Loi sur le statut de l'artiste

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Décision no 049

Décisions du Tribunal

Ottawa, le 23 février 2005 Dossier  : 1340-04-001


Dans l'affaire d'une demande faite en vertu de l'article 30 de la Loi sur le statut de l'artiste mettant en cause l'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son


Décision du Tribunal :

La demande est accueillie. L'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son succède au regroupement formé de l'Association des professionnelles et des professionnels de la vidéo du Québec et du Syndicat des techniciens du cinéma et de la vidéo du Québec dans les droits, privilèges et obligations conférés par la partie II de la Loi sur le statut de l'artiste.

Date de l'audience : Le 19 janvier 2005

Quorum: Me Marie Senécal-Tremblay, présidente de séance
Me John M. Moreau, membre
Mme Lyse Lemieux, membre


Motifs de décision

1340-04-001 : Dans l'affaire d'une demande faite en vertu de l'article 30 de la Loi sur le statut de l'artiste mettant en cause l'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son


Introduction

[1] La présente décision porte sur une demande de déclaration en vertu de l'article 30 de la Loi sur le statut de l'artiste (la « Loi ») déposée le 12 novembre 2004 par l'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son (« AQTIS »). La question sur laquelle le Tribunal doit se prononcer est la suivante : l' AQTIS succède-t-elle au regroupement formé de l'Association des professionnelles et des professionnels de la vidéo du Québec et du Syndicat des techniciens du cinéma et de la vidéo du Québec dans les droits, privilèges et obligations conférés par la partie II de la Loi? Une formation du Tribunal s'est réunie le 19 janvier 2005 pour examiner cette question et a rendu sa décision se basant sur les représentations écrites de l' AQTIS.

Contexte

[2] L' AQTIS allègue être le fruit d'une fusion entre l'Association des professionnelles et des professionnels de la vidéo du Québec (« APVQ ») et le Syndicat des techniciens du cinéma et de la vidéo du Québec (« STCVQ »). Elle demande au Tribunal de reconnaître qu'elle succède à ces dernières dans leurs droits, privilèges et obligations conférés par la partie II de la Loi sur le statut de l'artiste, dont notamment les droits et obligations découlant de l'accréditation octroyée par le Tribunal (2003 TCRPAP 041) au regroupement formé de l'APVQ et du STCVQ (le « Regroupement ») et des accords-cadres conclus sous l'empire de la Loi.

[3] À l'appui de sa demande, l' AQTIS soumet une copie de ses statuts et règlements et une copie des lettres patentes de fusion entre le STCVQ et l'APVQ délivrées par le Registraire des entreprises (Québec). L' AQTIS soumet également au Tribunal un nouveau libellé de secteur qui reflète la fusion des deux associations sans changer la portée du secteur.

[4] L' AQTIS soutient que la fusion de deux personnes morales incorporées sous l'empire de la partie III de la Loi sur les compagnies (L.R.Q., chap. C-38) (la « Loi sur les compagnies ») en une seule fait en sorte que la nouvelle personne morale succède aux entités fusionnées dans leurs droits et obligations.

[5] La Loi prévoit ce qui suit à l'article 30 :

30. (1) Dans les cas de fusion d'associations d'artistes ou de transfert de compétence entre elles, l'association qui succède à une autre association accréditée au moment de l'opération est réputée subrogée dans les droits, privilèges et obligations de cette dernière - conférés par la présente partie -, que ceux-ci découlent d'un accord-cadre ou d'une autre source.

(2) Le Tribunal tranche, à la demande de l'une des associations d'artistes touchées par l'opération, les questions relatives aux droits, privilèges et obligations que l'association peut acquérir dans le cadre de la présente partie ou d'un accord-cadre.

Du libellé de ces dispositions nous semble découler deux principes généraux que nous appliquerons dans notre analyse des faits en l'espèce. Le premier principe veut que l'association qui succède doit être une association d'artistes au sens de la Loi. Le second principe veut que le rôle du Tribunal se limite à constater l'existence de la fusion et à en déterminer les conséquences.

Analyse

La nature de l'entité qui succède :

[6] L'article 30 réfère à une «  association qui succède à une autre association accréditée » (nous soulignons). Il en découle que l'association alléguant être le successeur d'une autre doit préalablement démontrer au Tribunal qu'elle est elle-même une association d'artistes ou un regroupement d'associations d'artistes tel que défini à l'article 5 de la Loi.

[7] Comme corollaire à cette exigence, nous sommes d'avis que les règlements de l'association qui succède devraient également répondre aux critères préalables à l'accréditation prévus à l'article 23 de la Loi.

[8] Bien que nous ne soyons pas en présence d'une demande d'accréditation, il nous semble illogique de permettre à une association d'obtenir une accréditation indirectement alors que ses statuts et règlements l'en auraient empêchée dans le cadre d'une demande d'accréditation.

[9] Les dispositions susmentionnées de la Loi se lisent comme suit :

5. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie.
[...]
« association d'artistes » Groupement — y compris toute division ou section locale de celui-ci — ayant parmi ses objets la promotion ou la gestion des intérêts professionnels et socio-économiques des artistes qui en sont membres; la présente définition vise également les regroupements d'associations.
[...]

23. (1) L'accréditation d'une association d'artistes est subordonnée à la prise de règlements qui :

  1. établissent des conditions d'adhésion;

  2.  habilitent ses membres actifs à participer à ses assemblées, à y voter et à se prononcer par scrutin sur la ratification de tout accord-cadre les visant;

  3. garantissent aux membres le droit d'obtenir une copie des états financiers du dernier exercice certifiée conforme par le dirigeant de l'association autorisé à le faire.

(2) Les règlements d'une association d'artistes ne peuvent contenir aucune disposition ayant pour effet d'empêcher injustement un artiste d'adhérer ou de maintenir son adhésion à celle-ci ou de se qualifier comme membre.

[10] Une lecture attentive des statuts et règlements de l' AQTIS révèle que ces derniers répondent aux exigences minimales énoncées dans la Loi. L'article 1.6 des statuts énonce parmi les buts de l'association :

[...] l'étude, la défense, le développement et la promotion des intérêts sociaux, professionnels, économiques, politiques et moraux de ses membres [...]

Ces buts sont en accord avec le libellé de l'article 5 de la Loi, précité.

[11] Le règlement R-1 de l' AQTIS prévoit les conditions d'adhésion à l'association, tel que l'exige l'alinéa 23(1)a) de la Loi. L'article 3.1.1 des statuts de l' AQTIS prévoit que « l'assemblée générale est constituée de tous les membres en règle de l'association »; l'article 3.1.2.2.2 prévoit que tous les membres ont droit de vote aux assemblées générales de l'association; et le paragraphe d) de l'article 3.1.2.1 prévoit le droit des membres de ratifier un accord-cadre les visant, le tout tel que l'exige l'alinéa 23(1)b) de la Loi.

[12] L'article 2.1.1 des statuts de l' AQTIS prévoit un droit d'accès des membres aux documents de l'association, dont le plus récent rapport financier de l'association tel que l'exige l'alinéa 23(1)c) de la Loi.

[13] Finalement, la Loi prévoit au paragraphe 23(2) que les règlements d'une association ne peuvent contenir une disposition ayant pour effet d'empêcher injustement un artiste d'adhérer ou de maintenir son adhésion à celle-ci ou de se qualifier comme membre. Nous n'avons pas relevé l'existence de telles dispositions dans les statuts et règlements de l' AQTIS.

[14] Au contraire, nous notons qu'à l'alinéa a) du règlement R-1.1, l' AQTIS ouvre l'adhésion à quiconque est autorisé à travailler au Canada en vertu des lois applicables. L' AQTIS évite ainsi d'énoncer une exigence plus restrictive, limitant par exemple l'adhésion aux seuls citoyens canadiens, qui auraient pu susciter des interrogations de la part du Tribunal quant à un possible effet discriminatoire envers les réfugiés ou immigrants reçus comme cela a été le cas dans le passé dans le cadre de certaines demandes d'accréditation (voir : 1996 TCRPAP 018; 1997 TCRPAP 023). Nous notons également que le règlement R-1.2 de l' AQTIS prévoit la reconnaissance d'une expérience acquise à l'extérieur du Québec ou à l'extérieur du champ de compétence de l' AQTIS.

[15] Nous notons finalement que l' AQTIS, en vertu de l'article 1.7 de ses statuts et de l'annexe à laquelle il réfère, est dotée d'une politique exhaustive en matière de prévention de la discrimination comprenant notamment la formation d'un comité ayant pour mandat d'assurer l'application de cette politique.

L'existence de la fusion et ses conséquences :

[16] Le pouvoir du Tribunal, tel que le prévoit l'article 30, est de constater l'existence d'une fusion et de définir les droits qui en découlent en vertu de la partie II de la Loi.

[17] En l'espèce, les deux entités fusionnées – l' APVQ et le STCVQ – étaient des personnes morales créées sous l'empire de la partie III de la Loi sur les compagnies qui régit les personnes morales ou associations n'ayant pas de capital-actions. La délivrance par le Registraire des entreprises de lettres patentes de fusions constitue en soi la preuve qu'une fusion en vertu de la Loi sur les compagnies a bel et bien eu lieu et que l' AQTIS est la personne morale qui succède effectivement à l' APVQ et à la STCVQ.

Conclusion

[18] Il découle de la preuve soumise au Tribunal que l' AQTIS est une association d'artistes au sens de la Loi et qu'elle est le fruit d'une fusion entre l' APVQ et la STCVQ faite en vertu de la Loi sur les compagnies. L' APVQ et la STCVQ étant les seuls membres du regroupement accrédité par le Tribunal, nous sommes d'avis qu'en vertu de l'article 30 de la Loi l' AQTIS succède au Regroupement dans les droits découlant de la Partie II de la Loi.

[19] Un nouveau certificat d'accréditation sera émis par le Tribunal et se lira comme suit :

Par les Présentes, le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs accorde à :

L'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son ( AQTIS)

l'accréditation pour représenter un secteur qui comprend tous les entrepreneurs indépendants professionnels engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste pour exercer les fonctions d'assistant réalisateur, premier assistant à la réalisation, directeur de la photographie, cadreur, caméraman (incluant steady-cam, baby-boom et caméra opérée via un système spécialisé [C.O.S.S.]), photographes de plateau, directeur d'éclairage, preneur de son, bruiteur, infographiste, technicien aux effets spéciaux en infographie, concepteur de maquillages, chef maquilleur, maquilleur, assistant maquilleur, maquilleur d'effets spéciaux, prothésiste, assistant prothésiste, concepteur de coiffures, chef coiffeur, coiffeur, perruquier, créateur de costumes, costumier, concepteur de marionnettes, assistant directeur artistique, chef décorateur, concepteur d'accessoires, chef accessoiriste, chef peintre, peintre scénique, sculpteur-mouleur, dessinateur, technicien d'effets spéciaux de plateau, directeur ou régisseur de plateau (à l'exclusion des directeurs de plateau dans le doublage), régisseur, régisseur d'extérieur, scripte, monteur, monteur d'images hors ligne, monteur d'images en ligne, monteur sonore, mixeur de son, dans le cadre de toutes les productions audiovisuelles tournées principalement au Québec, en toutes langues, par tout moyen et sur tout support, incluant le film, la télévision, l'enregistrement vidéo, le multimédia et les réclames publicitaires.


Ottawa, le 23 février 2005

Me Marie Senécal-Tremblay,
Présidente de séance

Me John M. Moreau,
Membre

Mme Lyse Lemieux,
Membre

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