Contenu de la décision

Copyright Board
Canada

Canada Coat of Arms/Armoiries du Canada

Commission du droit d’auteur
Canada

 

Date

2017-01-27

Référence

CB-CDA 2017-008

Régime

Gestion collective du droit d’exécution et du droit de communication

Loi sur le droit d’auteur, paragraphe 68(3)

Commissaires

L’honorable Robert A. Blair

Me Claude Majeau

Me J. Nelson Landry

Projets de tarif examinés

Tarif no 22.D.1 de la SOCAN – Internet – Services audiovisuels en ligne (2007-2013)

Tarif des redevances à percevoir pour l’exécution en public ou la communication au public par télécommunication, au Canada, d’œuvres musicales

Motifs de la décision

I. INTRODUCTION

[1] Le 18 juillet 2014, la Commission a rendu une décision homologuant le Tarif no 22.D.1 de la SOCAN – Internet – Services audiovisuels en ligne (2007-2013). Ce tarif vise les services audiovisuels en ligne interactifs qui transmettent des diffusions Web d’œuvres audiovisuelles à des utilisateurs.

[2] Dans sa décision, la Commission a conclu que la preuve était insuffisante pour mettre en doute l’équité de la redevance minimale qu’elle a homologuée pour les services qui offrent des essais gratuits. En raison du fait qu’elle n’avait pas participé au processus d’opposition ainsi que des délais qui se produiraient nécessairement s’il lui était permis d’intervenir à une étape tardive de l’instance, Netflix n’avait pas été autorisée à produire de nouveaux éléments de preuve ou à présenter des observations à ce sujet.

[3] La formation qui a rendu la décision de la Commission était constituée de l’honorable William J. Vancise, de Me Claude Majeau et de Me J. Nelson Landry.

[4] Le 15 août 2014, Netflix a déposé une demande de contrôle judiciaire devant la Cour d’appel fédérale (la « Cour ») en vue de faire annuler l’alinéa 3b) du Tarif 22.D.1 (2007-2013), qui porte sur les redevances relatives aux abonnements d’essai gratuits.

[5] Dans le cadre de sa demande, Netflix a notamment fait valoir qu’elle avait essentiellement été privée de son droit d’être entendue au sujet de l’alinéa 3b) du Tarif 22.D.1, une disposition qui ne figurait pas dans les versions des projets de tarif qui ont été publiés dans la Gazette du Canada en vertu du paragraphe 67.1(5) de la Loi sur le droit d’auteur. [1]

[6] Le 17 décembre 2015, la Cour a rendu sa décision. Elle a accueilli la demande de Netflix et annulé la décision de la Commission dans la mesure où elle porte sur les redevances payables pour l’offre d’abonnements d’essai gratuits. La Cour a renvoyé l’affaire à « une autre formation différemment [constituée] de la Commission pour qu’elle rende une nouvelle décision ». [2]

[7] La Cour a conclu qu’il y avait eu manquement au devoir d’équité procédurale en raison du refus de la Commission de permettre à Netflix de faire valoir ses arguments. La Cour a indiqué que, même si Netflix ne s’était pas prévalue en temps utile du délai de 60 jours pour participer au processus d’opposition et que, de ce fait, elle n’avait pas eu le droit d’être entendue, « l’industrie touchée par la disposition en cause jouissait de ce droit et [Netflix] devait avoir la possibilité d’être entendue et de présenter ses arguments ». [3]

[8] Et la Cour d’ajouter les précisions suivantes :

[43] Étant donné que les tarifs homologués par la Commission sont d’application générale, les intérêts qui doivent être pris en considération sont ceux d’une industrie, par opposition à ceux d’un particulier ou d’une entité. Il s’agit d’un facteur pertinent dont il faut tenir compte quand on recherche s’il y a eu atteinte au devoir d’équité procédurale.

[44] Un autre facteur dont il faut nécessairement tenir compte est le fait qu’en adoptant l’article 67.1 de la Loi sur le droit d’auteur, le législateur fédéral a établi un mécanisme d’opposition afin de permettre aux parties visées de se faire entendre. Ce droit ne peut pas être perdu ni refusé chaque fois que la Commission homologue un tarif qui contient un sujet qui ne se trouvait pas dans le tarif mis à la disposition du public. Il n’y a pas de doute que l’avis donné publiquement à l’industrie par l’entremise de la Gazette du Canada est crucial en ce qui concerne la décision de s’opposer ou non à un projet de tarif. [4]

[9] Le 21 juillet 2016, la Commission a enclenché un processus visant à réexaminer les redevances relatives aux essais gratuits conformément à la décision de la Cour. Les parties ont été invitées à présenter des observations sur la nature du processus de réexamen, la constitution de la formation, la nature de la preuve nécessaire pour rendre une nouvelle décision, le calendrier de l’instance et toute autre question jugée pertinente.

[10] En ce qui concerne la deuxième question, à savoir la constitution de la formation, la Commission a indiqué qu’elle estimait à première vue qu’une formation constituée des membres actuellement en place serait appropriée en l’espèce. Depuis la décision de la Cour, la constitution de la Commission a été modifiée par le remplacement de l’honorable William J. Vancise par l’honorable Robert A. Blair, à titre de président.

[11] Les observations finales de toutes les parties devaient être déposées au plus tard le vendredi 2 septembre 2016.

[12] Le 22 août 2016, la SOCAN et Netflix ont demandé une prorogation du délai pour répondre à l’avis de la Commission jusqu’au 31 octobre 2016. Cela devait leur permettre d’engager des discussions entre elles concernant une résolution éventuelle de la question des essais gratuits, ce qui permettrait d’éviter un réexamen contesté, d’en négocier et rédiger les modalités et de consulter les autres parties.

[13] Le même jour, la Commission a accordé la prorogation, à la condition que les observations finales de toutes les parties soient déposées au plus tard le lundi 14 novembre 2016.

[14] Le 31 octobre 2016, la Commission a été informée que la SOCAN et Netflix avaient entrepris des négociations et s’étaient entendues, avec le consentement de Cineplex Entertainment LP, pour remplacer l’alinéa 3b) du tarif homologué par le projet de libellé suivant :

[TRADUCTION] b) pour un service qui offre des abonnements aux utilisateurs : 1,7 % (années 2007 à 2010) et 1,9 % (années 2011 à 2013) des montants versés par les abonnés, sujet à un minimum mensuel de 6,8 ¢ (années 2007 à 2010) et de 7,5 ¢ (années 2011 à 2013) par abonné. Dans le cas d’un unique et premier essai gratuit d’une durée d’au plus un mois inclus dans toute période de 12 mois destiné à inciter un abonné potentiel à souscrire à un abonnement payant, aucun paiement de redevance n’est dû; (« proposition de règlement »).

[15] La SOCAN et Netflix ont en outre indiqué qu’il ne serait pas nécessaire de tenir une audience et ont demandé à la Commission d’homologuer le Tarif 22.D.1 (2007-2013), tel qu’il est modifié ci-dessus en ce qui a trait à l’alinéa 3b).

[16] Le 7 novembre 2016, l’avocat de Bell Canada, Yahoo! Canada, Rogers Communications et Québecor Média inc. (collectivement appelés « les services ») a avisé la Commission que les services ne s’opposaient pas au libellé proposé par la SOCAN et Netflix.

[17] Le même jour, l’Association canadienne des radiodiffuseurs et Facebook ont avisé la Commission qu’ils ne prenaient pas position à l’égard de la proposition de règlement.

II. ANALYSE

A. Constitution de la formation aux fins du réexamen

[18] Aucune des parties n’a formulé d’observations sur l’opinion préliminaire de la Commission selon laquelle une formation constituée des membres actuellement en place serait appropriée en l’espèce.

[19] La Commission estime que la notion de « formation différemment constituée » comprend toute formation dont les membres ne sont pas tous les mêmes, contrairement à l’interprétation plus restrictive selon laquelle cette notion se limite à une formation entièrement constituée de nouveaux membres. Les tribunaux emploient généralement des termes plus précis lorsqu’une formation entièrement différente est exigée. [5]

[20] Quoi qu’il en soit, à notre avis, la doctrine de la nécessité [6] s’appliquerait dans les présentes circonstances pour permettre à une formation constituée de membres actuellement en fonction de rendre une nouvelle décision même si le président est le seul à ne pas avoir participé à la décision initiale. La nécessité découle également du fait que la Commission est le seul décideur chargé par la loi de rendre la décision de réexamen et qu’elle ne se compose actuellement que de trois membres.

B. Proposition de règlement

[21] Les seules différences qui existent entre la proposition de règlement et le tarif initialement homologué ont trait à une redevance minimale supplémentaire par abonné et à une nouvelle disposition selon laquelle les essais gratuits uniques d’une durée d’un mois inclus dans toute période d’abonnement de 12 mois ne sont assujettis à aucune redevance (voir l’annexe pour une comparaison entre le libellé initialement homologué et le libellé de la proposition de règlement).

[22] Tel que précédemment indiqué, toutes les parties ont eu la possibilité de formuler des observations sur la proposition de règlement et aucune ne s’y est opposée. De plus, pour la période visée, la Commission estime que la proposition de règlement tient maintenant compte des intérêts de tous les utilisateurs éventuels concernés, y compris les services audiovisuels en ligne qui offrent des essais gratuits comme Netflix.

III. LIBELLÉ DU TARIF

[23] L’alinéa 3b) figurant dans la proposition de règlement stipule un essai gratuit d’une durée d’au plus un mois. La Commission croit comprendre qu’il s’agit d’un mois civil, qui peut en fait compter de 28 à 31 jours. Pour écarter toute ambiguïté et par souci de clarté, le tarif doit prévoir expressément que l’essai gratuit peut être d’une durée d’au plus 31 jours (voir l’annexe pour une comparaison entre le libellé de la proposition de règlement et le libellé homologué par la Commission).

[24] Par conséquent, la Commission remplace l’alinéa 3b) du tarif initialement homologué par l’alinéa 3b) suivant, et homologue le tarif en conséquence :

3b) pour un service qui offre des abonnements aux utilisateurs : 1,7 % (années 2007 à 2010) et 1,9 % (années 2011 à 2013) des montants versés par les abonnés, sujet à un minimum mensuel de 6,8 ¢ (années 2007 à 2010) et de 7,5 ¢ (années 2011 à 2013) par abonné. Dans le cas d’un unique et premier essai gratuit d’une durée d’au plus 31 jours inclus dans toute période de 12 mois destiné à inciter un abonné potentiel à souscrire à un abonnement payant, aucun paiement de redevance n’est dû;

Le secrétaire général,

Signature

Gilles McDougall

Annex / Annexe

Initially certified wording

Wording of the settlement proposal

Certified wording

Libellé initialement homologué

Libellé de la proposition de règlement

Libellé homologué

3(b) For a service that offers subscriptions to end users: 1.7% for the years 2007-2010, and 1.9% for the years 2011-2013, of the amounts paid by subscribers. In the case of free trials, a minimum monthly fee of 6.8¢ for the years 2007-2010 and 7.5¢ for the years 2011-2013 per free trial subscriber shall apply;

3(b) For a service that offers subscriptions to end-users: 1.7% for the years 2007-2010 and 1.9% for the years 2011-2013 of the amounts paid by subscribers, subject to a minimum monthly fee of 6.8¢ for the years 2007-2010 and 7.5¢ for the years 2011-2013 per subscriber. In the case of a single, initial free trial of no more than one month’s duration in any 12 month period offered to induce a prospective subscriber to enter into a paid subscription, there shall be no royalty fee payable;

3(b) For a service that offers subscriptions to end-users: 1.7% for the years 2007-2010 and 1.9% for the years 2011-2013 of the amounts paid by subscribers, subject to a minimum monthly fee of 6.8¢ for the years 2007-2010 and 7.5¢ for the years 2011-2013 per subscriber. In the case of a single, initial free trial of no more than one month’s duration up to 31 days in any 12-month period offered to induce a prospective subscriber to enter into a paid subscription, there shall be no royalty fee payable;

3b) pour un service qui offre des abonnements aux utilisateurs : 1,7 % (années 2007 à 2010) et 1,9 % (années 2011 à 2013) des montants versés par les abonnés; dans le cas d’abonnements d’essai gratuits, un minimum mensuel de 6,8 ¢ (années 2007 à 2010) et de 7,5 ¢ (années 2011 à 2013) par abonné au service gratuit s’applique;

[TRADUCTION] 3b) pour un service qui offre des abonnements aux utilisateurs : 1,7 % (années 2007 à 2010) et 1,9 % (années 2011 à 2013) des montants versés par les abonnés, sujet à un minimum mensuel de 6,8 ¢ (années 2007 à 2010) et de 7,5 ¢ (années 2011 à 2013) par abonné. Dans le cas d’un unique et premier essai gratuit d’une durée d’au plus un mois inclus dans toute période de 12 mois destiné à inciter un abonné potentiel à souscrire à un abonnement payant, aucun paiement de redevance n’est dû;

3b) pour un service qui offre des abonnements aux utilisateurs : 1,7 % (années 2007 à 2010) et 1,9 % (années 2011 à 2013) des montants versés par les abonnés, sujet à un minimum mensuel de 6,8 ¢ (années 2007 à 2010) et de 7,5 ¢ (années 2011 à 2013) par abonné. Dans le cas d’un unique et premier essai gratuit d’une durée d’au plus un mois 31 jours inclus dans toute période de 12 mois destiné à inciter un abonné potentiel à souscrire à un abonnement payant, aucun paiement de redevance n’est dû;

 



[1] Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42.

[2] Netflix, Inc. c. Société Canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2015 CAF 289 au para 53.

[3] Ibid au para 42.

[4] Ibid aux para 43-44.

[5] Voir Dulmage v. Ontario (Police Complaints Commissioner) (1994) 21 OR (3e) 356, 1994 CanLII 8773 (ON SCDC); voir par ex Association canadienne des radiodiffuseurs c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2006 CAF 337 au para 24.

[6] Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale de l’Île- du-Prince-Édouard, [1998] 1 RCS 3 au para 6.

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