Contenu de la décision
Tribunal canadien |
|
Canadian Human |
Référence : 2019 TCDP
Date : le 5 décembre 2019
Numéro du dossier :
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Entre :
le plaignant
- et -
Commission canadienne des droits de la personne
la Commission
- et -
l’intimée
Décision sur requête
Membre :
Requête visant à fixer une date d’audience
A.
Contexte
[1]
Le plaignant a déposé une requête conformément au paragraphe 3(1) des Règles de procédure du Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal). Par cette requête, il demande au Tribunal de juger que l’intimée a renoncé à tous ses droits de recevoir un avis supplémentaire ou de participer à l’instance, et lui demande de fixer la date d’instruction de l’affaire sans envoyer d’autre avis à l’intimée.
[2]
Dans sa requête, le plaignant allègue que la procédure devant le Tribunal a connu des retards injustifiés depuis le renvoi de la plainte par la Commission. Il soutient que ces retards sont attribuables uniquement à l’intimée.
[3]
La Commission canadienne des droits de la personne a déposé une lettre à l’appui de la requête, bien qu’elle ait ajouté que le Tribunal devrait tenir l’intimée informée de l’état du dossier, y compris de la date de l’audience.
[4]
L’intimée n’a pas déposé d’observation concernant la requête.
B.
Faits
Requête du plaignant
[5]
La plainte a été déposée auprès de la Commission en novembre 2014 et renvoyée au Tribunal en mars 2018. Une conférence téléphonique de gestion de l’instance (CTGI) entre toutes les parties et le membre instructeur du Tribunal devait avoir lieu le 3 décembre 2018 en vue de déterminer le déroulement de l’affaire et les éléments procéduraux qui devaient être achevés pour que l’on puisse procéder à l’audience. L’intimée est la seule partie qui n’y a pas assisté.
[6]
Les exposés des précisions des parties ont été déposés en mars 2019. Le plaignant a fourni son rapport d’expert à l’intimée et à la Commission en mars 2019 également. Le 3 avril 2019, il a envoyé un courriel à l’intimée pour lui demander si elle avait l’intention de produire son propre rapport d’expert. L’intimée n’a pas répondu à sa question.
[7]
À compter du 6 mai, l’agent du greffe du Tribunal a tenté d’organiser une CTGI afin de régler les questions de divulgation et de déterminer si l’on était prêt à passer à l’audience.
[8]
Après plusieurs tentatives de l’agent du greffe pour joindre l’intimée, une CTGI a en fin de compte été fixée au 10 juin. Pour la deuxième fois, l’intimée était la seule partie absente.
[9]
L’agent du greffe a par la suite envoyé une lettre à toutes les parties le 11 juin, demandant à l’intimé de confirmer si elle avait l’intention de déposer un rapport d’expert en réponse à celui du plaignant, et aux parties de fournir leurs disponibilités pour une audience de quatre jours en juillet ou en août 2019.
[10]
Le 14 juin, l’intimée a enfin produit sa liste de documents et les documents qui y figuraient, mais uniquement après que j’ai précisément ordonné leur production au plus tard à cette date. Elle a également indiqué qu’elle et ses témoins n’étaient pas disponibles aux dates d’audience proposées par le plaignant.
[11]
L’intimée n’a pas répondu aux autres courriels de l’agent du greffe envoyés le 19 juin et le 5 juillet, dans lesquels il lui demandait de fournir les dates où elle pourrait assister à l’audience.
[12]
Enfin, le plaignant a déposé sa requête auprès du Tribunal le 4 septembre 2019.
C.
Droit et analyse
[13]
L’article 50 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la LCDP) accorde au Tribunal un vaste pouvoir discrétionnaire de mener ses procédures comme il le juge approprié, tandis que le paragraphe 48.9(1) l’oblige à instruire les plaintes sans formalisme et de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique. Le paragraphe 48.9(2) accorde également au président du Tribunal le pouvoir d’établir des règles de pratique.
[14]
Dans l’arrêt Commission canadienne des droits de la personne c. Société canadienne des postes, 2004 CF 81 [Cremasco], la Cour fédérale a déclaré que « [l]es tribunaux administratifs sont maîtres de leur propre procédure. Ainsi que l’écrivait le juge Sopinka dans l’arrêt Prassad c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] 1 R.C.S. 560, au paragraphe 16 :
Afin d’interpréter correctement des dispositions législatives susceptibles de sens différents, il faut les examiner en contexte. Nous traitons ici des pouvoirs d’un tribunal administratif à l’égard de sa procédure. En règle générale, ces tribunaux sont considérés maîtres chez eux. En l’absence de règles précises établies par loi ou règlement, ils fixent leur propre procédure à la condition de respecter les règles de l’équité et, dans l’exercice de fonctions judiciaires ou quasi judiciaires, de respecter les règles de justice naturelle. »
[15]
Il est loisible au Tribunal de fixer des dates d’audience à la demande d’une partie sans demander à toutes les parties quelles sont leurs disponibilités lorsque l’une d’elles a causé un retard injustifié en ne respectant pas les échéanciers convenus par tous ou imposés par le Tribunal.
[16]
Les actes d’omission de l’intimée, qui n’a pas respecté les calendriers de divulgation, qui a constamment ignoré les dates limites imposées par le Tribunal, qui n’a pas assisté aux CTGI et qui n’a pas fourni de disponibilités pour la tenue d’une audience, constituent un retard injustifié. Le devoir d’agir équitablement oblige le Tribunal à accueillir la requête du plaignant.
D.
Ordonnances
[17]
Ayant examiné l’argument soumis par le plaignant et la Commission, je rends les ordonnances suivantes :
- Le greffe du Tribunal demandera au plaignant et à la Commission leurs dates de disponibilité les plus rapprochées afin de procéder à l’audition de la présente affaire.
- Le plaignant informera le greffe du Tribunal du nombre de jours d’audience estimés et de l’emplacement de l’audience afin que l’on puisse prendre les arrangements logistiques nécessaires.
- Le greffe du Tribunal avisera toutes les parties des dates et de l’emplacement de l’audience.
Signée par
Membre du Tribunal
Ottawa (Ontario)
Le 5 décembre 2019
Tribunal canadien des droits de la personne
Parties au dossier
Dossier du tribunal :
Intitulé de la cause : Goran Petrovic c. TST Overland Express
Date de la décision du tribunal : Le 5 décembre 2019
Requête traitée par écrit sans comparutions des parties
Représentations écrites par :
Daphne Fedoruk, pour la Commission canadienne des droits de la personne