Loi sur le statut de l'artiste

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Décision no 024

Décisions du Tribunal

Ottawa, le 30 décembre 1997 Dossier No : 95-0020-A
95-0016-A
95-0021-A


Concernant la demande d'accréditation de l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec; de l'Union des artistes no 2 (metteurs en scène et chorégraphes); et de l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (metteurs en scène)


Lieu de l'audience : Montréal (Québec)

Date de l'audience : 9, 10, 11 et 12 septembre 1997; 21et 22 octobre 1997

Quorum: André Fortier, président
Robert Bouchard, membre
David P. Silcox, membre

Comparutions:

Dans le dossier de l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec :
Alarie, Legault, Beauchemin Paquin, Jobin & Brisson, Avocats;
Me Dominique Jobin pour l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec.
Lafortune, Leduc; Me Louise Cadieux pour l'Union des Artistes.
Sauvé et Roy, Avocat-e-s; Me Serge Lavergne pour l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec.
M. Guy Gauthier pour l'Office national du film du Canada

Dans le dossier de l'Union des Artistes n° 2 (metteurs en scène et chorégraphes) :
Lafortune, Leduc; Me Louise Cadieux pour l'Union des Artistes.
Alarie, Legault, Beauchemin Paquin, Jobin & Brisson, Avocats;
Me Dominique Jobin pour l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec.
Sauvé et Roy, Avocat-e-s; Me Serge Lavergne pour l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec.
M. Guy Gauthier pour l'Office national du film du Canada
Martineau Walker, Avocats; Me Guy Gagnon pour la Fight Directors, Canada

Dans le dossier de l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (metteurs en scène) :
Sauvé et Roy, Avocat-e-s; Me Serge Lavergne pour l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec.
Lafortune, Leduc; Me Louise Cadieux pour l'Union des Artistes.
Alarie, Legault, Beauchemin Paquin, Jobin & Brisson, Avocats;
Me Dominique Jobin pour l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec.


Motifs de décision

95-0020-A : Concernant la demande d'accréditation déposée par l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec;
95-0016-A : Concernant la demande d'accréditation déposée par l'Union des Artistes;
95-0021-A : Concernant la demande d'accréditation déposée par l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec.


Introduction

[1] Les présents motifs de décision portent sur trois dossiers entendus conjointement à Montréal du 9 au 12 septembre 1997 et les 21 et 22 octobre 1997. Dans le cadre de ces journées d'audience le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs (le «Tribunal») a traité les affaires suivantes :

  1. la demande d'accréditation de l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (l'«ARRQ») (association autrefois appelée Association québécoise des réalisateurs et réalisatrices de cinéma et de télévision);
  2. la partie de la demande d'accréditation de l'Union des Artistes (l'«UDA») visant les fonctions de metteurs en scène et de chorégraphes, dossier dénommé UDA no 2;
  3. la partie de la demande d'accréditation de l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (l'«APASQ») visant les metteurs en scène.

[2] Ayant à l'esprit le paragraphe 19(1) de la Loi selon lequel le Tribunal doit, dans la mesure où les circonstances et l'équité le permettent, fonctionner sans formalisme et avec célérité, il fut décidé que la jonction de ces affaires était dans l'intérêt des parties en cause.

[3] Dans le dossier impliquant l'ARRQ, le Tribunal a entendu toute la preuve touchant le secteur proposé dans la demande d'accréditation, secteur qui vise les réalisateurs d'oeuvres audiovisuelles.

[4] Dans l'affaire UDA n° 2, le Tribunal a traité la question des metteurs en scène et des chorégraphes. En décembre 1995, l'UDA déposait une demande d'accréditation visant un secteur composé des artistes interprètes, des metteurs en scène et des chorégraphes. Suite à une audience tenue en juin 1996, le Tribunal accordait à l'UDA une accréditation partielle le 29 août 1996 pour représenter les artistes interprètes. L'examen de la demande relativement aux metteurs en scène et aux chorégraphes a été remis à plus tard. De même, dans les motifs de décision, le Tribunal a signalé son intention de traiter l'intervention de la Fight Directors, Canada lors d'une audience subséquente.

[5] Dans le dossier de l'APASQ, le Tribunal s'est penché sur la partie de la demande d'accréditation visant les metteurs en scène. En mars 1996, l'APASQ déposait une demande d'accréditation visant un secteur comprenant les metteurs en scène et divers concepteurs dans les domaines des arts de la scène. À cause du chevauchement avec la demande de l'UDA à l'égard des metteurs en scène, le Tribunal a décidé de traiter cette partie du dossier de l'APASQ. Le reste de la demande sera traitée à une date ultérieure.

[6] Dans les présents motifs, le Tribunal examinera les questions dont il est saisi selon l'ordre suivant :

  1. Les réalisateurs
  2. Les metteurs en scène
  3. Les chorégraphes
  4. Les directeurs de combat

I Les réalisateurs

Exposé des faits

[7] L'Association québécoise des réalisateurs et réalisatrices de cinéma et de télévision (l'«AQRRCT») a déposé auprès du Tribunal une demande d'accréditation en vertu de l'article 25 de la Loi sur le statut de l'artiste (L.C. 1992, ch. 33, appelée ci-après la «Loi») le 27 février 1996. Une audience avait été fixée pour les 11 et 12 septembre 1996 et fut reportée au 15 et 16 avril 1997, audience qui a dû également être reportée. À noter que le 14 août 1997, l'AQRRCT est devenue l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (l'«ARRQ») et sera dénommée ainsi dans les présents motifs.

[8] L'ARRQ a présenté une demande pour représenter auprès de tous les producteurs assujettis à la Loi sur le statut de l'artiste un secteur qui comprend :

  1. tout réalisateur résidant ou domicilié au Québec qui réalise une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue autre qu'en langue originale anglaise;
  2. tout réalisateur qui réalise une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue autre qu'en langue originale anglaise et dont le tournage est, en tout ou en partie, sur le territoire de la province de Québec;

y inclus tout «double-shooting», tout tournage dit «international» et toute oeuvre audiovisuelle sans parole.

[9] Un avis public annonçant cette demande a été publié dans la Gazette du Canada le samedi 30 mars 1996 et dans le Globe and Mail et La Presse le 3 avril 1996. Cet avis a également paru dans le numéro d'avril 1996 du bulletin INFO-FAX de la Conférence canadienne des arts. L'avis public fixait au 13 mai 1996 la date limite avant laquelle les artistes, les associations d'artistes, les producteurs et les autres intéressés devaient faire connaître au Tribunal la nature de leur intérêt.

[10] Dans le cadre d'une demande d'accréditation, les paragraphes 26(2) et 27(2) de la Loi prévoient que les artistes et les associations d'artistes peuvent intervenir devant le Tribunal sur toute question liée à la définition du secteur de négociation et à la détermination de la représentativité de la requérante. Conformément à ces dispositions, M. Bruce Hill et l'UDA ont informé le Tribunal qu'ils souhaitaient intervenir en l'espèce. Les représentations de M. Hill ne portaient pas sur les questions dont le Tribunal était saisi.

[11] Un producteur, l'Office national du film du Canada (l'«ONF»), a aussi fait part de son intérêt face la demande. Le paragraphe 26(2) de la Loi prévoit que les producteurs peuvent intervenir devant le Tribunal sur toute question liée à la définition du secteur, mais ils ne peuvent intervenir sur la question de la représentativité d'une association d'artistes sans la permission du Tribunal. L'ONF n'a pas demandé à intervenir sur la question de la représentativité de l'ARRQ.

[12] La demande d'accréditation de l'ARRQ soulève les questions suivantes :

  1. Est-ce que le secteur proposé par l'ARRQ est un secteur approprié aux fins de la négociation?

  2. L'ARRQ est-elle représentative des artistes du secteur?

Les questions soulevées

Question 1 : Est-ce que le secteur proposé par l'ARRQ est un secteur approprié aux fins de la négociation?

[13] L'ARRQ a initialement demandé à représenter auprès de tous les producteurs assujettis à la Loi sur le statut de l'artiste un secteur qui comprend :

  1. tout réalisateur résidant ou domicilié au Québec qui réalise une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue autre qu'en langue originale anglaise;
  2. tout réalisateur qui réalise une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue autre qu'en langue originale anglaise et dont le tournage est, en tout ou en partie, sur le territoire de la province de Québec;

y inclus tout «double-shooting», tout tournage dit «international» et toute oeuvre audiovisuelle sans parole.

[14] Lors de l'audience, l'ARRQ a suggéré que des précisions soient apportées au libellé du secteur proposé. Le secteur proposé doit donc se lire comme suit :

  1. tout réalisateur résidant ou domicilié au Québec qui réalise une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue autre qu'en langue originale anglaise; ou
  2. tout réalisateur qui réalise une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue autre qu'en langue originale anglaise et dont le tournage est, en tout ou en partie, sur le territoire de la province de Québec.

Pour fins de précisions, tout tournage en double-shooting, tout tournage en version originale dite internationale et toute oeuvre audiovisuelle sans parole ou avec un langage inventé sont réputés être en une langue autre qu'en langue originale anglaise.

[15] Le document de présentation déposé par l'ARRQ indique que cette dernière «regroupe ses membres dans tous les domaines de production : cinéma de fiction et documentaire, télévision, films publicitaires et corporatifs, ainsi que vidéo d'art». [Nos italiques] Il y a lieu de noter qu'en ce qui concerne la vidéo d'art, le 15 avril 1997, le Tribunal a accrédité le Regroupement des artistes en arts visuels du Québec (voir la décision n° 021) pour représenter les auteurs d'oeuvres artistiques originales de recherche ou d'expression, uniques ou d'un nombre limité d'exemplaires, exprimées, entre autres, par la vidéo d'art. Par conséquent, tout secteur visant des réalisateurs devra exclure les artistes représentés par le Regroupement des artistes en arts visuels du Québec qui font de la vidéo d'art.

La terminologie utilisée

Le double-shooting

[16] L'ARRQ définit le double shooting comme étant des oeuvres audiovisuelles tournées simultanément, une fois dans une langue et une autre fois dans une autre langue, et ce avec les mêmes décors et, en général, avec les mêmes comédiens.

Le tournage international

[17] L'ARRQ a précisé qu'il s'agit d'oeuvres audiovisuelles en version originale dite internationale qui sont tournées pour plusieurs marchés. Ces oeuvres sont souvent de types documentaires et sont conçues de façon à ce que chaque marché puisse y insérer un nouveau tournage dans les parties de l'oeuvre où l'on voit un animateur. L'animateur est remplacé dans chaque version par un animateur habituellement connu dans la langue de la traduction, tandis que la partie documentaire est postsynchronisée. Ordinairement, le contenu du documentaire demeure le même, mais il peut y avoir certaines modifications pour un pays donné.

[18] À titre d'exemple, l'ARRQ a mentionné la série documentaire Les Grands Défis de l'An 2000 où au Québec on pourrait voir Pierre Nadeau présenter la série, animer les segments et les capsules d'information documentaire. Lorsque le documentaire sera présenté en Italie, on y retrouvera les mêmes segments et capsules d'information documentaire, mais l'animateur sera une personnalité connue en Italie qui s'exprimera en italien.

[19] Dans les représentations écrites déposées par l'ONF, il y avait confusion à savoir ce que voulait dire «tournage dit international». L'ONF considérait qu'un tournage international était un tournage fait dans plusieurs pays. L'ONF a voulu s'assurer que la définition d'un «tournage dit international» ne s'appliquait pas à un réalisateur étranger invité à participer à une coproduction. L'ARRQ a confirmé que les versions dites internationales ne visent pas les coproductions au sens où on l'entend habituellement.

[20] Pour les fins de cette décision, le Tribunal accepte que le «tournage international» réfère au genre de tournage défini ci-dessus par l'ARRQ.

Les oeuvres audiovisuelles sans parole ou en langage inventé

[21] Le secteur proposé par l'ARRQ vise également des oeuvres audiovisuelles sans parole. L'ARRQ définit ces oeuvres comme des oeuvres audiovisuelles tournées sans parole ou avec un langage inventé.

[22] L'ONF a fait valoir qu'il produit un nombre important de films sans parole. Habituellement, ce sont des films d'animation où les personnages prononcent des mots ou des sons inintelligibles qui en font des produits universels.

Les fonctions d'un réalisateur

[23] L'ARRQ a déposé en preuve un document qui énonce les nombreuses fonctions d'un réalisateur. Selon la requérante, en plus de diriger la réalisation, la mise en scène et tous les enregistrements nécessaires à la livraison de l'oeuvre audiovisuelle, le réalisateur exerce plus spécifiquement, mais non limitativement, les tâches suivantes :

  1. il choisit les membres-clés de l'équipe de production, de l'équipe technique et de l'équipe de postproduction;
  2. il choisit tout interprète, participant et animateur;
  3. il dirige l'orientation du contenu et approuve la recherche visuelle, sonore et de contenu;
  4. il choisit tout support de tournage, de transfert, de montage et celui de la copie maîtresse (copie «0»);
  5. il est consulté sur le choix du support vidéo, des services techniques, salles et studios de postproduction;
  6. il détermine les méthodes de tournage;
  7. il prépare le déroulement de l'oeuvre audiovisuelle, le plan de travail détaillé et le découpage technique;
  8. il choisit et approuve les lieux de tournage et collabore au choix des studios d'enregistrement;
  9. il définit et approuve les choix artistiques tels l'infographie, les décors, les costumes, les maquillages et les accessoires;
  10. il dirige les répétitions;
  11. il dirige l'organisation des éléments créateurs et des éléments techniques de la production;
  12. il détermine les angles de prise de vues et les cadrages;
  13. il dirige, de façon exclusive, la mise en scène;
  14. il dirige, en cours de tournage, l'animateur, les interprètes, les participants et l'équipe technique;
  15. il choisit le compositeur et approuve la musique;
  16. il dirige le montage visuel et sonore ainsi que tous les travaux de finition jusqu'à la copie maîtresse, y compris le mixage de la version internationale, s'il y a lieu.

Il y a lieu de noter que selon le type de production, les fonctions, ou certaines d'entre elles, sont sous réserve du droit d'approbation du producteur.

[24] L'ARRQ a fait entendre les réalisateurs suivants : MM. André Mélançon, François Côté, Robert Desfonds, Claude Fournier, Jean Beaudin, Claude Maher, Pierre Paiement et Régent Bourque. Ces témoins ont tous affirmé que l'ensemble des fonctions énumérées au paragraphe précédent décrivent bien le rôle du réalisateur dans les productions audiovisuelles. Ils ont insisté sur l'importance de la vision globale que le réalisateur imprime à l'oeuvre audiovisuelle. Ils ont également affirmé que, sauf dans des cas exceptionnels où il y a partage des tâches avec des réalisateurs coordonnateurs ou des coréalisateurs, le réalisateur d'une oeuvre audiovisuelle portait à lui seul la responsabilité finale de l'oeuvre.

[25] L'ARRQ prétend que la mise en scène et la direction d'acteurs sont des fonctions intrinsèques du réalisateur d'une oeuvre audiovisuelle et qu'au Québec les termes metteur en scène et réalisateur sont synonymes au cinéma et à la télévision. La requérante soutient de plus que sur un plateau de tournage l'autorité du réalisateur ne peut en aucun cas être mise en cause.

[26] À l'appui de ces prétentions, les témoignages des réalisateurs ont été à l'effet que la fonction d'un réalisateur au cinéma et à la télévision équivalait à celui d'un metteur en scène à la scène en ce qui a trait à la vision artistique et à l'autorité finale. Appelés à décrire plus spécifiquement le rôle du réalisateur par rapport à la mise en scène et à la direction d'acteurs sur un plateau de tournage pour la télévision, les témoins ont souligné que, dans la très grande majorité des émissions produites pour la télévision (environ 3 000 à 4 000 par année), le réalisateur est le seul chargé de la mise en scène et de la direction d'acteurs. Quant au cinéma, les témoins ont aussi affirmé que les responsabilités afférentes à la direction d'acteurs et la mise en scène relèvent du réalisateur.

[27] Par ailleurs, bien que ce soit des cas rares et exceptionnels, les témoins ont affirmé qu'à l'occasion de captations d'oeuvres produites sur scène, d'adaptations télévisuelles d'oeuvres ayant fait l'objet d'une production sur scène, d'enregistrement de variétés scénarisées ou de galas produits à la fois sur scène devant un public et pour la télévision, un metteur en scène provenant de la scène pouvait être associé à la production audiovisuelle. Dans certains galas et dans les variétés scénarisées surtout, il arrive que l'autorité finale sur la production soit partagée entre le réalisateur et le metteur en scène, de sorte qu'il existe une direction bicéphale. Pour les émissions dramatiques (téléroman ou téléséries), les témoins ont identifié deux cas seulement où des metteurs en scène avaient été associés à la production.

[28] Dans son argumentation, l'ARRQ a fait valoir que lorsqu'il y a partage de la direction d'acteurs ou de la mise en scène, il s'agit d'une coréalisation parce le travail est véritablement partagé 50/50 et que l'oeuvre qui en découle n'existerait pas sans le travail de l'un et de l'autre. Selon l'ARRQ, une réelle mise en scène ou direction d'acteurs doit être reliée et coordonnée au plus haut niveau et il ne peut y avoir de travail en hiérarchie.

[29] L'ARRQ a expliqué qu'elle fait une distinction entre la captation «pure et dure», c'est-à-dire le cas où, par exemple, on installe des caméras pour capter une pièce de théâtre, mais où le réalisateur n'a pas participé au montage de la pièce et où il intervient de façon minimale dans la mise en scène (éclairage, petits changements aux costumes ou à l'entrée des comédiens sur scène), et les enregistrements de galas ou de variétés scénarisées. Dans le premier cas, le metteur en scène théâtre a créé une oeuvre selon sa vision artistique. Le captage de cette oeuvre est interdit à moins d'en obtenir l'autorisation qui fait l'objet d'entente contractuelle. Dans le second cas, les galas ou variétés scénarisées, la position de l'ARRQ est qu'un gala présenté à la fois sur scène et à la télévision est une oeuvre audiovisuelle et non seulement un spectacle parce que dès qu'il est prévu qu'il y aura des caméras de télévision, le spectacle est différent au niveau de la mise en scène, des éclairages, des costumes, des décors et du jeu des acteurs. L'ARRQ soutient également que l'adaptation télévisuelle d'une oeuvre ayant fait l'objet d'une production sur scène en fait également une nouvelle oeuvre audiovisuelle puisque les changements apportés à l'oeuvre sont souvent majeurs.

[30] L'UDA ne conteste pas la demande de l'ARRQ en ce qui concerne les réalisateurs, mais veut représenter les metteurs en scène, agissant à titre de metteur en scène et non de réalisateur, lorsque ces personnes sont appelées à partager avec un réalisateur la mise en scène d'une production audiovisuelle. L'UDA soutient que même si la mise en scène ou la direction d'acteurs sont des fonctions pouvant être accomplies par un réalisateur, le metteur en scène possède une expertise distincte et spécifique, et ce même lorsqu'un radiodiffuseur enregistre une oeuvre audiovisuelle ou dans le cadre de la captation d'une oeuvre originellement destinée à la scène. L'UDA rejette la prétention de l'ARRQ que le metteur en scène agissant à la télévision soit automatiquement assimilable à un réalisateur.

[31] Par conséquent, l'UDA voudrait que tout secteur accordé à l'ARRQ stipule que les personnes agissant à titre de «metteurs en scène» soient exclues du secteur lorsque leurs services sont retenus pour effectuer la mise en scène ou la direction d'acteurs dans le cadre de l'enregistrement de toute oeuvre pour fins de diffusion à la télévision, à la radio, sur support vidéo, disque compact, cédérom ou tout autre support ou média similaire; ou lorsque leurs services sont retenus pour effectuer la mise en scène ou la direction d'acteurs d'une pièce de théâtre, de théâtre lyrique, d'un numéro de variété, d'un gala, etc. ayant fait l'objet à l'origine d'une production sur scène et qui est également capté pour fins de diffusion soit à la télévision, à la radio, sur support vidéo, disque compact, cédérom ou tout autre support ou média similaire, y inclus les cas où la mise en scène originale est modifiée pour permettre une telle captation.

[32] Les témoins de l'UDA (MM. André Montmorency et André Brassard) ont témoigné que des metteurs en scène provenant de la scène avaient occasionnellement participé à la réalisation de productions audiovisuelles, et que dans certains cas, principalement les galas et les variétés scénarisées, ils avaient partagé la responsabilité de la production télévisuelle avec le réalisateur tout en étant mentionnés au générique à titre de metteur en scène. En général, les témoins s'entendent pour dire que ce partage de tâches est réservé à des cas particuliers et n'est pas fréquent.

[33] Dans son argumentation, l'UDA a fait valoir que des metteurs en scène provenant de la scène qui sont appelés à travailler conjointement avec les réalisateurs sur des oeuvres audiovisuelles sont véritablement des metteurs en scène et qu'il n'existe nulle part dans le métier la notion de coréalisateur comme le prétend l'ARRQ. De plus, selon l'UDA, le fait qu'il y ait captation ou adaptation télévisuelle d'une pièce de théâtre n'en fait pas une nouvelle oeuvre, puisque ce sont souvent les mêmes interprètes dans les mêmes rôles, malgré les changements au niveau des décors, de l'éclairage ou du jeu des interprètes. Le caractère de l'oeuvre et la signature du metteur en scène demeurent.

[34] L'UDA rejette la prétention de l'ARRQ voulant que la présence des metteurs en scène provenant de la scène dans certaines productions audiovisuelles soit exceptionnelle. Au contraire, l'UDA y voit plutôt une tendance. C'est-à-dire qu'il est possible que, de plus en plus, des metteurs en scène soient appelés à travailler conjointement avec des réalisateurs en tant que metteur en scène.

[35] Le Tribunal est d'avis que dans le cas de galas ou de variétés scénarisées, l'oeuvre ultime est une oeuvre audiovisuelle puisque ces spectacles n'auraient probablement pas lieu s'ils n'étaient pas télévisés. Par ailleurs, même si la preuve a démontré que des personnes ayant travaillé à la mise en scène de certains galas ou variétés scénarisées ont porté le titre de «metteur en scène» au générique, ceci n'est pas un critère déterminant lorsqu'il s'agit de décider la fonction véritable d'un individu dans une situation donnée.

[36] Selon la preuve qui lui a été présentée, le Tribunal conclut que la mise en scène et la direction d'acteurs sont des fonctions intrinsèques du réalisateur, mais qu'il arrive dans certains cas qu'un metteur en scène puisse être associé à un réalisateur pour la production d'une oeuvre audiovisuelle. À titre d'exemple, cette situation peut survenir dans les cas où il y a :

  1. adaptation télévisuelle d'une oeuvre ayant fait l'objet d'une production sur scène;
  2. enregistrement de spectacles, de variétés scénarisées et de galas produits à la scène devant un public et pour la télévision, sans égard au moment où la diffusion de l'oeuvre a lieu.

[37] Dans les cas précités, la preuve démontre que le réalisateur et le metteur en scène doivent travailler conjointement et demeurent conjointement responsables de l'oeuvre finale. Par conséquent, dans ces cas, le Tribunal est d'avis que lorsque le travail fait par le réalisateur et le metteur en scène est une véritable coréalisation, ces personnes sont des coréalisateurs visés par le secteur proposé par l'ARRQ.

[38] L'UDA a fait la preuve que les services de certains metteurs en scène provenant de la scène ont été retenus à titre de «metteur en scène» à la télévision. Le Tribunal accepte que ces cas existent. En effet, la preuve a démontré que des réalisateurs ont pu, pour les fins d'une production donnée, s'adjoindre une personne ayant porté le titre de «metteur en scène». Habituellement, cette personne a une expertise et une expérience tout à fait exceptionnelle. Sans vouloir diminuer l'importance de sa contribution, on ne peut toutefois dire qu'elle jouit de la même autorité sur le plateau que le réalisateur, ni qu'elle soit, en bout de ligne, responsable auprès du producteur de la même façon que l'est le réalisateur. Par conséquent, le Tribunal conclut que lorsque les services d'un «metteur en scène» sont retenus pour travailler sur un aspect particulier d'une production à la télévision et que cette personne travaille sous l'autorité du réalisateur, elle n'est pas visée par le secteur proposé par l'ARRQ. Le cas des metteurs en scène provenant de la scène qui, de temps à autre, travaillent dans le domaine de la télévision est examiné de façon plus exhaustive dans le deuxième volet des présents motifs.

[39] De plus, le Tribunal est d'avis que dans le cas d'une captation dite «pure et dure», où l'oeuvre à la scène ne subit que des modifications mineures pour en permettre la télédiffusion, l'oeuvre ne devient pas pour autant une coréalisation. En effet, même si le metteur en scène à la scène et le réalisateur doivent travailler ensemble, l'oeuvre ne devient pas une nouvelle oeuvre puisqu'elle demeure imprégnée de la signature du metteur en scène. Le réalisateur est là pour rendre l'oeuvre «diffusable», mais l'oeuvre demeure intégrale et conforme à la vision du metteur en scène. Par conséquent dans les cas de captation «pure et dure», le metteur en scène n'est pas assimilable à un réalisateur et n'est pas visé par le secteur proposé par l'ARRQ.

[40] Le Tribunal juge que les fonctions du réalisateur décrites au paragraphe [23], y compris la mise en scène, définissent clairement et de façon exhaustive le travail du réalisateur. Le Tribunal rappelle que le titre attribué à une personne ne détermine pas nécessairement dans quel secteur sera la personne; il faut plutôt se tourner vers les fonctions qu'elle exerce. Tel qu'expliqué ci-dessus, dans certains cas une personne à qui on a donné le titre de «metteur en scène» doit être considérée réalisatrice/coréalisatrice faisant partie de tout secteur accordé à l'ARRQ parce qu'elle exerce une autorité pleine et équivalente à celle du réalisateur, alors qu'une autre personne portant également le titre de «metteur en scène» ne sera pas visée par le secteur proposé par l'ARRQ parce qu'elle travaille sous l'autorité d'un réalisateur ou parce que sa participation se limite à un seul aspect de la production. Pour ces raisons, le Tribunal est d'avis que la définition du secteur proposé devrait faire référence aux fonctions d'un réalisateur et non seulement au titre «réalisateur».

Communauté d'intérêts et historique des relations professionnelles

[41] Au cours des années, l'ARRQ a connu plusieurs changements de nom. La première association, formée le 3 avril 1973, fut l'Association des réalisateurs de film du Québec; en 1981, l'association était incorporée en vertu de la Loi des syndicats professionnels (L.R.Q. c. S-40) sous la dénomination sociale : Association des réalisateurs et réalisatrices de film du Québec. En 1991, elle devient l'Association des réalisateurs et réalisatrices de cinéma et de télévision du Québec. En 1997, le nom devient l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec.

[42] Selon l'ARRQ, les réalisateurs jouissent d'une communauté d'intérêts en raison de l'unicité de l'environnement créatif dans lequel ils évoluent. À titre d'exemple, la requérante cite le mode de rémunération qui est souvent basé sur le type de production, le budget et l'expérience, les conditions de vie au travail et le contexte de production. L'ARRQ souligne que les intérêts moraux et sociaux comme la reconnaissance du statut de créateur et du droit d'auteur des réalisateurs sont identiques.

[43] L'ARRQ intervient sur les questions intéressant les réalisateurs telles que le droit d'auteur, les politiques de diffusion et la promotion du statut professionnel auprès de diverses institutions dont l'ONF, Téléfilm Canada, l'Institut québécois du cinéma de même que les ministères fédéraux et provinciaux. L'ARRQ intervient aussi auprès de d'autres associations d'artistes comme l'UDA, la Société des auteurs, recherchistes, documentalistes et compositeurs et la Société des auteurs et compositeurs dramatiques.

[44] Le 14 novembre 1995, l'ARRQ a obtenu de la Commission de reconnaissance des associations d'artistes une reconnaissance pour un secteur visant tous les réalisateurs d'oeuvres audiovisuelles au Québec, à l'exception de ceux qui oeuvrent à la réalisation en langue anglaise.

[45] L'ARRQ affirme que les clients des réalisateurs ont changé et se sont diversifiés considérablement durant les 15 dernières années. Les coupures récentes dans les budgets des producteurs de compétence fédérale et les changements importants dans la structure de production feront qu'à l'avenir un nombre plus important de réalisateurs devront oeuvrer à titre de travailleur autonome.

[46] L'ARRQ a signé une première entente collective avec l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec le 21 novembre 1989. Cette entente vise les longs métrages dramatiques destinés aux salles et à la télévision. L'entente a été signée sur la base d'une reconnaissance volontaire. D'autres ententes pour la télévision sont en cours de négociation avec des producteurs privés. L'ARRQ dit attendre son accréditation fédérale pour entreprendre la négociation collective avec les producteurs de compétence fédérale.

[47] Le Tribunal conclut que les réalisateurs autonomes partagent effectivement une communauté d'intérêts qui s'est construite au cours des deux dernières décennies à travers des interventions faites auprès de ministères et d'agences gouvernementales et des négociations entreprises avec des producteurs.

Critères linguistiques et géographiques

[48] Dans la décision concernant La Guilde des musiciens du Québec (décision n° 020), le Tribunal a énoncé sa position touchant l'application des critères linguistiques et géographiques dans la définition d'un secteur. En résumé, le Tribunal croit qu'il est préférable de limiter le nombre de secteurs pour éviter les possibilités de chevauchements ou de conflits. Lorsque la langue n'est pas partie de l'expression artistique comme dans la musique, la danse et les arts visuels, le Tribunal croit qu'un secteur national est plus approprié pour les négociations avec les producteurs qui relèvent de la compétence fédérale, en autant qu'il existe une association nationale d'artistes capable de fournir les services à ses membres dans les deux langues officielles. D'autre part, lorsque la langue est partie de l'expression artistique tel que dans le cas des auteurs, le critère linguistique revêt une plus grande importance et le Tribunal en tient compte au moment de définir le secteur.

[49] En l'espèce, le secteur proposé par l'ARRQ n'est pas un secteur national, l'ARRQ ayant choisi de demander un secteur fondé sur un mélange des critères géographiques et linguistiques suivants :

  1. la résidence ou le domicile du réalisateur;
  2. le lieu du tournage;
  3. la langue de la production.

[50] Pour l'ARRQ, il est évident qu'il existe une homogénéité des réalisateurs résidents ou domiciliés au Québec et que tout tournage au Québec, en tout ou en partie, autre qu'en langue anglaise, devrait faire l'objet d'un seul secteur. L'ARRQ souligne qu'au niveau provincial il existe une division fondée sur la langue et que les réalisateurs qui oeuvrent en anglais sont représentés par une autre association. Quant à la requérante, il serait logique de tenir compte de ce facteur dans la définition du secteur, même si l'ARRQ croit qu'une distinction suivant la langue n'est pas un élément essentiel dans la définition d'un secteur pour les réalisateurs.

[51] L'ARRQ affirme qu'elle n'est pas en mesure, à ce moment-ci, d'étendre ses services aux réalisateurs d'oeuvres audiovisuelles en français qui ne sont pas résidents ou domiciliés au Québec, car elle ne pourrait leur offrir un niveau de services qui soit comparable à ce qu'elle fournit aux réalisateurs du Québec.

[52] Sur la question des critères linguistiques et géographiques, l'ONF soutient que la définition du secteur devrait être faite en fonction de la langue plutôt qu'en fonction d'un territoire géographique afin qu'un producteur fédéral comme l'ONF n'ait pas à négocier avec autant d'associations qu'il y a de provinces. L'ONF souligne que le critère de la langue est reconnu historiquement chez les auteurs et les interprètes et qu'un secteur visant tous les réalisateurs canadiens qui concluent des ententes avec l'ONF pour des productions en langue française, indépendamment du fait que le tournage ait lieu ou non au Québec, offrirait de grands avantages. L'ONF a réitéré ce point pour les double shooting et les oeuvres audiovisuelles sans parole. Question d'efficacité, l'ONF croit qu'il ne faut avoir qu'une seule juridiction. S'il doit y avoir plus d'une juridiction, l'ONF suggère que le choix de la juridiction soit laissé au producteur.

[53] Le Tribunal est d'avis que dans le cas des productions audiovisuelles, la langue est un élément essentiel de l'expression artistique et qu'il aurait été préférable que le secteur proposé vise tous les réalisateurs d'oeuvres audiovisuelles en langue française au Canada. Cependant, outre les critères linguistiques et géographiques, le Tribunal est tenu de considérer d'autres critères dont l'historique des relations professionnelles entre les réalisateurs et les producteurs.

[54] L'énoncé a) du secteur proposé par l'ARRQ introduit la notion du lieu de résidence du réalisateur. Le Tribunal a déjà accordé des secteurs fondés sur le lieu de résidence de l'artiste : à titre d'exemple, voir l'accréditation accordée à la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec (décision n° 013, rendue le 17 mai 1996). Même si aux yeux du Tribunal un secteur regroupant tous les réalisateurs qui produisent des oeuvres en langue française au Canada paraît plus «fonctionnel», la preuve présentée par l'ARRQ démontre que l'association n'est pas en mesure de rendre cette proposition viable. En effet, l'ARRQ a affirmé que ses effectifs et ses ressources actuels ne lui permettaient pas d'offrir des services ailleurs au Canada. Pour ces motifs, le Tribunal est prêt à considérer une limitation, pour le moment, quant au lieu de résidence comme faisant partie de la définition d'un secteur.

[55] Par ailleurs, l'énoncé b) du secteur proposé introduit la notion du lieu de tournage. À cet égard, l'ONF a fait valoir que cet énoncé lui était problématique, principalement en ce qui a trait aux mots «en tout ou en partie au Québec». Selon l'ONF, il faudrait tout au moins que la majorité du tournage ait lieu au Québec et pas seulement une petite partie. L'ONF suggère au Tribunal de ne retenir que l'énoncé a) du secteur proposé, dans le cas où le secteur de négociation n'est pas défini selon la langue de production pour tout le Canada afin d'éviter toute incertitude rendant le secteur difficile à administrer pour un producteur.

[56] À l'encontre de la position de l'ONF, l'ARRQ soutient qu'il y a très peu de productions audiovisuelles en français qui soient faites par des réalisateurs n'étant pas résidents ou domiciliés au Québec. Dans les faits, l'ARRQ prétend que le secteur tel qu'il est libellé viserait 95 pour cent des productions audiovisuelles en langue française au Canada. L'ARRQ indique de plus qu'advenant le cas où un réalisateur ne soit pas visé par le secteur, il pourrait probablement bénéficier de toute entente négociée par l'ARRQ sans avoir lui-même à la négocier.

[57] Le Tribunal accepte la proposition de l'ONF voulant que l'énoncé b) du secteur proposé devrait se limiter aux oeuvres audiovisuelles tournées majoritairement au Québec. Par conséquent, le Tribunal juge que les mots «en tout ou en partie» dans l'énoncé b) du secteur proposé doivent être remplacés par le mot «principalement».

[58] Les deux énoncés du secteur proposé, soit a) et b), se rapportent à la langue de la production. Il y a lieu de noter qu'en plus de vouloir représenter les réalisateurs qui réalisent des oeuvres en langue française, l'ARRQ veut également représenter les réalisateurs lorsqu'ils réalisent des oeuvres en toute autre langue qu'en langue originale anglaise. L'ARRQ signale que cette demande reflète la division qui existe présentement au niveau provincial où l'ARRQ a obtenu une reconnaissance en vertu de la Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma (L.R.Q., c. S-32.1) pour un secteur qui vise tous les réalisateurs d'oeuvres audiovisuelles à l'exception des oeuvres en langue originale anglaise, et où, en vertu de cette même loi, le Conseil québécois de la Guilde canadienne des réalisateurs représente les réalisateurs d'oeuvres audiovisuelles en langue originale anglaise.

[59] Lorsqu'on associe la demande qui vise les langues autres que l'anglais aux critères géographiques discutés ci-dessus, le secteur proposé pourrait englober :

  1. toutes les oeuvres audiovisuelles, dans une langue autre que l'anglais, produites au Canada par un réalisateur résident ou domicilié au Québec, pour tout producteur de compétence fédérale;
  2. toutes les oeuvres audiovisuelles, dans une langue autre que l'anglais, produites pour tout producteur de compétence fédérale, dont le tournage a lieu principalement au Québec, et ce, sans égard au lieu de résidence du réalisateur.

[60] Le Tribunal n'a reçu aucun commentaire de la part de réalisateurs ou de producteurs s'objectant à l'effet pratique du secteur proposé par l'ARRQ. Afin de maintenir un certain parallélisme avec les relations professionnelles existantes au Québec et de faciliter les négociations qui pourraient être entamées avec divers producteurs, le Tribunal est prêt à considérer un secteur qui tiendrait compte des critères géographiques et linguistiques demandés.

[61] L'ARRQ demande au Tribunal de préciser que le double shooting, le tournage en version dite internationale et les oeuvres audiovisuelles sans parole ou avec un langage inventé «sont réputées être des oeuvres dans une langue autre qu'en langue originale anglaise». À l'appui de cette demande, l'ARRQ invoque le fait que sa demande n'est pas contestée à ce point de vue.

[62] L'avis public annonçant la demande d'accréditation de l'ARRQ mentionnait expressément que le double shooting, le tournage dit «international» et les oeuvres audiovisuelles sans parole étaient compris dans le secteur proposé. Il est également vrai que personne n'a contesté l'inclusion de ces genres d'oeuvres dans le secteur proposé. Quant aux tournages en double shooting, un examen de la preuve révèle qu'il y a bien peu de ce genre de productions faites par des producteurs de compétence fédérale. Pour cette raison et compte tenu qu'il n'y a pas d'opposition à inclure ces oeuvres, le Tribunal juge que tout tournage en double shooting serait inclus dans le secteur proposé, même si une partie du tournage était en anglais. Toutefois, le Tribunal ne croit pas qu'il soit nécessaire de préciser dans le libellé que les tournages en double shooting «sont réputés être en une langue autre qu'en langue originale anglaise».

[63] L'ARRQ a aussi demandé au Tribunal d'apporter une précision relativement aux oeuvres audiovisuelles sans parole en ajoutant les mots «ou avec un langage inventé» au libellé proposé. Le Tribunal doit se demander si cette précision aura pour effet d'élargir la portée de la demande originale. Pour ce faire, il y a lieu d'examiner le sens de l'expression «une oeuvre audiovisuelle sans parole». À prime abord, on pense aux films muets ou avec trame sonore seulement. Peut-on donc assimiler une oeuvre audiovisuelle sans parole à une oeuvre audiovisuelle ayant un langage inventé? Selon Le petit Robert (Le nouveau petit Robert : Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, nouvelle éd. du Petit Robert, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1996), le mot «parole» signifie «un élément simple du langage articulé». Le mot «articulé» signifie «formé de sons différents reconnaissables». Des paroles sont donc des sons reconnaissables que l'on peut comprendre. Une oeuvre audiovisuelle avec un langage inventé comporte des mots ou des sons qui sont inintelligibles, donc sans paroles. Par conséquent, l'ajout des mots «ou avec un langage inventé» n'a pas pour effet d'élargir la portée du secteur proposé. En l'espèce, le Tribunal conclut que les oeuvres sans parole ou avec un langage inventé peuvent être considérées comme étant des oeuvres dans une langue autre qu'en langue originale anglaise, mais est d'avis qu'il n'est pas nécessaire de le préciser dans le libellé comme le demande l'ARRQ.

[64] D'une part, l'ARRQ a fait certaines précisions quant à ce qu'elle entend par un tournage international, précisions dont le Tribunal a pris note dans les présents motifs. D'autre part, l'ARRQ demande au Tribunal de spécifier que les tournages en versions dites internationales «sont réputés être des oeuvres en une langue autre qu'en langue originale anglaise». Le Tribunal comprend que ces oeuvres pourraient donc inclure n'importe quel tournage qu'il ait été fait en français, en anglais ou dans une autre langue pourvu que cela soit considéré un tournage «en version dite internationale». Il semble que la précision demandée pourrait élargir la portée du secteur initialement proposé par l'ARRQ et compris par le Tribunal. Par conséquent, le Tribunal croit qu'il n'est pas avisé d'apporter la précision demandée par l'ARRQ et que les oeuvres visées par le secteur proposé se limitent aux tournages où les segments et les capsules d'information documentaire présentés par l'animateur sont tournés dans une langue autre que l'anglais.

Conclusion à l'égard du secteur

[65] Ayant tenu compte de la preuve et de toutes les observations orales et écrites de la requérante et des intervenants, le Tribunal convient que le secteur approprié aux fins de la négociation est un secteur qui comprend tous les entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste pour accomplir les fonctions d'un réalisateur et :

  1. qui sont résidents ou domiciliés au Québec et qui réalisent une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue qu'en langue originale anglaise; ou
  2. qui réalisent une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue qu'en langue originale anglaise et dont le tournage est fait principalement sur le territoire du Québec;

à l'exclusion des entrepreneurs indépendants professionnels en arts visuels qui font de la vidéo d'art et qui sont visés par l'accréditation accordée par le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs au Regroupement des artistes en arts visuels du Québec le 15 avril 1997.

[66] Pour fins de précisions, le secteur défini ci-dessus inclut tout tournage en version originale dite internationale dont les segments et les capsules d'information documentaire présentés par l'animateur ont été tournés dans une langue autre que l'anglais, tout tournage en double shooting et toute oeuvre audiovisuelle sans parole ou avec un langage inventé.

Question 2 : L'ARRQ est-elle représentative des artistes du secteur?

[67] Dans sa demande d'accréditation, la requérante estime à 155 le nombre de ses membres travaillant dans le secteur, et à environ 175 le nombre d'artistes professionnels indépendants dans le secteur. Lors de l'audience, l'ARRQ a précisé qu'il y avait maintenant 159 membres à l'ARRQ sur un total possible de 214 réalisateurs pigistes qui pourraient être membres. À l'appui de ces chiffres, l'ARRQ a produit en preuve le détail d'activités de production où des réalisateurs éligibles ne sont pas encore membres de l'ARRQ. Aucune association n'a contesté la représentativité de la requérante.

[68] Par conséquent, le Tribunal accepte la prétention de la requérante qu'elle est la plus représentative des réalisateurs dans le secteur décrit ci-dessus.

Décision

[69] Pour toutes ces raisons et attendu que l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec se conforme aux exigences du paragraphe 23(1) de la Loi sur le statut de l'artiste, le Tribunal :

Déclare que le secteur approprié aux fins de la négociation est un secteur qui comprend tous les entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste pour accomplir les fonctions d'un réalisateur et :

  1. qui sont résidents ou domiciliés au Québec et qui réalisent une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue qu'en langue originale anglaise; ou
  2. qui réalisent une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue qu'en langue originale anglaise et dont le tournage est fait principalement sur le territoire du Québec;

à l'exclusion des entrepreneurs indépendants professionnels en arts visuels qui font de la vidéo d'art et qui sont visés par l'accréditation accordée par le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs au Regroupement des artistes en arts visuels du Québec le 15 avril 1997.

Déclare que l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec est l'association la plus représentative des artistes du secteur.

Une ordonnance sera émise pour confirmer l'accréditation de l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec pour ce secteur.

II Les metteurs en scène

Exposé des faits

[70] Il s'agit d'une affaire portant sur la demande d'accréditation déposée auprès du Tribunal par l'UDA, en vertu de l'article 25 de la Loi sur le statut de l'artiste le 14 décembre 1995. L'UDA avait demandé l'accréditation pour représenter un secteur comprenant les artistes interprètes, les metteurs en scène et les chorégraphes. Une première audition dans cette affaire s'est tenue à Montréal les 5, 6 et 7 juin 1996.

[71] Initialement, le secteur proposé par la requérante était le suivant :

Tous les artistes interprètes, chorégraphes et metteurs en scène qui représentent, chantent, récitent, déclament, jouent, dirigent ou exécutent de quelque manière que ce soit une oeuvre littéraire, musicale ou dramatique ou un numéro de mime, de variétés, de cirque ou de marionnettes :

  1. diffusée, présentée ou exécutée au Québec;
  2. diffusée, présentée ou exécutée au Canada, ailleurs qu'au Québec, auprès d'un public d'expression française;

auprès de tous les producteurs visés par la Loi sur le statut de l'artiste dans l'ensemble du Canada, à l'exclusion :

  1. du secteur pour lequel l'Union des Artistes reconnaît la compétence de la «Canadian Actors' Equity Association» en vertu d'une entente intervenue entre les deux syndicats;
  2. du secteur pour lequel l'Union des artistes reconnaît la compétence de l'«Association of Canadian Television and Radio Artists» en vertu d'une entente intervenue entre les deux syndicats;
  3. des artistes qui pratiquent l'art de la musique instrumentale dans tous les domaines de production artistique, y compris toute personne qui chante en s'accompagnant d'un instrument de musique pour la partie instrumentale de sa performance.

[72] Le 29 août 1996, le Tribunal rendait une décision partielle (décision n° 017) accordant à l'UDA une accréditation pour représenter le secteur suivant :

Tous les artistes interprètes qui sont des entrepreneurs indépendants qui représentent, chantent, récitent, déclament, jouent ou exécutent de quelque manière que ce soit une oeuvre littéraire, musicale ou dramatique ou un numéro de mime, de variétés, de cirque ou de marionnettes :

  1. diffusée, présentée ou exécutée au Québec;
  2. diffusée, présentée ou exécutée au Canada, ailleurs qu'au Québec et destinée à un public d'expression française;

auprès de tous les producteurs visés par la Loi sur le statut de l'artiste dans l'ensemble du Canada, à l'exception :

  1. des entrepreneurs indépendants qui relèvent de l'accréditation accordée à la Canadian Actors' Equity Association par le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs le 25 avril 1996 et sujet à l'entente intervenue entre l'Union des Artistes et la Canadian Actors' Equity Association le 6 novembre 1992;
  2. des entrepreneurs indépendants qui relèvent de l'accréditation accordée à l'ACTRA Performers Guild par le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs le 25 juin 1996 et sujet à l'entente intervenue entre l'Union des Artistes et l'ACTRA Performers Guild le 17 mai 1996;
  3. des artistes qui pratiquent l'art de la musique instrumentale dans tous les domaines de production artistique, y compris toute personne qui chante en s'accompagnant d'un instrument de musique pour la partie instrumentale de sa performance.

[73] Dans sa décision, le Tribunal avait indiqué qu'il remettait à plus tard l'examen de la partie de la demande d'accréditation de l'UDA qui visait les metteurs en scène et les chorégraphes, et également qu'il se pencherait sur la question de savoir s'il y avait lieu d'inclure les concepteurs de combat (directeurs de combat) dans le secteur proposé par l'UDA. Dans ce volet des motifs, le Tribunal examinera la demande de l'UDA visant les metteurs en scène dans tous les domaines de production, soit les oeuvres littéraires, musicales, dramatiques, les numéros de mime, de variétés de cirque ou de marionnettes (dossier dénommé UDA n°2).

[74] L'avis public annonçant la demande d'accréditation de l'UDA prévoyait que toute association d'artistes qui désirait présenter une demande d'accréditation concurrentielle pour le même secteur, en tout ou en partie, devait le faire au plus tard le 19 mars 1996. Le 19 février 1996, l'APASQ a fait savoir au Tribunal qu'elle comptait intervenir dans le dossier puisque l'APASQ représentait aussi des metteurs en scène et qu'elle comptait contester la représentativité de l'UDA pour cette fonction.

[75] Le 8 mars 1996, l'APASQ a déposé auprès du Tribunal une demande d'accréditation visant le secteur suivant :

Tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage, de son, d'accessoires, de marionnettes, les metteurs en scène, les régisseurs, les peintres de décors, les directeurs techniques, les directeurs de production et tous les assistants aux costumes, aux décors et aux metteurs en scène oeuvrant sur le territoire du Québec ou au Centre National des Arts dans les domaines suivants : arts de la scène, danse et variétés. [Nos italiques]

[76] Ces deux demandes d'accréditation soulèvent les questions suivantes :

  1. Les metteurs en scène devraient-ils être inclus dans un secteur avec les artistes interprètes, dans un secteur avec les concepteurs ou dans un secteur distinct?

  2. Quelle association est la plus représentative des metteurs en scène?

Les questions soulevées

Question 1 : Les metteurs en scène devraient-ils être inclus dans un secteur avec les artistes interprètes, dans un secteur avec les concepteurs ou dans un secteur distinct?

Les fonctions du metteur en scène

[77] L'UDA a déposé en preuve un document qui résume ce qu'est la mise en scène comme suit :

La mise en scène est l'art de concevoir et réaliser un spectacle.Elle s'exerce autant au théâtre, à l'opéra, au mime, à la comédie musicale qu'aux spectacles de variétés. Elle est un art, parce qu'elle suppose une vision intuitive des oeuvres, donc une démarche de re-création. Elle est à la fois spirituelle et pratique; ceux qui s'y adonnent doivent conjuguer des facultés intellectuelles toujours en éveil avec un solide sens des réalités matérielles.

Elle n'existe, dans sa forme actuelle, que depuis une centaine d'années, même s'il y a toujours eu un ordonnateur des spectacles à travers les âges. Sophocle, Shakespeare et Molière montaient leurs propres pièces, mais il les montaient conformément à l'esthétique de leur temps qui relevait de solides consensus socio-culturels. La fragmentation de la société a progressivement amené les gens de théâtre à rechercher une originalité, une singularité, dont leurs prédécesseurs ne se préoccupaient pas. La formation des répertoires et les constantes reprises d'oeuvres que cela entraîne les ont amené à chercher des façons de rendre actuels les textes anciens. Ces choix varient à l'infini; ils constituent les propositions personnelles des metteurs en scène et le fondement de leur art.

[78] Ce même document énumère les tâches du metteur en scène telles que conçues par l'UDA :

Au plan de la conception :

  1. faire le choix d'une oeuvre, ou faire sien le choix d'un directeur artistique, parce que cette oeuvre suscite un élan créateur profond;
  2. faire le choix d'une traduction ou d'un traducteur, si l'oeuvre provient d'une langue étrangère;
  3. faire de multiples lectures de l'oeuvre et en dégager les lignes de force;
  4. situer l'oeuvre dans son contexte historique, social, politique et esthétique;
  5. dégager le sens de l'oeuvre aujourd'hui, ainsi que le rapport avec le lieu et le public de sa présentation;
  6. élaborer une vision d'ensemble de la production à partir de ses intuitions et de ses recherches;
  7. choisir l'équipe d'interprètes idéale, selon l'idée que l'on se fait de chaque personnage, et prévoir des choix alternatifs, au cas où les premiers choix ne seraient pas disponibles, en veillant à ce qu'il n'y ait pas d'incompatibilité entre les interprètes;
  8. choisir l'équipe de production qui pourra le mieux s'intégrer à la vision d'ensemble;

Au plan de la réalisation :

  1. contacter les collaborateurs choisis et leur expliquer les grandes lignes de la production, pour qu'ils puissent s'y engager en toute connaissance de cause;
  2. déterminer un calendrier de répétitions et de réunions de production;
  3. établir avec les comédiens et l'équipe de production un climat de confiance et de plaisir, afin que chacun puisse librement donner le meilleur de lui-même;
  4. diriger les répétitions et les réunions de production, en tenant compte des normes syndicales et budgétaires;
  5. garder l'esprit ouvert aux suggestions de chacun, sans pourtant perdre de vue ses grandes intuitions de départ;
  6. maintenir un dialogue permanent avec la direction artistique, afin qu'elle apporte son aide précieuse tout au long de la production et, tout particulièrement, dans les moments difficiles;
  7. écrire dans le programme le «mot du metteur en scène», pour témoigner de son intérêt et de son engagement envers l'oeuvre que l'on monte;
  8. accepter les entrevues avec les médias et profiter de toutes les tribunes pour communiquer le goût de venir voir le spectacle.
Les metteurs en scène à la scène

[79] L'UDA a fait entendre trois témoins metteurs en scène : MM. André Montmorency, André Brassard et Gilles Marsolais. Les témoignages de MM. Montmorency et Brassard ont principalement porté sur leur expérience comme metteur en scène au théâtre, mais ils ont également témoigné de leur expérience lorsqu'il y avait captation ou enregistrement d'une production à laquelle ils avaient participé. Ce deuxième aspect de leur témoignage a été traité dans le premier volet des motifs.

[80] Appelé à expliquer le travail du metteur en scène, M. Montmorency a affirmé que celui-ci décide de la vision qui sera donnée à l'oeuvre et de la façon dont les rôles seront interprétés. Le metteur en scène a toujours le «dernier mot». Selon le témoin, contrairement à la télévision et dans les productions privés, le metteur en scène au théâtre a une démarche artistique totale. M. Montmorency a expliqué que pour lui un projet se développe de la façon suivante :

  1. il reçoit l'appel d'un directeur artistique
  2. il y a discussion sur la distribution et le choix des comédiens
  3. il y a communication avec les comédiens choisis
  4. le directeur artistique et lui choisissent les différents concepteurs (scène, costumes, décors, éclairages, etc.)
  5. il y a des répétitions en salle de répétition
  6. il y a des répétitions générales et un travail qui se fait avec l'équipe technique.

[81] Les étapes suivies par M. Brassard dans sa démarche sont semblables à celles décrites par M. Montmorency. Toutefois, M. Brassard a indiqué qu'il lui arrivait à l'occasion de rencontrer les concepteurs avant les comédiens. Selon M. Brassard, le metteur en scène doit choisir et constituer les équipes; il s'agit de la partie la plus déterminante du travail. Il doit nourrir les acteurs avec sa vision de l'oeuvre -- certains metteurs en scène sont directifs alors que d'autres travaillent leur vision avec le comédien, mais il aura plusieurs rencontres avec les concepteurs. Le metteur en scène est, en bout de ligne, responsable de la cohérence du spectacle. M. Brassard a également souligné que d'autres forces, telles les considérations budgétaires, peuvent avoir une influence sur le travail du metteur en scène.

[82] M. Brassard a de plus témoigné qu'il avait travaillé à titre de metteur en scène à l'occasion de spectacles pour des chanteurs ou des humoristes et lors de spectacles de variétés. Selon lui, il y a des niveaux d'implication différents dans le travail regroupé sous la rubrique «mise en scène». Selon le témoin, lors de certains spectacles, il y a une véritable mise en scène alors que dans d'autres cas le travail du metteur en scène se limite à «organiser» la représentation et il n'y a pas nécessairement de conception ou de vision de la part du metteur en scène.

[83] M. Marsolais a affirmé que le metteur en scène est le maître d'oeuvre du jeu des comédiens, mais qu'il est également celui qui décide de la direction qui sera donnée aux décors, aux costumes, à l'éclairage, à la musique, etc. Selon lui, le même spectacle monté par deux metteurs en scène donnerait deux spectacles complètement différents.

[84] De façon générale, les témoins s'entendent pour dire que le document énumérant les tâches du metteur en scène, reproduit au paragraphe [78], reflète le travail du metteur en scène.

[85] L'APASQ a fait entendre deux témoins metteurs en scène : MM. Martin Faucher et Jacques Rossi. Le témoignage de M. Rossi a plutôt porté sur un autre aspect du dossier et sera traité plus loin. M. Faucher a expliqué au Tribunal les étapes par lesquelles il passe en tant que metteur en scène. Devant un projet possible, il voit des images, des décors, l'atmosphère, la musique, l'aspect temporel de la pièce. Il aura des réunions avec les personnes qui pourraient faire les décors, les costumes et la bande sonore dans le but de leur faire part de sa pensée globale. M. Faucher ne pense pas aux comédiens immédiatement. Il situe la pièce concrètement, la synthétise et la schématise. Ce travail peut durer de six mois à un an avant la première répétition. Pour lui, cette façon de faire rend le travail avec les comédiens plus facile en salle de répétition parce que l'oeuvre a eu le temps de mûrir.

[86] L'APASQ n'a pas contesté comme tel et n'a pas cherché à apporter des précisions au document faisant état des tâches d'un metteur en scène déposé par l'UDA et reproduit au paragraphe [78]. Il est clair des témoignages des divers metteurs en scène que chacun a une démarche qui lui est individuelle et qu'il serait impossible d'en établir une qui serait universelle. Selon le Tribunal, la démarche suivie ou la façon de travailler choisie par une personne pour en arriver à faire naître sa vision ne change pas fondamentalement le travail ou les tâches qui relèvent du metteur en scène.

Les «metteurs en scène» à la télévision

[87] Dans le premier volet des motifs, le Tribunal a conclu que certains metteurs en scène avaient travaillé conjointement avec des réalisateurs dans le cas d'adaptations télévisuelles d'oeuvres ayant fait l'objet d'une production sur scène, d'enregistrements de spectacles, de variétés scénarisées et de galas produits à la scène devant un public et pour la télévision. Dans ces cas, la preuve a démontré que la nature des fonctions exercées par ces metteurs en scène faisaient en sorte qu'ils avaient coréalisé l'oeuvre et qu'ils étaient donc des coréalisateurs visés par l'accréditation accordée à l'ARRQ.

[88] La preuve présentée par l'UDA a également démontré que des personnes ayant porté le titre de «metteur en scène» avaient participé à des émissions de télévision. Dans ces cas, la preuve était plutôt à l'effet que ces personnes avaient habituellement une expérience très particulière et que leurs services avaient été retenus à une fin bien précise. Certains réalisateurs ayant témoigné pour l'ARRQ ont également affirmé qu'ils avaient retenu les services de «spécialistes» afin d'assurer la vraisemblance de certaines scènes.

[89] M. Montmorency a témoigné que lorsqu'on retient ses services comme «metteur en scène» à la télévision, il est là comme spécialiste tout comme le décorateur ou le chorégraphe au théâtre. À titre d'exemple, il a expliqué qu'il avait participé à la production d'une émission de télévision où les comédiens devaient faire appel à un style de jeu appelé la commedia dell'arte, un style moins connu chez les jeunes comédiens et réalisateurs. Il était sur le plateau pour transmettre ses connaissances aux comédiens afin de leur inculquer ce style de jeu.

[90] Sur la question des «metteurs en scène» à la télévision, le Tribunal retient du témoignage de M. Brassard que l'utilisation de l'appellation «metteur en scène» est souvent «galvaudé», malgré le fait que le champ d'action du metteur en scène demeure vaste.

[91] Tel qu'expliqué ci-dessus, le metteur en scène a une vision globale et doit être considéré le maître d'oeuvre de la production. À la télévision, ce rôle revient au réalisateur. Même si les services d'un «metteur en scène» sont retenus, la plupart, sinon tous les choix artistiques ont déjà été faits par le réalisateur. Bien que les personnes ayant travaillé à la télévision à titre de «metteurs en scène» aient pu contribuer à faire évoluer ou à préciser la vision du réalisateur, ces personnes n'ont pas été chargées de la démarche artistique totale tel que le metteur en scène à la scène. Ces personnes remplissent plutôt les fonctions de «consultant» et ne peuvent être considérées comme «metteur en scène» au même titre que le metteur en scène à la scène. Pour ces raisons, le Tribunal est d'avis qu'il n'est pas approprié d'inclure les personnes agissant à titre de «metteur en scène» à la télévision dans un secteur avec les metteurs en scène à la scène.

Les «metteurs en scène» à la radio

[92] Il apparaît au Tribunal que le secteur proposé par l'UDA pourrait viser les metteurs en scène si leurs services étaient retenus pour travailler à la radio. Dans toute la preuve entendue, il n'y a que deux instances où il a été question de la radio. M. Brassard a affirmé qu'en 1971, la Société Radio-Canada (la «SRC») avait produit à la radio la pièce À toi pour toujours, ta Marie-Lou de Michel Tremblay, pièce dont il avait fait la mise en scène au théâtre. Au moment de la production radiophonique, la SRC ne lui avait demandé de participer d'aucune façon et il n'a reçu aucune rémunération. Dans le deuxième cas, le témoin de l'APASQ, M. Faucher, a affirmé qu'en 1989, la SRC est venue capter, À quelle heure on meurt?, spectacle où il avait fait la mise en scène qui fut par la suite diffusé à la radio de la SRC. Il s'agissait d'une captation, sans aucune adaptation radiophonique. M. Faucher affirme avoir été rémunéré, mais n'a pu se rappeler à quel titre.

[93] L'UDA n'a pas présenté d'autres arguments au Tribunal sur cette question et l'APASQ ne demande pas à représenter les metteurs en scène à la radio. Sans plus de preuve, le Tribunal n'est pas en mesure de déterminer s'il existe des situations où des producteurs de compétence fédérale pourraient retenir les services d'un metteur en scène à la radio. Par conséquent, le Tribunal est d'avis que, pour le moment, un secteur visant les metteurs en scène ne peut inclure des metteurs en scène à la radio.

Conclusion quant aux metteurs en scène à la radio et à la télévision

[94] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est d'avis que, de façon générale, les tâches ou les fonctions du metteur en scène telles que décrites au paragraphe 78 définissent de façon claire et exhaustive le travail d'un metteur en scène à la scène, mais que ces fonctions ne décrivent pas le travail des personnes pouvant être engagées à titre de «metteur en scène» à la télévision ou à la radio. Donc, le Tribunal juge que tout secteur visant des metteurs en scène exclut les personnes dites «metteurs en scène» à la télévision ou à la radio.

[95] Le Tribunal tient à souligner que même si les personnes ayant porté le titre de «metteurs en scène» à la radio ou à la télévision sont exclus du secteur, cela ne veut pas dire qu'une association accréditée qui représente des metteurs en scène à la scène ne pourrait négocier des modalités pour le paiement de cachets lorsque leur oeuvre est captée et diffusée, et ce sans égard au moyen. Comme l'a expliqué Mme Erika Marcus, témoin de l'UDA, il existe déjà des ententes pour les artistes interprètes qui prévoient les cachets à leur être versés lorsqu'une oeuvre où ils ont joué est captée et rediffusée. Selon l'APASQ, il serait possible de faire respecter les droits d'auteur des metteurs en scène lors de captations par des producteurs au moyen d'ententes collectives négociées dans un secteur visant les arts de la scène.

Communauté d'intérêts et historique des relations professionnelles

[96] Les metteurs en scène ayant témoigné pour l'UDA ont affirmé que la grande majorité des metteurs en scène sont ou ont déjà été comédiens. Ils s'entendent pour dire que le metteur en scène passe en moyenne 75 pour cent des heures totales allouées à la préparation d'un spectacle avec les comédiens alors qu'il en passera environ 25 pour cent avec les concepteurs. M. Montmorency a témoigné qu'en général le metteur en scène n'a pas de responsabilités de gérance comme telles, bien qu'il doive à l'occasion signaler à la personne désignée par le producteur certains problèmes ou faire pression auprès de cette personne pour qu'un comédien ou une autre personne impliquée dans une production soit remplacée.

[97] L'UDA prétend qu'un secteur qui inclut les artistes interprètes et les metteurs en scène est un regroupement naturel conforme à la réalité des relations professionnelles de ces artistes, de leurs échanges entre eux et de leurs rapports avec les producteurs des différents domaines de production artistique. L'UDA souligne qu'il y a eu une transformation au sein de son membership en ce que plusieurs de ses membres exercent maintenant plus d'une profession dans le domaine artistique.

[98] L'UDA prétend de plus que le facteur le plus important qui milite en faveur d'une communauté d'intérêts entre les artistes interprètes et les metteurs en scène est le temps qu'ils passent à travailler ensemble. L'UDA a été fondée en 1937 par des artistes interprètes. Elle a négocié au cours des années de nombreuses ententes collectives visant les artistes interprètes et les chorégraphes tant dans le secteur de compétence fédérale que provinciale.

[99] Quant à l'APASQ, M. Faucher a témoigné que d'une part, il croit qu'il peut être utile d'être comédien pour être metteur en scène. Par contre, il affirme que pour tout ce qui relève de l'aspect visuel ou conceptuel du travail de mise en scène, le fait d'être comédien apporte peu au metteur en scène puisqu'il s'agit d'un tout autre domaine. Selon le témoin, il faut avoir d'autres atouts. En outre, il affirme qu'il est normal d'avoir une association où se retrouvent des metteurs en scène et des concepteurs, étant donné que le plus gros du travail de mise en scène se fait avec les concepteurs. M. Faucher reconnaît que le nombre d'heures totales passées avec les concepteurs est moins élevé que le nombre d'heures qui sont passées avec les comédiens. Mais, il souligne que la semaine avant une première, le metteur en scène travaille davantage avec les concepteurs qu'avec les comédiens. De façon générale, le travail des concepteurs est parallèle au travail du metteur en scène alors que le travail avec les comédiens est un travail quotidien.

[100] Le témoignage de M. Jacques Rossi, témoin de l'APASQ, a porté sur l'historique et la raison d'être de l'APASQ. Il a expliqué que suite aux états généraux sur le théâtre au Québec en 1981, le milieu avait décidé de former le Conseil québécois du théâtre parce que le besoin de former une association pour les personnes qui n'étaient ni comédiens, ni danseurs s'était fait sentir. L'Association des professionnels des arts de la scène (l'«APAS») a donc vu le jour en février 1984. L'APAS regroupait des concepteurs, des metteurs en scène ainsi que des techniciens. Selon le témoin, les concepteurs ont des affinités évidentes entre eux parce qu'ils se considèrent concepteurs avant d'être interprètes dans le métier de la mise en scène. Le metteur en scène choisit ses comédiens et ses concepteurs. Les divers concepteurs doivent par la suite choisir leur équipe. Chaque concepteur surveille les travaux d'une équipe tout comme le metteur en scène fait avancer sa vision de l'oeuvre à travers les comédiens. Chacun a un rôle de leadership. Selon M. Rossi, le comédien n'a personne à superviser, il supervise son propre travail et doit rendre compte au metteur en scène.

[101] Dans son argumentation l'APASQ a fait valoir que le Tribunal devrait soit accueillir sa demande d'accréditation ou créer un secteur distinct pour les metteurs en scène. L'APASQ prétend que le secteur tel que demandé par l'UDA qui vise à la fois les artistes interprètes et les metteurs en scène n'est pas approprié en l'espèce. Les metteurs en scène dirigent des équipes comme le font les concepteurs, ce qui n'est pas le cas des artistes interprètes. L'APASQ a également fait valoir que même si l'UDA a été fondée en 1937, ses statuts et règlements n'ont été amendés qu'au cours des années quatre-vingt dix afin d'inclure les metteurs en scène alors que l'APASQ regroupe des concepteurs et des metteurs en scène depuis 1984.

[102] Quant à la question des relations professionnelles avec les producteurs, ni l'APASQ ou l'UDA n'a négocié d'ententes collectives visant les metteurs en scène. Cependant, l'APASQ a en place un contrat type utilisé pour la conception et la mise en scène.

[103] Le metteur en scène n'a pas nécessairement à discipliner ses équipes, que ce soit les comédiens, les concepteurs ou les techniciens. Par contre, le metteur en scène doit s'assurer que son spectacle sera prêt à tout point de vue pour la première. Si le metteur en scène s'aperçoit qu'une personne ne fonctionne pas dans l'équipe, il devra régler le problème lui-même ou en faire part au producteur qui lui pourra le régler. Sans être des fonctions de gérance au sens traditionnel, le Tribunal est d'avis qu'en tant que maître d'oeuvre, le metteur en scène dispose d'un pouvoir assez important qui fait en sorte que ses intérêts diffèrent de ceux des artistes interprètes et des concepteurs.

[104] Les parties ont de part et d'autre présenté des arguments intéressants et valables. Il est vrai qu'il existe une communauté d'intérêts entre les metteurs en scène et les artistes interprètes du fait que plusieurs metteurs en scène sont ou ont déjà été comédiens. Le metteur en scène travaille quotidiennement avec les comédiens alors qu'il travaille en parallèle avec les concepteurs. Le temps passé avec les comédiens comparativement au temps que le metteur en scène passe avec les concepteurs est un critère important. Par ailleurs, l'aspect créatif et visionnaire du travail de mise en scène place le travail du metteur en scène dans une sphère qui se rapproche plus de la démarche qui doit être suivie par le concepteur. Le metteur en scène fait la mise en scène et dirige le travail des comédiens. La preuve démontre que le metteur en scène n'a pas de responsabilités de gérance telles qu'on l'entend normalement en relations industrielles. Il a tout de même un grand pouvoir -- le «dernier mot» sur le travail des comédiens et des concepteurs. De son côté, le concepteur dirige son équipe de conception et il travaille de concert avec le metteur en scène.

[105] À la lumière de la preuve qu'il a entendue, le Tribunal ne peut conclure que les metteurs en scène ont une plus grande communauté d'intérêts avec les artistes interprètes qu'ils en ont avec les concepteurs. En effet, la probabilité que les metteurs en scène aient des intérêts différents de chacun des deux groupes amène le Tribunal à conclure qu'il serait plus approprié de créer un secteur distinct pour les metteurs en scène. Le Tribunal reconnaît que cette conclusion diffère de celle à laquelle il est arrivé dans l'affaire concernant la Canadian Actors' Equity Association (voir la décision n° 010, rendue le 25 avril 1996) où il avait jugé que les metteurs en scène devaient être dans le même secteur que les artistes interprètes. Cependant, dans cette affaire, il faut noter que la requérante avait fait la preuve qu'elle avait historiquement représenté les metteurs en scène et que ses accords-cadres s'appliquaient à la fois aux artistes interprètes et aux metteurs en scène.

Critères linguistiques et géographiques

[106] La demande d'accréditation présentée par l'UDA inclut certains critères linguistiques et géographiques. L'UDA demande à représenter les personnes qui dirigent une oeuvre littéraire, musicale ou dramatique ou un numéro de mime, de variétés, de cirque ou de marionnettes présentée ou exécutée au Québec ou destinée à un public d'expression française ailleurs au Canada. En vertu d'une entente signée le 6 novembre 1992, l'UDA a expressément reconnu la juridiction de la Canadian Actors' Equity Association (la «CAEA») relativement aux productions à la scène en langue anglaise tant au Québec qu'à l'extérieur du Québec.

[107] Par ailleurs, il n'y a aucune mention spécifique quant aux critères linguistiques dans la demande de l'APASQ. Quant aux critères géographiques, la demande vise à représenter les metteurs en scène oeuvrant au Québec et au Centre national des Arts dans les domaines des arts de la scène, de la danse et des variétés.

[108] Le 25 avril 1996, le Tribunal accordait à la CAEA le droit de représenter les metteurs en scène dans les productions de langue anglaise. Par conséquent, tout secteur visant les metteurs en scène, secteur revendiqué par l'UDA et l'APASQ, devra respecter cette accréditation antérieure.

[109] Tel que discuté au paragraphe [48], le Tribunal croit qu'il est préférable d'avoir des secteurs nationaux lorsque possible. En l'espèce, le Tribunal est d'avis qu'il est approprié d'avoir un secteur national pour les metteurs en scène qui dirigent des oeuvres présentées ou exécutées en français. La preuve indique que la majorité des productions à la scène sont de compétence provinciale. Dans la mesure où il y a des productions en français par des producteurs de compétence fédérale, le Tribunal est d'avis qu'il ne devrait y avoir qu'une seule association pour représenter les metteurs en scène concernés, et ce sans égard à l'endroit où la production est présentée ou exécutée.

Conclusion à l'égard du secteur

[110] Ayant tenu compte de la preuve et de toutes les observations orales et écrites, le Tribunal convient que le secteur approprié aux fins de la négociation est un secteur qui comprend tous les entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste pour accomplir les fonctions d'un metteur en scène lors d'une production sur scène, en français, d'une oeuvre littéraire, musicale ou dramatique ou d'un numéro de mime, de variétés, de cirque ou de marionnettes.

Question 2 : Quelle association est la plus représentative des metteurs en scène?

[111] Chacune des associations a déposé sa liste de membres afin d'appuyer sa prétention qu'elle est la plus représentative des metteurs en scène dans le secteur proposé dans sa demande respective. Cependant, la définition du secteur énoncée ci-dessus, secteur que le Tribunal juge approprié aux fins de la négociation en l'espèce, diffère des secteurs proposés par les deux requérantes. Compte tenu des circonstances, le Tribunal est d'avis qu'il ne peut se fonder uniquement sur les listes de membres pour déterminer la représentativité et qu'il devrait y avoir un scrutin de représentation afin que les artistes eux-mêmes décident quelle association devrait les représenter.

Décision

[112] Le Tribunal ordonne donc que soit tenu un scrutin de représentation parmi les membres des deux requérantes qui exercent la profession de metteur en scène. Une ordonnance énonçant les modalités pour ce scrutin de représentation sera émise avec les présents motifs.

III LES CHORÉGRAPHES

[113] Tel que mentionné ci-dessus, le Tribunal avait décidé dans la décision partielle no 017 rendue le 29 août 1996 concernant la demande d'accréditation de l'UDA, de reporter à plus tard l'examen de la question des chorégraphes et le secteur proposé par l'UDA.

[114] Le dossier de l'UDA no 2 soulève les questions suivantes :

  1. Les chorégraphes devraient-ils être inclus dans le même secteur que les artistes interprètes?

  2. L'UDA est-elle représentative des chorégraphes?

Questions soulevées

Question 1 : Les chorégraphes devraient-ils être inclus dans le même secteur que les artistes interprètes?

[115] L'UDA a déposé au Tribunal un document préparé par la Société québécoise de développement de la main d'oeuvre qui s'intitule Rapport de l'analyse de la profession chorégraphe (Gouvernement du Québec, 1995). Ce document examine en profondeur les diverses fonctions exercées par les chorégraphes et leurs domaines de compétence, qu'ils travaillent à leur compte pour leur propre compagnie, ou lorsqu'ils sont engagés par un producteur. Les fonctions d'un chorégraphe se résument ainsi :

  1. mise en oeuvre du processus de création de la chorégraphie et mise en forme de la chorégraphie (définir le projet; former une équipe de collaboratrices et de collaborateurs autour du projet ou participer à la formation de l'équipe; structurer la chorégraphie ou créer l'oeuvre; monter la chorégraphie dans son lieu de représentation);
  2. diffusion de sa création (assurer la promotion du spectacle; superviser la présentation du spectacle; coordonner la tournée du spectacle);
  3. direction artistique et administrative de ses projets de création et de la compagnie d'appartenance (établir, à moyen terme, son programme de création et, s'il y a lieu, le programme des activités de la compagnie d'appartenance; assurer son ressourcement en tant que chorégraphe).

[116] Le témoin de l'UDA, Mme Louise Lapierre, a confirmé que l'éventail de tâches décrites dans le Rapport de l'analyse de la profession chorégraphe rendait fidèlement compte des fonctions principales assumées par les chorégraphes. Elle a cependant précisé que si le chorégraphe adressait des recommandations quant à l'engagement de certaines personnes, ce choix revenait en bout de ligne au producteur ou au metteur en scène. Il arrive quelques fois que l'équipe d'artistes ait été constituée avant l'engagement du chorégraphe et que celui-ci doive travailler avec les ressources humaines dont il dispose. De plus, le témoin a précisé que le chorégraphe doit apprendre aux artistes à bouger, à se déplacer dans l'espace et ce, sans qu'il n'y ait nécessairement de la danse.

[117] Le Tribunal convient que, vues dans leur ensemble, ces fonctions décrivent le travail du chorégraphe à partir de la mise en oeuvre de la création, en passant par les étapes suivantes : choisir les danseurs, enseigner les mouvements, diriger les répétitions et s'occuper de tout le volet administration, montage et promotion des spectacles et tournées. Si le volet création est bien entendu la partie la plus importante du travail du chorégraphe, celui-ci est également amené à exercer des fonctions administratives, de direction et de supervision. Ce sont ces dernières fonctions qui font que le Tribunal doit considérer s'il est approprié d'inclure les chorégraphes dans le même secteur que les artistes interprètes.

[118] Lorsqu'il rend une décision sous le régime de la Partie II de la Loi sur le statut de l'artiste, le Tribunal est enjoint par l'alinéa 18a) de la Loi de tenir compte des principes applicables en droit du travail. L'un des ces principes veut que les superviseurs ne soient pas inclus dans la même unité de négociation que les personnes qu'ils supervisent.

[119] Le Conseil canadien des relations du travail (le «CCRT») a expliqué les raisons justifiant cette règle dans l'affaire Banque de Nouvelle-Écosse (Succursale de Port Dover) (1977), 21 di 439; [1977] 2 Can LRBR 126; et 77 CLLC 16,090 (CCRT no 91) :

L'exclusion de certains 'gestionnaires' de l'unité de négociation a pour objet d'éviter des conflits d'intérêts entre leur loyauté envers l'employeur et le syndicat. Cette mesure protège autant les intérêts du premier que du second. Le conflit s'accroît quand une personne exerce une autorité sur les conditions de travail de ses compagnons. Il est aigu lorsque l'autorité s'étend à la continuité d'emploi et à des questions connexes (par exemple : le pouvoir de congédier un employé ou de lui imposer une sanction disciplinaire) (...)

Dans la décision British Columbia Telephone Company (1976), 20 di 239; [1976] 1 Can LRBR 273; et 76 CLLC 16,015 (CCRT no 58), le CCRT a commenté la nature de l'exclusion des gestionnaires en faisant remarquer que «l'exercice de fonctions hautement techniques et professionnelles n'est pas un obstacle à l'inclusion dans une unité de négociation». Dans la même décision, le CCRT a rejeté l'interprétation voulant que le pouvoir de «recommander» soit généralement équivalent au pouvoir de décider. Selon le CCRT, une personne doit correspondre à un profil très précis de décideur avant qu'on décide de l'exclure d'une unité de négociation au motif qu'elle exerce des fonctions de gestionnaire.

[120] Le Tribunal est lui aussi d'avis qu'une personne doit effectivement assumer des responsabilités de gestion significatives avant que l'on décide de l'exclure d'une unité de négociation. L'ONF s'oppose à l'inclusion des chorégraphes dans la même unité de négociation que les artistes interprètes au motif que les chorégraphes doivent diriger les artistes, mais n'a pas fourni de précisions sur la nature des responsabilités de direction que les chorégraphes pigistes pouvaient être appelés à remplir à l'ONF.

[121] Lors de son témoignage, le témoin de l'UDA a informé le Tribunal qu'en tant que chorégraphe pigiste engagé par un producteur, elle n'a pas la responsabilité d'engager les artistes avec lesquels elle travaille. En outre, elle n'a pas le pouvoir de les suspendre, de les réprimander ou de les congédier. Elle peut les corriger sur un enchaînement de mouvements, mais il incombe au producteur qui a signé le contrat d'engagement de discipliner ou de renvoyer un artiste dont le travail est insatisfaisant. De même, quant à d'autres aspects de la production tels l'éclairage, les costumes et la décoration scénique, le rôle du chorégraphe se limite généralement à faire des suggestions ou des recommandations que le metteur en scène est libre d'agréer ou de refuser.

[122] Pour ces motifs, le Tribunal est d'avis que les chorégraphes pigistes n'assument pas des fonctions de supervision ou de gestion à un niveau suffisamment élevé pour justifier leur exclusion du secteur des artistes interprètes.

Communauté d'intérêts et historique des relations professionnelles

[123] La preuve soumise au Tribunal indique que les chorégraphes ont très souvent débuté en tant que danseurs. Le succès d'un chorégraphe dépend dans une large mesure de son degré d'intimité artistique avec ceux qui exécutent son oeuvre. Aux yeux du Tribunal, il existe une grande communauté d'intérêts entre les chorégraphes et les artistes qui exécutent la chorégraphie à la scène ou dans le cadre d'une production audiovisuelle.

[124] L'UDA a déposé au Tribunal un certain nombre d'accords-cadres qu'elle a négociés avec différents producteurs. Une analyse de ces ententes révèle que l'UDA a négocié des dispositions visant les chorégraphes dans ses accords-cadres avec certains radiodiffuseurs (par exemple, la Société Radio-Canada, Télé-Métropole Inc. et Télévision Quatre Saisons). Par ailleurs, ni le Centre national des Arts (un membre de l'association de producteurs connue sous le nom de Théâtres Associés Inc.), ni l'ONF n'ont reconnu l'UDA comme agent négociateur pour le compte des chorégraphes.

[125] Dans la décision no 010 (Canadian Actors' Equity Association, rendue le 25 avril 1996), le Tribunal a reconnu qu'il est parfois nécessaire de créer des secteurs plus larges que ceux pour lesquels les associations d'artistes ont négocié jusqu'ici. Au paragraphe 20 de cette décision, le Tribunal a affirmé :

...La Loi sur le statut de l'artiste précise également que le Tribunal doit tenir compte de l'historique des rapports professionnels entre les artistes, leurs associations et les producteurs lorsqu'il définit les secteurs de négociation. Toutefois, le Tribunal se préoccupe également du fait que dans le but d'atteindre les objectifs de la nouvelle Loi, et particulièrement afin d'augmenter la rémunération versée aux artistes pour leur travail, il pourra s'avérer nécessaire, à l'occasion, de ne pas se limiter à l'historique des rapports professionnels. (...)

[126] En l'espèce, la requérante a fait la preuve qu'elle avait l'expérience dans la représentation des chorégraphes, même si elle a agi dans des sphères plus limitées que ce qu'elle recherche dans le secteur proposé. Néanmoins, afin d'assurer que tous les chorégraphes pigistes engagés par des producteurs assujettis à la Loi sur le statut de l'artiste puissent bénéficier des dispositions de la Loi, le Tribunal est d'avis qu'il est approprié d'inclure les chorégraphes pigistes travaillant à la télévision, dans l'industrie cinématographique et à la scène dans le même secteur.

Critères linguistiques et géographiques

[127] En vertu d'une accréditation accordée le 25 avril 1996, les chorégraphes dans les productions de langue anglaise assujetties à la Loi sur le statut de l'artiste sont représentés par la Canadian Actors' Equity Association (Décision no 010). La CAEA est partie à une entente conclue avec l'UDA délimitant les champs de compétence de chacune des associations selon un critère linguistique. Le Tribunal est d'avis qu'il est approprié de continuer à respecter cette distinction linguistique.

Conclusion à l'égard du secteur approprié pour les chorégraphes

[128] En ce qui concerne les chorégraphes pigistes engagés par des producteurs assujettis à la Loi sur le statut de l'artiste, le Tribunal est d'avis que même si les fonctions administratives et de supervision qu'ils sont appelés à remplir sont importantes, elles demeurent secondaires par rapport aux responsabilités qu'ils assument sur le plan artistique. Dans les faits, c'est le producteur ou le metteur en scène qui assume la responsabilité d'engager, de discipliner et de renvoyer les artistes. Le Tribunal estime donc que le niveau des responsabilités de supervision assumées par les chorégraphes pigistes ne justifie pas leur exclusion d'un secteur comprenant les danseurs et les autres artistes interprètes. De plus, puisque les chorégraphes partagent une communauté d'intérêts avec les danseurs et les autres artistes interprètes, le Tribunal juge qu'il est approprié de les inclure dans le même secteur que les artistes interprètes.

Question 2 : La requérante est-elle représentative des chorégraphes?

[129] La requérante a affirmé au Tribunal qu'il était très difficile d'estimer précisément le nombre de chorégraphes travaillant au Québec ou dans des productions de langue française. Le témoin de l'UDA a déclaré qu'à sa connaissance, environ 30 chorégraphes étaient inscrits dans le Regroupement québécois de la danse. L'UDA a déposé une liste de membres où figure le nom de 51 personnes qui sont chorégraphes au sein de l'UDA; il arrive également à certains d'entre eux de se produire comme artiste interprète lorsque l'occasion se présente.

[130] La requérante a fait la preuve du fait que les entreprises de radiodiffusion de langue française avec lesquelles elle a négocié des accords-cadres la reconnaissent en tant que représentante des chorégraphes. De même, aucune autre association d'artistes n'a contesté la représentativité de l'UDA à l'égard de cette profession. Pour ces motifs, le Tribunal conclut que la requérante est l'association d'artistes la plus représentative des chorégraphes travaillant dans les productions de langue française.

Décision

[131] Le Tribunal conclut qu'il est approprié d'inclure les chorégraphes dans le même secteur que les artistes interprètes qui sont déjà représentés par l'UDA. L'accréditation partielle accordée à l'UDA en août 1996 sera donc modifiée en conséquence.

[132] Le Tribunal profite de cette occasion pour mettre à jour l'ordonnance d'accréditation accordée à l'UDA, afin de tenir compte des accréditations accordées à l'American Federation of Musicians of the United States and Canada et à La Guilde des musiciens du Québec en janvier 1997, en remplaçant l'alinéa c) actuel par le texte suivant :

c) les entrepreneurs indépendants visés par l'accréditation accordée par le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs à l'American Federation of Musicians of the United States and Canada et à La Guilde des musiciens du Québec le 16 janvier 1997.

IV Les directeurs de combat (« Fight Directors »)

[133] Fight Directors, Canada (la «FDC») est intervenue dans la demande d'accréditation de l'UDA lors de l'audience que s'était tenue en juin 1996. En raison des liens potentiels entre le travail des directeurs de combat et celui des metteurs en scène et des chorégraphes, le Tribunal avait différé l'étude de la question des directeurs de combat au moment de rendre sa décision en août 1996.

[134] Dans sa présentation, la FDC a expliqué au Tribunal qu'elle est une association professionnelle à but non lucratif constituée en société sous le régime fédéral et qu'elle a le mandat de promouvoir et de maintenir des normes nationales de sécurité et d'esthétisme dans l'art de la chorégraphie des combats, une composante à part entière de l'industrie du spectacle. À cette fin, l'organisme se consacre à la promotion de la sécurité, à l'éducation, à la formation et à la certification professionnelle dans le domaine de la simulation de combats pour la scène, l'industrie cinématographique et la télévision.

[135] La FDC définit les fonctions d'un directeur de combat comme suit :

[TRADUCTION] Diriger, faire répéter ou arranger l'exécution d'actions dangereuses par les acteurs sans compromettre leur sécurité physique ou mentale et leur confort, ce qui implique une conception et une mise en scène de ces séquences qui soit sécuritaire, esthétique et spectaculaire.

[136] Selon la FDC, les directeurs de combat ne sont ni metteurs en scène, ni chorégraphes, ni cascadeurs, ni compagnons de cascade. La FDC soutient qu'il s'agit d'une fonction très spécialisée qui devrait être exclue du secteur representé par l'UDA.

[137] Certains des témoins produits par l'UDA à l'appui de sa demande pour représenter les metteurs en scène et les chorégraphes ont confirmé que la chorégraphie et la direction de scènes de combat nécessitaient parfois une compétence particulière. Certains metteurs en scène ou chorégraphes ont pu, à l'occasion, entreprendre la direction de scènes de combat, surtout lorsque la séquence est peu complexe. Cependant, lorsqu'il y a un combat à l'épée ou un combat corps-à-corps, ils demanderont ordinairement à un spécialiste du combat ou de la cascade de chorégraphier ces séquences.

[138] Le Tribunal remarque que dans sa documentation, la FDC décrit le directeur de combat comme un chorégraphe spécialisé dans les combats. Même si la FDC utilise le terme «directeur de combat/fight director», le Tribunal est d'avis que ces personnes ne sont ni «réalisateurs» ni «metteurs en scène» au sens où ces mots sont définis dans les présents motifs. Ils sont plutôt des techniciens spécialisés dans un aspect de la mise en scène d'une production. Même si le Tribunal reconnaît que les fonctions d'un directeur de combat sont spécialisées, il est néanmoins d'avis que celles-ci s'apparentent aux fonctions d'un chorégraphe. Le Tribunal a expliqué ci-dessus pourquoi il convenait d'inclure les chorégraphes dans le secteur représenté par l'UDA. Il faut maintenant examiner s'il existe des motifs suffisants d'exclure les directeurs de combat de ce secteur de négociation, tel que le demande la FDC.

[139] Le Tribunal prend très au sérieux les observations de la FDC sur la nécessité d'assurer la sécurité des acteurs dans les scènes où on simule des combats ou d'autres formes de violence physique. L'une des façons les plus certaines de promouvoir la sécurité des artistes est de s'assurer que ceux qui conçoivent et qui dirigent les scènes de combat soient convenablement qualifiés. Le Tribunal doit faire la distinction entre le rôle des organismes comme la FDC, qui forment et certifient les spécialistes de la chorégraphie et de la direction de combats et celui des associations d'artistes telles que l'UDA qui représentent les chorégraphes dans les négociations collectives avec les producteurs qui retiennent leurs services. Le Tribunal n'a pas compétence sur la formation et la certification. Son rôle est de déterminer quelle organisation est la mieux en mesure de représenter les directeurs de combat aux fins de la négociation collective.

[140] En l'espèce, ni la FDC ni l'UDA n'ont démontré qu'elles avaient historiquement représenté les personnes spécialisées dans la chorégraphie et la direction de scènes de combat lors de négociations avec les producteurs. Ce facteur n'est cependant pas déterminant.

[141] La FDC voudrait que les directeurs de combat soient expressément exclus du secteur représenté par l'UDA et, probablement, avoir un secteur distinct pour ces derniers. Le Tribunal se questionne sérieusement quant à la viabilité d'un tel secteur. Le membership de la FDC ne se limite pas aux directeurs de combat; donc, il n'est pas utile de s'y référer pour déterminer la taille potentielle d'un secteur distinct. Aucune des parties à l'instance n'a présenté de preuve quant au nombre de personnes qui exercent cette profession au Québec ou dans les productions de langue française, bien que le représentant de la FDC ait affirmé avoir connaissance du fait qu'il y ait une personne qui l'exerce.

Décision

[142] Le Tribunal est d'avis que le rôle joué par le directeur de combat à l'endroit de la sécurité des acteurs dans les scènes de combats ou de conflits simulés est certes important, mais une association d'artistes représentant un secteur aussi petit ne pourrait avoir un pouvoir de négociation suffisant pour protéger adéquatement les intérêts de ces personnes. Le Tribunal n'est donc pas convaincu que les intérêts de ces personnes seraient bien servis en créant un secteur de négociation distinct pour cette profession.

[143] La sécurité des artistes qui se livrent aux combats simulés est un problème qui doit être pris en mains de façon consciencieuse par les artistes interprètes eux-mêmes, tous et chacun d'eux étant touchés par les normes et les pratiques précisées dans les conditions de travail. Le Tribunal espère que l'UDA, en tant que représentante accréditée des artistes interprètes et des chorégraphes, travaillera diligemment afin que cette question soit traitée dans les accords-cadres qu'elle négocie avec les producteurs sous le régime de la Loi sur le statut de l'artiste.

Conclusion

[144] Pour toutes ces raisons, le Tribunal :

I En ce qui a trait aux réalisateurs :

Accorde à l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec le droit de représenter aux fins de la négociation un secteur qui comprend tous les entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste pour accomplir les fonctions d'un réalisateur et :

  1. qui sont résidents ou domiciliés au Québec et qui réalisent une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue qu'en langue originale anglaise; ou
  2. qui réalisent une oeuvre audiovisuelle en langue française ou en toute autre langue qu'en langue originale anglaise et dont le tournage est fait principalement sur le territoire du Québec;

à l'exclusion des entrepreneurs indépendants professionnels en arts visuels qui font de la vidéo d'art et qui sont visés par l'accréditation accordée par le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs au Regroupement des artistes en arts visuels du Québec le 15 avril 1997.

II En ce qui a trait aux metteurs en scène :

Ordonne que soit tenu un scrutin de représentation auprès des membres des deux requérantes qui exercent la profession de metteur en scène. Une ordonnance énonçant les modalités pour ce scrutin de représentation sera émise avec les présents motifs.

III En ce qui a trait aux chorégraphes :

Ordonne que l'accréditation partielle accordée à l'Union des Artistes le 29 août 1996 soit amendée afin d'inclure les chorégraphes et qu'elle soit mise à jour afin de refléter les accréditations accordées à l'American Federation of Musicians of the United States and Canada et à La Guilde des musiciens du Québec le 16 janvier 1997.

IV En ce qui a trait aux directeurs de combat :

Conclut qu'il n'est pas approprié de créer un secteur distinct pour les directeurs de combat.

Ottawa, le 30 décembre 1997

André Fortier, président
Robert Bouchard, membre
David P. Silcox, membre

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