Régie de l'énergie du Québec

Informations sur la décision

Résumé :

Le 3 octobre 2013, Gazifère Inc. (Gazifère ou le Distributeur) dépose auprès de la Régie de l’énergie (la Régie), en vertu des articles 31 (5°) et 73 (1°) de la Loi sur la Régie de l’énergie  (la Loi) et de l’article 1 du Règlement sur les conditions et les cas requérant une autorisation de la Régie de l’énergie  (le Règlement), une demande afin d’obtenir l’autorisation d’acquérir des actifs visant la réalisation du projet de mise en œuvre de son programme de francisation (le Projet). Les coûts du Projet sont évalués à 1 038 100 $.

Contenu de la décision

 

 

QUÉBEC                                                                               RÉGIE DE L’ÉNERGIE

 

 

 

D-2014-020

R-3862-2013

12 février 2014

 

 

 

 

 

PRÉSENT :

 

Laurent Pilotto

Régisseur

 

 

 

 

Gazifère Inc.

Demanderesse

 

 

 

 

 

 

Décision finale

 

Demande de Gazifère Inc. relative au projet d’investissement pour la mise en œuvre du programme de francisation


 


1.            DEMANDE

 

[1]             Le 3 octobre 2013, Gazifère Inc. (Gazifère ou le Distributeur) dépose auprès de la Régie de l’énergie (la Régie), en vertu des articles 31 (5°) et 73 (1°) de la Loi sur la Régie de l’énergie[1] (la Loi) et de l’article 1 du Règlement sur les conditions et les cas requérant une autorisation de la Régie de l’énergie[2] (le Règlement), une demande afin d’obtenir l’autorisation d’acquérir des actifs visant la réalisation du projet de mise en œuvre de son programme de francisation (le Projet). Les coûts du Projet sont évalués à 1 038 100 $.

 

[2]             Les conclusions recherchées par Gazifère sont les suivantes :

 

« ACCORDER à Gazifère l’autorisation d’acquérir les actifs visant la réalisation du projet de mise en œuvre de son programme de francisation, tel que décrit à la pièce GI-1, document 1;

 

PERMETTRE à Gazifère d’établir un compte de frais reportés hors base de tarification et portant rémunération dans lequel seront comptabilisés les coûts encourus par elle relativement à ce projet et ce, jusqu’au prochain dossier tarifaire suivant l’approbation du projet par la Régie, le cas échéant; 

 

PERMETTRE à Gazifère d’établir un compte de frais reportés hors base de tarification et portant rémunération dans lequel seront comptabilisés les charges d’exploitation additionnelles qui seront encourues par elle pour la réalisation de ce projet et ce, jusqu’au prochain dossier tarifaire suivant l’approbation du projet par la Régie, le cas échéant ».

 

[3]             Dans l’avis diffusé sur son site internet en date du 18 octobre 2013, la Régie indique qu’elle entend examiner la demande de Gazifère sur dossier. Elle y indique que les personnes intéressées pourront transmettre des demandes de renseignements à Gazifère au plus tard le 7 novembre 2013. Elle invite également les personnes intéressées à soumettre des observations écrites au plus tard le 28 novembre 2013.

 

[4]             Le 21 octobre 2013, Gazifère confirme que l’avis de la Régie a été publié sur son site internet.

 

[5]             Le 22 octobre 2013, la Régie dépose, sous les cotes A-0004 à A-0010, les informations pertinentes relatives au programme de francisation qui avaient été fournies par Gazifère dans le cadre du dossier tarifaire R-3793-2012.

 

[6]             Le 7 novembre 2013, la Régie transmet une demande de renseignements à Gazifère. Le 21 novembre 2013, Gazifère transmet les réponses à cette demande.

 

[7]             Le 28 novembre 2013, aucune observation écrite de la part d’intéressés n’ayant été déposée au présent dossier, la Régie entame son délibéré. Par la présente décision, la Régie se prononce sur la demande de Gazifère.

 

 

 

2.            CADRE JURIDIQUE

 

[8]             En vertu de l’article 73 de la Loi, Gazifère doit obtenir l’autorisation de la Régie aux conditions et dans les cas qu’elle fixe par règlement pour, entre autres, acquérir des actifs destinés à la distribution du gaz naturel.

 

[9]             En vertu du paragraphe 1d) du premier alinéa de l’article 1 du Règlement, Gazifère doit obtenir une approbation spécifique et préalable de la Régie lorsque le coût global estimé d’un projet est égal ou supérieur à 450 000 $. Le Règlement prescrit les renseignements qui doivent accompagner une telle demande[3].

 

 

 

3.            analyse

 

3.1             MISE EN CONTEXTE ET OBJECTIFS DU PROJET

 

[10]         Le Projet vise à assurer le respect de l’obligation légale de Gazifère de mettre en œuvre un programme de francisation conforme aux exigences de l’Office québécois de la langue française (l’Office), tel que le stipule la Charte de la langue française (la Charte).

 

[11]         Le 28 octobre 2011, l’Office a remis à Gazifère un avis en vertu de l’article 140 de la Charte, lui demandant d’adopter un programme de francisation et d’en faire le dépôt à l’Office dans les six (6) mois suivant la réception de l’avis, ce que Gazifère a fait. Le programme de francisation proposé a été approuvé par l’Office le 14 septembre 2012[4].

 

[12]         Gazifère indique devoir s’assurer de la mise en œuvre des mesures de francisation prévues à son programme et du respect des échéanciers prescrits par l’Office, soit :

 

        un échéancier de 24 mois à compter du 1er décembre 2012 pour réaliser les priorités d’action prévues à son programme, au terme duquel Gazifère se verra remettre un certificat de francisation;

        un rapport sur l’évaluation de l’utilisation du français dans l’entreprise à remettre à l’Office tous les trois ans.

 

[13]         L’échéance initiale étant fixée au 1er décembre 2014, Gazifère anticipe devoir demander une prolongation jusqu’en 2016 afin de lui permettre de compléter les activités prévues au programme. Un plan d’action démontrant sa détermination à réaliser l’ensemble des mesures de francisation à l’intérieur du nouvel échéancier devra également être préparé. Les périodes de prolongation accordées sont généralement d’une durée de deux ans.

 

[14]         Selon Gazifère :

 

« L’Office peut accepter de prolonger le programme de francisation d’une entreprise lorsque celle-ci lui fait part de contraintes particulières qui l’ont empêchée de le terminer à temps, ou encore lorsque, en cours de programme, de nouveaux éléments dans l’entreprise font en sorte que d’autres mesures s’avèrent nécessaires. L’entreprise peut alors soumettre une demande de prolongation de programme à l’Office »[5].

 

 


3.2             DESCRIPTION ET JUSTIFICATION DU PROJET

 

[15]         Le programme de francisation de Gazifère établit une liste de priorités d’action regroupées sous les thèmes suivants :

 

           politique d’embauche;

           ressources humaines;

           formation;

           communications internes;

           activités des opérations;

           activités internes;

           utilisation du français dans les technologies de l’information;

           utilisation du français dans les communications avec l’administration, la clientèle, les fournisseurs, le public et les actionnaires;

           utilisation du français dans l’affichage public et la publicité commerciale;

           utilisation d’une terminologie française.

 

 

3.2.1           Processus entourant l’élaboration du programme

 

[16]         Gazifère indique avoir eu recours à l’expertise d’un conseiller en francisation, désigné par l’Office, pour l’élaboration des priorités d’action et des mesures à inclure au programme de francisation. Celui-ci doit tenir compte :

 

           du type d’activités de l’entreprise, soit une entreprise d’utilité publique offrant un service d’urgence 24 heures sur 24 et 7 jours par semaine;

           de la situation géographique de l’entreprise à la frontière de l’Ontario;

           de la clientèle qui est en partie anglophone;

           du contexte organisationnel de l’entreprise, Gazifère étant une filiale d’une entreprise (Enbridge) dont les bureaux de haute direction et d’importants services dont elle dépend (opérations, ressources humaines et communications) sont situés à l’extérieur du Québec.

 

[17]         Lors de l’élaboration de son programme de francisation, Gazifère indique avoir identifié plusieurs variables représentant un impact important sur la mise en place de certaines mesures. Avant d’élaborer son programme de francisation, Gazifère a présenté ses caractéristiques particulières à l’Office et a fait valoir la complexité de sa situation organisationnelle ainsi que le caractère spécifique de ses activités. Gazifère a donc proposé à l’Office d’autres approches visant à minimiser l’impact de plusieurs de ces variables sur l’objectif de francisation, ce qui, selon Gazifère, a eu pour effet de réduire les coûts du programme[6].

 

[18]         Gazifère explique que les échanges d’information effectués au quotidien avec Enbridge ou sa société sœur, Enbridge Gas Distribution (EGD), se déroulent exclusivement en anglais. Ces échanges traitent autant de construction, d’entretien et de planification du développement du réseau que d’administration, de finances et de ressources humaines. Gazifère donne pour exemple les partages d’expertise en ingénierie, les partages de bases de données géographiques, d’applications et de bases de données pour la génération de la paie ou pour la production des rapports financiers.

 

[19]         Gazifère dit s’être entendue avec l’Office pour que toute activité comportant des échanges d’informations sensibles (activités des opérations, données techniques ou administratives) avec les différentes équipes d’Enbridge - dont le personnel est presque entièrement unilingue anglophone - puisse continuer à se faire en anglais. D’ailleurs, Gazifère souligne que les logiciels qu’elle utilise dans ces échanges sont la propriété d’Enbridge ou d’EGD.

 

[20]         Selon Gazifère, cet accord convenu avec l’Office permet d’économiser plusieurs centaines de milliers de dollars, puisqu’il évite la traduction d’une dizaine de logiciels utilisés et partagés par les différents services de Gazifère et d’EGD. Cet accord de principe permettant de ne pas requérir la traduction des outils de travail et de données techniques partagés sera également valable après la réalisation du programme de francisation, ce qui représente d’importantes économies récurrentes.

 

[21]         Étant donné qu’une partie de sa clientèle est unilingue anglophone et qu’elle offre un service d’urgence 24/7, Gazifère indique qu’elle doit embaucher des répartiteurs bilingues. Contrairement aux autres services de l’entreprise pour lesquels l’Office exige qu’un maximum de 50 % des postes requièrent le bilinguisme, il a été convenu avec l’Office que la totalité des postes en répartition des travaux exige le bilinguisme. Gazifère précise que cette entente lui permet de continuer à opérer son service de répartition de nuit avec une seule personne.

 

[22]         L’équipe de gestion de Gazifère a été recrutée sur la base d’une excellente connaissance de l’anglais. De ce fait, l’Office a accepté que l’échange d’informations et les formations destinées à l’ensemble des gestionnaires de la famille Enbridge puissent continuer à se faire en anglais, évitant ainsi des frais de traduction et les coûts d’un formateur francophone.

 

[23]         Gazifère souligne un autre aspect important du programme de francisation qui a fait l’objet d’une proposition à l’Office : l’Intranet d’Enbridge, dont la francisation aurait été très coûteuse. Gazifère a plutôt proposé de créer son propre Intranet pour le service des ressources humaines afin d’y déposer, notamment, les politiques d’entreprise et les documents relatifs à la santé et à la sécurité au travail. Elle précise que la gestion de cet Intranet sera faite à l’interne, sans frais additionnels.

 

[24]         Gazifère indique n’avoir aucune latitude pour modifier les mesures de francisation spécifiées dans son programme. Cependant, le choix des moyens à utiliser pour mettre en place les mesures lui appartient. Gazifère confirme qu’elle veillera à la réalisation de ces mesures au moindre coût possible, compte tenu des circonstances, des contraintes et des variables de son environnement[7].

 

 

3.2.2           Autres solutions étudiées

 

[25]         Gazifère affirme ne pas avoir d’autres solutions. Elle est tenue de satisfaire aux obligations dictées par la Charte et de répondre aux demandes de l’Office.

 

[26]         En réponse aux demandes de renseignements de la Régie, Gazifère mentionne qu’elle a étudié plusieurs options de francisation possibles avant de porter son choix sur celles incluses au présent dossier[8].

 


Ressources humaines

 

[27]         En ce qui a trait aux outils de gestion associés aux ressources humaines, Gazifère précise qu’Enbridge a procédé à l’implantation d’une toute nouvelle version du logiciel Peoplesoft, en fonction des besoins spécifiques de l’ensemble des sociétés du groupe en cette matière. Cette nouvelle version de Peoplesoft regroupe plusieurs bases de données nécessaires à la gestion des feuilles de temps et à la génération de la paie.

 

[28]         Dans le contexte où les principaux outils de gestion et bases de données relatifs aux ressources humaines sont désormais centralisés, Gazifère indique que les alternatives qu’elle souhaitait explorer, soit l’achat d’une licence d’exploitation française de Peoplesoft ou encore la gestion dans ses bureaux de son propre service de la paie, se sont rapidement avérées complexes et coûteuses.

 

[29]         Une des mesures de francisation vise à remettre aux employés les documents relatifs à l’emploi en français. Pour sa réalisation, Gazifère ne francisera que le module Employee Self Service de la nouvelle version de Peoplesoft. Le coût estimé de cette mesure s’élève à 240 000 $. Par ailleurs, Gazifère précise que plusieurs autres modules de gestion de la nouvelle version de Peoplesoft, utilisés par un nombre restreint d’employés, ne seront pas touchés par le programme de francisation[9].

 

Formation technique

 

[30]         En ce qui a trait à la francisation des formations techniques données à ses employés du service des opérations, Gazifère a exploré la possibilité d’avoir recours à des formations déjà existantes offertes en français par des collèges techniques du Québec et de l’Ontario. Cette option n’a pas été retenue compte tenu du petit nombre de formations existantes et des coûts d’adaptation qui auraient été requis pour refléter adéquatement les normes et procédures d’EGD et valider la conformité du contenu de ces formations par le service d’ingénierie d’EGD.

 

[31]         Afin de coordonner les projets de traduction de l’ensemble des programmes de formation technique d’Enbridge ainsi que les mises à jour apportées régulièrement aux manuels et au matériel de formation, Gazifère a privilégié l’embauche d’un formateur francophone à mi-temps, plutôt que de recourir à des formateurs contractuels externes. Gazifère est d’avis que l’utilisation de ressources externes aurait pu mettre à risque la rigueur et la diligence requises pour les mises à jour des manuels et du matériel de formation. Gazifère souligne, de plus, que les formateurs externes possédant les qualifications requises sont coûteux et peu nombreux.

 

[32]         Gazifère soutient que le fait d’avoir une ressource demeurant au centre des activités du service des opérations d’EGD autant que de celui de Gazifère, permet d’assurer que les mises à jour apportées régulièrement par le service d’ingénierie d’EGD soient rigoureusement intégrées aux versions françaises des documents techniques et que celles-ci se conforment en tous points aux normes, procédures et objectifs de sécurité d’EGD. Le formateur interne aura également la responsabilité de s’assurer que la mise en œuvre des mesures de francisation des formations techniques s’effectue de manière cohérente et avisée[10].

 

[33]         Enfin, Gazifère précise qu’au moment de choisir la meilleure option lui permettant de réaliser les mesures de son programme de francisation, elle a impérativement priorisé la sécurité du public et de ses employés.

 

3.3             Coûts et aspects économiques

 

[34]         Les tableaux suivants présentent les coûts des grandes composantes du Projet :

 

Tableau 1

Coûts d’investissement

Priorités d’action

Réalisation au

1er décembre 2014

Réalisation au

1er décembre 2016

Ressources humaines

Logiciel Peoplesoft – modules intranet paie

 

240 000 $

 

 

Formations

Frais reportés – formations obligatoires existantes pour l’ensemble des employés

Frais reportés – traduction du matériel existant de formation technique

 

23 300 $

 

 

 

 

588 800 $

Manuels techniques - opérations

   Conduites principales et branchements d’immeubles

Traduction des manuels techniques

Validation des traductions

 

 

 

 

124 000 $

62 000 $

Total

263 300 $

774 800 $

Grand total

1 038 100 $

Source : pièce B-0005, p. 7.

 

Tableau 2

Charges d’exploitation

Priorités d’action

Charges annuelles

2014-2016

Charges annuelles

2017 et suivantes

Ressources humaines

     Traduction des documents relatifs à l’emploi et des communications internes corporatives

     Traduction et mise à jour des formations obligatoires à l’ensemble des employés

 

 

23 700 $

 

25 000 $

 

 

20 000 $

 

25 000 $

Formations techniques

     Formateurs

     Traduction des mises à jour et ajouts – matériel de formation technique

 

50 000 $

 

 

50 000 $

 

120 000 $

Manuels techniques

     Traduction et validation des mises à jour et ajouts

 

30 000 $

 

52 000 $

 

Technologies de l’information

     Traduction de guides d’utilisateur, mémos

 

4 000 $

 

3 000 $

Total

132 700 $

270 000 $

Source : pièce B-0005, p. 9.

 

 

3.3.1           Charges d’exploitation pour 2014 et compte de frais reportés (CFR)

 

[35]         Gazifère mentionne qu’avant la mise en place du programme de francisation, elle ne traduisait pas de l’anglais au français les communications internes corporatives, les mises à jour régulières des manuels techniques et du matériel de formation, ni les nouvelles formations techniques. Elle n’offrait pas non plus à ses employés de formations techniques en français. Ainsi, Gazifère soutient que ce type de charges ne fait pas partie du revenu requis qui est à la base de la formule du mécanisme incitatif actuel.

 

[36]         Afin d’établir l’impact total sur le coût de service de la réalisation du programme de francisation, Gazifère tient compte de tous les éléments du coût de service qui sont touchés par le Projet, incluant la composante charge d’exploitation.

 

[37]         Gazifère indique qu’elle demandera l’ajout d’une exclusion à la formule du mécanisme incitatif actuel de même que l’autorisation d’ajouter dans le calcul du revenu requis de distribution de 2015 l’impact total sur son coût de service résultant du Projet.

 

[38]         Gazifère fait valoir que la Régie a reconnu cette façon de faire lorsqu’elle a approuvé l’impact sur le coût de service du projet Consumer Information System (CIS)[11] et du projet Remplacement du système téléphonique[12].

 

[39]         Gazifère précise qu’au moment où elle a déposé son dossier tarifaire 2014, elle n’avait pas obtenu l’autorisation préalable de la Régie. Elle ne pouvait donc pas inclure, à titre d’exclusion, l’impact du Projet sur son coût de service et sur ses tarifs 2014.

 

[40]         Conséquemment, Gazifère demande l’inclusion des charges d’exploitation associées au Projet en 2014 dans un CFR dont la demande d’autorisation de liquidation sera présentée dans le cadre du dossier tarifaire 2015, à titre d’exclusion à la formule du mécanisme incitatif actuel[13].

 


3.3.2           Caractère raisonnable du montant global soumis pour autorisation

 

[41]         Depuis le début de ses discussions avec l’Office, Gazifère indique avoir recherché des compromis et des solutions raisonnables pour minimiser les impacts et les coûts découlant de la mise en œuvre de son programme de francisation. Gazifère dit s’être basée sur des éléments quantifiables ou estimables, tels que l’inventaire de ses activités typiques, l’inventaire des manuels techniques et des mises à jour effectuées au cours d’une année et l’inventaire des formations techniques qui s’offrent normalement dans le programme de formation technique.

 

[42]         Selon Gazifère, il est plus difficile de quantifier ou estimer les éléments qui seront ajoutés ou enlevés des programmes de formation ou campagnes de communication. Elle souligne qu’elle évolue, tout comme Enbridge et EGD, dans un secteur d’activité où il faut constamment être au fait des nouvelles technologies et des tendances de l’industrie.

 

[43]         La mise en place d’un comité interne de francisation a contribué à élaborer un programme qui engendrera des coûts de francisation raisonnables compte tenu du contexte dans lequel Gazifère évolue.

 

[44]         Aussi, le calendrier de réalisation du programme de francisation n’a que très peu d’incidence sur le montant global présenté à la Régie, puisque les mesures et l’ampleur de la tâche à réaliser demeureront les mêmes que ce soit sur une période de deux ou quatre ans.

 

[45]         De plus, Gazifère indique qu’elle attendra les échéances régulières de mise à niveau des équipements informatiques pour changer les claviers et licences d’utilisateurs pour des versions françaises. Cette approche permettra donc de ne pas inclure dans son programme de francisation les coûts de remplacements des équipements informatiques pour des versions françaises.

 

[46]         Tout au long de l’élaboration de son programme de francisation, compte tenu des circonstances, des contraintes et à la lumière de l’analyse des variables internes et externes de son environnement, Gazifère estime avoir fait preuve de vigilance et de créativité dans ses recherches de compromis, ce qui, selon elle, contribue au caractère raisonnable du montant global soumis à la Régie. Gazifère est d’avis que sans ses propositions approuvées par l’Office, le coût du programme de francisation aurait pu être le double du budget examiné au présent dossier[14].

 

 

3.3.3           Impact tarifaire du Projet

 

[47]         L’impact sur le coût de service estimé par Gazifère est présenté au tableau suivant.

 

Tableau 3

Impacts sur le coût de service

 

Impacts sur le coût de service ($)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

 

 

 

 

 

 

 

Rendement sur la base de tarification

43 123

47 236

37 060

21 211

14 050

12 500

Amortissement

 

 

 

 

 

 

      Conduite principale

970

1 617

1 941

1 941

1 941

1 941

       Branchements d’immeubles

2 228

3 713

4 456

4 456

4 456

4 456

      Équipement informatique/logiciel

53 880

53 880

53 880

53 880

 

 

      Frais reportés

102 017

161 694

187 367

85 350

25 672

 

Taxes sur les services publics

906

1 331

1 283

1 235

1 187

1 139

Impôts (impact dû aux écarts temporaires)

(132 642)

(18 387)

87 306

49 994

8 422

(822)

Charges d’exploitation

254 649

127 325

265 104

265 104

265 104

265 104

Impact total sur le coût de service

325 131

378 410

638 396

483 171

320 832

284 317

Variation vs l’année antérieure

325 131

53 279

259 986

(155 225)

(162 339)

(36 515)

Source : pièce B-0013, p. 1.

 

[48]         Pour estimer ces montants, Gazifère a retenu les hypothèses suivantes :

 

           le coût en capital prospectif avant impôt de 8,06 %;

           une allocation aux activités non réglementées de 10,2 %;

           une subvention de 50 000 $ qui réduira les investissements en capital;

           un amortissement annuel de 25,0 % pour l’équipement informatique et les logiciels;

           une période d’amortissement de trois ans pour les frais reportés;

           un amortissement annuel de 2,2 % pour les conduites principales, et

           un amortissement annuel de 4,5 % pour les branchements d’immeuble[15].

 

[49]         Gazifère précise que la période d’amortissement des frais reliés à la traduction du matériel de formation est basée sur des tendances observées dans les cycles de formations techniques des dernières années.

 

[50]         Le Projet engendre uniquement des coûts additionnels. Gazifère ne prévoit aucun revenu ou économie de coûts découlant du Projet. En conséquence, aucune étude de faisabilité économique n’a été soumise.

 

 

3.4             AUTRES AUTORISATIONS REQUISES

 

[51]         Aucune autre autorisation n’est requise pour ce Projet.

 

 

 

4.            OPINION DE LA RÉGIE

 

[52]         La Régie souligne le caractère particulier de la demande d’autorisation d’investissement soumise par Gazifère dans le présent dossier. Elle rappelle que cette demande découle de la décision qu’elle a rendue dans le dossier tarifaire 2013 :

 

« [107] Considérant les coûts estimés à plus de 716 000 $, le fait que ces coûts sont incomplets, car d’autres coûts importants sont à venir, les avantages à long terme liés au programme de francisation, la capitalisation déjà autorisée par la Régie de certains coûts de traduction des manuels de procédures et la volonté du distributeur de traiter les coûts liés à la francisation comme un actif, la Régie considère qu’une demande d’autorisation d’acquisition d’actifs s’impose »[16].

 

[53]         La Régie juge qu’il y a lieu d’autoriser la réalisation du Projet. Gazifère a démontré, à la satisfaction de la Régie, la nécessité de réaliser le Projet comme présenté.

 

[54]         La Régie est également convaincue que l’option retenue par Gazifère est satisfaisante. Le Distributeur a, en effet, démontré que les alternatives envisagées auraient augmenté les coûts du Projet.

 

[55]         La Régie note que la demande soumise comporte des coûts importants, soit des investissements estimés à plus d’un million de dollars ainsi que des charges d’exploitation annuelles additionnelles estimées à 132 000 $ pour les années 2014, 2015 et 2016 et à 270 000 $ à compter de 2017.

 

[56]         La demande d’exclusion associée à ce Projet, qui sera soumise dans le cadre du dossier tarifaire 2015, comportera des sommes importantes comparativement aux montants reliés aux projets d’investissement qui font déjà l’objet d’une exclusion dans le dossier tarifaire 2014. En effet, l’impact total sur le coût de service découlant des trois projets d’investissements Renforcement – chemin Pink, CIS et Remplacement du système téléphonique s’élève à 1 726 900 $[17]. En comparaison, la Régie note que l’impact sur le coût de service du programme de francisation est estimé à 325 131 $ en 2015, et s’élèvera à 638 396 $ en 2017.

 

[57]         La Régie prend acte du fait que Gazifère doit respecter les exigences de l’Office et réaliser le programme que ce dernier a approuvé. Toutefois, elle note que Gazifère a une certaine latitude quant aux moyens à utiliser pour mettre en œuvre ce programme. À cet égard, la Régie prend acte de l’affirmation de Gazifère selon laquelle elle veillera à la réalisation et au respect des mesures prévues au programme, au moindre coût possible compte tenu des circonstances, des contraintes et des variables de son environnement.

 

[58]         La Régie s’attend à ce que Gazifère utilise cette latitude afin de minimiser les coûts du Projet et l’impact tarifaire qui en découle. Elle demande donc à Gazifère de faire état, dans le cadre de son rapport annuel, des économies qu’elle réalisera par rapport aux estimations présentées dans le présent dossier.

 

[59]         Gazifère devra également déposer un suivi annuel du Projet en fermeture réglementaire des livres. Ce suivi devra contenir les informations décrites à la version la plus récente du Guide de dépôt de Gazifère.

 

[60]         Gazifère demande la création d’un CFR pour y verser les charges d’exploitation associées au Projet, encourues en 2014, postérieurement à la date de la présente décision. La Régie considère cette demande inhabituelle. Cependant, elle tient compte des circonstances spécifiques à ce Projet ainsi que du fait que la demande initiale de création d’un CFR avait été faite au dossier tarifaire 2013. La Régie prend également en considération l’obligation qu’a Gazifère de respecter le programme et l’échéancier soumis à l’Office. Par conséquent, la Régie permet, de façon exceptionnelle, la création d’un tel CFR.

 

[61]         La Régie permet également l’établissement d’un CFR, hors base de tarification, dans lequel seront cumulés les coûts d’investissement reliés au Projet. Les frais de financement pourront y être capitalisés sur le solde du compte au taux de rendement sur la base de tarification approuvé par la Régie.

 

[62]         Considérant l’impact tarifaire important du Projet, la Régie ordonne à Gazifère de déposer, dans le cadre des dossiers tarifaires 2015 et 2016, une mise à jour de la pièce B‑0013 traitant de la ventilation des coûts du Projet et de l’impact sur le coût de service pour la période 2014 à 2022.

 

[63]         Pour ces motifs,

 

La Régie de l’énergie :

 

AUTORISE Gazifère à réaliser le projet de mise en œuvre de son programme de francisation;

 

PERMET à Gazifère d’établir un compte de frais reportés, hors base de tarification et portant intérêt au taux autorisé par la Régie, dans lequel seront comptabilisées les charges d’exploitation associées au Projet qui seront encourues en 2014 après la date de la présente décision;

 

PERMET à Gazifère d’établir un compte de frais reportés, hors base de tarification et portant intérêt au taux autorisé par la Régie, dans lequel seront comptabilisées les coûts d’investissement associés au Projet;

 

DEMANDE à Gazifère de faire un suivi du Projet lors de la fermeture règlementaire des livres qui fera état, notamment, des économies réalisées par rapport aux estimations présentées dans le présent dossier, et;

 

ORDONNE à Gazifère de déposer, dans le cadre du dossier tarifaire 2015, une mise à jour de la pièce B-0013 traitant de la ventilation des coûts du Projet et de l’impact sur le coût de service pour la période 2014 à 2022.

 

 

 

 

 

Laurent Pilotto

Régisseur

 

 

Gazifère Inc. représentée par Me Louise Tremblay.



[1]       L.R.Q., c. R-6.01.

[2]       (2001) 133 G.O. II, 6165, article 1 (1°) c).

[3]       Articles 2 et 3.

[4]       Pièce B-0015, p. 2 et pièce B-0016.

[5]       Pièce B-0015, p. 6.

[6]       Pièce B-0015, p. 20 à 22.

[7]       Pièce B-0015, p. 3.

[8]       Pièce A-0008, p. 49 et 50.

[9]       Pièce B-0015, p. 5.

[10]     Pièce B-0015, p. 14 et 15.

[11]     Dossier R-3692-2009 Phase 3, pièce A-23, décision D-2009-151, par. 69 à 71.

[12]     Dossier R-3793-2012 Phase 2, pièce A-0028, par. 55.

[13]     Pièce B-0015, p. 11 et 12.

[14]     Pièce B-0015, p. 20 à 22.

[15]      Les taux d’amortissement ont été approuvés dans le dossier R-3724-2010 Phase 3, pièce A-32, décision D‑2010‑112, par. 79 et 88.

[16]     Dossier R-3793-2012 Phase 2, pièce A-0019, par. 107.

[17]     Dossier R-3840-2013 Phase 3, pièce A-0030, par. 49.

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