’il vivait dans une maison en mauvais état et que la NCP a refusé de la réparer ou de lui fournir une nouvelle maison.

L’état de la maison 103

[71] En 2003, M. Ka-Nowpasikow a emménagé dans la maison 103, la maison en cause, avec Mme Dunstan. Il dit que la maison était abandonnée à ce moment-là. Il y avait des éléments de preuve contradictoires quant à la façon dont la maison a été attribuée et pendant combien de temps, mais tous étaient d’accord pour dire que M. Ka-Nowpasikow et Mme Dunstan avaient reçu la permission d’y vivre, du moins temporairement, par un membre de la famille Tootoosis, conformément à la coutume de la bande. M. Ka-Nowpasikow et Mme Dunstan se sont séparés en 2010, et il a continué de vivre dans la maison.

[72] La preuve a démontré que l’état de la maison 103 était médiocre et que, malgré certaines réparations effectuées au fil des ans, la maison est toujours en mauvais état. M. Ka-Nowpasikow dit que la maison est infestée de souris, contaminée par la moisissure et présente des dommages et des défauts irréparables. Plusieurs témoins ont témoigné du mauvais état de la maison, notamment Eugene Poundmaker, Glenda Andrew, Neil Andrew (l’ami, la sœur et le frère de M. Ka-Nowpasikow, respectivement) et la témoin de l’intimée, Mme Dunstan. Des photos de la maison montraient son mauvais état. L’aîné Eric Tootoosis a déclaré que cette maison, comme d’autres maisons dans la réserve, [traduction] « ne mérite pas d’être occupée par un être humain ».

[73] La NCP s’appuie sur le rapport d’inspection du Battle River Treaty Six Health Centre daté du 22 novembre 2019, après le dépôt de la plainte, pour affirmer que l’inspecteur [traduction] « ne pensait pas » que les zones noirâtres ou brunâtres visibles dans certaines parties de l’isolant étaient de la moisissure. Cependant, l’inspecteur a constaté les points suivants, entre autres choses :

  1. Il y avait des signes de dommages causés par l’eau;

  2. Il y avait des dommages aux carreaux de plancher qui pouvaient contenir de l’amiante;

  3. Le gaz avait été coupé dans la maison, donc qu’il n’y avait pas de chauffage central;

  4. Il y avait un risque d’incendie dans la maison;

  5. La maison avait besoin de réparations électriques;

  6. Il y avait des signes d’infestation de ravageurs dans le sous-sol;

  7. Il n’y avait pas de gouttières ni de tuyaux de descente installés sur la maison;

  8. Le plafond présentait des fissures;

  9. Le plafond présentait des taches d’eau ou des signes d’infiltration d’eau dans le salon, la cuisine, la chambre à coucher et la toilette;

  10. La toilette fuyait et on pouvait tirer la chasse seulement en mettant sa main dans le réservoir;

  11. Il n’y avait pas d’eau chaude dans la maison.

[74] Le rapport d’inspection a formulé un certain nombre de recommandations, dont une copie a été envoyée au chef de la NCP, Dwayne Antoine, à la gestionnaire du logement, Tanya Antoine, et au responsable du portefeuille de la santé, Brandon Favel. Bien que le rapport d’inspection n’ait pas confirmé la présence de moisissures, il a relevé un certain nombre de problèmes qui peuvent raisonnablement être considérés comme particulièrement nocifs pour une personne souffrant de problèmes pulmonaires, comme des dommages aux carreaux qui peuvent contenir de l’amiante, une infiltration d’eau, une infestation de ravageurs et le problème urgent du manque de chauffage central.

[75] La NCP n’a pas visité l’intérieur de la maison et n’a donné suite à aucune des recommandations du rapport d’inspection.

[76] M. Ka-Nowpasikow soutient dans son exposé des précisions que l’état de la maison a causé ses problèmes pulmonaires. La NCP le nie. Peu importe la cause de ses problèmes pulmonaires, je conclus, d’après le témoignage de M. Ka-Nowpasikow concernant l’état de la maison 103, les photos de la maison 103 présentées en preuve et le rapport d’inspection, qu’il est plus probable que le contraire que l’état extrêmement mauvais de la maison aggrave les problèmes pulmonaires de M. Ka-Nowpasikow.

Les mauvaises conditions de logement dans la réserve

[77] La NCP soutient, et c’est le témoignage de nombreux témoins, que le financement annuel qu’elle reçoit de SAC est insuffisant pour répondre aux besoins de la Nation en matière de logement. La majeure partie de l’argent destiné au logement sert à des urgences, comme le chauffage et la plomberie en hiver. La NCP doit prendre des décisions difficiles concernant l’attribution des logements. Elle prétend le faire conformément au droit coutumier de la bande, qui accorde la priorité à la protection des personnes dans le besoin, en particulier les femmes célibataires, les enfants et les aînés.

[78] Rhonda Dawiskiba, une représentante de SAC, a témoigné qu’il y a une pénurie de logements dans la nation. Elle a déclaré que l’allocation de fonds accordée à la NCP pour le logement est plafonnée à 296 970 $ depuis 1996, sans augmentation pour tenir compte de l’inflation ou des changements démographiques. Elle a dit que le financement pour lutter contre les rongeurs et la moisissure dans une maison proviendrait de ce fonds, mais elle a déclaré que le financement est le plus souvent utilisé pour les chaudières, les réservoirs d’eau chaude et les bardeaux.

[79] Marvina Pete, directrice des opérations de la NCP, a déclaré que le portefeuille de logements de la NCP est en déficit et qu’il utilise souvent des fonds d’autres portefeuilles pour couvrir les coûts.

[80] Brandon Favel, conseiller de la NCP responsable du portefeuille du logement, a déclaré que la NCP consacre la majeure partie de son budget destiné au logement à des urgences, comme la plomberie et le chauffage.

[81] Le chef Antoine a déclaré que les conditions de logement dans les réserves sont mauvaises. Il a dit que la moisissure est un problème pour de nombreuses maisons dans la réserve et que la Nation a offert un atelier gratuit sur la lutte contre la moisissure. De nombreux membres s’occupent eux-mêmes des problèmes de moisissure.

[82] Dans le contexte de la vie dans la réserve, où le financement de SAC pour le logement est très limité, la NCP s’attend à ce que ses membres s’occupent de leur propre maison au mieux de leurs capacités. Un certain nombre de témoins de la NCP ont déclaré que la Nation s’attend à ce que les hommes célibataires et physiquement aptes réparent eux-mêmes leur maison.

[83] Dans le cas présent, la NCP, représentée par son chef et les membres de son conseil et de son administration, a fait des hypothèses au sujet de la déficience de M. Ka-Nowpasikow parce que son état de santé n’était pas visible, ou n’a pas tenu compte de l’information que M. Ka-Nowpasikow a présenté dans sa plainte et de sa demande de logement de 2018. Par exemple, le chef Antoine et Brandon Favel ont déclaré qu’ils ne savaient pas que M. Ka-Nowpasikow avait une déficience et qu’ils ne croyaient toujours pas qu’il en avait une en raison de son apparence.

[84] La NCP soutient que, dans le contexte de la vie dans sa réserve, M. Ka-Nowpasikow a été traité comme tout le monde. Il y a peu de logements et peu de fonds pour améliorer les logements, et on s’attend à ce que les gens prennent l’initiative de régler eux-mêmes leurs problèmes. Le refus de la part de la NCP de réparer ou de construire une nouvelle maison a eu un effet négatif sur M. Ka-Nowpasikow par rapport à d’autres personnes vivant dans la réserve parce qu’il était physiquement incapable de s’occuper de l’état très mauvais de la maison 103, et l’état de cette maison a exacerbé son état de santé.

I. La caractéristique personnelle du plaignant a-t-elle été un facteur dans le traitement défavorable ou le désavantage?

a) Le statut de M. Ka-Nowpasikow en tant que membre de la famille Tootoosis a-t-il été un facteur du traitement défavorable ou du désavantage?

[85] Non, je conclus que la preuve n’a pas corroboré l’allégation de M. Ka-Nowpasikow selon laquelle son appartenance à la famille Tootoosis a été un facteur dans le traitement défavorable. Il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour satisfaire au critère de la preuve prima facie.

[86] M. Ka-Nowpasikow fait valoir qu’il n’a pas reçu de nouvelle maison ou de soutien pour rénover ou construire une maison parce qu’il est membre de la famille Tootoosis, qui n’appuie pas politiquement le chef actuel.

[87] La NCP nie que M. Ka-Nowpasikow ait été traité différemment parce qu’il faisait partie de la famille Tootoosis. La NCP prétend avoir fourni des logements améliorés à certains membres de la famille de M. Ka-Nowpasikow, de sorte que l’allégation reposant sur l’appartenance à la famille n’est pas fondée.

[88] La preuve a montré que même si certains membres de la famille Tootoosis n’avaient pas reçu de logement amélioré, d’autres en avaient reçu. Par exemple, en contre-interrogatoire, M. Ka-Nowpasikow a déclaré que sa mère et trois de ses frères et sœurs avaient reçu une maison sous l’administration de l’actuel chef. Il a ajouté que même si lui, un frère et une sœur ont été traités défavorablement par la NCP, les autres membres de sa famille ne l’ont pas été. M. Ka-Nowpasikow a dit qu’il présumait que certaines personnes reçoivent un traitement préférentiel de la part du chef et du conseil à des fins politiques.

[89] Les éléments de preuve concernant le traitement des membres de la famille Tootoosis ne sont pas cohérents. De plus, sans preuve supplémentaire, l’hypothèse de M. Ka-Nowpasikow concernant les motifs de ce traitement est fondée sur des conjectures et n’est pas suffisamment solide pour établir une preuve prima facie de discrimination en vertu de la Loi.

b) Le statut de M. Ka-Nowpasikow en tant qu’homme célibataire ayant une déficience a-t-il été un facteur dans le traitement défavorable ou le désavantage?

[90] Oui, j’estime que le statut de M. Ka-Nowpasikow en tant qu’homme célibataire ayant une déficience a joué un rôle dans le traitement défavorable ou le désavantage relativement à sa situation de logement.

[91] La NCP a fourni la preuve que les hommes célibataires vivant seuls n’ont pas la priorité pour l’amélioration des logements dans la réserve parce que, dans un contexte de ressources limitées, on s’attend à ce qu’ils s’occupent eux-mêmes de la réparation des logements.

[92] J’ai constaté que M. Ka-Nowpasikow est une personne ayant une déficience et que la NCP était au courant de sa déficience depuis le dépôt de sa plainte en janvier 2018. J’ai également constaté qu’en raison de ses problèmes pulmonaires, M. Ka-Nowpasikow n’était pas en mesure de répondre aux attentes de la NCP à l’égard des hommes célibataires. De plus, le mauvais état de la maison 103 aggrave son problème pulmonaire.

[93] La combinaison des attentes de la NCP à l’égard des hommes célibataires vivant seuls, de l’absence de réponse de la NCP aux demandes de M. Ka-Nowpasikow pour obtenir un nouveau logement ou un logement amélioré, de l’état de santé de M. Ka-Nowpasikow et du fait que celui-ci vit dans une maison en mauvais état a créé une situation désavantageuse pour M. Ka-Nowpasikow en matière de logement. En raison de sa déficience, il n’est pas en mesure de répondre aux attentes de la NCP, qui s’attend à ce qu’il répare sa maison par lui-même. Par conséquent, il a continué de vivre dans une maison en mauvais état, ce qui aggrave sa déficience. Je conclus donc que M. Ka-Nowpasikow a présenté une preuve prima facie de discrimination à l’égard de ces caractéristiques protégées. La NCP a maintenant la possibilité de fournir un motif justifiable.

J. L’intimée a-t-elle offert un motif valable de ses actes autrement discriminatoires?

[94] Non, la NCP n’a pas offert un motif valable de ses actes discriminatoires.

[95] Il incombe à la NCP de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la discrimination a un motif justifiable, au sens de l’alinéa 15(1)g) et du paragraphe 15(2) de la LCDP (Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. BCGSEU, [1999] 3 RCS 3; Colombie-Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie-Britannique (Council of Human Rights), [1999] 3 RCS 868 [« BC Motor Vehicles »].

[96] Afin de démontrer l’existence d’un motif justifiable, l’intimée sera généralement tenue de démontrer les éléments suivants :

a) son approche est rationnellement liée à un objectif légitime;

b) elle croyait honnêtement et de bonne foi que sa norme était nécessaire pour atteindre l’objectif;

c) la norme était raisonnablement nécessaire, en ce sens que la norme ne pouvait être assouplie sans causer de contrainte excessive en matière de santé, de sécurité ou de coûts. Pour évaluer le troisième élément, il faut se rappeler que certaines difficultés sont acceptables (BC Motor Vehicles).

[97] La NCP doit démontrer qu’elle a pris des mesures d’adaptation raisonnables pour M. Ka-Nowpasikow sans qu’il en résulte une contrainte excessive. Le fardeau de la preuve incombe à l’intimée, car elle est en possession des renseignements nécessaires pour démontrer l’existence d’une contrainte excessive. Un plaignant sera rarement, voire jamais, en mesure de démontrer l’absence d’une telle contrainte (Simpson-Sears, au par. 28).

[98] Lorsque l’intimée réfute l’allégation de discrimination, elle doit fournir une explication raisonnable, qui ne peut constituer une excuse pour dissimuler l’acte discriminatoire (Moffat c. Davey Cartage Co (1973) Ltd., 2015 TCDP 5, au par. 38.

a) L’approche de la NCP en matière d’attribution des logements est-elle rationnellement liée à un objectif légitime?

[99] Non, l’approche adoptée par la NCP pour l’attribution des logements n’est pas rationnellement liée à l’objectif légitime d’attribuer des logements aux personnes dans le besoin dans un contexte de ressources limitées.

[100] La NCP soutient qu’elle dispose d’un budget très limité en matière de logement, que de nombreuses maisons sont en mauvais état et que, dans ce contexte, elle doit prendre des décisions difficiles. Elle soutient en outre que la NCP se fonde sur son droit coutumier pour attribuer des logements dans la réserve, que ce droit coutumier accorde la priorité à certaines personnes vulnérables par rapport aux hommes célibataires et que ce droit devrait être respecté à titre de motif justifiable de ses décisions concernant l’attribution et la réparation des logements, y compris pour les réparations d’urgence visant à préserver la vie, comme le chauffage. Je reconnais que je devrais tenir compte du droit coutumier pour déterminer si la NCP a établi l’existence d’un motif justifiable.

[101] Tout comme le Tribunal dans l’affaire Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et al. c. Procureur général du Canada (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), 2016 TCDP 2, au par. 120, je reconnais que les logements inadéquats constituent un problème auquel sont confrontées de nombreuses collectivités des Premières Nations, en particulier la NCP.

[102] La NCP a fourni la preuve, par l’intermédiaire des aînés Patrick Tootoosis et Eric Tootoosis, que les logements sont attribués conformément au droit coutumier de la Nation, qui accorde la priorité en matière de logement selon les besoins. Les femmes célibataires, les familles avec des enfants et les aînés ont la priorité pour le logement. J’estime qu’il est légitime de fournir un logement adéquat en fonction des besoins, selon les limites imposées par les ressources très limitées.

[103] Les deux aînés ont déclaré que le droit coutumier exige que les personnes s’occupent de leur logement dans la réserve du mieux qu’elles le peuvent. Le chef Antoine était d’accord avec ces déclarations et a déclaré que, selon le droit coutumier de la NCP, le logement était accordé d’abord aux femmes célibataires et aux personnes ayant des enfants, ainsi qu’aux aînés. Les éléments de preuve concernant le droit coutumier accordant la priorité aux femmes célibataires, aux enfants et aux aînés étaient cohérents.

[104] La Nation a admis que M. Ka-Nowpasikow, en tant qu’homme vivant seul, a peut-être été désavantagé parce qu’il ne vivait pas avec des enfants. Toutefois, ce traitement serait justifié et conforme aux obligations du chef de la Nation de protéger ses membres.

[105] Les éléments de preuve concernant le droit coutumier et les pratiques de la NCP n’étaient pas cohérents en ce qui a trait au traitement des personnes ayant une déficience. Brandon Favel a déclaré que le droit coutumier de la NCP en matière de logement accordait la priorité aux personnes ayant des besoins spéciaux. Le chef Antoine a déclaré que les personnes ayant une déficience étaient placées pour qu’elles vivent chez des membres de leur famille. Il a dit que la coutume exigeait que les membres de la famille accueillent chez eux une personne qui ne peut pas prendre soin d’elle-même.

[106] Patrick Tootoosis a déclaré que les personnes ayant une déficience étaient placées pour qu’elles vivent chez des membres de leur famille ou envoyées dans un foyer de soins à Cut Knife. Il a aussi dit que les personnes malades doivent s’aider elles-mêmes du mieux qu’elles le peuvent. Il n’acceptait pas l’idée que les personnes malades devraient demander de l’aide.

[107] Certains des témoins de la NCP semblaient limiter la reconnaissance des personnes ayant une déficience d’une manière qui n’englobe pas toute la gamme des états de santé, des capacités et des expériences des personnes ayant une déficience. Ce ne sont pas toutes les personnes qui ont une déficience visible. Beaucoup de personnes ayant une déficience sont capables de vivre seules et préfèrent vivre seules.

[108] À la lumière de l’incohérence et de la nature incomplète de la preuve, je conclus que la NCP n’a pas établi la façon dont le droit coutumier s’applique à la fourniture de logements aux personnes ayant une déficience (Francis c. Conseil mohawk de Kanesatake, [2003] 4 CF 1133).

[109] Les aînés et le chef ont expliqué de façon plus générale le processus d’attribution et de réparation des logements dans la réserve. Patrick Tootoosis a déclaré que la pratique coutumière consistait à présenter une demande de logement, puis à se présenter à une réunion de bande où les logements étaient attribués en fonction des besoins. On s’attendait à ce que les gens s’aident et s’occupent des maisons qu’on leur donnait.

[110] Ils ont ajouté que certaines maisons sont attribuées par les familles à d’autres membres de la famille ou à des amis, conformément aux pratiques coutumières. Selon le témoignage de Sherri Dunstan, c’est ainsi qu’elle et M. Ka-Nowpasikow se sont vu attribuer initialement la maison 103, bien que cette attribution soit maintenant contestée par Dwight Tootoosis.

[111] Eric Tootoosis a déclaré que si une maison a besoin de réparations, une personne doit s’adresser au conseiller responsable ou au directeur du logement et qu’elle est inscrite sur une liste. La personne invite ensuite la bande à venir voir la maison et se fait inscrire sur une liste de priorités.

[112] Cependant, Brandon Favel a déclaré que le portefeuille du logement reçoit de nombreuses demandes de logement et qu’il ne les voit pas toutes. Il a convenu qu’il serait utile pour la NCP d’avoir une politique en matière de logement.

[113] Bien que la NCP ait établi que le classement en ordre de priorité des personnes ayant besoin d’un logement ou de réparations conformément à son droit coutumier est un objectif légitime, je ne suis pas convaincue que son approche pratique soit logiquement liée à cet objectif. La preuve du droit coutumier n’expliquait pas suffisamment comment les personnes ayant une déficience, y compris celles qui vivent seules, recevraient un logement adéquat dans ce contexte de ressources limitées. La preuve du processus actuel d’obtention de nouveaux logements et de réparation des logements actuels laisse certaines personnes ayant une déficience sans recours adéquat.

b) La NCP croyait-elle honnêtement et de bonne foi que sa norme était nécessaire pour atteindre l’objectif visé?

[114] Oui, le témoignage des aînés, du chef Antoine et de Brandon Favel a prouvé que la NCP, en toute honnêteté et de bonne foi, croyait qu’elle devait accorder la priorité aux femmes célibataires, aux personnes ayant des enfants et aux aînés afin de fournir un logement aux personnes dans le besoin.

c) La norme était-elle raisonnablement nécessaire, en ce sens que la norme ne pouvait pas être assouplie sans causer de contrainte excessive en matière de santé, de sécurité ou de coûts?

[115] Non, la NCP n’a pas établi que le fait d’apporter des améliorations à la situation de logement de M. Ka-Nowpasikow pour tenir compte de son état de santé causerait une contrainte excessive en matière de coûts. Elle a établi que l’achèvement de la construction de la maison sur le projet de fondation de M. Ka-Nowpasikow lui imposerait une contrainte excessive en matière de coûts.

[116] M. Ka-Nowpasikow a déclaré avoir déposé de nouvelles demandes de logement au bureau de la bande en 2005, 2007, 2008 et 2009, bien avant le dépôt de la plainte qui contenait des renseignements sur sa déficience. Il dit qu’il n’a reçu aucune réponse de la NCP.

[117] Mme Dunstan se souvenait que M. Ka-Nowpasikow avait communiqué avec le chef et le conseil pour demander des rénovations à la maison 103 et que Kyle Favel et Burton Baptiste étaient venus faire des réparations en 2009 et 2010.

[118] En 2011, M. Ka-Nowpasikow a commencé à travailler, avec l’aide d’un ami, à un nouveau projet d’habitation pour lui-même. Il a déclaré qu’après la construction de la fondation, le projet est resté inachevé, car il n’a pas les fonds nécessaires pour le terminer.

[119] M. Ka-Nowpasikow a dit qu’en 2016, il avait présenté une proposition de projet à la NCP pour l’achèvement de la nouvelle maison, et qu’elle avait été rejetée ou ignorée. Brandon Favel se souvenait d’avoir reçu une enveloppe de M. Ka-Nowpasikow et d’avoir eu une conversation au sujet du projet au cours de laquelle Brandon Favel a dit qu’il n’y avait pas d’argent pour le terminer.

[120] M. Ka-Nowpasikow a déclaré dans son témoignage qu’en mai 2018, il a présenté une autre demande pour obtenir un nouveau logement au bureau de la NCP en déclarant que la maison 103 est [traduction] « détériorée, négligée, problème de moisissure, odeur d’urine de souris. Condamnée!! Pas de gouttières » et faisant état de [traduction] « vérification médicale, inhalation de moisissures, odeur d’urine de souris ». Cette demande, présentée en preuve, demande expressément [traduction] « l’achèvement du projet de fondation au sud, avec toutes les commodités, l’électricité, les raccordements au gaz, la route, le gravier, l’électricité, l’eau de puits, la fosse septique, les travaux de plomberie, les travaux de terrassement, le ciment ». La demande est datée du 17 mai 2018, après le dépôt de la plainte et après que la NCP a été informée de la déficience de M. Ka-Nowpasikow. Brandon Favel n’était pas certain s’il avait vu cette demande.

[121] Brandon Favel a déclaré que le bureau du conseil de bande reçoit de nombreuses demandes de logement chaque jour et que ce ne sont pas toutes les demandes de logement qui parviennent au personnel du portefeuille du logement ou à lui-même.

[122] Les membres de la NCP ont déclaré que le site où M. Ka-Nowpasikow a construit les fondations de sa nouvelle maison n’est pas sur une route viabilisée et qu’il serait extrêmement coûteux d’appuyer la construction de cette maison et de toutes les commodités requises. Le chef Antoine a déclaré que tout ce travail coûterait environ 250 000 $. Brandon Favel a déclaré qu’il en coûterait à la NCP son budget annuel en matière de logement pour terminer tous ces travaux, ce qui entraînerait des décès dans la réserve en hiver parce que d’autres travaux essentiels ne pourraient pas être effectués.

[123] Mme Dawiskiba de SAC a déclaré que certains programmes offrent un financement fondé sur des propositions et que la NCP a demandé et reçu un financement supplémentaire pour le logement en 2016-2017, 2019-2020 et 2020-2021. La NCP a reçu 350 000 $ de plus en 2019-2020 et 200 000 $ de plus en 2020-2021 en fonction des besoins immédiats en matière de logement. Elle a déclaré que SAC ne fournit pas de fonds supplémentaires pour le logement afin de permettre l’accessibilité pour les personnes ayant une déficience, mais que d’autres ministères fédéraux ont du financement à cette fin et que la NCP pourrait présenter une demande pour obtenir ces fonds.

[124] J’ai conclu ci-dessus qu’en date de janvier 2018, la NCP savait que M. Ka-Nowpasikow avait une déficience et avait besoin d’un meilleur logement. Pourtant, rien ne prouve que, depuis 2018, la NCP ait pris des mesures pour offrir un meilleur logement à M. Ka-Nowpasikow. Il n’est pas clair, d’après les éléments de preuve, qui a entrepris l’inspection de la maison en 2019, mais depuis qu’elle a reçu ce rapport d’inspection, la NCP n’a effectué aucune réparation à la maison 103, notamment pour s’assurer qu’il y avait du chauffage central. Le manque de chauffage sécuritaire en hiver est le type de problème urgent auquel, selon de nombreux témoins de la NCP, la Nation consacre la majeure partie de son budget en matière de logement.

[125] La NCP n’a pas évalué le coût lié à la réparation de la maison 103 ou à la fourniture à M. Ka-Nowpasikow d’une nouvelle maison plus près des commodités existantes. Brandon Favel, le conseiller de la Nation responsable du portefeuille du logement, a déclaré qu’il n’avait même pas vu le rapport d’inspection de la maison 103 ni la nouvelle demande de logement de M. Ka-Nowpasikow de 2018 avant la semaine précédant son témoignage à l’audience et qu’il ne savait pas que M. Ka-Nowpasikow avait une déficience jusqu’à environ deux semaines avant son témoignage. Il a dit qu’il n’avait pas présenté de demande de financement dans le cadre du Programme d’aide à la remise en état des logements pour personnes handicapées au nom de M. Ka-Nowpasikow parce qu’il ne savait pas que ce dernier avait une déficience.

[126] Le chef Antoine a déclaré que la bande avait envisagé d’effectuer des réparations à la maison 103, mais que la pandémie de COVID-19 l’avait empêché de le faire et qu’elle n’avait pas effectué les réparations. Je remarque qu’il s’est écoulé deux ans entre le dépôt de la présente plainte et le début de la pandémie.

[127] Étant donné que la NCP n’a pas fourni de preuve du coût des améliorations à apporter au logement de M. Ka-Nowpasikow ou qu’elle a pris des mesures pour l’améliorer, je conclus que la NCP n’a pas satisfait au critère de la contrainte excessive.

[128] Je reconnais que l’achèvement de la nouvelle maison de M. Ka-Nowpasikow sur son projet de fondation imposerait une contrainte excessive à la NCP dans le contexte de l’entente de financement actuelle de SAC pour les logements de la NCP. Les témoignages du chef Antoine et de Brandon Favel concernant le coût de la réalisation de tous les aménagements dont cette maison aurait besoin étaient cohérents et raisonnables.

[129] En résumé, je conclus que M. Ka-Nowpasikow a présenté une preuve prima facie de discrimination dans la fourniture de logements en raison de son statut d’homme célibataire ayant une déficience. La NCP n’a pas établi l’existence d’un motif justifiable de cette discrimination parce que son approche pour fournir un logement aux personnes ayant une déficience n’est pas rationnellement liée à la fourniture d’un logement aux personnes dans le besoin dans le contexte de ressources limitées, et elle n’a pas établi que le fait de fournir à M. Ka-Nowpasikow un meilleur logement lui imposerait une contrainte excessive en matière de coûts.

K. Si la NCP ne peut justifier ses actes, quelles mesures de redressement convient-il d’accorder par suite de la discrimination?

[130] M. Ka-Nowpasikow devrait recevoir une indemnité pour préjudice moral ainsi qu’une indemnisation pour les actes de discrimination irresponsables de la NCP. Il convient également d’accorder des mesures de redressement d’intérêt public. La situation actuelle de M. Ka-Nowpasikow en matière de logement est peut-être en suspens et, le cas échéant, devra être corrigée.

[131] M. Ka-Nowpasikow a déclaré que le traitement discriminatoire avait eu un effet profond sur lui. Il a des problèmes pulmonaires qui sont liés à l’état de sa maison, et il se sent encore plus mal lorsqu’il est à l’intérieur de la maison.

[132] Il a ajouté qu’il se sent ostracisé et ignoré dans la collectivité et qu’il a l’impression de ne pas exister. Comme il l’a décrit, son sentiment d’appartenance a souffert du piètre état de sa maison et de l’absence de réponse de la part de la NCP à ses demandes. Il a dit que cela lui faisait particulièrement mal parce qu’il est un survivant des pensionnats. J’estime que ces éléments de preuve sont crédibles et dignes de foi, particulièrement à la lumière de ses notes médicales, du mauvais état de la maison et de l’absence de réponse de la part de la NCP aux questions soulevées dans la plainte et dans la demande de logement de 2018 de M. Ka-Nowpasikow.

Mesures de redressement d’intérêt personnel

(a) Indemnisation

[133] L’alinéa 53(2)e) de la LCDP confère au Tribunal le pouvoir d’indemniser jusqu’à concurrence de 20 000 $ une victime de discrimination « qui a souffert un préjudice moral ». Le Tribunal a tendance à réserver l’octroi du montant maximal de 20 000 $ aux cas les plus graves et les plus flagrants (Christoforou c. John Grant Haulage, 2021 TCDP 15, au par. 98; Bird c. Première Nation Paul, au par. 93).

[134] L’ordonnance quant aux mesures de redressement rendue en vertu du paragraphe 53(2) de la LCDP ne vise pas à punir la partie intimée, mais à éliminer, dans la mesure du possible, les effets discriminatoires de l’acte (Robichaud c. Canada (Conseil du Trésor), 1987 CanLII 73 (SCC), [1987] 2 RCS 84, au par. 13). Il doit y avoir une preuve qu’un plaignant a subi un préjudice moral, et il doit y avoir un lien de cause à effet entre ce préjudice et la pratique discriminatoire (Bird c. Première Nation Paul, au par. 94).

[135] L’avocat du plaignant n’a pas fourni au Tribunal la jurisprudence justifiant sa demande d’indemnité pour préjudice moral de 20 000 $ et sa demande d’indemnisation pour discrimination délibérée ou inconsidérée de 20 000 $. Je déterminerai les montants d’indemnisation en fonction des principes généraux de la Loi et de la jurisprudence récente.

[136] À la lumière de la douleur et de la souffrance physiques et psychologiques subies par M. Ka-Nowpasikow, j’estime qu’il convient, dans les circonstances, de lui accorder une indemnité pour préjudice moral de 10 000 $ en vertu de l’alinéa 53(2)e) de la Loi. Contrairement à la situation plus extrême dans l’affaire Kamalatisit c. Première Nation de Sandy Lake, 2019 TCDP 20, dans laquelle le Tribunal a accordé à la plaignante une indemnité pour préjudice moral de 20 000 $, la NPC n’a pas ordonné à M. Ka-Nowpasikow de quitter la nation.

[137] M. Ka-Nowpasikow a également demandé une indemnisation pour discrimination délibérée ou inconsidérée de la part de la NCP. Comme l’a déclaré le Tribunal dans la décision Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada et autres c. Procureur général du Canada (représentant le ministre des Affaires autochtones et du Nord canadien), 2019 TCDP 39 :

Pour pouvoir conclure à l’existence d’un acte discriminatoire délibéré ou inconsidéré, il doit y avoir « dans une certaine mesure, une intention ou un comportement si dénué de prudence, ou encore, un mépris des conséquences de ce comportement » (Canada (Procureur général) c. Collins, 2011 CF 1168 (CanLII), au par. 33). Là encore, le Tribunal ne devrait accorder le montant maximal permis par cet article que dans les cas les plus graves (voir Grant, au par. 119).

[138] J’estime que M. Ka-Nowpasikow n’a pas établi que les actions de l’intimée étaient délibérées, en ce sens qu’elle a délibérément décidé de ne pas apporter d’améliorations à la maison 103. Toutefois, j’estime que la façon dont elle a négligé de répondre aux besoins liés à la déficience de M. Ka-Nowpasikow était dépourvue de prudence quant aux conséquences de ce comportement et que ses actes étaient donc inconsidérés au sens du paragraphe 53(3).

[139] Après que la NCP a reçu l’avis de plainte, qui comprenait l’allégation selon laquelle M. Ka-Nowpasikow avait une déficience, Brandon Favel, conseiller de bande responsable du portefeuille du logement, n’a pas été informé de la situation. De plus, après l’achèvement du rapport d’inspection en novembre 2019 montrant le mauvais état de la maison 103, la NCP n’a pris aucune mesure pour améliorer cet état. Bien que la NCP soit aux prises avec de graves contraintes en matière de ressources et que le bureau de la bande reçoive quotidiennement des plaintes en matière de logement, les personnes ayant une déficience comme M. Ka-Nowpasikow ont besoin de l’attention de la Nation. L’obligation de fournir un logement sécuritaire aux membres de la collectivité comprend le devoir de répondre aux besoins d’une personne ayant une déficience.

[140] Je suis consciente du fait que la pandémie a commencé en mars 2020 et que, pendant un certain temps par la suite, il n’aurait pas été possible de régler bon nombre des problèmes auxquels faisait face la NCP. Toutefois, il y a quand même eu une période de deux ans durant laquelle la NCP aurait dû prendre des mesures pour évaluer et améliorer les conditions de logement de M. Ka-Nowpasikow. Compte tenu de toutes ces circonstances, j’accorde 5 000 $ de plus à M. Ka-Nowpasikow en vertu du paragraphe 53(3).

[141] Des intérêts simples sont payables sur les montants octroyés au taux annuel moyen établi par la Banque du Canada. Les intérêts s’appliqueront de la date du dépôt de la plainte jusqu’à la date du paiement des indemnités accordées (paragraphe 53(4) de la LCDP et article 46 des Règles de pratique du Tribunal).

(b) La situation du logement de M. Ka-Nowpasikow

[142] La situation du logement de M. Ka-Nowpasikow et le financement à la disposition de la NCP ont peut-être changé depuis le début de cette audience, il y a deux ans.

[143] Dans ses observations finales, la NCP a déclaré qu’en octobre 2021, elle avait attribué une meilleure maison présentant moins de risques pour la santé à M. Ka-Nowpasikow. Dans ses observations en réplique, M. Ka-Nowpasikow affirme que la NCP lui a signifié un avis d’expulsion le 29 octobre 2021. Il a quitté la maison 103 et a déménagé pour vivre avec un frère cadet dans une maison qui est aussi une propriété endommagée.

[144] Ces observations ne constituent pas une preuve et les circonstances peuvent avoir changé davantage. Le Tribunal demande aux parties de trouver une solution acceptable pour fournir un logement qui tient compte de la déficience de M. Ka-Nowpasikow afin que l’état de santé de ce dernier ne soit pas aggravé, compte tenu des conclusions contenues dans la présente décision. Si les parties ne peuvent résoudre cette question directement, elles sont priées de communiquer avec le Tribunal dans les 90 jours suivant la présente décision afin de planifier une conférence téléphonique de gestion de l’instance. Le Tribunal collaborera avec les parties pour discuter de la façon d’appliquer les mesures de redressement prévues dans la présente instance, y compris les prochaines étapes.

[145] Je suis prête à mener une médiation-arbitrage sur cette question, avec le consentement des parties.

Mesures de redressement d’intérêt public

[146] Il convient d’accorder des mesures de redressement d’intérêt public dans la présente affaire, conformément à l’alinéa 53(2)a). La CCDP a demandé au Tribunal d’ordonner à la NCP de créer une politique en matière de logement, et le chef Antoine et Brandon Favel ont convenu qu’une politique en matière de logement était nécessaire.

[147] Je remarque que l’article 23 de la DNUDPA stipule que les peuples autochtones ont le droit de déterminer leurs propres stratégies de développement du logement. Le paragraphe 22(1) exige que les États accordent une attention particulière « aux droits et aux besoins spéciaux des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones dans l’application de la présente Déclaration ».

[148] Je reconnais que la NCP est aux prises avec de graves contraintes en matière de ressources et que la CCDP est en mesure d’offrir un soutien en matière d’élaboration de politiques et de formation.

[149] Compte tenu de l’importance d’élaborer une politique en matière de logement qui respecte le droit coutumier de la NCP ainsi que les droits et les besoins spéciaux des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones conformément à la DNUDPA et à la LCDP, j’ordonne que :

  1. en consultation avec la CCDP, la NCP élabore sa propre politique en matière de logement qui se rapporte à la construction, à la réparation et à l’attribution des logements sur les terres régies par la NCP. Conformément au paragraphe 22(1) de la DNUDPA, cette politique devrait accorder une attention particulière aux droits et aux besoins spéciaux des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones;

  2. en consultation avec la CCDP, la NCP donne de la formation aux membres du conseil et au personnel sur l’application de la politique en matière de logement, y compris sur la façon d’offrir des mesures d’adaptation aux personnes vivant avec différents types de déficiences;

  3. la NCP fasse connaître la politique en matière de logement à ses membres et veille à ce qu’elle soit largement accessible aux membres pour examen.

VIII. Ordonnances

[150] Comme la plainte de M. Ka-Nowpasikow est en partie corroborée, le Tribunal ordonne que :

  1. dans les 90 jours suivant la présente décision, l’intimée verse au plaignant une indemnité pour préjudice moral de 10 000 $, conformément à l’alinéa 53(2)e) de la Loi;

  2. dans les 90 jours suivant la présente décision, l’intimée verse au plaignant une somme de 5 000 $ pour s’être livrée à un acte discriminatoire sans se soucier des conséquences, conformément au paragraphe 53(3);

  3. l’intimée paie au plaignant des intérêts simples sur les montants octroyés au taux annuel moyen établi par la Banque du Canada. Les intérêts s’appliqueront de la date du dépôt de la plainte jusqu’à la date du paiement des indemnités accordées (paragraphe 53(4) de la LCDP et article 46 des Règles de pratique du Tribunal);

  4. les parties collaborent pour trouver une solution acceptable au problème de logement du plaignant et communiquent avec le Tribunal dans les 90 jours suivant la présente décision si elles ne sont pas en mesure de le faire;

  5. en consultation avec la CCDP, la NCP élabore sa propre politique en matière de logement qui se rapporte à la construction, à la réparation et à l’attribution des logements sur les terres régies par la NCP. Conformément au paragraphe 22(1) de la DNUDPA, cette politique devrait accorder une attention particulière aux droits et aux besoins spéciaux des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones;

  6. en consultation avec la CCDP, la NCP donne de la formation aux membres du conseil et au personnel sur l’application de la politique en matière de logement, y compris sur la façon d’offrir des mesures d’adaptation aux personnes vivant avec différents types de déficiences;

  7. la NCP fasse connaître la politique en matière de logement à ses membres et veille à ce qu’elle soit largement accessible aux membres pour examen.

[151] Le Tribunal conserve sa compétence pour régler la situation actuelle du logement de M. Ka-Nowpasikow, au besoin. Les parties doivent aviser le Tribunal dans les 90 jours suivant la présente ordonnance si elles ont besoin de son aide pour régler cette question. Si le Tribunal n’a pas de nouvelles des parties après 90 jours, sa compétence prendra fin et le dossier sera clos.

Signée par

Jennifer A. Orange

Membre du Tribunal

Ottawa (Ontario)

Le 8 septembre 2023


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du Tribunal : T2407/6619

Intitulé de la cause : Earl Ka-Nowpasikow c. Nation crie Poundmaker

Date de la décision du Tribunal : Le 8 septembre 2023

Date et lieu de l’audience : Les 16, 19, 23, 24 et 27 août 2021

Du 7 au 9 et les 13 et 14 septembre 2021

Par vidéoconférence

Comparutions :

Eldon B. Lindgren, K.C., pour le plaignant

Brittany Tovee , pour la Commission canadienne des droits de la personne

Deanne K. Kasokeo, pour l'intimée

 

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