Régie de l'énergie du Québec

Informations sur la décision

Résumé :

[1] Le 21 janvier 2015, Société en commandite Gaz Métro (Gaz Métro ou le Distributeur) dépose à la Régie de l’énergie (la Régie) une demande afin d’obtenir l’autorisation requise pour réaliser les projets d’investissement visant l’amélioration et le renforcement des réseaux de transmission de l’Estrie et du Saguenay. Cette demande est présentée en vertu de l’article 73 (1°) de la Loi sur la Régie de l’énergie (la Loi) et du Règlement sur les conditions et les cas requérant une autorisation de la Régie de l’énergie (le Règlement).

Contenu de la décision

 

QUÉBEC                                                                             RÉGIE DE L’ÉNERGIE

 

 

                                                 

D-2015-118

R-3919-2015

22 juillet 2015

 

 

 

 

 

PRÉSENTE :

 

Françoise Gagnon

Régisseur

 

 

 

Société en commandite Gaz Métro

Demanderesse

 

et

 

Intervenants dont les noms apparaissent ci-après

 

 

Décision finale

 

Demande relative à des projets d’investissement visant l’amélioration et le renforcement des réseaux de transmission de l’Estrie et du Saguenay

 



Intervenants :

 

Association des consommateurs industriels de gaz (ACIG);

Stratégies énergétiques et Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (SÉ-AQLPA).


1.            DEMANDE

 

[1]             Le 21 janvier 2015, Société en commandite Gaz Métro (Gaz Métro ou le Distributeur) dépose à la Régie de l’énergie (la Régie) une demande afin d’obtenir l’autorisation requise pour réaliser les projets d’investissement visant l’amélioration et le renforcement des réseaux de transmission de l’Estrie et du Saguenay. Cette demande est présentée en vertu de l’article 73 (1°) de la Loi sur la Régie de l’énergie[1] (la Loi) et du Règlement sur les conditions et les cas requérant une autorisation de la Régie de l’énergie[2] (le Règlement).

 

[2]             En suivi de la décision D‑2013‑192[3], le Distributeur dépose également une analyse des critères de conception et d’opération du réseau gazier et demande à la Régie d’en prendre acte.

 

[3]             Le 27 janvier 2015, la Régie publie un avis aux personnes intéressées sur son site internet. Le lendemain, Gaz Métro informe la Régie qu’elle a également procédé à l’affichage du même avis sur son site internet, tel que demandé.

 

[4]             Le 3 février 2015, SÉ-AQLPA dépose une demande d’intervention, accompagnée d’un budget de participation. Le même jour, la Conférence régionale des élus du Saguenay-Lac-Saint-Jean transmet à la Régie ses observations écrites, sous forme de lettre d’appui au projet. Le 4 février 2015, l’ACIG dépose une demande d’intervention ainsi qu’un budget de participation.

 

[5]             Le 19 février 2015, la Régie rend sa décision procédurale D‑2015‑011. Elle accorde le statut d’intervenant à l’ACIG et à SÉ-AQLPA et fixe la procédure et le calendrier de traitement de la demande de Gaz Métro. De plus, la Régie accueille la demande de traitement confidentiel du Distributeur relative aux coûts des projets pour l’Estrie et le Saguenay, apparaissant respectivement au tableau 6 de la pièce B‑0008 et au tableau 8 de la pièce B‑0010[4].

 


[6]             Le 26 février 2015, la Régie tient une séance de travail avec Gaz Métro et les intervenants. Le Distributeur y présente, notamment, le rapport de la firme Artelys portant sur le débit horaire de référence et celui de la firme KPMG-SECOR relatif aux prévisions des besoins additionnels en gaz naturel pour la période 2015-2024. Il présente également les solutions recommandées pour les réseaux de l’Estrie et du Saguenay ainsi que les autres mesures envisagées.

 

[7]             Le 11 mars 2015, la Régie et les intervenants transmettent leurs demandes de renseignements (DDR) à Gaz Métro. Le Distributeur répond à ces DDR le 30 mars 2015.

 

[8]             Le 7 avril 2015, Gaz Métro dépose la pièce révisée B‑0035 relative aux critères de conception et d’opération du réseau de gaz naturel.

 

[9]             Le 9 avril 2015, la Régie transmet une deuxième DDR à Gaz Métro. Le Distributeur y répond le 21 avril 2015.

 

[10]         Le 16 avril 2015, la Régie et Gaz Métro transmettent leurs DDR à l’ACIG. L’intervenante y répond le 22 avril 2015.

 

[11]         Le 22 avril 2015, à la lumière des réponses reçues aux DDR, la Régie reporte le dépôt des argumentations à une date ultérieure.

 

[12]         Le 19 mai 2015, la Régie transmet une lettre à Gaz Métro dans laquelle elle fait part de ses préoccupations relatives à la construction d’un nouveau poste de compression à La Tuque. Elle annonce également qu’elle tiendra une audience afin de donner la possibilité à Gaz Métro de répondre à ses préoccupations et d’apporter tout autre élément de preuve que le Distributeur juge nécessaire.

 

[13]         Le 27 mai 2015, Gaz Métro dépose une demande amendée (la Demande) dans laquelle elle requiert de la Régie de prendre acte du retrait du projet d’investissement visant le renforcement du réseau de transmission de l’Estrie et du fait que Gaz Métro redéposera, au moment opportun, une nouvelle demande d’investissement à cet égard.

 

[14]         À cette même date, le Distributeur dépose également les pièces révisées B‑0044, B‑0045, B‑0046 et B‑0047.

 

[15]         Le 28 mai 2015, la Régie informe les participants que l’audience aura lieu le 10 juillet 2015.

 

[16]         Le 12 juin 2015, la Régie transmet une troisième DDR à Gaz Métro. Le Distributeur y répond le 25 juin 2015.

 

[17]         L’audience portant sur le projet d’investissement visant l’amélioration et le renforcement du réseau de transmission du Saguenay (le Projet) a lieu le 10 juillet 2015. La Régie entame son délibéré le même jour, à la suite de la réponse de Gaz Métro à l’engagement no 1.

 

[18]         La présente décision porte sur les conclusions recherchées par Gaz Métro, selon la demande amendée du 27 mai 2015 :

 

« ACCUEILLIR la présente demande;

 

[…]

 

PRENDRE ACTE du retrait de la demande d’investissement visant le renforcement du réseau de transmission de l’Estrie et du fait que Gaz Métro redéposera au moment opportun une nouvelle demande d’investissement à cet égard;

 

AUTORISER Gaz Métro à réaliser le projet d’investissement visant l’amélioration et le renforcement du réseau de transmission du Saguenay, tel que décrit à la pièce Gaz Métro-1, Document 3 [le Projet];

 

AUTORISER Gaz Métro à créer un compte de frais reportés, portant intérêts, où seront accumulés les coûts du Projet;

 

PRENDRE ACTE de la réponse de Gaz Métro au suivi requis par la Régie dans sa décision D-2013-192 (par. 92) et S’EN DÉCLARER SATISFAITE;

 

[…] ».


2.            cadre rÉglementaire

 

[19]         En vertu de l’article 73 de la Loi, Gaz Métro doit obtenir l’autorisation de la Régie, aux conditions et dans les cas qu’elle fixe par règlement, pour acquérir, construire ou disposer des immeubles ou des actifs destinés à la distribution de gaz naturel.

 

[20]         Gaz Métro doit obtenir une autorisation spécifique et préalable de la Régie lorsque le coût global d’un projet est égal ou supérieur à 1,5 M$, conformément aux dispositions du Règlement.

 

 

 

3.            Description de la demande - réseau du Saguenay

 

3.1             mise en contexte, Justification et objectifs

 

[21]         Gaz Métro demande à la Régie l’autorisation de réaliser le Projet. Le Distributeur mentionne que le réseau du Saguenay présente des enjeux de capacité à l’horizon 2024. Ces enjeux sont établis à partir de la pression minimale contractuelle convenue avec TransCanada Pipelines Limited (TCPL) comme suit :

 

Tableau 1

Capacité du réseau de transmission du Saguenay à l’horizon 2024

 

Source : tableau établi à partir de la pièce B-0009, p. 3, 4, 7 et 8.

 


[22]         Gaz Métro présente les principes qui l’ont guidée dans le présent dossier, soit :

 

       l’obligation légale de desservir;

       l’intérêt public et le développement économique et environnemental;

       la position concurrentielle favorable à la croissance de la demande en gaz naturel;

       la sécurité du réseau et de l’approvisionnement.

 

[23]         Elle soumet qu’un réseau saturé menace non seulement la sécurité d’approvisionnement des clients existants mais constitue également un obstacle important à l’acquisition de nouveaux clients. Selon elle, une telle situation est contraire à l’esprit de la Loi et au texte, entre autres, des articles 5, 77 et 78.

 

[24]         Gaz Métro cite l’article 5 de la Loi qui stipule que :

 

« Dans l’exercice de ses fonctions, la Régie assure la conciliation entre l’intérêt public, la protection des consommateurs et un traitement équitable du transporteur d’électricité et des distributeurs. Elle favorise la satisfaction des besoins énergétiques dans une perspective de développement durable et d’équité au plan individuel comme au plan collectif ».

 

[25]         Le Distributeur soumet également avoir l’obligation de desservir toute personne qui en fait la demande, en vertu des articles 77 et 78 de la Loi :

 

« 77. Un distributeur de gaz naturel est tenu de fournir et de livrer le gaz naturel à toute personne qui le demande dans le territoire desservi par son réseau de distribution.

 

Dans ce territoire, il doit en outre recevoir, transporter et livrer au consommateur qui lui en fait la demande, le gaz naturel acquis d’un tiers par ce consommateur et destiné à être consommé par ce dernier ou lorsque la demande est faite par un courtier en gaz naturel agissant en son nom propre, celui d’un producteur ou d’un consommateur.

 


78. Une personne intéressée non desservie par un réseau de distribution de gaz naturel peut demander à la Régie d’ordonner à un distributeur de gaz naturel d’étendre son réseau de distribution dans le territoire où s’exerce son droit exclusif.

 

Elle peut également demander à la Régie de recommander au gouvernement d’étendre le territoire où s’exerce le droit exclusif d’un distributeur de gaz naturel et d’ordonner à ce distributeur d’étendre son réseau de distribution ».

 

[26]         Gaz Métro indique privilégier des solutions qui répondent à la demande des clients existants et des nouveaux clients plutôt que celles visant à réduire la demande.

 

[27]         Selon le Distributeur, le renforcement du réseau permettra à la clientèle actuelle, sur les portions de réseau saturé, de jouir de conditions de desserte équivalentes (par exemple, accès aux tarifs de distribution à débit stable et possibilité d’ajout de charge) à celles de la clientèle des tronçons non saturés. Ce renforcement permettra également à de nouveaux clients de profiter du gaz naturel.

 

[28]         Gaz Métro soumet que ces nouveaux clients pourront réduire leur utilisation de sources d’énergie plus polluantes dans la plupart des cas. Ainsi, la disponibilité ou l’accessibilité du gaz naturel est dans l’intérêt public parce qu’il contribue à améliorer le bilan environnemental, économique et énergétique à travers son territoire exclusif de distribution.

 

[29]         Selon le Distributeur, le gaz naturel jouit d’une position concurrentielle enviable et favorable par rapport aux autres sources d’énergie et cette tendance se maintiendra assurément à moyen terme. Il doit donc trouver des solutions permanentes qui prennent en compte la croissance de la demande.

 

[30]         Gaz Métro fait valoir qu’il est essentiel de trouver des solutions permanentes et fiables qui assurent la sécurité du réseau ainsi que l’approvisionnement de ses clients. De plus, les critères de conception et d’opération du réseau doivent être respectés.

 


[31]         Dans sa recherche de solutions, Gaz Métro allègue qu’elle doit avoir une vision à long terme puisqu’elle planifie des investissements majeurs sur un réseau de transmission. De plus, elle juge nécessaire d’avoir une capacité excédentaire qui va au‑delà des besoins futurs anticipés.

 

[32]         Gaz Métro fait valoir que la disponibilité du gaz naturel est un élément critique dans la décision d’investissement d’un client important désirant s’implanter au Québec. Selon elle, les délais de réalisation d’un nouveau projet de renforcement ainsi que l’incertitude liée à l’approbation éventuelle de la Régie à l’égard de ce projet pourraient constituer un obstacle majeur au financement du Projet et, par le fait même, à sa viabilité économique.

 

[33]         En somme, Gaz Métro présente les objectifs visés par le Projet comme suit :

 

       respecter l’obligation de desservir les clients existants et les nouveaux clients qui en font la demande;

       assurer la sécurité d’approvisionnement des clients existants;

       assurer le respect des mesures requises découlant de la Stratégie de gestion des actifs[5].

 

[34]         Gaz Métro mentionne que la démarche d’amélioration continue reliée à la Stratégie de gestion des actifs l’a menée à retenir les services de quatre experts afin de déposer le présent dossier à la Régie.

 

[35]         La firme KPMG-SECOR a été retenue afin de réaliser une étude économique sur l’évaluation des besoins additionnels de gaz naturel pour les réseaux de l’Estrie et du Saguenay, pour la période 2015 à 2024. KPMG-SECOR a également participé à la projection de la demande horaire de référence établie par la firme Artelys, en identifiant les probabilités et les volumes associés aux gains de nouveaux clients et aux pertes potentielles de grands clients actuels à l’horizon 2024.

 


[36]         La firme Artelys a été retenue pour la détermination du débit horaire de référence et la projection du débit horaire à l’horizon 2024. De plus, Artelys a révisé deux autres critères de conception et d’opération du réseau.

 

[37]         La firme Det Norske Veritas (DNV-GL) a été retenue afin d’analyser les critères de conception et d’opération du réseau utilisés par Gaz Métro qui permettent de déterminer la capacité horaire maximale d’un tronçon ou d’un réseau de transmission.

 

[38]         Finalement, les services de monsieur Jeff D. Makholm, de la firme NERA, ont été retenus afin d’obtenir son opinion sur la façon de récupérer les coûts associés aux projets d’investissements.

 

 

3.2             historique et description du réseau du Saguenay

 

[39]         Au début des années 1980, les subventions versées par les deux paliers de gouvernement ont permis la réalisation de grandes expansions de réseaux. C’est en 1984 que Gaz Inter-Cité Québec a reçu l’autorisation de prolonger le réseau de transmission du Saguenay.

 

[40]         A l’époque, un montant d’environ 230 M$ provenait d’une entente spécifique avec le gouvernement fédéral pour la construction de l’embranchement du Saguenay. Selon Gaz Métro, les réseaux de transmission disposaient de capacité suffisante, puisqu’ils avaient été conçus avec un excédent de capacité. Cependant, compte tenu d’un manque de données historiques, Gaz Métro n’a pu retracer l’excédent de capacité lors de la conception du réseau du Saguenay.

 

[41]         L’embranchement du réseau du Saguenay, d’une longueur de 363 km, alimente 13 postes de livraison du réseau qui eux alimentent des réseaux de distribution. Depuis l’installation des compresseurs en 1986, la pression de ce réseau de transmission est assurée à l’aide du poste de compression installé à Saint-Maurice, qui permet d’obtenir une pression maximale de 6 350 kPa à la sortie du compresseur, aux conditions de pression minimale contractuelles de TCPL (4 000 kPa en amont du poste).

 


[42]         De l’avis de Gaz Métro, ces installations de transport ne sont aucunement comparables aux installations de distribution proprement dites, tant au niveau des installations elles-mêmes qu’au niveau de leur exploitation. Selon le Distributeur, cet embranchement s’apparente davantage aux embranchements des réseaux de transport de TCPL et de TransQuébec & Maritimes Pipeline Inc. (TQM). D’ailleurs, cet embranchement devait, à l’origine, faire partie intégrante du réseau de TQM.

 

 

3.3             Solution recommandée

 

[43]         Afin de solutionner les enjeux de capacité sur le réseau de transmission du Saguenay et de rencontrer les objectifs visés, Gaz Métro recommande de mettre à niveau le poste de compression de Saint-Maurice et d’ajouter un nouveau poste de compression à La Tuque.

 

[44]         Compte tenu du délai associé à l’implantation de la solution recommandée, deux autres mesures temporaires sont également nécessaires, soit :

 

       continuer d’utiliser la pression de 4 650 kPa de l’entente conclue avec TCPL (la pression temporaire) à l’entrée du poste de compression de Saint‑Maurice;

       démarrer le deuxième compresseur de Saint-Maurice durant les pointes hivernales.

 

[45]         Gaz Métro mentionne que ces mesures temporaires sont exceptionnellement acceptables sur une courte période. Elles ne devraient pas être utilisées comme substitut au renforcement du réseau pour assurer la sécurité d’approvisionnement au Saguenay. Quant à la pression à l’entrée du poste de Saint‑Maurice, le Distributeur indique avoir une entente avec TCPL pour obtenir une pression de livraison supérieure à la pression minimale contractuelle de 4 000 kPa jusqu’au 31 mars 2017. Ainsi, la sécurité d’approvisionnement des clients est satisfaite jusqu’en 2017.

 


[46]         Selon Gaz Métro, l’utilisation de la pression temporaire de 4 650 kPa plutôt que la pression minimale contractuelle de 4 000 kPa ferait augmenter la capacité horaire de 13 000 m3/h. De plus, le démarrage du deuxième compresseur, combiné à la pression temporaire de 4 650 kPa, ferait augmenter la capacité horaire du réseau de 9 500 m3/h.

 

[47]         La mise à niveau du poste de compression de Saint-Maurice permettrait d’obtenir une capacité horaire de 142 600 m3/h, avec une pression temporaire de 4 650 kPa, ou de 140 000 m3/h avec la pression minimale contractuelle de 4 000 kPa. L’ajout d’un nouveau poste de compression à La Tuque ferait augmenter la capacité horaire du réseau à 174 000 m3/h[6].

 

[48]         Le graphique suivant présente la solution recommandée pour le réseau de transmission du Saguenay.

 

Graphique 1

Solution recommandée pour le réseau du Saguenay

 

                Source : pièce B-0046, p. 11.

 


[49]         Questionnée à cet effet, Gaz Métro présente le débit horaire en fonction du nombre d’heures d’utilisation pour l’année 2024, à partir de la répartition du réel de 2014. Pour les mois d’octobre 2023 à mars 2024, il y aurait une heure d’utilisation au débit horaire de 152 487 m3/h, quatre heures au débit horaire de 142 600 m3/h et 260 heures au débit horaire de 129 500 m3/h[7]

 

 

3.3.1                Mise à niveau du poste de compression de Saint‑Maurice

 

[50]         La mise à niveau du poste de compression de Saint-Maurice comporte un volet visant l’amélioration du réseau et un volet visant le renforcement du réseau.

 

[51]         Le poste de compression de Saint-Maurice possède deux compresseurs électriques qui sont situés dans un même bâtiment. Advenant une panne de courant ou un événement incontrôlable, tel qu’un feu dans le bâtiment, les deux compresseurs ne seraient plus disponibles. À cet effet, Gaz Métro mentionne qu’il existe un historique de problèmes électriques où les deux compresseurs n’ont pu être utilisés pendant une certaine période de temps.

 

[52]         Gaz Métro indique que le niveau de risque a été évalué au-delà du seuil de tolérance par rapport à ses valeurs d’affaires. De plus, elle doit mettre à niveau le poste de compression de Saint-Maurice afin de respecter les exigences associées à ces critères de conception et d’opération du réseau.

 

[53]         Ainsi, afin d’assurer l’intégrité et la fiabilité du réseau ainsi que le respect des critères de conception et d’opération du réseau, Gaz Métro recommande d’ajouter un compresseur de secours au gaz naturel dans un autre bâtiment. En réponse aux DDR, le Distributeur précise que les travaux de mise à niveau seraient requis, même s’il n’y avait aucun besoin additionnel de capacité à l’horizon 2024.

 


[54]         Gaz Métro propose également d’augmenter le ratio de compression des compresseurs électriques actuels, ce qui permettrait d’atteindre la pression maximale d’opération de la conduite de transmission en utilisant simultanément les deux compresseurs électriques.

 

[55]         La mesure temporaire recommandée pour l’hiver 2016-2017 serait d’utiliser un seul compresseur électrique modifié, alimenté par la pression temporaire de 4 650 kPa, tout en démarrant les deux compresseurs électriques, afin de passer d’un compresseur à l’autre rapidement.

 

 

3.3.2                Ajout d’un poste de compression à La Tuque

 

[56]         Pour répondre au débit horaire projeté pour l’hiver 2023-2024, estimé à 152 487 m3/h, Gaz Métro mentionne qu’un poste de compression, comprenant un compresseur fonctionnant à l’électricité et un autre au gaz naturel, devrait être ajouté et installé à l’embranchement qui alimente la ville de La Tuque. Ce poste de compression permettrait d’augmenter une deuxième fois la pression dans la conduite et, conséquemment, d’obtenir la pression nécessaire en bout de réseau pour alimenter les clients.

 

 

3.3.3                Évaluation de l’aspect technique de la solution recommandée

 

[57]         Afin d’évaluer l’aspect technique de la solution qu’elle propose, Gaz Métro indique l’avoir comparée aux solutions préconisées par les autres compagnies gazières en Amérique du Nord pour augmenter la capacité de leurs réseaux de transmission saturés.

 

[58]         Selon Gaz Métro, les pratiques de TCPL pour augmenter la capacité de ses réseaux consistent à ajouter des stations de compression. C’est de cette manière que s’est développé le réseau de TCPL au Canada et au Québec. Au fil des années, TCPL a systématiquement installé des stations de compression le long de son réseau, à environ tous les 100 à 200 km. TCPL a d’ailleurs procédé à de tels investissements au Québec ces dernières années, en construisant la station de compression de Lachenaie pour augmenter la capacité de TQM.

 

[59]         Corporation Champion Pipeline Ltée, filiale à part entière de Gaz Métro, a aussi procédé de cette façon, il y a quelques années, pour augmenter la capacité de son réseau en Abitibi. Une station de compression a été installée à Earlton et le projet avait préalablement été accepté par l’Office national de l’énergie.

 

[60]         Gaz Métro a aussi comparé l’option de doublage de conduite par rapport à la solution d’ajout d’un poste de compression. Ainsi, en prenant l’exemple du poste de compression de La Tuque, pour égaler l’ajout de capacité de ce poste de compression de 34 000 m3/h, un doublage de 160 km aurait été requis, au coût estimé de 275 M$. En considérant le besoin additionnel de capacité à l’horizon 2024, soit 12 487 m3/h, Gaz Métro estime que 43 km de doublage serait requis, au coût estimé à environ 80 M$[8].

 

[61]         Gaz Métro indique également avoir évalué les pratiques des compagnies gazières américaines lors d’une rencontre du comité Distribution Construction Maintenance and Operation (DCMO) de l’Association Américaine du Gaz (AGA) sur lequel elle siège à titre de compagnie membre. Elle mentionne que les 60 compagnies gazières présentes ont affirmé préconiser la solution d’ajouter des stations de compression pour augmenter la capacité de leurs réseaux de transmission. Quelques compagnies ont mentionné s’être dotées de fardiers de gaz naturel liquéfié (GNL) qu’elles utiliseraient en cas d’urgence seulement, à la suite de bris de conduite, pour tenter de maintenir, si possible, l’alimentation d’une partie de la clientèle. Selon le Distributeur, cette solution n’est toutefois pas utilisée pour solutionner des enjeux de capacité de réseaux de transmission saturés.

 

 

3.4             solution ALTERNATIVE

 

[62]         Gaz Métro a analysé une solution alternative qui consiste à mettre à niveau le poste de compression de Saint-Maurice et construire et opérer une station de vaporisation de GNL à Jonquière et Alma, plutôt que d’ajouter un poste de compression à La Tuque.

 


[63]         L’utilisation du GNL permettrait d’augmenter la capacité du réseau de 7 000 m3/h pour Jonquière et 6 500 m3/h pour Alma. Cette solution permettrait d’atteindre une capacité de 153 500 m3/h à l’horizon 2024.

 

[64]         En cours d’examen du dossier, Gaz Métro a raffiné ses analyses quant à cette solution, soit celle qui comprend l’utilisation du GNL pour faire de l’écrêtement de pointe aux postes de livraison de Jonquière et d’Alma, en raison des questions et préoccupations soulevées par la Régie.

 

[65]         Le Distributeur indique avoir comparé le projet d’approvisionner le Saguenay en GNL avec d’autres projets d’alimentation en GNL, dont les projets d’alimentation en GNL de Gaz Métro Solution Transports, de la Société des Traversiers du Québec, de Stornoway, des générateurs d’électricité de pointe et des distributeurs gaziers en Nouvelle‑Angleterre[9].

 

[66]         Gaz Métro conclut que la solution alternative présentée initialement ne permettrait pas d’assurer la sécurité d’approvisionnement, en raison d’une capacité d’entreposage qui permettrait la vaporisation de seulement 36 % des volumes annuels de GNL prévus.

 

[67]         Le Distributeur indique avoir acquis beaucoup de connaissances dans les derniers mois sur l’approvisionnement des clients en GNL. Il constate que pour assurer la sécurité d’approvisionnement des besoins de pointe, il est essentiel de prévoir un volume d’entreposage pouvant approvisionner la totalité des besoins fermes anticipés.

 

[68]         Gaz Métro mentionne que l’enjeu particulier à l’utilisation du GNL pour desservir le Saguenay n’est pas uniquement relié en soi à son utilisation, mais plutôt au profil de consommation imprévisible du Saguenay. Pour pallier cette problématique, le volume d’entreposage doit être de 100 % des besoins annuels fermes anticipés pour ainsi sécuriser la disponibilité du GNL au moment requis.

 


[69]         Conséquemment, Gaz Métro conclut que cette solution devrait compter sur une capacité d’entreposage significativement plus élevée que celle déposée initialement.

 

[70]         Questionnée à cet effet par la Régie, Gaz Métro indique que, pour récupérer une partie de la capacité requise en hiver sur le réseau du Saguenay, divers emplacements ont été analysés afin d’évaluer le potentiel local de vaporisation de GNL dans les réseaux d’alimentation. Parmi les 13 postes de livraison du réseau du Saguenay, sept sites permettent un gain supérieur à 1 000 m3/h et ont été analysés. Selon Gaz Métro, les meilleurs endroits où construire les stations de vaporisation seraient à Alma et Jonquière.

 

[71]         Le tableau suivant compare les principales caractéristiques, initiales et révisées, des stations de vaporisation de GNL et les coûts associés.

 

Tableau 2

Principales caractéristiques des stations de GNL et les coûts associés

 

Source : tableau établi à partir de la pièce B-0040, p. 12 et de la pièce B-0046, p. 25.

 

[72]         En considérant les principales caractéristiques révisées des stations de vaporisation de GNL à Jonquière et à Alma, Gaz Métro révise les coûts prévus à 71,46 M$ pour les immobilisations et à 1,29 M$ pour les coûts d’opération des stations de vaporisation[10].

 

[73]         Cependant, l’ajout d’approvisionnement de ces deux sites viendrait en contrepartie réduire les capacités de transport autrement requises, ce qui permettrait de réduire les coûts totaux d’approvisionnement de près de 0,7 M$ annuellement.

 

[74]         Gaz Métro fait valoir que cette solution dégage moins de capacité que la solution qu’elle recommande. À terme, si elle continuait d’investir en actifs de GNL pour desservir la croissance des besoins du Saguenay, ceci entraînerait des surcoûts par rapport à la solution recommandée de compression à Saint-Maurice et à La Tuque.

 

[75]         À cet effet, le Distributeur croit nécessaire d’avoir une capacité excédentaire qui va au‑delà des besoins futurs anticipés (débit horaire de référence 2024), en raison de l’incertitude entourant toute prévision de demande et des surcoûts associés à devoir réinvestir davantage au Saguenay dans un horizon de cinq ans. Dans le cas contraire, Gaz Métro mentionne qu’elle ne sera pas en mesure de répondre à un projet non prévu dans l’analyse du scénario raisonnable d’Artelys.

 

[76]         De plus, Gaz Métro indique que le débit horaire de référence du réseau de transmission du Saguenay devrait continuer sa progression après 2024, en présumant que la croissance de la demande de gaz naturel annuelle de 5 % entre 2025 et 2030 présentée au dossier R-3900-2014[11] se répartira de façon uniforme et qu’elle se traduira par une augmentation du débit horaire.

 

[77]         Conséquemment, advenant l’utilisation de la solution GNL, Gaz Métro soumet que des investissements supplémentaires devraient être encourus pour assurer la sécurité d’approvisionnement de la clientèle de la région du Saguenay. Selon le Distributeur, pour atteindre un débit horaire de référence légèrement inférieur au débit de la solution recommandée, le coût de l’option GNL serait de 101 M$, soit un montant deux fois plus élevé que celui de 50 M$ pour la solution recommandée.

 

 


3.5             COÛTS du projet et impact tarifaire

 

[78]         Les coûts de la solution recommandée par Gaz Métro s’élèvent à 81,12 M$ pour les immobilisations et à 0,78 M$ pour les dépenses d’opération annuelles. Les coûts révisés de la solution alternative non retenue par Gaz Métro s’élèvent à 71,46 M$ pour les immobilisations et à 1,29 M$ pour les dépenses d’opération annuelles.

 

Tableau 3

Coût des solutions analysées pour le réseau de transmission du Saguenay

 

Source : tableau établi à partir de la pièce B-0046, p. 12, 13 et 26.

 

[79]         Les coûts détaillés, déposés sous pli confidentiel, incluent la planification, l’ingénierie, les terrains, les travaux électriques, les nouveaux compresseurs, la gestion et l’inspection, la contingence et les frais généraux. Gaz Métro précise qu’un nouvel estimé des coûts sera préparé lorsque l’ingénierie préliminaire sera complétée, afin de s’assurer de respecter le budget. Advenant un écart plus grand que 15 %, elle avisera la Régie dans les plus brefs délais.

 

[80]         Selon Gaz Métro, l’impact tarifaire de la solution recommandée est de 117,5 M$ sur 32 ans. Pour la première année, la hausse du revenu requis s’élève à 10,8 M$, ou 1,9 %, estimée à partir du coût de service prévu pour l’année témoin 2015[12].

 


[81]         En considérant les caractéristiques révisées de la solution non retenue ainsi que la réduction des coûts d’approvisionnement, Gaz Métro estime l’impact tarifaire de cette solution à 101,6 M$ sur 32 ans. Pour la première année, la hausse du revenu requis s’élève à 9,3 M$, soit une hausse estimée de 1,6 %. Le Distributeur souligne que l’écart entre la solution recommandée et la solution alternative est de 1,4 M$ pour la première année[13].

 

 

3.6             Autorisations exigÉes en vertu d’autres lois

 

[82]         Gaz Métro mentionne que le Projet sera réalisé conformément aux autres lois en vigueur. La liste des autorisations exigées contient notamment :

 

       le permis de construction des villes de La Tuque et de Trois-Rivières;

       le certificat d’autorisation auprès du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.

 

 

3.7             Impact sur la fiabilitÉ du rÉseau et sur la qualitÉ de prestation du service

 

[83]         Gaz Métro fait valoir que la réalisation du Projet permettra d’assurer l’intégrité et la fiabilité du réseau ainsi que la sécurité d’approvisionnement des clients. En outre, la réalisation du Projet permettra à certains clients de migrer du tarif D5 au tarif D4, donnera l’accès au gaz naturel à de nouveaux clients et réduira les émissions de gaz à effet de serre (GES) qui se dégageraient autrement de l’utilisation d’énergie plus polluante que le gaz naturel.

 

[84]         Selon les hypothèses utilisées, Gaz Métro estime la réduction des GES à 34 491 tonnes, ce qui est équivalent à la consommation annuelle de 8 623 voitures.

 


[85]         Gaz Métro soumet que les solutions techniques de compression et/ou doublage sont largement reconnues comme les bonnes pratiques de l’industrie gazière par les opérateurs, tant les distributeurs que les transporteurs, dans le contexte d’enjeux de capacité de réseau de transmission comme le Saguenay[14].

 

 

3.8             autres mesures envisagées

 

[86]         Gaz Métro mentionne avoir évalué d’autres mesures permanentes qui n’ont pas été retenues, soit augmenter d’une façon permanente la pression minimale contractuelle de TCPL, accroître l’efficacité énergétique des tronçons saturés et ajuster les tarifs.

 

[87]         Pour ce qui est de la pression minimale contractuelle, Gaz Métro a conclu une entente avec TCPL qui prévoit une pression minimale contractuelle d’alimentation au poste de compression de Saint-Maurice, fixée à 4 650 kPa durant les mois d’hiver. Selon Gaz Métro, TCPL n’était disposée à se lier que jusqu’au 31 octobre 2017.

 

[88]         Quant à l’efficacité énergétique, Gaz Métro a établi que des économies de 835 Mm3 de gaz naturel en efficacité énergétique seraient requises pour combler les besoins additionnels de capacité. Afin de mettre en perspective ses économies volumétriques, elle mentionne que l’objectif annuel de son programme Plan global en efficacité énergétique (PGEÉ) au dossier tarifaire 2015 est de 39,4 Mm3 pour l’ensemble de sa franchise.

 

[89]         Considérant que l’ampleur des efforts requis dépasserait largement le potentiel des programmes du PGEÉ, Gaz Métro conclut que l’option d’accroître l’efficacité énergétique ne peut être retenue pour solutionner les enjeux de capacité sur le réseau de transmission du Saguenay.

 

[90]         En ce qui a trait aux ajustements tarifaires, Gaz Métro a analysé quelques mesures pouvant potentiellement réduire la demande horaire sur les tronçons de réseau saturé, soit l’ajout de composantes tarifaires en m3/h, la bonification du service interruptible et la création d’un service super interruptible.

 

[91]         À la suite de l’analyse présentée à la pièce B‑0047, Gaz Métro conclut que l’option des ajustements tarifaires ne peut permettre de solutionner les enjeux de saturation des réseaux, bien que ces mesures puissent donner un meilleur signal de prix et, ainsi, réduire le débit horaire de façon marginale.

 

[92]         À cet effet, considérant que les m3/h sont à la base du design du réseau de distribution, Gaz Métro pourrait considérer cet élément lors de la phase 2 du dossier portant sur la vision tarifaire[15], afin d’assurer une meilleure causalité entre les coûts et les tarifs. De plus, le Distributeur indique qu’il prévoit déposer, dans les meilleurs délais, une révision de l’offre interruptible afin de réduire le besoin de pointe pour des fins d’approvisionnement.

 

 

 

4.            Description de la demande - réseau de l’estrie

 

[93]         Gaz Métro présente les enjeux de capacité du réseau de transmission de l’Estrie pour la période 2014-2024. En fonction du scénario raisonnable établi par la firme Artelys pour le débit horaire de référence, le Distributeur mentionne qu’il faut augmenter la capacité du tronçon de Waterloo/Windsor de 13 320 m3/h pour rencontrer les besoins de la clientèle existante et de 28 390 m3/h pour ceux de la clientèle future. Pour le tronçon de Sabrevois/Courval, il faut augmenter la capacité de 12 950 m3/h et de 29 450 m3/h pour rencontrer les besoins respectifs de la clientèle existante et future[16].

 

[94]         Gaz Métro mentionne avoir convenu d’une entente avec TCPL d’une pression de livraison supérieure à la pression minimale contractuelle de 4 000 kPa, jusqu’au 31 mars 2017. Selon le Distributeur, la sécurité d’approvisionnement des clients est satisfaite par ces pressions de livraison supérieures jusqu’en 2017.

 

[95]         Pour solutionner les enjeux de capacité au-delà de 2017, le Distributeur indique devoir ajouter un nouveau poste de compression à Waterloo.

 


[96]         Questionnée sur la possibilité de prolonger l’entente avec TCPL au-delà de 2017, Gaz Métro fait part d’un projet d’entente finale avec TCPL, qui consiste à livrer le gaz naturel au poste de Waterloo à une pression de 5 750 kPa durant l’hiver, pour une période plus longue que la période de trois ans se terminant le 31 mars 2017.

 

[97]         Gaz Métro confirme que cette nouvelle entente serait valide pour une période de cinq ans, débutant le 1er novembre 2017 et se terminant le 31 octobre 2022. Au 1er novembre 2019, soit deux ans après le début de cette nouvelle entente, il serait loisible aux parties d’ajouter une année à l’engagement de TCPL pour repousser sa date de fin au 31 octobre 2023. Cet ajout d’une année à la nouvelle entente serait possible à tous les ans par la suite, pour en faire une entente d’une durée de quatre ans.

 

[98]         Par ailleurs, il serait possible pour TCPL de mettre unilatéralement un terme à l’entente, en donnant un préavis de quatre ans, procurant ainsi un délai suffisant à Gaz Métro pour mettre en place une autre solution[17].

 

[99]         Considérant ces développements récents, Gaz Métro retire sa demande d’approbation du projet d’investissement visant le renforcement du réseau de transmission de l’Estrie, même si, selon elle, un investissement en renforcement demeure ultimement inévitable dans le futur. Elle maintient toutefois les pièces révisées au dossier, pour information.

 

[100]    De plus, Gaz Métro mentionne que ce retrait fait suite à l’annonce du gouvernement du Québec qui réserve une enveloppe de 38 M$ pour des projets d’extension du réseau de distribution de gaz naturel. Cette enveloppe était inconnue à l’époque où l’exercice de prévision de la demande a été effectué et pourrait affecter à la hausse la prévision de la demande et, conséquemment, l’évaluation des solutions envisagées.

 

[101]    Selon le Distributeur, certains clients potentiels, qui n’avaient pas été inclus dans le scénario de base, ont vu la probabilité de réalisation de leur projet augmenter au cours des derniers mois. De plus, Gaz Métro et TCPL coordonnent actuellement leurs efforts pour analyser et identifier les meilleures solutions permettant d’assurer la sécurité d’approvisionnement des besoins de Gaz Métro et de TQM dans la région de l’Estrie, tout en considérant les mesures temporaires disponibles sur ce tronçon.

[102]    Compte tenu de cette conjoncture, Gaz Métro conclut qu’il est préférable de retirer sa demande relative au renforcement du réseau de transmission de l’Estrie et d’en redéposer une nouvelle, au moment opportun.

 

[103]    Durant cet intervalle, Gaz Métro indique qu’elle sera en mesure d’assurer la sécurité d’approvisionnement de ses clients.

 

[104]    La Régie prend acte du retrait de la demande d’investissement visant le renforcement du réseau de transmission de l’Estrie et du fait que Gaz Métro redéposera, au moment opportun, une nouvelle demande d’investissement à cet égard.

 

[105]    La Régie demande à Gaz Métro, dans le cadre du suivi aux rapports annuels portant sur l’évolution de la situation critique du niveau de saturation des réseaux de transmission, de présenter l’état des discussions avec TCPL permettant d’identifier les meilleures solutions pour assurer la sécurité d’approvisionnement des besoins de Gaz Métro et de TQM dans la région de l’Estrie.

 

 

 

5.            prévisions des besoins de la période 2014-2024

 

5.1             Débit horaire de référence

 

[106]    Les besoins de la clientèle existante en période de pointe correspondent au débit horaire de référence 2014 et ceux de la clientèle future correspondent au débit horaire de référence projeté en 2024. Le débit horaire de référence est le critère de conception et d’opération du réseau n15 et remplace l’ancien critère du débit horaire de pointe observé (coïncident).

 


[107]    Ce critère, révisé selon la nouvelle méthode développée par Artelys, est défini comme suit :

 

« Le débit horaire de référence est le débit donné par un modèle statistique de débit horaire lors de l’épisode climatique [le plus froid ayant un temps de retour moyen de 30 ans] défini dans le critère 10. Le modèle est calibré sur l’historique de la somme coïncident des débits horaires aux postes de livraison du réseau de transmission. Cette valeur est sécurisée pour tenir compte des variations entre le modèle statistique et les valeurs observées qui ne sont pas expliquées par le modèle »[18].

 

[108]    Dans un premier temps, Artelys a établi le débit horaire de référence 2014 en modélisant les données historiques de débit horaire de la période 2009‑2014, ce qui représente l’analyse d’environ 7 millions de valeurs.

 

[109]    Par la suite, pour projeter la demande dans les années futures pour les secteurs résidentiels et commerciaux (clients à lecture mensuelle), Artelys a ajouté au modèle un facteur de croissance annuel basé sur une analyse de la tendance historique, en intégrant, entre autres, l’arrivée et le départ de clients. Pour le réseau du Saguenay, le taux de croissance annuel est de 0,13 %.

 

[110]    Selon Gaz Métro, puisque le débit horaire n’évolue pas de la même façon que la demande volumétrique annuelle, l’utilisation d’un taux de croissance obtenu par l’analyse historique de la demande horaire est justifiée[19].

 

[111]    Pour le secteur industriel, soit les clients à lecture horaire (grands clients – ventes grandes entreprises (VGE), grands clients commerciaux et institutionnels), Artelys examine quatre événements possibles, soit :

 

       le maintien de la consommation selon l’évolution passée et dans les mêmes termes contractuels;

       le maintien de la consommation avec un transfert au continu (pour les clients interruptibles ou en combinaison tarifaire);

       l’arrêt possible des consommations (changement de vocation du site ou arrêt des opérations);

       l’arrivée d’une nouvelle consommation (nouveau site ou expansion d’un site existant).

 

[112]    Pour le maintien de la consommation existante, Artelys procède comme pour les clients à lecture mensuelle, en déterminant un taux de croissance annuel (positif ou négatif), basé sur la tendance historique. Pour les clients à lecture horaire du réseau du Saguenay, le taux de croissance annuel est établi à 0,71 %.

 

[113]    Pour l’arrêt possible de la consommation, une probabilité de perte est fournie par la firme KPMG-SECOR. Le débit perdu en cas d’arrêt de consommation du client a été évalué par Artelys sur la base de l’historique des débits.

 

[114]    Pour les nouveaux clients ou projets, Artelys utilise les prévisions de KPMG‑SECOR, ainsi que leur probabilité de réalisation, converties en prévisions horaires par Gaz Métro. Cependant, lorsqu’un projet potentiel présente une consommation de gaz très importante (au-delà de 10 % du débit de pointe du tronçon entier), son ajout a été traité dans une variante de scénario pour bien identifier son impact individuel sur la demande. Ainsi, pour le réseau du Saguenay, deux projets industriels, totalisant 42 200 m3/h, sont traités dans une variante de scénario, compte tenu de l’importance en termes de débit et la faible probabilité de réalisation[20].

 

[115]    Une fois les différentes probabilités obtenues pour les clients à lecture horaire, Artelys utilise une méthode Monte Carlo pour construire plusieurs milliers de trajectoires de débit horaire de pointe 2014‑2024. Dans le scénario « raisonnable », le débit horaire de référence projeté correspond au quantile à 80 % de l’ensemble des simulations.

 

[116]    Le quantile de 80 % est déterminé spécifiquement pour l’étude au présent dossier. Les valeurs proches ou inférieures à 50 %, ainsi que celles supérieures à 90 %, représentent des scénarios trop négatifs ou trop optimistes et ont été exclues. Artelys a toutefois vérifié que le débit supplémentaire ajouté entre les quantiles à 50 % et 80 % est limité à quelques pourcents. Selon elle, le débit horaire de référence à l’horizon 2024 de 152 487 m3/h représente une hausse d’environ 2 %, comparativement à la valeur de 150 000 m3/h obtenue avec un quantile de 50 %.

[117]    Le tableau suivant présente les principales hypothèses du scénario raisonnable pour établir la projection du débit horaire à l’horizon 2024, pour le réseau du Saguenay.

 

Tableau 4

Hypothèses pour la projection du débit horaire de référence 2024

 

Source : pièce B-0014, p. 42.

 

 

5.2             Besoins additionnels en gaz naturel

 

[118]    KPMG-SECOR indique :

 

« [qu’a]vant de procéder à ces investissements, il importe d’avoir une bonne évaluation des besoins en gaz naturel des territoires concernés et de déterminer la demande de pointe qui est associée à ces besoins. C’est sur une telle toile de fond que Gaz Métro a demandé le soutien de KPMG-SECOR afin de documenter de manière indépendante les besoins additionnels potentiels pour les régions spécifiées, et ce, pour les dix prochaines années, soit de 2015 à 2024 inclusivement »[21].

 

[119]    Pour les secteurs résidentiels et commerciaux (clients à lecture mensuelle), le rapport de KPMG-SECOR indique que la nécessité d’établir des scénarios par tronçon géographique ainsi que l’historique limité des données disponibles ne permettent pas d’établir un modèle précis dans lequel les facteurs principaux influençant la consommation auraient été statistiquement pris en compte.

[120]    Pour le secteur industriel (clients à lecture horaire), il a été possible pour KPMG‑SECOR de miser sur des données historiques de ventes. De plus, des projets économiques susceptibles d’être alimentés au gaz naturel ont été identifiés et analysés.

 

[121]    Pour le secteur du transport, l’analyse de KPMG-SECOR se concentre sur le transport de marchandise par route et sur la collecte de matières résiduelles. Les volumes de deux projets majeurs de conversion de véhicules auparavant alimentés au diesel ont été considérés comme tels, compte tenu de leur forte probabilité de réalisation. Par la suite, l’analyse s’est intéressée au potentiel de conversion d’une partie de la flotte de camions routiers, alimentés actuellement en diesel, vers une alimentation en gaz naturel.

 

[122]    Selon KPMG-SECOR, les besoins additionnels à l’horizon 2024 pour le réseau du Saguenay sont :

 

       secteurs résidentiels et commerciaux : 49,2 Mm3, soit une croissance annuelle de 4,9 %;

       secteur du transport : 16,8 Mm3, soit une croissance annuelle moyenne de 1,7 %;

       secteur industriel : 44,5 Mm3, soit une croissance annuelle moyenne de 4,5 %.

 

[123]    Gaz Métro précise que l’étude de KPMG-SECOR, déposée au présent dossier, est spécifique aux besoins additionnels de la période 2015-2024, sans prendre en compte l’évolution des volumes existants[22].

 

[124]    En réponse à la DDR de l’ACIG, KPMG-SECOR précise que le prix relatif du gaz naturel par rapport à celui du mazout et du diesel a peu changé, malgré la baisse majeure en absolue des prix des produits pétroliers observés au cours des derniers mois. Les écarts, ou plus précisément les prix relatifs, sont donc similaires.

 


[125]    KPMG-SECOR indique également que plusieurs sources consultées prévoient une remontée graduelle des prix des produits pétroliers. Toutefois, la position concurrentielle favorable du gaz naturel devrait, en parallèle, se maintenir. Selon elle, les experts s’entendent encore pour dire que le gaz naturel bénéficiera d’un avantage relatif par rapport au mazout sur l’horizon des 10 prochaines années[23].

 

 

 

6.            Critères de conception et d’opération du réseau

 

[126]    Dans sa décision D-2013-192, la Régie notait qu’une analyse des critères de conception d’opération du réseau gazier serait réalisée à l’automne 2013, ce qui permettrait leur révision et, le cas échéant, d’en ajouter. Conséquemment, elle demandait à Gaz Métro de déposer, dans le forum approprié ou au plus tard au moment du dossier tarifaire 2015, cette nouvelle analyse des critères de conception et d’opération du réseau gazier[24].

 

[127]    Dans le cadre du dossier R-3879-2014, Gaz Métro informait la Régie que les travaux à l’égard des enjeux reliés au taux de saturation élevé de certains tronçons du réseau de distribution et le suivi relatif aux critères de conception et d’opération du réseau gazier n’étaient pas complétés, en raison d’un niveau d’analyse plus important qu’anticipé. Le Distributeur mentionnait également que la participation d’experts était requise[25].

 

[128]    Au présent dossier, Gaz Métro présente l’analyse des critères de conception et d’opération du réseau qu’elle utilise, afin de déterminer la capacité horaire maximale des réseaux de transmission.

 

[129]    Gaz Métro a retenu la firme DNV-GL afin d’analyser les 23 critères de conception et d’opération de son réseau gazier. Ces critères sont répartis entre les catégories « Besoins des clients » (nos 1 à 5), « Validation de la capacité du réseau » (nos 6 à 20), « Design du réseau » (nos 21 et 22) et « Analyse des coûts » (no 23).

 

[130]    À la suite de leur analyse, DNV-GL a identifié cinq critères à réviser, soit :

 

       no 10 : température minimale de l’hiver précédent;

       no 11 : pression minimale contractuelle d’alimentation (TCPL & TQM);

       no 13 : redondance des équipements critiques de la transmission;

       no 14 : ratio de compression et débit maximal;

       no 15 : débit horaire de pointe observé (coïncident).

 

[131]    De plus, dans son analyse du débit horaire de référence, Artelys a également identifié la nécessité de réviser le critère no 4 relié à la possibilité d’interrompre le client.

 

[132]    Gaz Métro présente une comparaison détaillée des critères, avant et après les recommandations de DNV-GL et d’Artelys, soit :

 

       no 4 : possibilité d’interrompre le client; 

       no 10 : l’épisode climatique le plus froid ayant un temps de retour moyen de 30 ans;

       no 11 : pression minimale contractuelle d’alimentation (TCPL & TQM);

       no 13 : redondance des équipements critiques de la transmission;

       no 14 : ratio de compression et débit maximal;

       no 15 : débit horaire de référence[26].

 

[133]    La révision du critère no 4 augmente les besoins du client. La révision des critères nos 10, 11 et 15 diminue la capacité du réseau, alors que la révision des critères nos 13 et 14 n’a aucun impact sur celle-ci.

 

[134]    Le tableau suivant présente l’impact de la révision des critères sur la capacité du réseau de gaz naturel, pour l’ensemble de la franchise de Gaz Métro.

 


Tableau 5

Débit horaire maximal et impact de la révision des critères

 

            Source : pièce B-0040, p. 2.

 

[135]    Gaz Métro précise que l’évaluation de la capacité du réseau de transmission de la Montérégie à 230 000 m³/h était basée sur un calcul théorique qui supposait que les tronçons de Saint-Mathieu/Candiac et Saint‑Mathieu/Contrecœur subissaient la même perte de charge. Après une évaluation plus approfondie de la répartition des charges en fonction de la demande réelle, une répartition différente est requise sur l’embranchement Saint‑Mathieu/Contrecœur. Conséquemment, la perte de pression entre les deux embranchements n’est pas équivalente, ce qui diminue la capacité globale du réseau de la Montérégie à 185 000 m³/h.

 

[136]    La Régie prend acte du suivi donné par Gaz Métro quant à l’analyse des critères de conception et d’opération du réseau gazier.

 

 

 

7.            Position des intervenants

 

[137]    L’ACIG et SÉ-AQLPA recommandent à la Régie d’autoriser le Projet, tel que soumis par Gaz Métro.

 

[138]    L’ACIG indique que Gaz Métro a l’obligation de desservir tout client potentiel futur qui en fera la demande, selon la lecture qu’elle fait des articles 77 et 78 de la Loi. Elle est d’avis que le réseau devrait être conçu pour répondre aux demandes existantes et prévues des clients existants ainsi qu’aux clients potentiels qui en ont déjà fait la demande ou qui sont raisonnablement susceptibles de le faire.

 

[139]    L’intervenante est d’avis que les ajouts de capacité ne doivent pas dépasser ce qui est raisonnablement anticipé pour la croissance de la demande sauf, évidemment, si l’ajout de la capacité excédentaire proposée n’entraîne pas des coûts supplémentaires importants ayant un impact significatif à la hausse sur les tarifs de la clientèle de Gaz Métro[27].

 

[140]    En audience, l’ACIG indique maintenir sa position quant au fait qu’un investissement puisse répondre à une demande établie sur la base de prévision raisonnable. En principe, l’intervenante privilégie la solution la moins coûteuse lorsque deux solutions permettent de rencontrer la demande. Après analyse de la preuve amendée de Gaz Métro et des réponses aux DDR de la Régie, l’AGIG conclut que la solution de compression à La Tuque est la moins dispendieuse.

 

[141]    L’ACIG mentionne que selon la preuve amendée, qu’elle qualifie de convaincante, tant du point de vue technique, opérationnel que financier, l’alternative impliquerait l’ajout d’une autre station de vaporisation de GNL, afin de répondre à la croissance de la demande au-delà de 2024. Dans ce contexte, l’intervenante indique que la solution alternative, qui consiste à utiliser du GNL, présente des coûts qu’elle estime à 91 M$, soit 10 M$ de plus que la solution de compression.

 

[142]    L’intervenante indique également que l’approche GNL présente des contraintes opérationnelles évidentes, contrairement à la solution recommandée.

 

[143]    SÉ-AQLPA recommande à la Régie d’accepter, comme raisonnable, la prévision de la demande de gaz naturel pour le tronçon Saguenay-Mauricie à l’horizon 2024, étant donné à la fois l’importance de son secteur industriel et du taux de croissance modeste qui y est associé.

 

[144]    SÉ-AQLPA recommande à la Régie d’autoriser l’investissement proposé par Gaz Métro pour le tronçon Saguenay-Mauricie à l’horizon 2024, parce qu’il laisse une marge importante à la hausse et que les coûts unitaires qui y sont associés sont moindres que ceux de l’autre option considérée. De plus, l’intervenant est d’avis que la solution de compression présente un meilleur bilan GES que la solution alternative, considérant les nombreux allers-retours en camion pour alimenter les stations de GNL.

 

[145]    Par ailleurs, l’intervenant indique que le transport par camion de GNL représente un risque d’accident supérieur à un approvisionnement par gazoduc.

 

[146]    SÉ-AQLPA invite toutefois la Régie à porter une attention particulière aux coûts élevés présentés par Gaz Métro quant à ses investissements en équipements de compression. L’intervenant souhaite que la Régie demande à Gaz Métro, dans le cadre d’un dossier ultérieur, de soumettre un rapport sur la possibilité de standardiser les achats de compresseurs.

 

 

 

8.            OPINION DE LA RÉGIE

 

[147]    Au présent dossier, Gaz Métro fait état des enjeux de capacité sur le réseau de transmission du Saguenay. Ces enjeux ont déjà été reconnus par la Régie dans sa décision D‑2012‑158[28].

 

[148]    La solution recommandée, soit la mise à niveau du poste de compression de Saint‑Maurice et l’ajout d’un poste de compression à La Tuque, devrait permettre de résoudre ces enjeux de capacité, mais également d’avoir une capacité excédentaire d’environ 21 500 m3/h à l’horizon 2024.

 


[149]    Tout comme les participants au dossier, la Régie est d’avis que le réseau de transmission de Gaz Métro doit être conçu en tenant compte des besoins de long terme. Elle considère que la prévision de demande horaire à la pointe effectuée par Artelys est un estimé raisonnable des besoins de capacité pour le réseau du Saguenay. Elle retient cette prévision comme étant le critère à rencontrer. Ainsi, le projet de renforcement devrait viser à atteindre une capacité de l’ordre de 153 000 m3/h.

 

[150]    La Régie note que le débit horaire de 152 487 m3/h est établi en tenant compte de l’épisode climatique le plus froid en 30 ans ainsi que d’une prévision raisonnable des besoins en gaz naturel. Par définition, il s’agit d’un débit qui ne sera raisonnablement pas dépassé. Le Distributeur doit être en mesure d’y faire face.

 

[151]    La Régie note que le poste de compression de Saint-Maurice est désuet et n’est pas conforme aux normes actuelles. Il est logique de profiter des besoins de rénovation pour augmenter la capacité du poste afin d’atteindre 140 000 m3/h avec la pression contractuelle de 4 000 kPa.

 

[152]    Les besoins horaires de pointe à combler, après la mise à niveau du poste de compression de Saint-Maurice, sont de 13 000 m3/h.

 

[153]    Selon Gaz Métro, la construction du poste de compression à La Tuque est requise pour fournir cette dernière capacité. Le poste de compression à La Tuque permettrait d’augmenter la capacité de 34 000 m3/h, à un coût estimé de 50 M$.

 

[154]    Le Distributeur explique que l’alternative à l’ajout de compression consiste en l’installation de postes de vaporisation de GNL à Jonquière et Alma. Cette approche permet d’atteindre une capacité de 153 000 m3/h, comparativement à une capacité de 174 000 m3/h pour la solution de compression.

 

[155]    Au cours de l’examen du dossier, la Régie a avisé Gaz Métro des préoccupations suivantes à l’égard du Projet :

 

« 

                    À la suite de la rénovation et de l’amélioration du poste de compression de St‑Maurice, le réseau de transmission aura une capacité de 140 000 m3/h. Les besoins au-delà de 140 000 m3/h semblent être des besoins de pointe requis peu fréquemment;

                    La solution alternative requiert un investissement inférieur à la solution proposée de 22 M$ et permet de combler les besoins prévus à la pointe à l’horizon 2024;

                    Les justifications soumises par le Distributeur pour recommander la solution plus dispendieuse (problèmes opérationnels, besoin de capacité dépassant le débit de référence prévu, façons de faire dans d’autres juridictions) sont peu étayées;

                    L’impact de la solution alternative sur les coûts de transport ferme ne semble pas avoir été pris en compte dans l’analyse économique du projet »[29].

 

[156]    En raison des préoccupations de la Régie, Gaz Métro a raffiné ses analyses quant à l’approche qui consiste à utiliser du GNL. Le Distributeur a déposé une preuve amendée à ce sujet dans laquelle il conclut que la solution alternative présentée initialement ne permet pas d’assurer la sécurité d’approvisionnement, en raison d’une capacité d’entreposage insuffisante.

 

[157]    Gaz Métro a ainsi révisé le volume d’entreposage des stations de vaporisation de GNL, qui passe de 235 000 m3 à 681 300 m3. Les coûts estimés pour la solution alternative ont également été révisés à la hausse, soit à 71,46 M$ pour les immobilisations et à 1,29 M$ pour les coûts d’opération des stations de vaporisation.

 

[158]    La Régie constate que, sur une période de 32 ans, la solution recommandée par Gaz Métro a un impact tarifaire plus élevé de 16 M$, comparativement à la solution alternative révisée qui consiste à utiliser du GNL. Pour la première année, l’impact tarifaire est plus élevé d’environ 1,4 M$. Ainsi, le différentiel de coûts entre les deux solutions n’est plus aussi important qu’il ne l’était initialement.

 

[159]    La Régie note que la solution recommandée par Gaz Métro respecte les bonnes pratiques de l’industrie pour le renforcement d’un réseau gazier.

 

[160]    La Régie constate que cette solution permettra de satisfaire les besoins futurs anticipés au-delà de 2024. Bien que les coûts soient plus élevés que ceux de la solution alternative à l’horizon 2024, il s’agit de la solution la moins dispendieuse, en considérant une croissance continue de la demande au-delà de 2024.

 

[161]    La Régie retient également que la solution qui consiste à utiliser du GNL comporte des contraintes opérationnelles importantes, contrairement à la solution de compression.

 

[162]    En conséquence, la Régie est d’avis qu’il y a lieu d’autoriser Gaz Métro à réaliser le Projet.

 

[163]    La Régie autorise également Gaz Métro à créer un compte de frais reportés hors base de tarification, portant intérêts, dans lequel seront accumulés les coûts reliés au Projet.

 

[164]    Pour ces motifs,

 

La Régie de l’énergie :

 

ACCUEILLE la demande de Gaz Métro;

 

AUTORISE Gaz Métro à réaliser le projet d’investissement visant l’amélioration et le renforcement du réseau de transmission du Saguenay (le Projet), tel que décrit à la pièce B-0046;

 

DEMANDE à Gaz Métro de soumettre les données nécessaires au suivi du Projet lors des prochains dossiers de rapport annuel;

 

PREND ACTE de l’engagement de Gaz Métro d’aviser la Régie, dans les plus brefs délais, advenant un écart des coûts du Projet plus grand que 15 %;

 

AUTORISE Gaz Métro à créer un compte de frais reportés hors base de tarification, portant intérêts, dans lequel seront accumulés les coûts reliés au Projet;

 

PREND ACTE du retrait de la demande d’investissement visant le renforcement du réseau de transmission de l’Estrie et du fait que Gaz Métro redéposera, au moment opportun, une nouvelle demande d’investissement à cet égard;

 


PREND ACTE de la réponse de Gaz Métro au suivi requis par la Régie dans sa décision D-2013-192 (paragraphe 92) portant sur les critères de conception.

 

 

 

 

 

 

Françoise Gagnon

Régisseur


Représentants :

 

Association des consommateurs industriels de gaz (ACIG) représentée par MGuy Sarault;

Société en commandite Gaz Métro représentée par Me Hugo Sigouin-Plasse et MMarie Lemay Lachance;

Stratégies énergétiques et Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (SÉ-AQLPA) représenté par Me Dominique Neuman.



[1]        RLRQ, c. R-6.01.

[2]        RLRQ, c. R-6.01, r. 2, article 1 (1°) c).

[3]        Dossier R-3837-2013 Phase 2, p. 24, par. 92.

[4]        Décision D-2015-011, p. 8, par. 27.

[5]        Pièce B-0046, p. 12.

[6]        Pièce B-0040, p. 4.

[7]        Pièce B-0040, p. 11.

[8]        Pièce B-0040, p. 4.

[9]        Pièce B-0048, p. 4.

[10]       Pièce B-0046, p. 26.

[11]       Avis de la Régie de l’énergie sur les approvisionnements en fourniture et transport de gaz naturel nécessaires pour répondre aux besoins en gaz naturel des consommateurs québécois à moyen et long termes, p. 32, graphique 3.

[12]       Pièce B-0023, p. 44.

[13]       Pièce B-0046, p. 26. Il peut y avoir des écarts dû à la présence d’arrondis.

[14]       Pièce B-0046, p. 18.

[15]       Dossier R-3867-2013.

[16]       Pièce B-0045, p. 5.

[17]       Pièce B-0029, p. 18 et 19 et pièce B-0047, p. 4.

[18]       Pièce B-0035, p. 7.

[19]       Pièce B-0040, p. 9.

[20]       Pièce B-0014, p. 39.

[21]       Pièce B-0013, p. 2.

[22]       Pièce B-0040, p. 7.

[23]       Pièce B-0030, p. 11 et 12.

[24]       Dossier R-3837-2013 Phase 2, décision D-2013-192, p. 24, par. 92.

[25]       Pièce B-0049, p. 4.

[26]       Pièce B‑0035.

[27]       Pièce C-ACIG-0008, p. 4.

[28]       Dossier R-3809-2012, p. 22 et 23, par. 86 à 89 et p. 27 et 28, par. 108 à 110.

[29]       Pièce A-0015.

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