Régie de l'énergie du Québec

Informations sur la décision

Résumé :

[1] Le 28 août 2015, Société en commandite Gaz Métro (Gaz Métro) dépose à la Régie de l’énergie (la Régie), en vertu de l’article 32 (3.1o) de la Loi sur la Régie de l’énergie (la Loi), une demande de modifications de certaines conventions comptables réglementaires relatives au passage aux principes comptables généralement reconnus (PCGR) des États Unis.

Contenu de la décision

 

québec                                                            régie de l’énergie

 

 

 

D-2015-212

R-3940-2015

21 décembre 2015

 

 

 

 

PRÉSENTS :

 

Diane Jean

Bernard Houle

Simon Turmel

Régisseurs

 

 

Société en commandite Gaz Métro

Demanderesse

 

et

 

Stratégies énergétiques et Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique

Intervenant

 

 

Décision sur le fond

 

Demande de modifications comptables réglementaires relatives au passage aux principes comptables généralement reconnus des États-Unis



TABLE DES MATIÈRES

 

1.     INTRODUCTION.. 6

2.     CONCLUSIONS RECHERCHÉES. 7

3.     CONTEXTE.. 9

4.     COMPTES DE STABILISATION TARIFAIRE DE LA TEMPÉRATURE ET DU VENT.. 11

5.     AVANTAGES SOCIAUX FUTURS. 14

5.1       Méthode actuarielle. 15

5.2       Transition vers la méthode actuarielle. 19

5.3       Date de création des CFR découlant de la modification de la convention comptable réglementaire. 20

5.4       Autres éléments liés à la méthode actuarielle. 22

5.5       Allégement réglementaire pour la période 2015-2017. 26

6.     RÉFÉRENTIEL COMPTABLE.. 27

 


 

Liste des tableaux

 

Tableau 1 Charge 2016 et 2017 selon la méthode actuarielle. 16

Tableau 2 Charge 2016 et 2017 – écarts entre les méthodes actuelle et actuarielle. 16

Tableau 3 Écarts liés à la transition vers la méthode actuarielle. 19

Tableau 4 Actif (passif) au titre des prestations définies 2016 et 2017. 22

Tableau 5 Impacts sur la base de tarification. 23

 


lISTE DES DÉCISIONS

 

Décisions

Dossiers

Nom du dossier

D-2010-020

R-3703-2009

Phase 1

Demande relative à certaines modifications de méthodes comptables

 

 

 

D-2011-028

R-3740-2010

Demande relative à l’établissement des tarifs d’électricité pour l’année tarifaire 2011-2012

D-2011-039

R-3738-2010

Demande de modification des tarifs et conditions des services de transport d’Hydro-Québec au 1er janvier 2011

 

 

 

D-2012-077

R-3773-2011

Demande de modifications de certaines conventions comptables réglementaires et frais des intervenants

 

 

 

D-2013-082

R-3815-2012

Demande de révision de la décision D-2012-077 rendue dans le dossier R‑3773-2011

D-2013-191

R-3840-2013

Phase 3

Plan d’approvisionnement pour l’exercice 2014, tarifs à compter du 1er janvier 2014 et Conditions de service et Tarif de Gazifère inc.

 

 

 

D-2015-175

R-3940-2015

Demande de modifications comptables réglementaires relatives au passage aux principes comptables généralement reconnus des États-Unis

D-2015-181

R-3879-2014

Phases 3 et 4

Demande d’approbation du plan d’approvisionnement et de modification des Conditions de service et Tarif de Société en commandite Gaz Métro à compter du 1er octobre 2014

D-2015-189

R-3927-2015

Demande relative aux modifications de méthodes comptables découlant du passage aux principes comptables généralement reconnus des États-Unis (US GAAP)

1.            INTRODUCTION

 

[1]              Le 28 août 2015, Société en commandite Gaz Métro (Gaz Métro) dépose à la Régie de l’énergie (la Régie), en vertu de l’article 32 (3.1o) de la Loi sur la Régie de l’énergie[1] (la Loi), une demande de modifications de certaines conventions comptables réglementaires relatives au passage aux principes comptables généralement reconnus (PCGR) des États‑Unis.

 

[2]              Le 16 septembre 2015, la Régie affiche sur son site internet un avis invitant les personnes intéressées à lui soumettre une demande d’intervention et un budget de participation. L’avis est publié sur le site internet de Gaz Métro le 17 septembre 2015.

 

[3]              Le 15 octobre 2015, Gaz Métro informe la Régie des implications, sur ses états financiers statutaires, d’une décision rendue après le 31 décembre 2015.

 

[4]              Le 20 octobre 2015, la Régie rend sa décision D‑2015‑175 dans laquelle elle accorde le statut d’intervenant à Stratégies énergétiques et Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (SÉ-AQLPA), circonscrit son intervention à certains sujets et émet des directives sur son budget de participation. Elle fixe également le calendrier de traitement du dossier.

 

[5]              Le 28 octobre 2015, SÉ‑AQLPA et la Régie participent à une séance de travail lors de laquelle Gaz Métro présente les implications de la conversion vers les PCGR des États‑Unis.

 

[6]              Le 30 octobre 2015, Gaz Métro dépose une demande amendée et la pièce révisée B-0012, qui intègre notamment les réponses aux deux engagements souscrits lors de la séance de travail.

 

[7]              Le 9 novembre 2015, Gaz Métro dépose ses réponses aux demandes de renseignements de la Régie et de SÉ‑AQLPA.

 

[8]              Le 16 novembre 2015, SÉ‑AQLPA dépose son mémoire.

 

[9]              Le 25 novembre 2015, SÉ-AQLPA dépose ses réponses à la demande de renseignements de la Régie. Le même jour, Gaz Métro dépose ses réponses à la demande de renseignements numéro 2 de la Régie.

 

[10]          Les 26 et 27 novembre 2015, Gaz Métro et SÉ‑AQLPA déposent leur argumentation. Gaz Métro dépose sa réplique le 30 novembre suivant. La Régie entame son délibéré à cette date.

 

[11]          Dans la présente décision, la Régie se prononce sur la demande de modification de certaines conventions comptables réglementaires découlant du passage aux PCGR des États-Unis.

 

 

 

2.            CONCLUSIONS RECHERCHÉES

 

[12]          Les conclusions recherchées par Gaz Métro sont les suivantes :

 

« Concernant les conventions comptables réglementaires relatives aux comptes de stabilisation tarifaire de la température et du vent

 

APPROUVER une modification à la convention comptable réglementaire afin que la durée d’amortissement des comptes de frais reportés relatifs à la stabilisation tarifaire de la température et du vent soit de 2 ans;

 

APPROUVER que cette modification soit applicable à compter 1er octobre 2016;

 

AUTORISER que ces comptes de frais reportés soient versés dans la base de tarification dès le 1er exercice financier suivant leur capitalisation;

 

AUTORISER que le solde non amorti réel de ces comptes de frais reportés au 30 septembre 2016, excluant les effets prévus de la normalisation de l’exercice 2016, soit versé dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016;

 

AUTORISER que ce solde soit amorti sur 1 an au cours de l’exercice financier de 2017;

Concernant les conventions comptables réglementaires relatives aux avantages sociaux futurs

 

APPROUVER une modification à la convention comptable réglementaire afin que les dépenses reliées aux avantages sociaux futurs soient imputées au coût de service selon la méthode actuarielle plutôt que sur la base des déboursés réels;

 

APPROUVER que cette modification soit applicable à compter du 1er octobre 2016;

 

AUTORISER la création d’un compte de frais reportés dans lequel seront comptabilisés, à compter du 1er octobre 2016, les écarts entre la méthode actuelle (déboursés réels) et la méthode actuarielle à la date de la modification des conventions comptables réglementaires;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit versé, au 1er octobre 2016, dans la base de tarification;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit amorti linéairement sur une période de 20 ans;

 

AUTORISER la création d’un compte de frais reportés dans lequel seront comptabilisés, à compter du 1er octobre 2016, les gains et les pertes actuariels à la date du changement de référentiel comptable et subséquents;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit versé, au 1er octobre 2016, dans la base de tarification;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit amorti selon la méthode du corridor;

 

AUTORISER la création d’un compte de frais reportés dans lequel seront comptabilisés, à compter du 1er octobre 2016, les coûts des services passés à la date du changement de référentiel comptable et subséquents;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit versé, le 1er octobre 2016, dans la base de tarification;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit amorti selon la durée estimative moyenne d’activité des employés du régime au moment où l’adoption ou les modifications aux régimes auront été effectuées;

 

AUTORISER la comptabilisation de l’actif/passif au titre des prestations définies à compter du 1er octobre 2016;

 

AUTORISER l’inclusion, à compter du 1er octobre 2016, de l’actif/passif au titre de prestations définies dans la base de tarification;

 

AUTORISER la création d’un compte de frais reportés dans lequel seront comptabilisés, à compter du 1er octobre 2016, les écarts annuels entre la charge actuarielle prévisionnelle et la charge actuarielle réelle;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit versé dans la base de tarification à compter du deuxième exercice subséquent;

 

AUTORISER que ce compte de frais reportés soit amorti sur une durée d’un an »[2].

 

 

 

3.            CONTEXTE

 

[13]          Gaz Métro a choisi de présenter ses états financiers statutaires selon les normes comptables pré-basculement du Manuel de CPA[3] Canada (Manuel) jusqu’au 30 septembre 2015. Le Manuel ne traitant pas spécifiquement de la comptabilisation des entreprises ayant des activités à tarifs réglementés, Gaz Métro utilise les exigences de l’ASC 980 Regulated operations des PCGR des États-Unis comme source de référence. Ce choix de Gaz Métro découle de l’exemption permise aux entités ayant des activités à tarifs réglementés de reporter l’application des normes internationales d’information financière (IFRS).

 


[14]          La période d’exemption prévue au Manuel étant terminée, Gaz Métro indique qu’elle aurait dû débuter l’application des IFRS à compter du 1er octobre 2015. Cependant, considérant l’incertitude entourant la comptabilisation des activités à tarifs réglementés en vertu des IFRS et les impacts substantiels de l’application de la norme provisoire IFRS 14[4], Gaz Métro, GMi et Valener ont obtenu de nouvelles dispenses des autorités canadiennes en valeurs mobilières qui leur permettent de préparer leurs états financiers consolidés en vertu des PCGR des États‑Unis, jusqu’au 1er janvier 2019.

 

[15]          Gaz Métro soumet que cette décision de présenter les états financiers statutaires en vertu des PCGR des États-Unis a également été prise par plusieurs autres entreprises canadiennes assujetties à la réglementation de leurs tarifs. Selon elle, l’utilisation des PCGR des États‑Unis permet de maintenir la comptabilisation des actifs et passifs réglementaires, de limiter la volatilité sur les résultats financiers consolidés et de restreindre les modifications au niveau de la présentation et des informations à divulguer.

 

[16]          Gaz Métro indique respecter déjà la plupart des exigences des PCGR des États‑Unis. Elle mentionne que leur adoption n’entraînera pas d’impacts quant aux conventions comptables réglementaires, autres que ceux relatifs à la période d’amortissement des comptes de stabilisation tarifaire de la température et du vent et ceux relatifs au traitement des avantages sociaux futurs, lesquels font l’objet de la présente demande.

 

[17]          Les modifications réglementaires proposées au présent dossier entreraient en vigueur à partir du 1er octobre 2016, soit pour l’établissement des tarifs de l’exercice financier 2017. Gaz Métro indique que les méthodes actuelles sont maintenues aux fins de l’établissement des tarifs 2016, alors que les méthodes proposées seront utilisées à partir du 1er octobre 2015 pour les états financiers statutaires. Elle explique cette différence d’un an par son choix de déposer les présentes demandes dans un dossier distinct du dossier tarifaire 2016, celui-ci étant déjà chargé et comportant un échéancier serré.

 

 

 


4.            COMPTES DE STABILISATION TARIFAIRE DE LA TEMPÉRATURE ET DU VENT

 

[18]          Gaz Métro propose de modifier la convention comptable réglementaire relative aux comptes de frais reportés liés à la stabilisation tarifaire de la température et du vent (CFR de stabilisation) afin de l’harmoniser avec celle utilisée aux fins des états financiers statutaires. Selon le traitement réglementaire actuel, les CFR de stabilisation sont amortis sur une période de cinq années, à compter du 2e exercice financier subséquent à leur constatation.

 

[19]          Gaz Métro indique qu’en vertu des PCGR des États-Unis, une portion des sommes capitalisées dans les CFR de stabilisation entre dans le champ d’application des Alternative revenue Programs de la norme ASC 980 Regulated operation. Selon cette norme, les sommes peuvent être capitalisées dans un CFR seulement si elles sont récupérées dans les 24 mois suivant la fin de l’année de leur constatation.

 

[20]          Dans le cas où le traitement réglementaire actuel était maintenu, Gaz Métro affirme qu’elle devrait décomptabiliser une portion des CFR aux fins des états financiers statutaires dressés selon les PCGR des États-Unis, ce qui entraînerait une différence au niveau du bénéfice comptable.

 

[21]          Gaz Métro demande donc d’approuver, à compter du 1er octobre 2016, une durée d’amortissement de deux ans pour les CFR de stabilisation. Elle demande également l’autorisation de les inclure dans la base de tarification, dès le 1er exercice financier suivant leur capitalisation.

 

[22]          Pour les CFR de stabilisation au 30 septembre 2016, Gaz Métro demande l’autorisation de verser le solde non amorti dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016, en excluant les effets prévus de la normalisation de l’exercice 2016, et d’amortir ce solde sur une période d’un an, au courant de l’exercice 2017.

 


[23]          Questionnée sur l’éventualité d’un choc tarifaire important, Gaz Métro mentionne la possibilité de répartir l’impact sur une plus longue période, tout en maintenant l’harmonisation entre la comptabilité réglementaire et la comptabilité statutaire. Cette solution consiste à comptabiliser deux CFR, soit :

 

        un CFR portant sur la portion des Alternative revenue programs correspondant à des coûts spécifiques encourus, qui serait amorti sans limites spécifiques;

        un CFR portant sur la portion des Alternative revenue programs ne correspondant pas à des coûts spécifiques encourus, qui serait amorti sur une période de 24 mois suivant sa constatation.

 

[24]          Gaz Métro ne souhaite pas que cette solution ponctuelle et exceptionnelle soit pratique courante, puisqu’elle alourdirait indûment les processus comptables actuels.

 

[25]          SÉ-AQLPA soumet que le choix de la période d’amortissement devrait refléter à la fois le principe d’équité intergénérationnelle et celui de la justesse du signal de prix transmis aux consommateurs. L’intervenant considère qu’il serait souhaitable non seulement que les écarts entre les revenus réels et prévus soient alloués à la génération de clients qui y sont associés, mais qu’ils soient également alloués, autant que possible, de manière à transmettre le bon signal de prix au moment même où de tels écarts surviennent. 

 

[26]          Bien qu’il reconnaît que la proposition de Gaz Métro répond au principe d’équité intergénérationnelle, SÉ-AQLPA fait valoir que l’idéal serait d’appliquer un cavalier tarifaire à chaque mois, afin d’intégrer aux tarifs les écarts de revenus causés par des températures et des vents anormaux, à mesure que la saison progresse. Une telle rapidité fournirait un signal de prix presque immédiat aux consommateurs.

 

[27]          Questionné à cet égard, l’intervenant indique qu’il peut être « contre-intuitif » qu’un hiver plus froid ou plus venteux que la normale climatique puisse contribuer à faire diminuer la facture d’un client. Cependant, cette diminution doit être comprise dans le contexte global où l’hiver plus froid ou plus venteux que la normale se traduit également par deux facteurs haussiers, soit une consommation et des coûts en gaz, en transport et en équilibrage également plus élevés.

 


[28]          SÉ-AQLPA recommande donc que les CFR de stabilisation soient récupérés selon la période la plus rapide possible, soit en temps réel d’un ou deux mois après la constatation des écarts. Subsidiairement, si cette proposition n’est pas accueillie, l’intervenant propose que les soldes de ces comptes soient récupérés dans les tarifs de l’année suivante ou subsidiairement amortis sur deux ans tel que proposé par Gaz Métro.

 

Opinion de la Régie

 

[29]          La Régie partage les préoccupations de SÉ-AQLPA à l’égard de l’équité intergénérationnelle et du signal de prix. Il importe cependant d’évaluer la faisabilité technique des recommandations de l’intervenant ainsi que leurs impacts sur les tarifs.

 

[30]          D’une part, la Régie considère que l’application de la recommandation de l’intervenant serait complexe et se traduirait par une volatilité plus importante des tarifs, ce qui serait susceptible de brouiller le signal de prix recherché. De plus, la proposition de Gaz Métro est équitable d’un point de vue intergénérationnel. La Régie ne retient donc pas la recommandation de SÉ-AQLPA.

 

[31]          La Régie constate que les modifications proposées par Gaz Métro pour les CFR de stabilisation permettent d’harmoniser la comptabilité réglementaire et statutaire. De plus, la réduction de la durée d’amortissement permet de diminuer le coût de financement des CFR. Toutefois, la Régie reconnaît qu’une récupération ou une remise plus rapide des CFR de stabilisation pourrait augmenter la variabilité tarifaire entre les exercices financiers.

 

[32]          À cet égard, la Régie prend acte du fait qu’une solution alternative permettrait de répartir les impacts tarifaires sur une plus longue période tout en maintenant l’harmonisation de la comptabilité réglementaire et statutaire.

 

[33]          Pour ces motifs, la Régie approuve une modification à la convention comptable réglementaire afin que la durée d’amortissement des CFR relatifs à la






stabilisation tarifaire de la température et du vent soit de deux ans, à compter du 1
er octobre 2016. Elle autorise également que les sommes cumulées dans ces CFR soient versées dans la base de tarification dès le 1er exercice financier suivant leur capitalisation.

 

[34]          De plus, la Régie autorise Gaz Métro à verser dans la base de tarification, à compter du 1er octobre 2016, le solde non amorti réel de ces CFR au 30 septembre 2016, excluant les effets prévus de la normalisation de l’exercice 2016, et son amortissement sur un an au cours de l’exercice financier 2017.

 

 

 

5.            AVANTAGES SOCIAUX FUTURS

 

[35]          La demande de modification de méthodes comptables réglementaires liées aux avantages sociaux futurs porte sur les régimes de retraite à prestations déterminées et le régime d’assurances collectives offert aux employés retraités.

 

[36]          Gaz Métro indique que, conformément aux lois applicables, les régimes de retraite des employés syndiqués et des employés cadres sont capitalisés. Des actifs sont ainsi accumulés par l’entremise d’une société distincte. Le régime complémentaire de retraite des cadres exécutifs et le régime d’assurances collectives des employés retraités ne sont pas capitalisés. L’obligation de Gaz Métro au titre des prestations définies est établie en fonction de la valeur actuarielle des prestations futures attribuées aux services rendus par les employés, selon les dispositions des différents régimes.

 

[37]          Aux fins réglementaires, la convention comptable utilisée par Gaz Métro est une combinaison de deux méthodes, soit la méthode actuarielle du Manuel pour la charge liée au régime complémentaire de retraite des cadres exécutifs et la méthode des déboursés pour la charge liée aux autres régimes.

 


[38]          Aux fins statutaires, Gaz Métro concilie la charge établie selon les PCGR du Canada avec celle établie aux fins réglementaires. La différence est constatée à titre d’actif réglementaire (frais reportés) ou passif réglementaire (crédits reportés), selon le cas.

 

[39]          Gaz Métro indique qu’en vertu des PCGR des États‑Unis[5], les coûts liés aux avantages sociaux futurs doivent être comptabilisés selon la méthode actuarielle. Cette méthode permet d’attribuer généralement une part égale du total estimatif des prestations futures à chacune des années de service entre la date d’engagement d’un salarié et la date de son admissibilité à la retraite.

 

[40]          Gaz Métro fait valoir les avantages d’une telle méthode actuarielle en termes d’équité intergénérationnelle, de stabilité tarifaire, de baisse moyenne du coût de service et de pérennité. Selon elle, cette méthode permettra également une meilleure comparabilité des états financiers entre les pairs canadiens et évitera le maintien de deux jeux d’états financiers.

 

[41]          À cet égard, Gaz Métro mentionne que les PCGR des États‑Unis ne permettent pas la création d’un CFR lié au régime d’assurances collectives si la méthode des déboursés est utilisée pour établir les tarifs. Le maintien de la méthode des déboursés entraînerait un écart significatif entre les états financiers réglementaires et statutaires, qu’elle évalue à 80 M$ au niveau des actifs au 31 décembre 2015[6].

 

 

5.1        Méthode actuarielle

 

[42]          Gaz Métro demande à la Régie de modifier la convention comptable réglementaire afin que les dépenses liées aux avantages sociaux futurs soient imputées au coût de service selon la méthode actuarielle plutôt que sur la base des déboursés réels.

 


[43]          Le coût de chacune des composantes lié aux avantages sociaux futurs en 2016 et 2017 selon les PCGR des États-Unis, est estimé par Gaz Métro comme suit :

 

Tableau 1
charge 2016 et 2017 selon la méthode actuarielle

 

Tableau établi à partir de la pièce B-0022, annexe E. Les écarts observés sont dus aux arrondis.

 

[44]          Pour 2016 et 2017, les écarts entre la charge établie selon la méthode actuarielle et la méthode actuelle sont établis par Gaz Métro comme suit :

 

Tableau 2
charge 2016 et 2017 – écarts entre les méthodes actuelle et actuarielle

 

Tableau établi à partir de la pièce B-0022, annexe E. Les écarts observés sont dus aux arrondis.

 

[45]          Gaz Métro demande également l’autorisation de créer deux CFR et de les verser dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016 pour comptabiliser les écarts actuariels et le coût des services passés. Les CFR seraient amortis selon la méthode du corridor pour les écarts actuariels et de façon linéaire sur la durée estimative moyenne d’activité des employés du régime pour le coût des services passés.

 

[46]          Les gains et pertes actuariels sont générés par la non-réalisation ou des modifications aux hypothèses actuarielles et sont reflétés dans l’actif, ou le passif selon le cas, au titre des prestations définies. La contrepartie est présentée à titre de CFR pour Gaz Métro, étant donné ses activités à tarifs réglementés[7], sauf pour les autres avantages complémentaires de retraite dont les coûts sont récupérés dans les tarifs en fonction de la méthode des déboursés. Dans ce cas, la contrepartie est présentée dans le cumul des autres éléments du résultat étendu[8].

 

[47]          Selon la méthode du corridor, les écarts actuariels qui excèdent 10 % de l’actif ou de l’obligation, selon le plus élevé des deux, sont amortis sur la durée estimative restante de la carrière active du groupe de salariés. Les gains et pertes actuariels nets en deçà du corridor de 10 % ne sont sujets à aucun amortissement.

 

[48]          La comptabilisation du coût des services passés est semblable à celle liée aux écarts actuariels, à l’exception du fait que le coût est amorti de façon linéaire sur la durée estimative moyenne d’activité des employés du régime.

 

[49]          SÉ-AQLPA recommande à la Régie d’énoncer et de déterminer que les dépenses reliées aux avantages sociaux futurs de Gaz Métro sont imputées au coût de service selon la méthode actuarielle plutôt que sur la base des déboursés réels.

 

[50]          L’intervenant est d’avis que le contexte d’incertitude entourant l’acceptation des actifs et passifs réglementaires sous le référentiel des IFRS est susceptible d’exister encore très longtemps. Selon lui, cette incertitude ne peut justifier le maintien de la méthode des déboursés approuvée par la Régie dans sa décision D-2013-082[9].

 

[51]          SÉ-AQLPA soumet que le passage à la méthode actuarielle devrait être accepté pour ses mérites propres. Il juge cette méthode plus logique et équitable entre les générations, puisqu’elle correspond à une comptabilité moderne basée sur les causes réelles durant chaque exercice financier.

 


Opinion de la Régie

 

[52]          Bien que la méthode actuarielle soit plus complexe que la méthode des déboursés, la Régie lui reconnaît plusieurs avantages. La méthode actuarielle permet de constater le coût des avantages offerts aux employés lorsqu’ils rendent les services donnant droit à ces avantages. Cette méthode permet également de répartir dans le temps le coût des avantages sociaux futurs.

 

[53]          Par ailleurs, la Régie a reconnu la pertinence d’utiliser la méthode actuarielle lorsqu’elle a approuvé son application pour Hydro-Québec dans ses activités de transport et de distribution, notamment dans sa récente décision D-2015-189[10].

 

[54]          Pour ces motifs, la Régie approuve une modification à la convention comptable réglementaire afin que les dépenses liées aux avantages sociaux futurs soient imputées au coût de service selon la méthode actuarielle déterminée par les PCGR des États‑Unis, à compter du 1er octobre 2016.

 

[55]          La Régie autorise donc les éléments suivants, qui découlent de l’application de la méthode actuarielle :

 

        la création d’un CFR afin de comptabiliser les gains et pertes actuariels à la date du changement de référentiel comptable et subséquents;

        l’amortissement des gains et pertes actuariels selon la méthode du corridor;

        la création d’un CFR dans lequel seront comptabilisés les coûts des services passés à la date du changement de référentiel comptable et subséquents;

        l’amortissement des coûts des services passés sur la durée estimative moyenne d’activité des employés du régime au moment où l’adoption ou les modifications aux régimes auront été effectuées.

 


[56]          La demande de Gaz Métro d’inclure les CFR dans la base de tarification au 1er octobre 2016 est traitée à la section 5.4.

 

 

5.2        Transition vers la méthode actuarielle

 

[57]          Gaz Métro demande l’autorisation de créer un CFR et de le verser dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016 afin de récupérer l’écart cumulé entre la méthode actuarielle et la méthode actuelle, qui s’est créé depuis l’entrée en vigueur des régimes, incluant ceux attribuables à l’exercice financier 2016. Gaz Métro propose que le CFR lié à la transition vers la méthode actuarielle soit amorti linéairement, sur une période de 20 ans.

 

[58]          Gaz Métro indique que l’écart cumulé représente les droits de prestation acquis par les employés avant la date de changement de référentiel comptable pour lesquels les cotisations et primes d’assurances n’ont pas encore été récupérées dans les tarifs. Selon elle, ces coûts ne seraient pas inclus dans les tarifs en fonction de la méthode actuarielle sans la création et l’amortissement d’un CFR lié à l’année de transition.

 

[59]          Gaz Métro établit l’écart cumulé lié à l’année de transition comme suit :

 

Tableau 3
Écarts liés à la transition vers la méthode actuarielle

 

Tableau établi à partir de la pièce B-0022, annexes D et E. Les écarts observés sont dus aux arrondis.

 


Opinion de la Régie

 

[60]          La Régie constate que depuis la création des régimes, les sommes récupérées dans les tarifs sont supérieures aux coûts des droits acquis pour les régimes de retraite, alors qu’elles sont insuffisantes pour les avantages offerts aux employés retraités au niveau des assurances collectives. La preuve démontre que, sans la création et l’amortissement d’un CFR lié à la transition, le montant estimé de 45 M$ ne serait pas inclus dans les tarifs futurs, puisque la méthode actuarielle sera appliquée à compter du 1er octobre 2016.

 

[61]          La Régie considère que le montant lié à la transition de la méthode basée sur les déboursés vers la méthode actuarielle est nécessaire à la prestation du service de distribution, au même titre que les salaires ou les vacances.

 

[62]          Pour ces motifs, la Régie autorise la création d’un CFR dans lequel seront comptabilisés les écarts cumulés entre la méthode basée sur les déboursés et la méthode actuarielle, à la date de la modification des conventions comptables réglementaires. Elle autorise l’amortissement du CFR lié à la transition vers la méthode actuarielle de façon linéaire sur une période de 20 ans.

 

[63]          La demande de Gaz Métro d’inclure le CFR dans la base de tarification au 1er octobre 2016 est traitée à la section 5.4.

 

 

5.3        Date de création des CFR découlant de la modification de la convention comptable réglementaire

 

[64]          Gaz Métro demande à la Régie la création de divers CFR en lien avec le passage de la méthode basée sur les déboursés à la méthode actuarielle déterminée selon les PCGR des États-Unis. La présente section vise la date de création de trois CFR qui découlent de la modification de la convention comptable réglementaire, soit les CFR relatifs à la comptabilisation des écarts entre l’application de la méthode basée sur les déboursés et la méthode actuarielle, les gains et pertes actuariels, ainsi que les coûts des services passés à la date du changement de référentiel comptable.

 


[65]          Tel que mentionné précédemment, Gaz Métro préparera ses prochains états financiers statutaires sur la base des PCGR des États-Unis, lesquels sont appliqués depuis le 1er octobre 2015. Toutefois, elle maintiendra les méthodes actuelles aux fins de l’établissement des tarifs jusqu’au 30 septembre 2016.

 

[66]          Dans sa décision D-2015-189, la Régie indique :

 

« [186] Dans une décision subséquente, Bell Canada c. Bell Aliant [note de bas de page omise], la Cour suprême du Canada confirme également le caractère non rétroactif pour la disposition des sommes incluses dans un compte de report. Cette décision précise qu’une fois le compte de report approuvé, il fait partie des tarifs finaux, même si les sommes qu’il capte sont incertaines et imprécises. Ainsi, la Cour est d’avis que le pouvoir de déterminer leur utilisation postérieure est accessoire au pouvoir de les créer et que la décision ultérieure sur la disposition des sommes qui y sont incluses n’a pas d’effet rétroactif ». [nous soulignons]

 

[67]          Elle ajoute également :

 

« [210] D’autre part, pour déterminer si les sommes captées dans un CFR ont une portée rétroactive, rétrospective ou prospective, il n’est pas opportun de considérer la période pendant laquelle elles seront disposées dans les tarifs des consommateurs, mais plutôt la période au cours de laquelle ces sommes sont constatées. Si cette dernière est antérieure à la date de la décision finale, celle-ci a une portée rétroactive, peu importe le moment où ces sommes seront finalement portées aux tarifs des consommateurs, contrairement à ce que peut prétendre SÉ‑AQLPA ».

 

[68]          À la lumière de la décision précitée, un CFR ne peut capter de sommes encourues avant sa création. Afin d’éviter toute problématique liée à la rétroactivité, la Régie est d’avis qu’il est nécessaire que les trois CFR visés par la présente section soient créés à compter du 1er octobre 2015 de façon à capter les impacts découlant des modifications de conventions comptables réglementaires liés aux avantages sociaux futurs.

 

[69]          La date de création d’un CFR est généralement celle de la décision qui le crée, ou encore une date ultérieure.

 

[70]          Considérant le contexte factuel particulier du présent dossier, la Régie reconnaît le caractère prospectif de la demande, celle-ci ayant été déposée le 28 août 2015, soit antérieurement à la date retenue pour la création des CFR. Dès le dépôt du dossier, la Régie était saisie d’une demande de modifications comptables réglementaires à compter de la date du changement de référentiel.

 

[71]          Dans ce contexte, la Régie autorise, à compter du 1er octobre 2015, la création des trois CFR découlant de la modification de convention comptable réglementaire liée aux avantages sociaux futurs.

 

 

5.4        Autres éléments liés à la méthode actuarielle

 

[72]          Gaz Métro demande l’autorisation de comptabiliser l’actif (passif) au titre des prestations définies (ATPD / PTPD) et de le verser dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016.

 

[73]          Pour 2016 et 2017, Gaz Métro établit comme suit l’ATPD / PTPD selon les PCGR des États‑Unis :

 

Tableau 4
Actif (passif) au titre des prestations définies 2016 et 2017

 

Tableau établi à partir de la pièce B-0022, annexe D. Les écarts observés sont dus aux arrondis.

 

[74]          Gaz Métro fait valoir que tous les éléments de la méthode actuarielle sont reliés et représentent un tout indissociable. Selon elle, l’inclusion des CFR et de l’ATPD / PTPD dans la base de tarification répond au critère d’utilité et participe à l’établissement de tarifs justes et raisonnables, au sens de l’article 49 de la Loi. Sans cette inclusion et l’amortissement dans le coût de service, Gaz Métro soumet qu’elle ne sera pas en mesure de récupérer les sommes nécessaires pour assumer le coût de la prestation du service.

 

[75]          Gaz Métro établit les impacts sur la base de tarification comme suit :

 

Tableau 5
Impacts sur la base de tarification

 

Tableau établi à partir de la pièce B-0012, annexe C et de la pièce B-0022, annexe D. Les écarts observés sont dus aux arrondis.

 

[76]          Selon Gaz Métro, l’inclusion du solde de – 10,9 M$ à la base de tarification au 1er octobre 2016 est justifiée par le fait qu’il représente une composante monétaire. Il s’agit de la différence entre les sommes récupérées dans les tarifs selon la méthode actuarielle et les sommes qu’elle a versées.

 

[77]          En considérant le rendement sur la base de tarification, les impôts et tous les éléments faisant l’objet de la demande d’approbation ou d’autorisation, Gaz Métro évalue l’impact net sur le coût de service à – 1,3 M$ en 2017. Pour la période 2017-2021, Gaz Métro évalue l’impact annuel moyen à - 6,1 M$, sur la base des hypothèses actuarielles utilisées au présent dossier[11].

 

[78]          Dans le cas où la Régie refusait les modifications comptables proposées au présent dossier, le montant total de 118,9 M$ lié aux CFR pour les assurances collectives serait présenté dans le cumul des autres éléments du résultat étendu. Au 1er octobre 2016, l’effet net sur l’avoir des associés passerait de -10,9 M$ à – 129,8 M$[12].

 

Opinion de la Régie

 

[79]          Selon Gaz Métro, sa demande doit être acceptée dans son ensemble afin qu’elle demeure cohérente, ce qui implique l’autorisation d’inclure les CFR et l’ATPD / PTPD dans la base de tarification, à compter du 1er octobre 2016.

 

[80]          La Régie ne partage pas l’avis de Gaz Métro selon lequel la demande doit être acceptée dans sa totalité pour être cohérente. Certes, dans le cas où l’inclusion dans la base de tarification était autorisée, ce sont tous les éléments demandés qui devraient y être versés. La question qui demeure est l’inclusion ou non dans la base de tarification.

 

[81]          Au présent dossier, la preuve démontre que sur cinq entreprises comparables à Gaz Métro, trois n’incluent pas les différents éléments dans leur base de tarification, tout en utilisant la méthode actuarielle déterminée selon les PCGR des États‑Unis aux fins réglementaires[13]. Pour ces trois entreprises, il est légitime de considérer que le traitement réglementaire est cohérent puisqu’il devrait normalement générer des tarifs justes et raisonnables. Ainsi, certaines orientations différentes pourraient être retenues par la Régie, si elle le jugeait à propos.

 

[82]          La Régie a déjà reconnu la pertinence d’inclure le solde net lié aux avantages sociaux futurs dans les bases de tarification du transporteur d’électricité[14] et du distributeur d’électricité[15], lorsque le coût lié aux avantages sociaux futurs était déterminé selon les PCGR du Canada. Cependant, le contexte peut mener à une opinion différente. Pour ces raisons, la Régie juge nécessaire de procéder à un examen plus détaillé de la question afin de rendre une décision éclairée.

 


[83]          La Régie considère que la preuve au dossier n’est pas suffisante pour lui permettre d’évaluer la pertinence d’inclure ou de ne pas inclure dans la base de tarification l’ATPD / PTPD nets des CFR. À cet égard, elle se questionne notamment sur les raisons qui justifient la non-inclusion dans la base de tarification pour trois entreprises sur cinq comparables à Gaz Métro et s’il y a un lien avec le fait qu’un pourcentage des écarts actuariels (10 %) ne sera jamais amorti dans le coût de service.

 

[84]          À cet égard, la Régie souligne que l’article 50 de la Loi prévoit que la juste valeur des différents éléments à inclure dans la base de tarification doit être évaluée au coût d’origine, soustraction faite de l’amortissement.

 

[85]          Ce sont là autant de questionnements qui militent en faveur de poursuivre l’examen de la demande d’inclusion ou non des différents éléments dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016. 

 

[86]          La Régie souligne que le calendrier du traitement du dossier, établi de manière serrée afin que la présente décision soit rendue avant le 31 décembre 2015, n’est pas étranger à cette situation.

 

[87]          Pour ces motifs, la Régie renvoie, dans le cadre du dossier tarifaire 2017, l’examen de la demande de Gaz Métro d’inclure, dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016, l’ATPD / PTPD net du solde non amorti des CFR liés à la transition, aux écarts actuariels et aux coûts des services passés.

 

[88]          Par ailleurs, la Régie est d’avis que la demande d’autorisation pour comptabiliser l’ATPD / PTPD est directement liée à son inclusion dans la base de tarification. À cet égard, la preuve démontre que les composantes de l’ATPD / PTPD sont déjà comptabilisées aux états financiers statutaires dressés selon les PCGR du Canada. De plus, à la suite du passage aux PCGR des États‑Unis et considérant la présente décision, seule la présentation au bilan sera différente, pour les soldes non amortis des écarts actuariels et de coûts des services passés[16].

 


[89]          Conséquemment, la Régie ne juge pas nécessaire d’autoriser la comptabilisation de l’ATPD / PTPD pour les fins réglementaires, à ce stade-ci.

 

 

5.5        Allégement réglementaire pour la période 2015-2017

 

[90]          Dans sa décision D-2015-181 rendue dans le cadre des dossiers tarifaires 2015 et 2016, la Régie autorisait la neutralisation des ajustements liés aux régimes de retraite pour la période d’application de la méthode d’allégement réglementaire, soit 2015 à 2017. Ainsi, advenant que le niveau de cotisation et d’ajustements réels de la période diffère de ceux constatés au 30 septembre 2014, Gaz Métro utiliserait les lettres de crédit pour couvrir les écarts prévisionnels[17].

 

[91]          Gaz Métro mentionne que l’utilisation des lettres de crédit permet de neutraliser les écarts de prévisions associés au traitement comptable réglementaire actuel qui est basé sur les déboursés. Or, selon les dispositions de la présente décision, la méthode basée sur les déboursés ne sera plus appliquée pour l’établissement des tarifs 2017.

 

[92]          Pour maintenir l’objectif de neutralité des impacts liés aux écarts de prévision, Gaz Métro demande la création d’un CFR, hors base de tarification et portant rémunération, pour comptabiliser les écarts de prévision à compter du 1er octobre 2016. Ce CFR serait inclus à la base de tarification et amorti sur un an dans le coût de service du 2e exercice subséquent.

 

Opinion de la Régie

 

[93]          La demande d’autorisation d’un CFR pour comptabiliser les écarts entre le montant prévu et le montant réel pour la charge établie selon la méthode actuarielle ne découle pas du passage aux PCGR des États-Unis, bien qu’elle soit présentée au présent dossier. Il s’agit d’une pratique réglementaire qui aurait pu être envisagée dans le cadre du dossier tarifaire 2017, afin de remplacer l’utilisation des lettres de crédit.

 


[94]          La Régie constate que l’utilisation des lettres de crédit permet de neutraliser les écarts de prévisions associés au traitement comptable réglementaire lorsque celui-ci est basé sur les déboursés. Or, cette méthode ne sera plus appliquée pour les tarifs 2017, selon les dispositions de la présente décision.

 

[95]          Dans ses décisions antérieures, la Régie a autorisé à maintes reprises l’utilisation d’un CFR pour capter les écarts prévisionnels au niveau des avantages sociaux futurs[18].

 

[96]          Considérant le caractère imprévisible et incontrôlable des coûts liés aux avantages sociaux futurs, la Régie juge opportun de neutraliser l’impact des écarts de prévision sur le trop-perçu ou le manque à gagner au terme d’un exercice financier.

 

[97]          Pour ces motifs, la Régie autorise la création d’un CFR hors base de tarification et portant rendement, à compter du 1er octobre 2016, pour capter les écarts de prévision liés au coût des avantages sociaux futurs. Elle autorise également l’inclusion du CFR – Écarts prévisionnels dans la base de tarification du 2e exercice subséquent afin qu’il soit amorti sur un an.

 

 

 

6.            RÉFÉRENTIEL COMPTABLE

 

[98]          Selon Gaz Métro, les modifications réglementaires qu’elle propose demeurent applicables en vertu des PCGR du Canada, des États-Unis et des IFRS. De plus, elle soumet que sa demande n’est pas de nature provisoire puisqu’elle prévoit conserver les traitements proposés, peu importe le référentiel comptable qu’elle devra appliquer dans le futur. D’ailleurs, Gaz Métro indique n’avoir aucune intention d’adopter les IFRS tant que ce référentiel comptable ne permettra pas une présentation adéquate de la réalité économique des entreprises ayant des activités à tarifs réglementés.

 


[99]          Pour ce qui est du référentiel comptable utilisé aux fins réglementaires, Gaz Métro indique ne pas rechercher de conclusion visant la détermination des PCGR des États-Unis comme étant son « référentiel de la comptabilité régulatoire ». Elle fait valoir que l’article 32 de la Loi ne requiert pas une telle détermination par la Régie :

 

« 19. En effet, Gaz Métro est d’avis que les « méthodes » au sens de la Loi ne font pas directement référence au référentiel comptable appliqué par un distributeur, mais font plutôt référence aux façons d’appliquer les traitements réglementaires requis en fonction de ce référentiel. 

 

20. Prétendre autrement ferait en sorte que Gaz Métro devrait présenter une nouvelle demande à la Régie advenant qu’elle se convertisse éventuellement aux IFRS (dans la mesure où ceux-ci reconnaissent les effets des activités à tarifs réglementés) puisqu’elle changerait de référentiel, et ce, même si cela pourrait ne pas être requis autrement si les conventions réglementaires en vigueur étaient arrimées »[19].

 

[100]     Dans le cas où les conventions comptables réglementaires étaient arrimées avec un nouveau référentiel comptable, Gaz Métro est d’avis qu’une demande d’autorisation pour utiliser ce nouveau référentiel alourdirait le processus réglementaire, considérant qu’une telle demande n’est pas requise selon la Loi.

 

[101]     Par ailleurs, il se pourrait que le référentiel comptable utilisé par Gaz Métro évolue dans les années à venir sans pour autant que les conventions comptables réglementaires y étant associées évoluent au même rythme.

 

[102]     Gaz Métro indique ne pas voir d’avantage, en pratique, à l’approbation d’un référentiel comptable. Toutefois, dans la mesure où la Régie jugeait nécessaire de statuer sur cet élément pour rendre une décision sur la présente demande, Gaz Métro soumet que la preuve versée au dossier lui permet d’approuver les PCGR des États-Unis à titre de référentiel comptable aux fins de sa comptabilité réglementaire.

 


[103]     SÉ-AQLPA invite la Régie à « énoncer » et « déterminer », conformément à l’article 32 de la Loi, que les PCGR des États-Unis (et les choix effectués en vertu de ceux-ci et toute éventuelle exception énoncés et déterminés par la Régie) constituent le référentiel de la comptabilité réglementaire de Gaz Métro devant la Régie.

 

[104]     L’intervenant soumet que la Régie n’a jamais expressément « énoncé » et « déterminé », dans ses décisions antérieures sur les basculements de référentiels comptables, que le nouveau référentiel constituait le référentiel comptable réglementaire de l’assujetti.

 

[105]     SÉ‑AQLPA souligne l’argumentation de Gaz Métro qui soutient que cela :

 

« « ferait en sorte que Gaz Métro devrait présenter une nouvelle demande à la Régie advenant qu’elle se convertisse éventuellement aux IFRS (dans la mesure où ceux-ci reconnaissent les effets des activités à tarifs réglementés) puisqu’elle changerait de référentiel, et ce, même si cela pourrait ne pas être requis autrement si les conventions réglementaires en vigueur étaient arrimées », ce qui selon elle « alourdirait indûment le processus réglementaire » ».

 

[106]     SÉ-AQLPA ne considère pas souhaitable que Gaz Métro puisse basculer vers les IFRS en comptabilité réglementaire, sans demander à la Régie de rendre une décision à cet effet. L’intervenant indique que les normes contenues à chaque référentiel comptable s’expriment au moyen de textes complexes et nuancés. Selon lui, une éventuelle reconnaissance des actifs et passifs réglementaires de façon permanente sous les IFRS se ferait au moyen de texte normatif propre à ce référentiel et ne serait pas une copie des PCGR des États-Unis.

 

Opinion de la Régie

 

[107]     L’article 32 de la Loi prévoit que la Régie peut déterminer les méthodes comptables et financières applicables à Gaz Métro :

 

« 32. La Régie peut de sa propre initiative ou à la demande d’une personne intéressée:

 

1° déterminer le taux de rendement du transporteur d'électricité, du distributeur d’électricité ou d’un distributeur de gaz naturel;

2° déterminer la méthode d’allocation du coût de service applicable au transporteur d’électricité ou au distributeur d’électricité ou à un distributeur de gaz naturel;

 

3° énoncer des principes généraux pour la détermination et l’application des tarifs qu'elle fixe;

 

3.1° déterminer, pour le transporteur d’électricité, le distributeur d’électricité et chaque distributeur de gaz naturel les méthodes comptables et financières qui leur sont applicables;

 

4° (paragraphe abrogé) ». [nous soulignons]

 

[108]     À cet égard, la Régie a apporté quelques précisions et émis certains principes, notamment, dans sa décision D‑2010‑020 :

 

« [53] La Régie considère important de poursuivre la ligne directrice établie dans ses décisions antérieures et de maintenir, comme assise première, la compatibilité des méthodes comptables utilisées pour la fixation des tarifs avec les conventions comptables reconnues. Toutefois, en conformité avec les pouvoirs qui lui sont dévolus en vertu de la Loi, des adaptations ou modifications de ces règles peuvent être retenues par la Régie si elle le juge nécessaire aux fins d’établir des tarifs justes et raisonnables ». [nous soulignons]

 

[109]     Dans sa décision D-2012-077, la Régie indique également que :

 

« [79] La Régie reconnaît que l’absence d’une norme spécifique relative à la comptabilisation des actifs et passifs réglementaires, sous le référentiel des IFRS, est un des principaux facteurs qui a mené Gaz Métro à choisir les PCGR américains comme référentiel comptable [note de bas de page omise].

 

[80] Bien que la Régie puisse établir un référentiel comptable réglementaire différent du référentiel comptable utilisé pour préparer les états financiers statutaires de Gaz Métro, elle ne retient pas la proposition de statu quo de l’UMQ. La Régie considère important de s’assurer que les méthodes comptables utilisées pour fins réglementaires soient, dans la mesure du possible, similaires aux conventions comptables utilisées pour les états financiers statutaires. Dans le présent cas, la Régie constate que la méthode actuarielle est une convention comptable qui est reconnue selon les PCGR américains ».

[110]     Conséquemment, la Régie reconnaît que les principes, méthodes et règles utilisés par Gaz Métro pour établir les valeurs de son coût de service reposent sur :

 

        les normes comptables utilisées aux fins des états financiers statutaires, sauf exception;

        exceptionnellement, les PCGR du Canada pour 2016; et

        les décisions de la Régie.

 

[111]     Considérant ce qui précède, la Régie demande à Gaz Métro de lui présenter, dans le cadre des prochains dossiers tarifaires, les changements aux normes comptables en vigueur qui s’appliquent à ses états financiers statutaires, lorsque ces modifications peuvent avoir un impact sur la détermination de son coût de service. À cet égard, la Régie précise qu’une demande d’autorisation est toujours requise pour modifier les méthodes utilisées aux fins réglementaires visées à l’article 32 de la Loi.

 

[112]     Pour ces motifs,

 

La Régie de l’énergie :

 

APPROUVE une modification à la convention comptable réglementaire à compter du 1er octobre 2016, afin que la durée d’amortissement des comptes de frais reportés relatifs à la stabilisation tarifaire de la température et du vent soit de deux ans;

 

AUTORISE que les comptes de frais reportés relatifs à la stabilisation tarifaire de la température et du vent soient versés dans la base de tarification dès le 1er exercice financier suivant leur capitalisation;

 

AUTORISE que le solde non amorti réel de ces comptes de frais reportés au 30 septembre 2016, excluant les effets prévus de la normalisation de l’exercice 2016, soit versé dans la base de tarification à compter du 1er octobre 2016;

 

AUTORISE que ce solde soit amorti sur un an au cours de l’exercice financier 2017;

 

APPROUVE une modification à la convention comptable réglementaire afin que les dépenses liées aux avantages sociaux futurs soient imputées au coût de service selon la méthode actuarielle déterminée, à compter du 1er octobre 2016;

AUTORISE les éléments suivants, lesquels découlent de l’application de la méthode actuarielle :

        la création d’un CFR, à compter du 1er octobre 2015, afin de comptabiliser les gains et pertes actuariels à la date du changement de référentiel comptable et subséquents;

        l’inclusion de l’amortissement des gains et pertes actuariels selon la méthode du corridor, dans le coût de service à compter du 1er octobre 2016;

        la création d’un CFR, à compter du 1er octobre 2015, dans lequel seront comptabilisés les coûts des services passés à la date du changement de référentiel comptable et subséquents;

        l’inclusion dans le coût de service à compter du 1er octobre 2016, de l’amortissement du coût des services passés sur la durée estimative moyenne d’activité des employés du régime au moment où l’adoption ou les modifications aux régimes auront été effectuées;

        la création d’un CFR, à compter du 1er octobre 2015, dans lequel seront comptabilisés les écarts entre la méthode basée sur les déboursés et la méthode actuarielle, cumulés jusqu’à la date de la modification des conventions comptables réglementaires; et

        l’inclusion dans le coût de service à compter du 1er octobre 2016, de l’amortissement du CFR lié à la transition vers la méthode actuarielle de façon linéaire sur une période de 20 ans.

 

RENVOIE au dossier tarifaire 2017, l’examen de la demande d’inclure dans la base de tarification au 1er octobre 2016 l’ATPD / PDTD, net du CFR – transition, CFR – écarts actuariels et CFR – coût des services passés;

 

AUTORISE la création d’un CFR, hors base de tarification et portant rendement, à compter du 1er octobre 2016, pour capter les écarts de prévision liés au coût des avantages sociaux futurs;

 

AUTORISE l’inclusion du CFR – écarts prévisionnels dans la base de tarification du 2e exercice subséquent afin qu’il soit amorti sur un an;

 


ORDONNE à Gaz Métro de se conformer à l’ensemble des autres éléments décisionnels contenus dans la présente décision.

 

 

 

 

 

Diane Jean

Régisseur

 

 

 

 

 

Bernard Houle

Régisseur

 

 

 

 

 

Simon Turmel

Régisseur

 


Représentants :

 

Société en commandite Gaz Métro représentée par Me Marie Lemay Lachance;

Stratégies énergétiques et Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (SÉ-AQLPA) représenté par Me Dominique Neuman.



[1]        RLRQ, c. R-6.01.

[2]        Pièce B-0011.

[3]        Comptables professionnels agréés.

[4]        Comptes de report réglementaires.

[5]        PCGR des États-Unis, selon la décision D-2015-189, par. 128 : ASC 715 Compensation – Retirement      benefits et ASC 712 Compensation-Nonretirement Postemployment Benefits.

[6]        Pièce B-0008, p. 2.

[7]        Pièce B-0012, p. 18.

[8]        Pièce B-0016, p. 28.

[9]        Par. 114.

[10]       Par. 139.

[11]       Pièce B-0012, annexe C.

[12]       Pièce B-0016, p. 28.

[13]       Pièce B-0012, annexe B.

[14]       Décision D-2011-039, p. 62. Base de tarification du transporteur pour la période 2009-2011.

[15]       Décision D-2011-028, p. 97. Base de tarification du distributeur d’électricité pour la période 2009-2011.

[16]       Pièce B-0016, p. 24 et 28.

[17]       Décision D-2015-181, par. 296 et 298.

[18]       Décisions D-2011-028, D-2011-039 et D-2013-191, respectivement pour HQD, HQT et Gazifère.

[19]       Pièce B-0030.

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