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Canada

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Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2020-09-11

Référence

Ré :Sonne Tarif 6.B (2018-2022), 2020 CDA 014

Commissaires

René Côté
Adriane Porcin

Nathalie Théberge

Projet de tarif examiné

Ré:Sonne No 6.B – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités de conditionnement physique (2018 2022)

Homologation du projet de tarif

sous le titre

Tarif Ré:Sonne 6.B – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités de conditionnement physique (2018 2022)

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. introduction

[1] Le 31 mars 2017, Ré:Sonne Société de gestion de la musique (Ré:Sonne) a déposé le Tarif no6.B – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités de conditionnement physique pour les années 2018 à 2022 (le « projet de tarif »).

[2] Les parties suivantes se sont opposées au projet de tarif : GoodLife Fitness Centres inc. (GoodLife), le Conseil du secteur du conditionnement physique du Canada (CSCP), l’Association des hôtels du Canada (AHC), Restaurants Canada (RC) et le Conseil canadien du commerce de détail (CCCD). Cependant, le 6 décembre 2018, Ré:Sonne, le CSCP et GoodLife (collectivement, les « parties au règlement ») ont déposé conjointement un tarif convenu entre elles, avec le consentement des autres opposants (l’AHC, RC et le CCCD).

[3] Pour les motifs suivants, nous concluons qu’un tarif fondé sur le tarif convenu, moyennant des modifications mineures aux modalités pour assurer un traitement symétrique des trop perçus et des moins perçus et pour éviter une communication superflue de renseignements confidentiels, répond à l’exigence selon laquelle il doit être juste et équitable. Par conséquent, nous l’homologuons.

II. contexte

[4] Le 31 mars 2017, Ré:Sonne a déposé un tarif proposant des redevances pour l’exécution en public ou la communication au public par télécommunication, au Canada, pour les années 2018 à 2022, d’enregistrements sonores publiés constitués d’œuvres musicales et la prestation de telles œuvres pour accompagner des activités de conditionnement physique. Les parties suivantes ont déposé des oppositions au projet de tarif, dans le délai imparti : le CSCP, GoodLife, l’AHC, RC et le CCCD (collectivement, les « opposants »).

[5] Le 6 décembre 2018, Ré:Sonne, le CSCP et GoodLife ont déposé conjointement le tarif convenu avec le consentement des autres opposants (l’AHC, RC et le CCCD).

[6] Le 24 mars 2020, la Commission a demandé à Ré:Sonne, au CSCP et à GoodLife de présenter à la Commission des renseignements pour soutenir la proposition selon laquelle le CSCP et GoodLife sont collectivement représentatifs des utilisateurs visés pour la période 2018 2022 [1] . Le 25 juin 2020, les parties au règlement ont déposé leur réponse [2] .

III. Question

[7] Le tarif établi sur le fondement du tarif convenu déposé conjointement par Ré:Sonne, le CSCP et GoodLife, avec le consentement des autres opposants en l’espèce (l’AHC, RC et le CCCD), est-il juste et équitable, et, par conséquent, le projet de tarif devrait-il être approuvé?

IV. Analyse

[8] En vertu de la Loi sur le droit d’auteur, la Commission « fixe des redevances et des modalités afférentes en vertu de la présente loi qui sont justes et équitables » [3] .

[9] Un tarif convenu déposé par une ou plusieurs parties constitue un élément de preuve produit dans le cadre du processus d’approbation du tarif par la Commission; il ne remplace pas le projet de tarif initialement déposé par une société de gestion. Pour ce motif, lorsqu’elle est appelée à déterminer si le tarif convenu est juste et équitable, la Commission doit l’examiner dans le contexte du processus global amorcé à la suite du dépôt du projet initial de tarif, en tenant compte notamment des oppositions initialement déposées par les parties avant le dépôt du tarif convenu.

[10] Lorsqu’elle évalue si le tarif est, dans le contexte du tarif convenu, juste et équitable, la Commission examine normalement certaines questions, dont voici des exemples :

    1. Les parties à l’entente de règlement sont-elles des représentantes de l’industrie? Le fait que les parties à l’entente sont des représentantes de l’industrie touchée par le tarif pourrait signifier que des personnes qui ne sont pas parties à l’entente, ou du moins un nombre important de ces personnes, y adhèrent également. Cette entente pourrait se révéler être une sorte d’entente « intervenue à l’échelle du marché », et pourrait indiquer que le marché considère qu’il s’agit d’un taux juste et équitable.
    2. L’entente règle-t-elle l’ensemble des points soulevés en opposition, y compris les oppositions au projet de tarif, et indique-t-elle si les personnes qui ne sont pas parties à l’entente y adhèreraient?
    3. Des écarts importants existent ils entre le tarif convenu et un tarif préalablement approuvé (le cas échéant)? En présence d’un tarif préalablement approuvé et en l’absence de modification au tarif convenu, ou lorsque ces modifications ont été expliquées (par les parties ou la Commission), la Commission peut décider que ces éléments établissent le caractère fondamentalement équitable de l’entente.

A. Représentativité des parties au règlement

[11] Dans leur réponse du 25 juin 2020 à la Commission, les parties au règlement ont souligné que GoodLife compte plus de 1,5 million de membres et plus de 405 centres à l’échelle du Canada, et que le CSCP représente plus de 5000 installations et au-delà de 4 millions de membres au pays. Cependant, la réponse n’indiquait pas clairement que GoodLife et le CSCP représentaient l’industrie du conditionnement physique à la date où le tarif convenu a été proposé. Elle renvoyait plutôt la Commission à ses propres conclusions énoncées dans le Tarif 6.B – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités physiques (2013 2017) [4] .

[12] Compte tenu de la preuve présentée dans la présente instance, y compris la réponse des parties du 25 juin 2020, nous sommes incapables de conclure avec une certitude absolue que GoodLife, le CSCP and les autres opposants – qui sont eux-mêmes des associations de commerce respectées comptant un nombre important de membres – sont représentatifs de tous les utilisateurs affectés.

B. Règlement des points soulevés en opposition

[13] Le présent tarif convenu a été déposé avec le consentement des opposants.

[14] En l’espèce, seul GoodLife a déposé des objections de fond soulevant des questions en litige. Premièrement, elle a souligné que le projet de tarif faisait augmenter les frais pour les cours de conditionnement physique et la musique de fond à un moment où d’importantes pressions sont exercées pour une réduction des frais d’inscription. Deuxièmement, GoodLife s’est opposée aux modalités de paiement : elle souhaitait un versement unique pour toute utilisation de musique enregistrée dans les aires d’un lieu de conditionnement physique.

[15] L’entente répond clairement à la première question : pour la musique de fond, elle prévoit les mêmes taux que ceux du tarif préalablement approuvé; pour les cours de conditionnement physique, elle prévoit les mêmes taux que ceux du tarif préalablement approuvé, légèrement augmentés pour tenir compte de l’inflation.

[16] L’entente ne répond pas à la seconde question, puisque la structure du tarif convenu est presque identique à celle qui figure dans le projet de tarif. Cependant, sans preuve de problèmes associés à la structure de paiement, nous sommes dans l’incapacité d’évaluer l’incidence sur l’équité du tarif convenu, le cas échéant.

C. Comparaison entre le tarif convenu et le tarif préalablement approuvé

i. Taux de redevances

[17] Comme pour le Tarif 6.B de Ré:Sonne (2013 2017) préalablement approuvé et le projet de Tarif 6.B (2018 2022), le tarif convenu prévoit que, lorsqu’un fournisseur de musique de fond d’un établissement de conditionnement physique paie son tarif respectif, l’établissement de conditionnement physique n’est pas tenu de payer les redevances prévues dans le Tarif 6.B de Ré:Sonne.

[18] Si un lieu de conditionnement physique s’abonne à de la musique de fond, mais que le fournisseur ne paie pas son tarif respectif, le lieu doit payer à sa place. Le tarif convenu fixe ce taux à 3,2 pour cent du montant payé au fournisseur, sous réserve d’une redevance minimale de 2,15 $ par lieu et par trimestre. Ce sont les mêmes taux que les taux approuvés prévus dans le Tarif 6.B de Ré:Sonne (2013 2017).

[19] Si la musique de fond n’est pas fournie par un fournisseur, le tarif convenu prévoit que le lieu de conditionnement physique verse une redevance fixe établie en fonction du nombre de membres. Cette redevance oscille entre 50 $ et 500 $ par année. Le montant de cette redevance est le même que celui prévu dans le Tarif 6.B de Ré:Sonne (2013 2017).

[20] En ce qui a trait aux cours de conditionnement physique, le tarif convenu prévoit un taux de redevance à verser par cours donné. Ces taux varient maintenant entre 41,7 ¢ et 46,7 ¢ par cours. Ils sont majorés par rapport au Tarif 6.B de Ré:Sonne (2013 2017), par un pourcentage inférieur au taux d’inflation mesuré sur la même période.

[21] Il n’y a aucun élément nouveau dans la présente instance qui nous fait remettre en question le caractère juste et équitable des taux préalablement approuvés. Les taux prévus dans le tarif convenu sont identiques à ceux du tarif préalablement approuvé, ou ont subi une augmentation inférieure à l’inflation. Par conséquent, nous concluons que les taux prévus dans le tarif convenu sont justes et équitables.

ii. Modalités

[22] La plupart des modalités prévues dans le tarif convenu sont très semblables à celles qui figurent dans le Tarif 6.B de Ré:Sonne (2013 2017) et nous les jugeons adéquates. Cependant, certaines diffèrent considérablement du tarif précédent et requièrent des modifications en ce qui a trait au traitement des trop perçus et des moins perçus, et aux renseignements confidentiels.

[23] Contrairement à son prédécesseur, le tarif convenu prévoit qu’aucun intérêt ne devrait être perçu sur les trop perçus (déjà perçus par Ré:Sonne). Cependant, en cas de paiement insuffisant, c’est à dire les paiements désormais dus à Ré:Sonne, des intérêts devraient être payés selon le tarif convenu. Dans ses observations, Ré:Sonne soutenait que cette modification du tarif préalablement homologué est une [TRADUCTION] « [modification] mineure du libellé [qui a été] apportée à des fins de clarté et de cohérence avec d’autres tarifs de Ré:Sonne » [5] . Nous ne sommes pas d’accord pour dire que cela justifie un traitement asymétrique des trop perçus et des moins perçus.

[24] Dans des décisions antérieures, la Commission a conclu que le traitement asymétrique des trop perçus et des moins perçus n’était pas raisonnable. Par exemple, dans le Tarif 6.C de Ré:Sonne (2013 2018) [6] , la Commission a modifié les modalités d’une convention de manière à imposer un traitement symétrique, en s’appuyant notamment sur ses décisions Tarif 5 de Ré:Sonne (2008 2012) [7] , Access Copyright (Établissement d’enseignement) 2005-2009Réexamen [8] et Radio commerciale (2016) [9] . Dans Tarif 5 de Ré:Sonne (2008-2012), la Commission a également souligné qu’une simple entente conclue entre les parties à cet égard ne constitue pas une justification suffisante [10] .

[25] À notre avis, le même raisonnement s’applique en l’espèce. Pour trancher ce point, nous modifions les modalités du tarif convenu de manière à apporter la précision suivante : « Tout paiement en surplus découlant d’une erreur ou d’une omission de la part de Ré:Sonne porte intérêt de la date du trop-perçu jusqu’à la date de son remboursement [11] ».

[26] En outre, nous concluons que les dispositions divergentes prévues par le tarif convenu en ce qui a trait au partage de renseignements confidentiels doivent être modifiées. Selon le tarif convenu, Ré:Sonne peut communiquer des renseignements regroupés et confidentiels avec [TRADUCTION] « ses mandataires et fournisseurs de services, s’ils ont signé une entente de confidentialité »; « la SOCAN, à condition que la confidentialité soit préservée; » et « une personne qui demande le versement de redevances, dans la mesure où cela est nécessaire pour effectuer la distribution de redevances ».

[27] Dans le Tarif 6.C de Ré:Sonne (2013-2018), la Commission a fait remarquer que toute communication de renseignements confidentiels avec les fournisseurs de services ne doit se faire que « [dans la mesure de] ce qui est requis par les fournisseurs pour rendre les services pour lesquels ils ont été retenus » et uniquement si les fournisseurs signent un accord de confidentialité à titre de mesure de protection [12] . Cette disposition est semblable à des décisions pour d’autres tarifs de Ré:Sonne, dans lesquelles la Commission a expliqué que le partage de renseignements entre les sociétés de gestion traitant avec la même clientèle est efficient et souhaitable [13] . Par conséquent, nous modifions ces dispositions de sorte que le partage de renseignements avec les fournisseurs de services ne soit possible que « dans la mesure de ce qui est requis par les fournisseurs pour rendre les services pour lesquels ils ont été retenus ». Les renseignements pouvant être partagés en vertu du tarif approuvé doivent être protégés par un accord de confidentialité.

[28] Nous faisons un autre changement, mineur, au texte du tarif. L’alinéa 4(1)(a) du tarif convenu fait référence au « paragraphe 4(2) du Tarif des fournisseurs de musique de fond de Ré:Sonne, 2010‑2013. » Une référence spécifique au tarif 3.A pour les années 2010 à 2013 risque de devenir obsolète lorsque la Commission homologuera le tarif 3.A pour les années subséquentes. Afin de diminuer ce risque, nous enlevons la référence à « 2010 à 2013. » Par conséquent, nous enlevons aussi la référence au « paragraphe 4(2). »

V. Conclusion

[29] Comme nous l’avons déjà mentionné, nous sommes dans l’incapacité de confirmer avec une certitude absolue que les parties au règlement et les autres opposants sont conjointement représentatifs des utilisateurs qui seraient visés par un tarif fondé sur le tarif convenu, bien que nous reconnaissions qu’ils représentent probablement une grande partie de ces utilisateurs.

[30] Cependant, compte tenu de notre conclusion selon laquelle le taux des redevances n’a pas subi d’augmentation supérieure à l’inflation par rapport au dernier tarif approuvé, et puisque nous ne sommes pas au courant de changements majeur dans le marché concerné, nous concluons que les taux sont justes et équitables.

[31] Bien que le tarif convenu n’aborde pas l’objection de GoodLife au sujet de la structure des redevances, nous ne disposons d’aucune preuve selon laquelle cette structure pourrait poser des problèmes à l’avenir. Par conséquent, nous ne modifions pas la structure des redevances pour nous plier à l’objection de GoodLife.

[32] En outre, nous concluons que les modalités du tarif convenu sont appropriées, à condition d’apporter quelques modifications mineures au sujet du traitement symétrique des trop perçus et des moins perçus et de la protection des renseignements confidentiels.

[33] Pour ces motifs, nous concluons qu’un tarif basé sur le tarif convenu, une fois les modifications exposées ci-dessus apportées, est juste et équitable, et nous l’approuvons sous le titre Tarif Ré:Sonne 6.B – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités physiques (2018 2022).



[1] Ordonnance CB‑CDA 2020‑025 (24 mars 2020).

[2] Lettre de Ré:Sonne : Tarif 6.B de Ré:Sonne – Activités de conditionnement physique, 2018‑2022 (25 juin 2020).

[3] Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, c C‑42, art. 66.501.

[4] Dans la décision Tarif 6.B de Ré:Sonne – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner des activités de conditionnement physique (2013-2017) de la Commission datée du 12 janvier 2018 (la « décision 2013‑2017 »), au par. 22, la Commission a conclu que « [c]ollectivement, le CSCP et GoodLife représentent un grand nombre d’établissements de conditionnement physique au Canada, allant de petits établissements de 10 membres à de très grandes chaînes comme GoodLife ».

[5] Demande d’homologation, lettre de Ré:Sonne à la Commission, datée du 6 décembre 2018, à la p. 2.

[6] Tarif 6.C de Ré:Sonne – Utilisation de musique enregistrée pour accompagner un divertissement pour adultes (2013-2018) (21 juillet 2017), décision de la Commission du droit d’auteur, aux paras 29‑30.

[7] Tarif 5 de Ré:Sonne – Utilisation de musique pour accompagner des événements en direct, 2008‑2012 (Parties A à G) (25 mai 2012), décision de la Commission du droit d’auteur, aux paras 53 et 61. [Tarif 5 de Ré:Sonne, 2008‑2012]

[8] Access Copyright (Établissements d'enseignement) 2005-2009 — Réexamen (18 janvier 2013), décision de la Commission du droit d’auteur, aux paras 39‑40.

[9] Tarif pour la radio commerciale (SOCAN (2011-2013); Ré:Sonne (2012-2014); CSI (2012-2013); Connect/SOPROQ (2012-2017); Artisti (2012-2014) (21 avril 2016), décision de la Commission du droit d’auteur, au para 409.

[10] Supra note 7, au para 55.

[11] Un libellé similaire a récemment été employé dans le Tarif 5 de la SODRAC (Reproduction d'œuvres musicales dans des œuvres cinématographiques pour usage privé ou en salle) (28 septembre 2018), décision de la Commission du droit d’auteur.

[12] Voir Tarif 6.C de Ré:Sonne (2013-2018), au para 27, citant Tarif pour la radio commerciale (SOCAN (2011-2013); Ré:Sonne (2012-2014); CSI (2012-2013); Connect/SOPROQ (2012-2017); Artisti (2012-2014) (21 avril 2016), décision de la Commission du droit d’auteur, au para 406.

[13] Voir, par exemple, Tarif 3.A de Ré:Sonne – Fournisseurs de musique de fond (2010-2013); Tarif 3.B de Ré:Sonne – Musique de fond (2010-2015) (1er septembre 2017), décision de la Commission du droit d’auteur, aux paras 80 à 83, citant Tarif 5 de Ré:Sonne – Utilisation de musique pour accompagner des événements en direct, 2008-2012 (Parties A à G) (25 mai 2012), décision de la Commission du droit d’auteur, au para 41.

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