Tribunal canadien des droits de la personne

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Tribunal canadien
des droits de la personne

Les armoiries du Tribunal

Canadian Human
Rights Tribunal

Référence : 2019 TCDP 2

Date : le 9 janvier 2019

Numéro du dossier : T2225/4717

 

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Entre :

Jennifer Young

la plaignante

- et -

Commission canadienne des droits de la personne

la Commission

- et -

Via Rail Canada Inc.

l'intimée

Décision sur requête

Membre : Kirsten Mercer

 



I.  Résumé

[1]  S'il est vrai qu'une requête en non‑lieu peut légitimement être déposée dans certains cas au cours d'une instance portée devant le Tribunal canadien des droits de la personne (le TCDP ou le Tribunal), il est de droit constant qu'on ne doit accueillir une telle requête que s'il appert de la preuve produite par le plaignant qu'il n'a aucune chance d'avoir gain de cause.

[2]  Par conséquent, il convient de ne faire droit à une requête en non-lieu que dans les cas les plus évidents.

[3]  La partie qui souhaite déposer une requête en non‑lieu est normalement tenue de faire le choix de ne pas produire d'autres éléments de preuve dans le cas où elle serait déboutée de cette requête. L'une des manières dont le Tribunal peut assurer le bon usage des requêtes en non‑lieu est d'appliquer aux instances portées devant lui la règle de common law exigeant un tel choix, sauf si l'on peut avancer des motifs irréfutables d'écarter cette règle.

[4]  La règle en question peut être levée soit par les parties, soit par le Tribunal dans les cas exceptionnels qui le justifient.

[5]  Vu les observations qui m'ont été présentées et les motifs exposés ci‑dessous, j'estime que les faits de la présente espèce ne justifient pas qu'on s'écarte de la règle de common law exigeant un choix de la part de l'intimée, et les parties n'ont pas consenti à la levée de cette règle.

[6]  En conséquence, si elle souhaite déposer une requête en non‑lieu dans la présente instance, l'intimée devra préalablement faire le choix susdit.

II.  Rappel de la procédure

[7]  Le 15 novembre 2013, Mme Jennifer Young (la plaignante ou Mme Young) a déposé devant la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) une plainte selon laquelle son employeur, VIA Rail Canada Inc. (l'intimée ou VIA), avait à répondre du harcèlement fondé sur le sexe exercé contre elle par un de ses collègues, M. Kevin Sawchuck, qui n'est pas partie à la présente instance (la plainte).

[8]  Le 23 août 2017, la Commission a renvoyé la plainte devant le Tribunal pour instruction. La Commission participe à l'instance ainsi portée devant le Tribunal.

[9]  Les trois parties ont participé au processus de gestion de l'instance préalable à l'audience devant le Tribunal et se sont acquittées de leurs obligations de communication de preuve, après quoi des dates ont été fixées pour cette audience.

[10]  L'audience sur la plainte de Mme Young a commencé le 21 septembre 2019 à Toronto.

[11]  Jusqu'à maintenant, le Tribunal a entendu onze témoins durant environ onze jours, et reçu deux gros volumes de preuve documentaire et un élément de preuve vidéographique.

[12]  La plaignante aussi bien que la Commission ont clos leur preuve.

[13]  Au début de l'audience, l'intimée a avisé les autres parties et le Tribunal que, malgré la liste de témoins qu'elle avait fournie dans le cadre de la communication de la preuve, il était possible qu'elle décide, comme elle en avait le droit, de n'appeler aucun témoin dans la présente instance.

[14]  À la clôture de la preuve de la plaignante, l'intimée a demandé au Tribunal de statuer sur une question de procédure concernant les requêtes en non‑lieu. Plus précisément, l'intimée voulait savoir si, dans l'hypothèse où elle déposerait une requête de cette nature, elle serait tenue de faire le choix de ne plus produire d'autres éléments de preuve en cas de débouté.

[15]  Le Tribunal a répondu à cette requête en directives en avisant les parties qu'il entendrait leurs observations sur la question de l'obligation du choix susdit. Il leur a offert la possibilité de présenter de brèves observations par écrit avant l'audition de leurs observations orales relatives à ladite requête, mais aucune d'elles ne s'en est prévalue.

[16]  Le 5 décembre 2018, le Tribunal a entendu par téléconférence les observations de l'intimée et de la plaignante. La Commission, même si elle a participé à cette téléconférence, s'est malheureusement abstenue de prendre position sur la question du choix ou de présenter à ce sujet des observations d'intérêt public.

III.  Les thèses des parties

A.  La thèse de l'intimée

[17]  L'intimée a soutenu qu'elle ne devrait pas être tenue de faire un choix dans la présente instance, aux motifs suivants :

  1. Temps : L'intimée a rappelé que l'audience avait déjà duré quelque treize jours, et avait donc pris beaucoup de temps aux trois parties. Elle a ajouté prévoir d'appeler plus de dix autres témoins dans le cas où se poursuivrait l'audience sur le fond.
  2. Frais : L'intimée a fait valoir que, selon ses prévisions, l'instance en cours lui coûterait encore 40 000 $. Bien que cette somme soit approximative et que l'intimée ne l'ait pas détaillée, le Tribunal croit comprendre que les honoraires d'avocat en formeraient la plus grande part.
  3. Équité : L'intimée a avancé que la présente affaire n'est pas de celles où la partie plaignante serait lésée par le fait que des renseignements pertinents quant à sa plainte seraient en la possession de la partie intimée. Bien que la procédure du Tribunal ne comporte pas d'interrogatoires préalables, a poursuivi l'intimée, la plaignante a connaissance de tous les faits afférents à la présente plainte.

L'intimée a soutenu qu'il devrait lui être permis de déposer une requête en non‑lieu sans avoir à [traduction] « miser le tout pour le tout » afin de mettre à l'épreuve la thèse que la plaignante ne s'est pas acquittée de sa charge de preuve. Elle a reconnu que le Tribunal, en tant que rouage du système de défense des droits de la personne, a un rôle à jouer dans la protection des personnes, mais cette protection, a‑t‑elle ajouté, devrait s'étendre à toutes les parties, y compris aux personnes morales intimées, qui ne devraient pas se voir obligées de gaspiller des ressources considérables à se défendre contre des plaintes dénuées de fondement.

[18]  Dans ses observations en réponse, l'intimée a vigoureusement insisté sur le fait qu'elle ne cherchait à utiliser l'outil procédural de la requête en non‑lieu dans aucun but tactique répréhensible, et elle a répété que VIA s'était montrée souple et accommodante envers la plaignante en libérant les employés appelés à témoigner à l'audience, de même qu'elle avait évoqué en toute franchise la possibilité qu'elle n'appelle elle-même aucun témoin de toute l'audience.

B.  La thèse de la plaignante

[19]  Le Tribunal souligne que la plaignante n'a pas formulé sans difficulté ses observations sur la requête, et qu'elle paraissait découragée et frustrée par son sentiment que l'intimée considérait sa plainte comme entièrement dépourvue de fondement.

[20]  La plaignante, pour les motifs suivants, a invité le Tribunal à rejeter la requête de l'intimée visant à obtenir la levée de l'obligation de faire un choix :

  1. Frais : La plaignante, en tant que plaideur non représenté, a comparé la procédure d'audience devant le Tribunal à une montagne qu'il lui fallait gravir, sous les rapports du temps, de l'argent et de l'énergie nécessaires. Elle a fait valoir que le surcroît de temps, de frais et de complexité que représenterait pour elle l'obligation de contester une requête en non‑lieu serait difficile à supporter.
  2. Temps : La plaignante, après avoir fait valoir que la procédure du Tribunal devrait être aussi expéditive et exempte de formalisme que possible, a avancé qu'une requête en non‑lieu aggraverait la complexité et les lenteurs de l'instance. Elle a ajouté qu'on ne devrait pas rendre plus facile à l'intimée de demander le rejet de la plainte au milieu de l'instance en l'autorisant à suivre cette voie sans encourir de conséquences.
  3. Équité : La plaignante a fait valoir qu'il ne serait pas équitable de permettre à l'intimée de [traduction] « tâter le terrain » en sondant le point de vue du Tribunal sur le litige à la présente étape de l'instruction.

C.  La thèse de la Commission

[21]  La Commission a choisi de ne pas prendre position sur la requête en directives, se réservant le droit de présenter des observations dans le cadre de la requête en non‑lieu, si l'intimée en forme une.

[22]  Certes, le Tribunal respecte le droit de la Commission de ne pas prendre position sur la présente requête, mais j'ai été déçue de ne pas pouvoir bénéficier de son point de vue sur les questions d'ordre public que soulève le problème de la règle relative au choix – étant donné, en particulier, que certaines de ces questions touchent directement à son propre rôle dans l'administration des plaintes pour atteinte aux droits de la personne.

IV.  Analyse

[23]  Je tiens à souligner au départ que les présents motifs ne visent en rien à mettre en question le droit garanti à toute partie de plaider sa cause de la manière qu'elle estime appropriée, y compris, s'agissant d'un intimé, d'exercer sa faculté de ne produire aucun élément de preuve dans le cadre de l'instruction d'une plainte par le Tribunal. Les réflexions qui suivent sont plutôt à situer dans le cadre de l'analyse qu'exige du Tribunal l'instruction d'une plainte pour atteinte aux droits de la personne, et par rapport à certains des facteurs que ce contexte met en jeu.

[24]  S'il est vrai que la question à trancher par le Tribunal dans la présente requête est simplement celle de savoir si l'intimée serait soumise à l'obligation de faire un choix dans le cas où elle déposerait une requête en non‑lieu, il me semble utile, étant donné l'incertitude découlant d'une partie de la jurisprudence du Tribunal quant à son approche à l’égard des requêtes de ce type, de préciser ce qu'est au juste la requête en non‑lieu et comment le droit y afférant devrait être appliqué dans le contexte des instances portées devant lui.

[25]  La requête en non‑lieu est un outil dont dispose l'intimé pour mettre fin à l'instance, à la clôture de la preuve du plaignant, sans produire lui-même aucun de ses éléments de preuve, lorsqu'il estime que n'a pas été avancé le moindre moyen propre à ouvrir la possibilité que le juge des faits déclare la plainte fondée.

[26]  La partie qui forme une requête en non‑lieu supporte une lourde charge de preuve.

[27]  La requête en non‑lieu trouve son origine dans le contexte des procès devant jury, où le juge du procès et le juge des faits étaient et restent deux agents distincts. Dans ce contexte, le droit a prévu un outil par lequel le juge du procès (à la demande de la défense) pourrait intervenir de manière à dessaisir le jury dans le cas où la cause de l'accusation serait si faible qu'elle n'aurait aucune chance raisonnable de succès.

[28]  Cet outil avait pour but de permettre au juge, non pas d'usurper la fonction du jury en appréciant la preuve pour se prononcer sur le fond, mais plutôt d'intervenir dans le cas où la preuve serait tout simplement insuffisante pour que n'importe quel jury raisonnable puisse estimer la cause fondée.

[29]  Citons à ce sujet les observations suivantes formulées dans l’ouvrage de Sopinka et autres :

[traduction]

Le juge du procès, dans l'exercice de cette fonction, ne décide pas s'il ajoute foi ou non à la preuve; il décide plutôt si un juge des faits raisonnable pourrait donner gain de cause au demandeur dans le cas où il ajouterait foi à la preuve produite jusque‑là au cours du procès. Le juge du procès ne décide pas si le juge des faits devrait retenir la preuve, mais plutôt s'il serait possible de tirer des éléments de preuve présentés l'inférence souhaitée par le demandeur, dans le cas où le juge des faits choisirait de les retenir [1] .

[30]  On voit donc que le seuil de preuve fixé au plaignant, s'agissant d'une requête en non‑lieu, est très bas, et que le seuil à franchir pour avoir gain de cause s'en trouve d'autant plus élevé. Par conséquent, il ne convient d'accueillir une requête en non‑lieu que dans les cas les plus évidents, lorsque le plaignant n'a produit aucun élément de preuve au soutien d'un moyen nécessaire pour établir le bien‑fondé de sa plainte.

[31]  La requête en non‑lieu ne doit donc être accueillie que si le plaignant n'a pas justifié d'une apparence de droit suffisante. Il s'agit là d'une norme moins rigoureuse que celle de la prépondérance des probabilités, qu'on applique au moment de décider en fin de compte si un plaideur s'est acquitté de sa charge de preuve. On peut conclure qu'il est justifié d'une apparence de droit suffisante lorsque l'examen de la preuve, mené du point de vue le plus favorable à la partie qui l'a produite, révèle des éléments (si faibles soient‑ils) propres à étayer sa cause. On ne prend pas en considération à cette étape la crédibilité des témoins ni la force probante des éléments de preuve [2] .

[32]  Il est de droit constant que le Tribunal est habilité à instruire et accueillir les requêtes en non‑lieu [3] .

[33]  Cependant, la jurisprudence du Tribunal est moins claire sur les points de savoir comment il doit instruire une requête de cette nature et si la partie requérante est tenue de faire le choix de ne plus présenter d'autres éléments de preuve en cas de débouté.

[34]  En common law, l'auteur d'une requête en non‑lieu est tenu de faire le choix de ne pas produire d'autres éléments de preuve dans le cas où il en serait débouté. Mais certaines provinces canadiennes ont explicitement écarté cette exigence dans le contexte civil, par exemple l'Île‑du‑Prince‑Édouard [4] , Terre‑Neuve [5] et la Nouvelle‑Écosse [6] .

[35]  Cependant, les Règles des Cours fédérales, qui régissent le fonctionnement de la Cour fédérale du Canada, ne contiennent aucune disposition écartant la règle de common law, pas plus qu'on n'a promulgué de telles dispositions relativement aux instances portées devant le Tribunal.

[36]  La Cour fédérale a confirmé dans la décision Filgueira que le point de savoir s'il faut ou non exiger un choix est une question de procédure et qu'il y a lieu d'accorder une latitude suffisante au Tribunal en matière de décisions procédurales [7] .

[37]  Si elle a conclu que le Tribunal peut lever l'obligation de faire un choix relativement aux requêtes en non‑lieu, la Cour fédérale n'a pas précisé le point de savoir s'il le devrait.

[38]  La jurisprudence du Tribunal est partagée entre des pratiques divergentes pour ce qui concerne les requêtes en non‑lieu, certains arbitres exigeant du requérant qu'il fasse un choix et d'autres levant cette exigence.

[39]  La pratique du Tribunal touchant les requêtes en non‑lieu me paraît soulever un bon nombre d'importantes questions de politique générale, qui pourraient nous éclairer sur le point de savoir si le requérant devrait être normalement soumis à l'obligation de faire un choix, conformément à la règle de common law.

[40]  S'il peut certes se trouver des cas où il convient de lever l'obligation pour le requérant de faire un choix, j'estime que ces cas, dans les instances portées devant le Tribunal, devraient constituer des exceptions plutôt que la règle.

[41]  Je vois à cela quatre raisons principales :

  1. le rôle de filtre joué par la Commission,
  2. l'approche globale du Tribunal,
  3. l'effet perturbateur de l'éventualité d'une requête en non‑lieu,
  4. le sentiment d'injustice qu'inspire l'idée d'une requête en non‑lieu sans risques.

[42]  Je propose ci‑dessous un examen détaillé de chacune de ces raisons.

  1. Le rôle de filtre joué par la Commission

[43]  Il est prescrit à la Commission par disposition législative de passer les plaintes au crible avant de les renvoyer devant le Tribunal. Ce mécanisme est conçu pour écarter les plaintes qui n'ont que peu ou pas de fondement, qui se révèlent vexatoires, qui sont déposées prématurément ou ne sont pas déposées dans la bonne instance, etc.

[44]  Le paragraphe 41(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la LCDP ou la Loi) institue cette fonction de sélection préliminaire visant à écarter les plaintes qui ne devraient pas être instruites. Les intimés sont invités à participer à cette opération de la Commission, et il leur est permis de présenter des observations à cette dernière lorsqu'ils estiment que les plaintes formées contre eux sont frivoles, vexatoires ou entachées de mauvaise foi [8] .

[45]  Le paragraphe 41(1) de la LCDP est libellé comme suit :

 (1) Sous réserve de l’article 40, la Commission statue sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime celle-ci irrecevable pour un des motifs suivants :

a) la victime présumée de l’acte discriminatoire devrait épuiser d’abord les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

b) la plainte pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une autre loi fédérale;

c) la plainte n’est pas de sa compétence;

d) la plainte est frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi;

e) la plainte a été déposée après l’expiration d’un délai d’un an après le dernier des faits sur lesquels elle est fondée, ou de tout délai supérieur que la Commission estime indiqué dans les circonstances.

[46]  Normalement, lorsqu'elle ne voit aucun motif de rejeter la plainte à cette étape, la Commission effectue un complément d'examen avant de décider si son instruction par le Tribunal est justifiée, ce qui constitue essentiellement un second niveau de filtrage.

[47]  Lorsque la Commission décide de renvoyer la plainte devant le Tribunal, la partie intimée peut demander le contrôle judiciaire de cette décision si elle estime le renvoi infondé.

[48]  S'il est vrai que la procédure du Tribunal constitue une instruction de novo de la plainte sur le fond, il ne conviendrait pas de ne tenir aucun compte du mandat fixé à la Commission par disposition législative d'établir si l'instruction de la plainte est justifiée ni d'écarter trop vite, sans tenir une audience complète, le résultat de cet examen préliminaire.

[49]  L'exercice de cette fonction de filtrage a pour effet que les plaintes renvoyées devant le Tribunal ont déjà fait l'objet d'un examen préliminaire attentif.

[50]  Il ne s'ensuit pas pour autant qu'une requête en non‑lieu soit nécessairement vouée à l'échec devant le Tribunal.

[51]  Une plainte peut prêter le flanc à une requête en non‑lieu pour de multiples raisons, notamment une modification apportée au droit applicable après le renvoi par la Commission, un changement substantiel des faits exposés, un aveu ou une rétractation d'importance cruciale faits par un témoin à l'audience, ou encore le simple défaut, de la part du plaignant, de produire les éléments nécessaires pour prouver ses prétentions.

[52]  Cependant, l'existence de la fonction de filtrage assignée à la Commission par disposition législative donne à penser qu'une vision plus restrictive de la voie du non‑lieu pourrait se justifier. Il faut aussi en déduire que les cas où une requête en non‑lieu serait accueillie devraient être très rares.

  1. L'approche globale du Tribunal

[53]  En dépit du mécanisme d'examen préliminaire par la Commission et des exigences de communication de la preuve fixées par le Tribunal, on constate parfois une inégalité d'information entre les parties à une plainte pour atteinte aux droits de la personne portée devant celui‑ci. Parfois, c'est l'intimé qui ne comprend pas entièrement avant l'audience le détail des sujets de mécontentement du plaignant, et parfois, c'est le détail des politiques, des procédures, ainsi que des décisions prises par la direction en réponse à la plainte en cours de traitement, qui n'est pas tout à fait clair pour le plaignant.

[54]  Malgré l'échange de documents dans le cadre de la communication de la preuve (aussi bien devant la Commission qu'une fois la plainte renvoyée devant le Tribunal), les parties se trouvent souvent dans le cas paradoxal de ne pas savoir au juste ce qu'elles ne savent pas. Cette ignorance peut leur rendre difficile de s'assurer qu'elles ont produit à l'audience tous les éléments de preuve pertinents.

[55]  La commission d'enquête de l'Ontario, dans la décision Nimako v. C.N Hotels [9] , a défini ce déséquilibre comme étant une caractéristique commune des litiges relatifs aux droits de la personne :

[traduction]

À cet égard, il est important de se rappeler que ce n'est qu'après avoir terminé l'audition de toute la cause qu'un tribunal est en mesure d'évaluer la preuve et de prendre une décision, et il se peut que les témoignages présentés en faveur du défendeur (ou de l'accusé) fassent pencher la balance en sa défaveur. En ce qui concerne les difficultés que les plaignants éprouvent à obtenir tous les renseignements pertinents pour établir la discrimination, il est fort probable que des difficultés de ce genre se posent plus souvent dans le cas des audiences tenues en vertu du Code des droits de la personne que dans le cadre des actions civiles en général. [Nimako, à la page D/286; passage cité au paragraphe 4 de la décision Chopra c. Canada (Ministère de la Santé nationale et du Bien‑être social), [1999] D.C.D.P. no5 (Chopra).]

[56]  La jurisprudence du Tribunal fait aussi état de cette inquiétude, qu'on trouve exprimée dans les décisions Chopra et Khalifa.

[57]  Dans les affaires de cette nature, il peut arriver que le plaignant se trouve incapable de prouver directement les actes discriminatoires et doive en conséquence recourir aux éléments de preuve qu'il pourra tirer du témoignage de certains des témoins de l'intimé.

[58]  Je reprends ici les observations formulées au paragraphe 9 de la décision Chopra :

Par conséquent, il ne conviendrait pas dans le cas d'une présumée violation de la Loi canadienne sur les droits de la personne qu'on refuse au plaignant le redressement auquel il a droit parce qu'il n'a pas été en mesure d'établir ses allégations à ce stade des procédures, alors que le tribunal n'a pas eu le loisir d'entendre toute la preuve, particulièrement lorsque la Commission ou le plaignant n'a pas eu accès à certains éléments [10] .

[59]  En outre, le mandat du Tribunal consistant à établir si une conduite donnée est discriminatoire nécessite souvent l'adoption d'une approche globale de la preuve.

[60]  Pour comprendre si le plaignant a fait l'objet de discrimination, le Tribunal doit prendre en considération à la fois son affirmation comme quoi il a été victime d'une distinction défavorable fondée sur un motif illicite et l'existence de toute justification de ce traitement avancée par l'intimé. C'est seulement par un examen de l'ensemble de la situation que le Tribunal se trouve en mesure d'établir si l'acte, l'omission, la ligne de conduite ou les pratiques en cause étaient discriminatoires.

[61]  Cette exigence s'impose avec encore plus de rigueur peut-être dans les affaires qui déclenchent l'application de l'article 65 de la LCDP, où l'on peut avoir besoin d'éléments de preuve détaillés sur les actes, les politiques et les procédures de la partie intimée afin d'établir si elle a pris toutes les mesures nécessaires dans les circonstances de l'espèce. Or, il se peut que le plaignant n'ait pas accès à cette information, en particulier lorsque (comme dans la présente espèce) les actes de la partie intimée se rapportent au dossier disciplinaire ou au dossier d'emploi d'un autre employé qui n'est pas partie à l'instance.

[62]  Par conséquent, le Tribunal applique souvent une approche globale à son instruction de la plainte, ce qui peut se révéler plus difficile s'il ne peut entendre les versions des deux parties à celle‑ci.

  1. L'effet perturbateur de l'éventualité d’un dépôt d'une requête en non‑lieu

[63]  L'intimée a fait preuve de respect et de courtoisie relativement à la possibilité prévue par elle de n'appeler aucun témoin dans la présente instance.

[64]  Cependant, à en juger d'après la discussion sur la possibilité de dépôt d'une requête en non‑lieu par les parties au cours de l'audience et à la clôture de la preuve de la plaignante, il n'est pas évident que cette dernière ait pleinement compris la signification et les conséquences de l'avertissement de l'intimée selon lequel elle pourrait n'appeler aucun témoin. Le Tribunal souligne que, néanmoins, la possibilité que l'intimée n'appelle aucun témoin a incité la plaignante à appeler elle-même d'autres témoins de VIA à déposer au soutien de sa plainte.

[65]  Me fondant sur les observations exposées par les parties dans le cadre de la présente requête, je crois que la plaignante comprend maintenant les conséquences sur l'instance de la requête en non‑lieu envisagée par l'intimée.

[66]  On ne peut pas dire que l'intimée ait pris la plaignante au dépourvu avec son projet de requête en non‑lieu, étant donné que dès le début de l'audience, l'avocat de VIA avait évoqué en toute franchise la possibilité que son client n'appelle aucun témoin.

[67]  Même si je comprends et apprécie la valeur de cette transparence, qui me paraît de bonne foi, le fait de savoir que l'intimée pourrait ne produire aucun élément de preuve a eu un effet assez déstabilisant sur le déroulement de l'audience contradictoire, aussi bien pour les parties que pour le Tribunal.

[68]  Le Tribunal souligne que l'obligation d'appeler en interrogatoire principal des témoins qu'on s'attendrait normalement à contre-interroger peut présenter des difficultés pour un plaideur.

[69]  S'il est vrai que l'intimée a donné son aide en libérant ses témoins pour l'audience, on ne sait pas avec certitude si la plaignante a pu les rencontrer, ni dans quelle mesure il lui a été possible de se préparer à les interroger ou de les préparer eux-mêmes à témoigner.

[70]  Qui plus est, comme la procédure du Tribunal ne prévoit pas d'interrogatoires préalables, les parties ne disposent que des documents mutuellement communiqués et des résumés des témoignages anticipés pour se faire, avant l'audience, une idée de ce que savent et/ou diront les témoins à intérêt opposé.

  1. Le sentiment d'injustice qu'inspire l'idée d'une requête en non‑lieu sans risques

[71]  Bien que je n'attribue ici à la requérante aucune malveillance ni aucun motif répréhensible, j'estime convaincantes les observations de la plaignante selon lesquelles l'idée d'une requête en non‑lieu n'entraînant pas l'obligation de faire un choix inspire un sentiment d'injustice dans le contexte des instances portées devant le Tribunal.

[72]  Je suis frappée par la justesse du raisonnement, reproduit ci‑dessous, qu'a suivi la commission d'enquête dans la décision Nimako et que le Tribunal a repris à son compte dans la décision Chopra :

[traduction]

Contrairement aux procédures criminelles, qui opposent l'État à un individu qui est passible d'une sanction pénale et qui doit être déclaré coupable hors de tout doute raisonnable, une action civile implique de résoudre des intérêts personnels contradictoires en fonction de la prépondérance des probabilités. Dans ce contexte, il ne semble que juste que le défendeur doive se prononcer quant à l'opportunité de clore l'affaire après que le demandeur a présenté sa preuve, l'empêchant ainsi d'avoir accès à des éléments de preuve qui auraient peut-être établi le bien-fondé de ses arguments, ou d'appeler des témoins au risque d'aider la cause du demandeur. Autrement, le défendeur semblerait dire au tribunal : Je veux que vous tranchiez cette affaire sans entendre toute la preuve, dont certains éléments pourraient être utiles au demandeur, mais seulement si vous vous prononcez en ma faveur et rejetez, ce faisant, l'action; si vous n'êtes pas disposé à le faire sur la foi de la preuve présentée par le demandeur, alors je veux que vous différiez votre décision jusqu'à ce que ma preuve ait été entendue, même si certains éléments pourraient aider la cause du demandeur. Si cette attitude voulant que pile je gagne, face je ne perds pas semble inconvenante dans une action civile, elle semble encore moins acceptable dans le cadre d'une audience devant une commission d'enquête comme la nôtre [11] .

[73]  Ce passage me rappelle les propres observations de l'intimée, où elle définissait l'exigence du choix comme l'obligation de [traduction] « miser le tout pour le tout » sur sa requête en non‑lieu. Or il ne faut pas oublier le corollaire : la possibilité de déposer une telle requête en étant exemptée du choix permettrait à l'intimée de lancer son coup de dés sans avoir à parier, ce qui semble contraire à la règle normale du jeu.

[74]  En dernière analyse, étant donné les considérables ressources publiques et privées qui ont été investies dans une plainte au moment où elle atteint l'étape de l'audience devant le Tribunal, on ne devrait décider de s'arrêter avant la conclusion de cette audience que rarement et dans les cas les plus évidents.

[75]  Il peut certes se trouver des cas où la levée de l'obligation de faire un choix servirait l'intérêt de la justice et aiderait le Tribunal à mieux remplir son mandat (Chopra, au paragraphe 22). Mais il me paraît que, en l'absence de telles conditions, la règle de common law obligeant la partie requérante à faire un choix devrait s'appliquer aux requêtes en non‑lieu formées devant le TCDP.

V.  Conclusion

[76]  Vu les faits de l'espèce et les observations des parties, je conclus à l'absence de motifs suffisants pour écarter la règle de common law obligeant l'auteur d'une requête en non‑lieu à faire un choix.

[77]  Je n'ai rien à reprocher à l'intimée, je tiens à le répéter, que ce soit à propos de la question qu'elle a mise en litige dans la présente requête ou de sa franche évocation de la possibilité qu'elle n'appelle aucun témoin à l'audience. Au contraire, les efforts déployés par elle pour relever ce défi m'ont paru manifester la bonne foi, le respect et la courtoisie que le Tribunal attend de toutes les parties plaidant devant lui, compte tenu en particulier de ce qu'elle s'opposait à une plaideuse inexpérimentée et non représentée dans la présente instance.

[78]  En plus des principes généraux formulés plus haut, qui militent pour l'application de la règle de common law, trois autres facteurs, dont les parties ont souligné l'importance dans leurs observations respectives, me paraissent pertinents quant à la question de savoir si l'obligation de faire un choix doit accompagner dans la présente instance le dépôt d'une requête en non‑lieu. J'examinerai brièvement chacun de ces facteurs ci‑dessous.

[79]  Temps : D'un côté, l'intimée informe le Tribunal qu'elle pourrait appeler de nombreux autres témoins dans le cadre de la présentation de sa preuve. Leur audition allongerait probablement l'audience d'une semaine ou plus.

[80]  De l'autre côté, la plaignante fait valoir que la nécessité de répondre à une requête en non‑lieu alourdirait son fardeau, exigerait d'elle encore plus de temps et rendrait plus escarpée encore la montagne que la présente affaire, selon la métaphore consacrée, lui donne le sentiment d'avoir à gravir.

[81]  S'il est vrai que la durée qu'exigerait l'achèvement de la présentation de la preuve est pertinente quant à ma décision, je ne pense pas qu'une semaine supplémentaire de témoignages, programmée pour le début de janvier 2019, allongerait considérablement le temps nécessaire pour statuer sur la présente plainte. Cela est particulièrement vrai si l'on songe que l'audience a déjà duré presque trois semaines et que le traitement de la plainte dure depuis plus de cinq ans.

[82]  En outre, dans le cas où l'intimée ne serait pas soumise à l'obligation de faire un choix et déposerait une requête en non‑lieu dont le Tribunal la débouterait, il y aurait lieu de craindre que la procédure ne soit encore retardée de plusieurs mois pour permettre aux parties de fixer de nouvelles dates d'audience. Malgré le caractère incertain de cette possibilité, il faut prendre en considération le risque d'un retard considérable en cas de rejet de la requête en non‑lieu.

[83]  Frais : Selon l'estimation de l'intimée, la poursuite de la procédure lui coûterait quelque 40 000 $, somme de laquelle une partie serait engagée pour préparer une requête en non‑lieu. 

[84]  Le Tribunal reconnaît le caractère considérable de cette somme, mais il doit néanmoins veiller à ne pas attribuer, dans une analyse telle que la présente, un poids indu aux frais de litige de l'une ou l'autre des parties. En effet, ce sont les parties elles‑mêmes qui déterminent les dépenses qu'elles engageront. Toutes sont obligées de réfléchir mûrement à la meilleure manière de plaider leur cause, et le fait que l'une des parties ait choisi de consacrer au litige des ressources pécuniaires considérables ne peut servir à mesurer le préjudice que représenterait pour elle la poursuite de la procédure dans ces conditions.

[85]  Dans la présente instance, seulement deux des trois parties sont représentées. S'il est vrai que le Tribunal apprécie beaucoup les contributions d'avocats expérimentés, il n'exige pas qu'on soit représenté devant lui.

[86]  Il peut se trouver des cas où la poursuite de l'audience entraînerait des frais extraordinaires, et où la levée de la règle de common law subordonnant la requête en non‑lieu à l'obligation de faire un choix pourrait en conséquence se révéler souhaitable, mais les frais de litige ordinaires ne justifient pas normalement qu'on s'écarte de cette règle (Chopra, au paragraphe 30).

[87]  Par conséquent, les frais de litige ordinaires de l'intimée ne constituent pas un préjudice suffisant pour justifier la levée de la règle de common law portant l'obligation de faire un choix.

[88]  Équité : En permettant à l'intimé d'apprécier la viabilité de la cause du plaignant au milieu de l'audience, on pourrait risquer d'offrir au premier une possibilité inéquitable de « tâter le terrain ». Cependant, on ne m'a pas convaincue de l'impossibilité d'écarter ce risque dans les cas où le dépôt d’une requête en non‑lieu est justifié.

[89]  La charge de présentation afférente à la requête en non‑lieu diffère sensiblement de celle que commande la décision sur le fond. On commettrait une erreur en tirant de l'issue d'une telle requête une quelconque conclusion touchant la force ou la faiblesse sur le fond de la cause de l'une ou l'autre des parties, à moins, bien sûr, que cette requête ne soit accueillie. Toute issue de ladite requête, autre que l'accueil, n'aiderait guère à déterminer les chances de succès de la plainte sur le fond, qui dépendent de la prépondérance des probabilités.

[90]  En outre, s'il est vrai que les motifs de la décision sur la requête en non‑lieu pourraient donner à la partie requérante une idée de la manière dont l'arbitre perçoit l'affaire, ce qui lui conférerait un avantage inéquitable puisqu'il conserverait la possibilité d'adapter sa preuve au point de vue du Tribunal sur la cause telle que présentée jusque‑là, on peut aussi dissiper cette inquiétude. En effet, dans le cas où il n'accueillerait pas la requête en non‑lieu, le Tribunal, pour empêcher le requérant de tirer de celle‑ci un avantage indu, n'aurait qu'à remettre la communication des motifs de sa décision sur ladite requête au moment de la décision finale sur le fond de la plainte.

[91]  VIA a également fait valoir qu'il serait inéquitable de l'obliger à préparer une défense si la plaignante ne s'est pas acquittée de sa charge de preuve.

[92]  Je dois rejeter ce moyen.

[93]  L'obligation dans laquelle se trouve la partie intimée de se défendre contre une plainte portée devant le Tribunal découle du renvoi de cette plainte par la Commission, et non de la tenue d'une audience par ledit Tribunal. En effet, la partie contre laquelle la plainte est formée peut décider de ne pas présenter de défense, de conclure un règlement ou de plaider. Il n'est pas en soi contraire à l'équité de donner à une partie la possibilité d'achever la présentation de sa preuve dans le cadre d'une plainte pour atteinte aux droits de la personne portée devant le Tribunal.

[94]  Par conséquent, tout bien considéré, vu les faits de l'espèce, et par les motifs dont l'exposé précède, je conclus à l'absence de raisons suffisantes pour lever la règle de common law obligeant VIA à faire le choix de ne plus produire d'autres éléments de preuve dans le cas où elle déposerait une requête en non‑lieu relativement à la présente plainte.

VI.  Décision

[95]  Le Tribunal statue comme suit sur les questions en litige dans la présente requête :

  1. L'intimée est avisée que la règle de common law portant l'obligation de la part de l'auteur d'une requête en non‑lieu de faire un choix est applicable à la présente instance.
  2. Comme les parties en ont convenu le 5 décembre 2018, l'intimée a jusqu'au 21 du même mois, à midi, pour notifier au Tribunal et aux autres parties son intention concernant le dépôt d'une requête en non‑lieu.

[96]  Le Tribunal a communiqué la présente décision aux parties avant la publication des présents motifs afin que l’audience ait lieu dans la mesure du possible aux dates fixées pour janvier 2019. L'intimée a décidé en fin de compte de ne pas déposer de requête en non‑lieu et, conformément à l'ordonnance du Tribunal, elle a notifié sans délai cette intention à qui de droit.

Signée par

Kirsten Mercer

Membre du Tribunal

Ottawa, Ontario

Le 9 janvier 2019

 


Tribunal canadien des droits de la personne

Parties au dossier

Dossier du Tribunal : T2225/4717

Intitulé de la cause : Jennifer Young c. Via Rail Canada Inc.

Date de la décision sur requête du Tribunal : Le 9 janvier 2019

Requête instruite par téléconférence de gestion de l'instance le 5 décembre 2018.

Observations orales :

Jennifer Young, pour elle-même

Ikram Warsame, pour la Commission canadienne des droits de la personne

William Hlibchuk, pour l'intimée



[1] Sidney N. Lederman, Alan W. Bryant et Michelle K. Fuerst, Sopinka, Lederman & Bryan: The Law of Evidence in Canada, 4e éd., Markham, LexisNexis Canada, 2014, au paragraphe 5.4.

[2] Sara Blake, Administrative Law in Canada, 3e éd., Markham, Butterworths Canada, 2001, à la page 66.

[3] Filgueira c. Garfield Container Transport Inc., 2006 CF 785 (Filguiera).

[4] Rules of Civil Procedure, article 52.11.

[5] Rules of the Supreme Court, 1986, S.N.L. 1986, c. 42, annexe D, article  42.08.

[6] Nova Scotia Civil Procedure Rules, article 51.06.

[7] Filguiera , précitée, au paragraphe 22.

[8] Khalifa c. Pétrole et Gaz des Indiens du Canada, 2009 TCDP 27 (Khalifa), au paragraphe 8.

[9] (1985) 6 C.H.R.R. D/2894 (Nimako).

[10] Chopra, au paragraphe 9.

[11] Passage de la décision Nimako cité au paragraphe 8 de la décision Chopra.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.