Régie de l'énergie du Québec

Informations sur la décision

Résumé :


Le 7 juillet 2017, Société en commandite Gaz Métro (Gaz Métro ou le Distributeur) dépose à la Régie de l’énergie (la Régie) une demande concernant la mise en place de mesures relatives à l’achat et à la vente de gaz naturel renouvelable (GNR). Cette demande est présentée en vertu des articles 31 (5o), 48, 52 et 72 de la Loi sur la Régie de l’énergie (la Loi).

Contenu de la décision

 

QUÉBEC                                                                             RÉGIE DE L’ÉNERGIE

 

 

 

D-2018-052

R-4008-2017

8 mai 2018

 

 

 

 

 

PRÉSENTS :

 

Laurent Pilotto

Lise Duquette

Bernard Houle

Régisseurs

 

 

Énergir, s.e.c.

Demanderesse

 

et

 

Personnes intéressées dont les noms apparaissent ci-après

 

 

Décision procédurale portant sur les enjeux, les demandes d’intervention, les budgets de participation, la demande de traitement confidentiel et le calendrier de traitement du dossier

 

Demande d’Énergir, s.e.c. concernant la mise en place de mesures relatives à l’achat et à la vente de gaz naturel renouvelable



Personnes intéressées :

 

Association coopérative d’économie familiale de Québec (ACEF de Québec);

Association des consommateurs industriels de gaz (ACIG);

Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (section Québec) (FCEI);

Groupe de recherche appliquée en macroécologie (GRAME);

Regroupement des organismes environnementaux en énergie (ROEÉ);

Stratégies énergétiques, Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique et Groupe d'initiatives et de Recherches Appliquées au Milieu (SÉ‑AQLPA-GIRAM);

Union des consommateurs (UC);

Union des municipalités du Québec (UMQ).

 


1.            INTRODUCTION

 

[1]              Le 7 juillet 2017, Société en commandite Gaz Métro (Gaz Métro ou le Distributeur) dépose à la Régie de l’énergie (la Régie) une demande concernant la mise en place de mesures relatives à l’achat et à la vente de gaz naturel renouvelable (GNR). Cette demande est présentée en vertu des articles 31 (5o), 48, 52 et 72 de la Loi sur la Régie de l’énergie[1] (la Loi).

 

[2]              Le 21 juillet 2017, la Régie rend sa décision procédurale D-2017-080[2] dans laquelle est établi le mode procédural qu’elle entend suivre pour examiner la demande.

 

[3]              Le 12 septembre 2017, la Régie rend sa décision procédurale D-2017-097 par laquelle elle suspend temporairement le déroulement procédural du dossier jusqu’au 8 janvier 2018[3].

 

[4]              Le 16 novembre 2017, Gaz Métro dépose à la Régie une demande amendée.

 

[5]              Le 11 janvier 2018, le Distributeur transmet une version réamendée de la demande en raison du changement de dénomination sociale de Société en commandite Gaz Métro par Énergir, s.e.c. (Énergir) annoncé le 29 novembre 2017.

 

[6]              Le 24 janvier 2018, la Régie rend sa décision D-2018-006[4] par laquelle elle fixe un nouvel échéancier relatif à l’obtention du statut d’intervenant. Par cette décision, la Régie demande aux personnes intéressées, dans le cadre de leur demande d’intervention, de commenter notamment l’absence de cadre réglementaire quant à la quantité de GNR déterminée par règlement, ainsi que la priorité à accorder à l’examen de la demande. Énergir est également invitée à commenter ces éléments.

 

[7]              Le 9 février 2018, Énergir transmet un nouvel amendement à sa demande.

 

[8]              Les 14, 15 et 16 février 2018, l’ACEFQ, l’ACIG, la FCEI, le GRAME, le ROEÉ, SÉ-AQLPA-GIRAM, l’UC et l’UMQ déposent des demandes d’intervention accompagnées de budgets de participation.

 

[9]              Le 22 février 2018, Énergir dépose ses commentaires relatifs aux demandes d’intervention, aux budgets de participation et aux questions de la Régie énoncées à sa décision D-2018-006.

 

[10]          Le 27 février 2018, l’ACEFQ répond aux commentaires d’Énergir sur sa demande d’intervention.

 

[11]          Le 7 mai 2018, le Distributeur amende à nouveau sa demande (la Demande) en raison de changements apportés à sa demande de traitement confidentiel de certaines informations contenues dans sa preuve.

 

[12]          La présente décision porte sur les enjeux, les demandes d’intervention, les budgets de participation, la demande de traitement confidentiel et le calendrier de traitement du dossier.

 

 

 

2.            CADRE RÉGLEMENTAIRE

 

[13]          Dans sa décision D-2018-006, la Régie demandait aux personnes intéressées de commenter l’absence de cadre réglementaire complet aux fins du traitement de la Demande.

 

[14]          Énergir reconnaît que le règlement pouvant être adopté par le gouvernement en vertu de l’article 112 (4) de la Loi n’a pas été publié. Elle considère cependant que les cadres légal et réglementaire, ainsi que la preuve soumise dans le présent dossier sont suffisamment étayés pour permettre à la Régie d’exercer pleinement les pouvoirs qui lui sont conférés par la Loi et, ainsi, de statuer sur la Demande.

 


 

[15]          Le Distributeur signale que l’article 5 de la Loi a été modifié en décembre 2016 et qu’il se lit désormais comme suit :

 

« 5. Dans l’exercice de ses fonctions, la Régie assure la conciliation entre l’intérêt public, la protection des consommateurs et un traitement équitable du transporteur d’électricité et des distributeurs. Elle favorise la satisfaction des besoins énergétiques dans le respect des objectifs des politiques énergétiques du gouvernement et dans une perspective de développement durable et d’équité au plan individuel comme au plan collectif ».

 

[le Distributeur souligne]

 

[16]          Le Distributeur soutient que la Régie doit interpréter l’article 5 de la Loi de manière large et libérale. Selon lui, la précision apportée à cet article fait en sorte que l’ensemble des publications gouvernementales en lien avec la Politique énergétique 2030 font partie intégrante du cadre réglementaire s’appliquant à la Régie et que cette dernière doit les considérer lorsqu’elle détermine le cadre réglementaire applicable à une demande.

 

[17]          Énergir soutient que les objectifs et plans d’action gouvernementaux sont très clairs et que la Régie doit en tenir compte. C’est d’ailleurs pourquoi, malgré l’absence d’un règlement adopté en vertu de l’article 112 (4) de la Loi, le Distributeur doit, considérant le libellé de l’article 5, être proactif et proposer des mesures relatives à l’achat et la vente de GNR.

 

[18]          Selon l’ACIG, en l’absence du règlement auquel l’article 112 de la Loi fait référence, le cadre réglementaire relatif au GNR est exactement le même que celui qui s’applique pour les approvisionnements de gaz naturel en général. L’ACIG note que ni l’article 48, ni l’article 52 de la Loi ne font de distinction entre le GNR et le gaz naturel provenant d’autres sources. Elle soutient que la Régie a déjà le pouvoir d’approuver les conditions applicables à l’approvisionnement en GNR et qu’elle dispose de l’autorité juridique requise pour rendre une décision parfaitement valable relativement aux tarifs et autres conditions auxquels le GNR sera fourni, transporté et livré à la clientèle d’Énergir.

 

[19]          La FCEI partage l’interrogation de la Régie quant à l’opportunité de traiter de la Demande en l’absence de cadre réglementaire complet. Elle lui recommande de suspendre l’étude du dossier jusqu’à l’adoption, par le gouvernement, du règlement prévu à la Loi. Puisque les conditions et modalités de l’approvisionnement et de la livraison de GNR seront établies par le règlement, la FCEI estime qu’il serait prématuré de traiter la Demande à ce stade-ci.

 

[20]          Bien que l’obligation relative à la quantité de GNR dont les distributeurs de gaz naturel doivent tenir compte dans leur plan d’approvisionnement n’ait pas encore été déterminée par règlement, le GRAME soutient qu’une cible minimale de 5 % à atteindre d’ici 2020 a été établie par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles dans le Plan d’action de la Politique énergétique 2030. Le GRAME est donc d’avis que la connaissance de cette cible est suffisante pour établir le cadre d’examen de la Demande.

 

[21]          Le ROEÉ considère que la Régie est tenue de traiter la Demande selon l’état du droit actuel, sans spéculation sur l’adoption éventuelle et le contenu d’un règlement sur la quantité de GNR dont les distributeurs de gaz naturel devront tenir compte dans leur plan d’approvisionnement. Selon cette personne intéressée, même en l’absence d’un tel règlement, la Régie a déjà la compétence exclusive et le devoir d’examiner et de décider de la Demande.

 

[22]          L’UC est d’avis que le règlement prévu à la Loi quant à l’achat et la vente de GNR pourrait ne laisser que bien peu de marge de manœuvre à la Régie et aux intervenants pour discuter de la proposition du Distributeur. Par souci d’efficacité, l’UC recommande à la Régie de suspendre le traitement de la Demande jusqu’à l’adoption du règlement et, le cas échéant, la mise à jour de la preuve du Distributeur pour en tenir compte. L’UC est d’avis qu’aucun enjeu majeur n’exige de précipiter l’étude de ce dossier.

 

[23]          L’UMQ est d’avis que la Régie devrait entendre la Demande d’Énergir malgré l’absence de données précises quant à la quantité de GNR que celle-ci devra inclure dans son plan d’approvisionnement. L’UMQ estime qu’il en va du rôle de la Régie de permettre la mise en place de conditions favorables au démarrage d’une filière énergétique souhaitable pour le Québec.

 

Opinion de la Régie

 

[24]          La Régie constate que les articles 48 et 52 de la Loi ne font pas de distinction entre le GNR et le gaz naturel de source fossile. Ainsi, le cadre réglementaire qu’elle doit considérer en l’instance est exactement le même que celui qu’elle utilise habituellement pour examiner les prix, les modalités et les tarifs découlant des autres sources d’approvisionnement en gaz naturel.

[25]          Comme plusieurs l’ont fait remarquer, la position de la Régie depuis la décision RNCREQ c. Régie de l’énergie et al.[5] consiste à étudier les sujets qui doivent l’être en fonction du cadre réglementaire existant au moment de l’examen.

 

[26]          La Régie l’exprimait ainsi dans sa décision D-2013-037[6] :

 

« [34]  Tel que mentionné précédemment, en février 2013, le gouvernement a présenté le Projet de loi à l’Assemblée nationale dans le but de mettre en œuvre la mesure transitoire annoncée dans le Budget, mais il n’a pas encore fait l’objet d’une adoption à ce jour. La Régie doit fixer les tarifs du Distributeur en fonction de la Loi actuellement en vigueur et non en fonction de modifications législatives à venir, d’autant plus qu’elle ne peut présumer de la teneur exacte et spécifique qu’auront les modifications législatives annoncées. À cet égard, la Régie se réfère à la décision du juge Barbeau de la Cour supérieure dans l’affaire RNCREQ c. Régie de l’énergie et al. [note de bas de page omise] :

 

“En l’espèce, à la date de l’audition le Gouvernement n’avait pas encore donné suite au rapport (avis) de la Régie à ce dernier : à quel moment le fera-t-il, personne n’en sait rien. La loi n’ayant pas été modifiée à la date de la décision prononcée, la Régie se devait de l’appliquer; sa juridiction ou compétence n’étant nullement restreinte ni abrogée à ce moment.” ».

 

[nous soulignons] 

 

[27]          Est-ce que l’article 5 de la Loi, tel que modifié depuis décembre 2016, a pour effet de modifier le cadre réglementaire en vertu duquel la Régie doit rendre ses décisions, comme le prétend Énergir?

 

[28]          La réponse à cette question doit être négative.

 

[29]          La jurisprudence de la Régie a établi depuis longtemps que l’article 5 de la Loi n’est pas attributif de compétence, mais qu’il constitue une toile de fond, un énoncé législatif des préoccupations que la Régie doit avoir en tête dans l’exercice de ses fonctions[7]. Par sa décision D-2016-043, la Régie a souligné que l’article 5 de la Loi énonce la façon dont elle doit exercer sa compétence[8].

 

[30]          Tout comme les autres préoccupations mentionnées à l’article 5 de la Loi, le respect des objectifs des Politiques énergétiques sera certainement un facteur dont la Régie tiendra compte en examinant la Demande. Cependant, en l’absence de règlement spécifique relatif au GNR, le cadre réglementaire dans lequel cette dernière s’inscrit repose sur les articles 48 et 52 de la Loi.

 

[31]          Comme le mentionne l’ACIG, ce cadre réglementaire permet de traiter de transactions d’achat de GNR à des fins de revente aux clients du Distributeur. Il donne également l’autorité nécessaire à la Régie pour rendre une décision relative aux tarifs et autres conditions auxquels le GNR est fourni, transporté et livré à la clientèle et ce sont ces sujets, avec leurs caractéristiques, qui seront à l’étude dans le présent dossier. Ils seront cependant étudiés à l’aune des tests déjà mis en place par le cadre réglementaire actuel.

 

 

 

3.            ENJEUX

 

[32]          La Demande d’Énergir vise à élargir l’offre de GNR au Québec et la rendre disponible au plus grand bassin de clients possible. Pour y arriver, deux objectifs sont poursuivis par le Distributeur :

 

1.    pour les clients : faciliter la consommation volontaire de GNR pour les clients intéressés à valoriser cette énergie renouvelable;

2.    pour les producteurs : envoyer un signal de prix aux producteurs, qui encourage la production de GNR[9].

 

[33]          Compte tenu du cadre réglementaire actuel, la Régie considère que le présent dossier porte sur la mise en place d’un tarif et de conditions de service spécifiques visant à permettre et faciliter, pour les clients d’Énergir, l’acquisition volontaire de GNR.

[34]          La Régie estime qu’un des enjeux principaux du présent dossier concerne le traitement du surcoût que les clients participants sont prêts à assumer pour l’achat de GNR. Ce surcoût est lié au mode de production de ce gaz naturel et non à la consommation spécifique de la molécule de GNR.

 

[35]          Par ailleurs, la Régie rappelle que la molécule de GNR est identique à la molécule provenant de source fossile et interchangeable avec celle-ci. Elle estime donc qu’un débat portant sur l’identification de la molécule de gaz naturel réellement consommée par un client souhaitant consommer du GNR, s’il devait être fait, n’est pas pertinent au présent dossier. La Régie ne retient donc pas cet enjeu.

 

[36]          D’autre part, la Régie juge que la nature des intrants utilisés ou le mode de production du GNR ne sont pas pertinents à l’examen des propositions objets du présent dossier. Elle ne retient donc pas cet enjeu.

 

[37]          De la preuve déposée au dossier, la Régie identifie les grands enjeux suivants :

 

           la méthode de calcul du prix d’acquisition du GNR aux fins de l’application du tarif de GNR;

           la fonctionnalisation des coûts encourus par Énergir reliés à l’offre de GNR;

           le suivi des ventes de GNR;

           l’impact des déséquilibres volumétriques de GNR;

           les modifications aux conditions de service reliées à l’offre de GNR;

           les composantes et le cadre contractuel des contrats d’approvisionnement de GNR;

           la durée de vie utile du GNR;

           la création et le mode de disposition de comptes de frais reportés (CFR).

 

[38]          Comme mentionné à la section précédente, la Régie est d’opinion qu’elle doit traiter la Demande en fonction du cadre réglementaire tel qu’il existe présentement. Or, la Demande est plutôt basée sur des assises réglementaires anticipées. La Régie estime que cette discordance d’assise réglementaire pourrait remettre en question la structure même de la Demande.

 

[39]          Dans ces circonstances, elle croit opportun, avant d’examiner précisément la Demande, de bien établir les paramètres et caractéristiques du dossier en étudiant les diverses options de tarifs et de conditions de service relatives à la fourniture, au transport et à la livraison par lesquelles le GNR peut être offert à la clientèle d’Énergir. Par exemple :

 

           fourniture GNR par Énergir de type « tarif GNR » selon la proposition d’Énergir;

           fourniture GNR de type « prix fixes »;

           fourniture de type « Achat direct par la clientèle » où le client peut s’approvisionner:

          directement auprès d’un site de production,

          par un courtier reconnu,

          par une filiale d’Énergir dans des activités non réglementées.

 

[40]          La Régie estime qu’il est important de considérer ces options en fonction des éléments ou des caractéristiques du tarif GNR qui permettent d’assurer le respect de la Loi, plus particulièrement ses articles 31 (1)(2.1) et 52.

 

[41]          Elle devra également tenir compte de :

 

           la détermination des éléments de coûts qui devraient être pris en compte dans le prix de fourniture du GNR;

           la réciprocité des conditions de service entre un service de fourniture de GNR offert par un courtier et le service de fourniture de GNR offert par le Distributeur;

           l’admissibilité au tarif de GNR et les impacts réglementaires.

 

[42]          À ces fins, la Régie convoque une audience les 14 et 15 juin 2018 à 9 h 00 dans la salle Krieghoff de ses bureaux de Montréal afin d’entendre la position des participants sur :

 

           la meilleure option ou le meilleur portefeuille d’options de tarifs et de conditions de service relatifs à la fourniture, au transport et à la livraison par lesquels le GNR peut être offert à la clientèle d’Énergir;

           les éléments ou les caractéristiques du tarif GNR proposé qui permettent d’assurer le respect de la Loi;

           les éléments de coûts à être pris en compte pour le prix de fourniture du GNR, les éléments de réciprocité entre un service offert par un courtier et celui offert par Énergir, ainsi que les conditions d’admissibilité des clients au tarif GNR.

[43]          La Régie demande aux participants de transmettre leur document de réflexion sur les éléments mentionnés au paragraphe précédent d’ici le 31 mai 2018 à 16 h.

 

[44]          La détermination que fera la Régie de ces paramètres et caractéristiques de l’offre en GNR par Énergir pourrait avoir un impact sur les services offerts par les courtiers en gaz naturel et en GNR. En conséquence, la Régie ordonne à Énergir de communiquer par écrit, au plus tard le 11 mai 2018 à 12 h, avec l’ensemble des courtiers qu’elle sait être actifs auprès de sa clientèle afin de leur faire part du dossier, de leur remettre copie de la présente décision et d’en aviser la Régie le même jour. Ces derniers seront autorisés à participer à l’audience prévue les 14 et 15 juin 2018.

 

 

 

4.            RECONNAISSANCE DES INTERVENANTS ET BUDGETS DE PARTICIPATION

 

[45]          L’ACEFQ, l’ACIG, la FCEI, le GRAME, le ROEÉ, SÉ-AQLPA-GIRAM, l’UC et l’UMQ ont déposé des demandes d’intervention conformément au Règlement sur la procédure de la Régie de l’énergie[10] (le Règlement). Comme demandé par la Régie dans sa décision D-2018-006, ces demandes sont accompagnées d’un budget de participation, conformément au Guide de paiement des frais 2012 (le Guide)[11].

 

[46]          L’article 16 du Règlement prévoit que la personne intéressée qui souhaite intervenir dans un dossier doit notamment indiquer les éléments suivants :

 

« […]

 

2° la nature de son intérêt;

3° les motifs à l’appui de son intervention;

4° les sujets dont elle entend traiter et, de façon sommaire, les conclusions qu’elle recherche ou les recommandations qu’elle propose;

[…]

7° s’il y a lieu, sa représentativité ».

[47]          L’article 19 du Règlement mentionne également que :

 

« Lorsque la Régie accorde à la personne intéressée le statut d’intervenant, elle détermine, si elle le juge nécessaire, le cadre de sa participation en fonction de son intérêt, de la nature et de l’importance des enjeux qu’elle aborde, des sujets que la Régie estime pertinents ainsi qu’en fonction de l’intérêt public ».

 

[48]          En application de ces dispositions, la Régie soulignait, dans sa décision D-2014-117, ce qui suit :

 

« [10] En vertu de ces articles, la Régie accorde le statut d’intervenant à une personne intéressée lorsqu’elle juge que la nature de l’intérêt de cette dernière est en lien avec les enjeux prévus au dossier. De plus, elle doit considérer que les représentations de cette personne permettent d’éclairer la Régie dans l’examen du dossier » [12].

 

[49]          La Régie est d’avis que l’ACEFQ, l’ACIG, la FCEI, le GRAME, l’UC et l’UMQ ont démontré un intérêt à intervenir au présent dossier. En conséquence, elle leur accorde le statut d’intervenant.

 

[50]          Cependant, en ce qui concerne l’intervention du GRAME, la Régie limite les sujets dont il pourra traiter à la méthode et aux marchés qui seront privilégiés pour écouler l’inventaire de GNR ainsi qu’au traitement des coûts de gestion des modalités d’adhésion au tarif GNR. Elle enjoint donc le GRAME à ne retenir les services que d’un seul analyste et à réduire le nombre d’heures budgétées pour la préparation de son avocat et de son analyste.

 

[51]          Le ROEÉ présente la nature de son intérêt de la façon suivante :

 

« 20. […] le ROEÉ tient à s’assurer que les modalités du tarif régressif ne permettent pas à certains producteurs de produire sans respecter la hiérarchisation des 3RV.

21. […] notre regroupement tient à assurer qu’une hiérarchisation des 3RV prime sur l’augmentation de la fourniture du gaz naturel renouvelable [note de bas de page omise].

[…]

 30. Le ROEÉ considère qu’une éventuelle proposition mitoyenne qui inclut principalement une tarification volontaire, mais qui inclut aussi une part de socialisation d’éventuels surplus serait plus juste et équitable et favoriserait le développement de la filière de GNR sur le territoire. Le ROEÉ fera donc des recommandations en ce sens »[13].

 

[52]          Tel qu’indiqué précédemment, le présent dossier traite des modalités de mise en place d’un tarif et de conditions de service spécifiques visant à faciliter l’acquisition volontaire de GNR par des clients d’Énergir.

 

[53]          Bien que le développement de la filière de GNR puisse résulter de la mise en place d’un tel tarif, il ne constitue pas l’objectif du présent dossier et n’est donc pas un enjeu pertinent à l’examen de la Demande. Considérant également que le mode de production de GNR n’est pas un enjeu retenu par la Régie dans ce dossier, cette dernière estime que la nature des intérêts exprimés par le ROEÉ n’est pas en lien avec l’éclairage qu’elle recherche. En conséquence, la Régie rejette la demande d’intervention du ROEÉ.

 

[54]          SÉ-AQLPA-GIRAM présente la nature de son intérêt de la façon suivante :

 

« Le modèle d’affaires de tarif de gaz naturel renouvelable (GNR) qu’Énergir propose nous apparaît fondamentalement vicié et nuisible à l’essor du gaz naturel renouvelable (biométhane) au Québec.

 

En effet, Énergir souhaite vendre une partie de son gaz (jusqu’à concurrence du volume total de biométhane qu’elle achète dans son réseau et qui est mêlé à l’ensemble de son gaz) à un prix plus élevé, en qualifiant cette partie de gaz comme étant du biométhane, lui attribuant ainsi une étiquette verte que les clients pourront invoquer à des fins de marketing. La qualification de cette partie de gaz comme étant du biométhane sera toutefois, dans les faits, trompeuse et ne correspondra pas à la composition réelle du gaz.

 

On pourrait ainsi même se retrouver dans des situations où des clients payant ce tarif supplémentaire pourront faussement prétendre être totalement alimenté en gaz naturel renouvelable, même dans les cas où, physiquement, il serait impossible que le gaz ainsi acheté comporte du biométhane, vu la localisation des conduites et la direction du flux.

 

Au mieux, le gaz acheté par ces clients payant un tarif supplémentaire sera de composition identique à l’ensemble du gaz vendu sur le réseau »[14].

 

[55]          Comme mentionné précédemment, l’identification de la provenance de la molécule réellement consommée par un client n’est pas un enjeu retenu au présent dossier. La Régie estime donc que la nature des intérêts exprimés par SÉ-AQLPA-GIRAM n’est pas en lien avec l’éclairage qu’elle recherche. En conséquence, la Régie rejette la demande d’intervention de SÉ-AQLPA-GIRAM.

 

[56]          La Régie note que les budgets de participation soumis par les intervenants reconnus varient entre 13 043 $ et 36 483 $.

 

[57]          Considérant les conclusions de la présente décision quant aux enjeux retenus au dossier, les budgets de participation de certains intervenants devraient être ajustés.

 

[58]          La Régie rappelle que lors de l’octroi des frais, elle jugera du caractère nécessaire et raisonnable des frais encourus et de l’utilité de la participation des intervenants à ses délibérations, selon les critères prévus au Guide.

 

 

 

5.            DEMANDE DE TRAITEMENT CONFIDENTIEL

 

[59]          Le Distributeur demande à la Régie d’interdire, pour une durée indéterminée, la divulgation, la publication et la diffusion des informations caviardées aux pages 34 et 35 de la pièce B-0014, aux pages 1 et 2 de l’annexe 3 ainsi qu’à l’annexe 4 de cette pièce, qui ont été déposées sous pli confidentiel à la pièce B-0015. Cette demande de traitement confidentiel vise également les informations caviardées aux pages 36 et 37 de la pièce B‑0022, aux pages 1 et 2 de l’annexe 3 ainsi qu’à l’annexe 4 de cette pièce, qui ont été déposées sous pli confidentiel à la pièce B-0021.

 

[60]          La demande de traitement confidentiel est soutenue par une déclaration écrite sous serment de M. Vincent Regnault, Directeur, Transport et Approvisionnement gazier chez Énergir.

 

[61]          Aucune personne intéressée au dossier n’a contesté la demande de traitement confidentiel.

 

[62]          Compte tenu de la nature commerciale de certaines de ces informations et des engagements de confidentialité pris par Énergir auprès de ses fournisseurs, la Régie accueille la demande de traitement confidentiel des informations caviardées aux pièces B‑0014 et B-0022 et qui ont été déposées sous pli confidentiel, respectivement, aux pièces B-0015 et B-0021. Cependant, considérant la nature de ces informations, elle limite le traitement confidentiel demandé à une durée de cinq ans à compter de la présente décision.

 

 

 

6.            CALENDRIER

 

[63]          La Régie fixe le calendrier suivant pour la première étape de traitement du dossier.

 

Le 11 mai 2018, à 12 h

Communication de la décision par écrit aux courtiers et confirmation de cette communisation auprès de la Régie


Le 31 mai 2018, à 12 h

Date limite pour le dépôt d’un document de réflexion des participants sur les éléments mentionnés au paragraphe 42 de la décision

Les 14 et 15 juin 2018, dès 9 h

Audience

 

Elle établira ultérieurement les échéances des étapes subséquentes de traitement de la Demande.

 

[64]          Pour ces motifs,

 


 

La Régie de l’énergie :

 

ACCORDE le statut d’intervenant à l’ACEFQ, l’ACIG, la FCEI, le GRAME, l’UC et l’UMQ;

 

REJETTE les demandes d’intervention du ROEÉ et de SÉ-AQLPA-GIRAM;

 

FIXE le calendrier de traitement prévu à la section 6 de la présente décision;

 

INTERDIT pour une durée de cinq ans à compter de la présente décision, la divulgation, la publication et la diffusion des informations caviardées aux pages 34 et 35 de la pièce B‑0014, aux pages 1 et 2 de l’annexe 3 et à l’annexe 4 de cette pièce, qui ont été déposées sous pli confidentiel à la pièce B-0015, ainsi qu’aux pages 36 et 37 de la pièce B-0022, aux pages 1 et 2 de l’annexe 3 et à l’annexe 4 de cette pièce, qui ont été déposées sous pli confidentiel à la pièce B-0021;

 

DONNE les instructions suivantes aux participants :

 

           déposer la documentation écrite par le biais du Système de dépôt électronique de la Régie, conformément aux prescriptions y afférentes,

           transmettre la documentation écrite en 8 copies au Secrétariat de la Régie, avec copie à Énergir,

           transmettre les données chiffrées en format Excel.

 

 

Laurent Pilotto

Régisseur

 

 

Lise Duquette

Régisseur

 

 

Bernard Houle

Régisseur


Représentants :

 

Association coopérative d’économie familiale de Québec (ACEF de Québec) représentée par Me Denis Falardeau;

Association des consommateurs industriels de gaz (ACIG) représentée par Me Guy Sarault;

Énergir, s.e.c. représentée par Me Hugo Sigouin‑Plasse;

Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (section Québec) (FCEI) représentée par Me Pierre-Olivier Charlebois;

Groupe de recherche appliquée en macroécologie (GRAME) représenté par Me Geneviève Paquet;

Regroupement des organismes environnementaux en énergie (ROEÉ) représenté par Me Franklin S. Gertler;

Stratégies énergétiques, Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique et Groupe d'initiatives et de Recherches Appliquées au Milieu (SÉ‑AQLPA-GIRAM) représenté par Me Dominique Neuman;

Union des consommateurs (UC) représentée par Me Hélène Sicard;

Union des municipalités du Québec (UMQ) représentée par Me Catherine Rousseau.

 



[1]        RLRQ, c. R-6.01.

[2]        Pièce A-0002.

[3]        Pièce A-0005.

[4]        Pièce A-0006.

[5]        1999 IIJCAN 11714 (QC CS). Ce jugement a été confirmé par la Cour d’appel le 10 mai 2001 : 2001 CANLII 8985 (QC CA).  

[6]        Dossier R-3814-2012, décision D-2013-037, p. 19.

[7]        Dossier R-3652-2007, décision D-2008-037, p. 7.

[8]        Dossier R-3960-2016, décision D-2016-043, p. 14.

[9]        Pièce B-0022, p. 6.

[12]       Dossier R-3888-2014, décision D-2014-117, p. 6.

[13]       Pièce C-ROEÉ-0002, p. 5 et 7.

[14]       Pièce C-SÉ-AQLPA-GIRAM-0005, p. 2.

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